Research studies

La Guerre en Ukraine : Une remise en cause de la question géopolitique

The Warfare in Ukraine: The questioning of geopolitical issue

 

Prepared by the researche : PhD student, Akrimi Reem, Faculty of Law and Political Science/ Tunis University El Manar

Democratic Arabic Center

Journal of extremism and armed groups : Fifteenth Issue – May 2024

A Periodical International Journal published by the “Democratic Arab Center” Germany – Berlin

Nationales ISSN-Zentrum für Deutschland
ISSN 2628-8389
Journal of extremism and armed groups

 

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Abstraite

Dans la pensée réaliste ̏la guerre″ est une évidence, c’est la continuation de la politique par d’’autres moyens. Néanmoins, devenue une stratégie, la quête des intérêts nationaux sera ostensible. La géopolitique, cette branche scientifique localisé à la jonction de la géographie et la politique, une science qui soucie des moyens de détention de la force, du pouvoir qui s’apprécient en relief avec la couverture territoriale, les zones stratégiques que les Etats sont en quête de les annexer sous leurs autorités. Une quête qui n’engendre pas la possibilité de se déboucher sur le résultat d’une guerre la plus délétère, mais en addition de l’entamer si ne nous manquons pas de se rappeler l’idée promu par ̏Le Nouveau Courant Eurasien″, à l’égard de la guerre dont les scènes se déroule actuellement en l’Ukraine꞉ « Nous n’avons aujourd’hui d’autre choix que de continuer cette guerre » (Alexander Dugin). En démontrant son aspect purement géopolitique (la guerre en Ukraine), nous concluons que : la géopolitique puisse être un aspect crucial de la compréhension de cette crise, mais elle ne doit pas être considérée comme l’unique explication du fait que d’autres facteurs peuvent également influencer les relations internationales et les comportements des États.

Abstract

In realistic thought, “war” is a fact, it is the continuation of politics by other means. However, as it becomes a strategy, the pursuit of national interests becomes apparent. Geopolitics, this scientific branch located at the intersection of geography and politics, a science concerned with the means of holding power, which are appreciated in relation to territorial coverage, the strategic areas that states seek to annex under their authority. A quest that does not necessarily lead to the possibility of resulting in the most deleterious war, but in addition to starting it if we do not forget the idea promoted by “The New Eurasian Current”, regarding the war scenes currently taking place in Ukraine: “We have no choice today but to continue this war” (Alexander Dugin). By demonstrating its purely geopolitical aspect (the war in Ukraine), we conclude that geopolitics may be a crucial aspect in understanding this crisis, but it should not be considered as the sole explanation, as other factors can also influence international relations and state behaviors.

Introduction

Certes, le recours à la guerre est prohibé, mais on ne peut pas nier sa possibilité. Et par tentative d’échapper aux failles qu’elles peuvent être engendrées par la carence législative. Ce déni s’est assoupi par la législation, ainsi le droit de recours à la guerre (Jus Ad Bellum) a pris place en tant qu’une discipline indispensable à la réglementation de cet ordre illicite. Néanmoins les efforts déployés, la guerre demeure un tabou toléré dans les relations entre les États. Cependant, pour être bien précis, chaque guerre est précédée par des indicateurs qui alertent de sa proximité. Évidemment, c’est le cas de la présente guerre, dont les circonstances se déroulent sur le territoire ukrainien, et qui oppose l’Ukraine à son pays voisin : la Russie.

Une guerre qui dépasse ses deux véritables acteurs. Une guerre à volet international, vue les nombreux acteurs embarqués indirectement dans ce conflit ; le cas le plus saillant étant celui de l’Amérique. C’est à ce niveau que la géopolitique paraît dotée d’un rôle remarquable dans la délibération de cette guerre. Souvent, la géographie d’un État, notamment sa position par rapport à d’autres États, aux océans, aux frontières naturelles, à ses ressources (…) etc., peut constituer un enjeu stratégique pour déclarer une guerre.

En s’articulant sur l’État et ses traits géographiques (1), la géopolitique est en quête continue du pouvoir. La géopolitique, nous fournit un contexte dont les déterminants incitent les États à la prise de décision. Une décision qui peut valider l’hypothèse de la guerre, et qui semble être validée par notre étude ; par la décision russe d’envahir l’Ukraine. Déclenchée le 24 février 2022, la Crise en Ukraine s’est dotée des prémices historiques bien émergées. Située à l’intervalle des deux camps concurrentiels (Occidental/Oriental), l’Ukraine persiste à incarner ce lieu des hostilités les plus intensifiées entre eux. Toutefois, une vision critique sur la période Post-Guerre Froide nous montre qu’elle est dynamisée par les changements géopolitiques majeurs ; l’effondrement de l’URSS, la destruction des liens qui reliaient les États parties de l’URSS avec l’annonce de l’indépendance résultant de la fin du régime communiste bolchevique, et l’ascension des États-Unis en tant que superpuissance unique qui règne sur le monde entier. Ainsi, réservant l’ordre international à l’unipolarité après être balancé entre deux superpuissances. L’effondrement de l’URSS a incité les États-Unis à assumer la mission de leadership de ce même ordre, inaugurant une nouvelle ère ; une ère purement géopolitique.

Une ère qui semble bouleverser les comportements des États à l’ordre international ; de privilégier des outils de puissance influente, des outils de pression au détriment des outils de puissance rigide. Sans doute, ceci va créer une énorme faveur pour les États qui préfèrent de ne plus participer directement, mais sacrifier les outils, les facteurs, et les circonstances qui garantissent l’atteinte de leurs objectifs. En évoluant vers cette stratégie d’intervention indirecte, les guerres prennent corollairement une autre facette. La facette des guerres artificielles ; l’exemple de la guerre qui s’est déroulée en Irak en 2003 au titre d’intervention humanitaire, les guerres dans certains pays arabes dont la vague du printemps arabe les incluent (la Libye, la Syrie) qui se sont clôturées sur une image dramatique par l’application de l’intervention humanitaire et du principe de la responsabilité de protection. Sans s’enfoncer dans l’énumération des raisons, ou des causes qui sont à la base de ces guerres, qui sont bien dévoilées à un stade ultérieur. Le processus de «Management des Crises » s’est cédé la place à ce qui s’oppose à celui-ci : « Management à travers les Crises».

            Particulièrement, dans le sillage de ce thème s’intègre notre article, porteur d’un débat houleux, celui de : « La Guerre en Ukraine : une remise en cause de la question Géopolitique ».

          Afin de cerner ce débat, il est nécessaire de définir certains mots-clés. La Crise, ce stade transitoire entre la stabilité et la probabilité d’explosion en guerre, est définie par Jean Schneider, professeur de science politique et président du centre d’études sur les conflits internationaux aux États-Unis, comme suit : « une situation de conflit entre des gouvernements en désaccord, motivée par la tentative d’une partie de modifier la situation actuelle de l’autre partie, qui résiste, ce qui fait craindre un risque élevé de déclenchement de la guerre » (Nadhim Abdul Wahid Al-Jasur, 2009). En suggérant cette définition de la Crise Internationale, comme étant la plus pertinente à notre cas d’étude, il convient d’examiner l’implication de la géopolitique.

La géopolitique, cette science qui offre une méthode d’analyse des relations politiques, est : « une étude du rapport de l’homme à la géographie – physique et humaine – dans ses conséquences sur les relations politiques entre les sociétés humaines » (Aymeric Chauprade, 2007, p. 12-13). En optant pour cette définition pré-avancée, et par rappel de la réponse qu’il nous a fournie Chaupradre à sa question « Quel cadre de référence faut-il se fixer à priori pour l’étude de géopolitique? », on déduit que la géopolitique se figure comme une vaste discipline qui s’occupe de l’étude des relations qui peuvent être nouées entre les espaces géographiques, les États, les acteurs internationaux, et les facteurs politiques, économiques, humains, culturels, militaires et stratégiques, et qui influent et déterminent ces relations. Cherchant à comprendre comment ces facteurs peuvent façonner les comportements des États sur la scène mondiale, la géopolitique s’intéresse aux stratégies mises en œuvre par les États pour défendre leurs intérêts nationaux, que ce soit sur le plan économique, politique, ou militaire.

En un mot, la géopolitique vise à expliquer comment la géographie influence les relations et comment les acteurs politiques agissent dans l’espace mondial en fonction de divers facteurs géopolitiques.

            D’un point de vue historique, les balbutiements de cette crise remontent à l’annexion de la Crimée par Moscou en 2014, ainsi qu’au lancement des débats sur l’adhésion de l’Ukraine à l’Union Européenne et à l’OTAN. La rencontre des trois ministres des affaires étrangères de France, d’Allemagne et de Pologne à Kiev en février 2014 a impulsé une nouvelle dynamique dans le projet du Triangle de Weimar (2), exprimant la volonté de ces trois pays de trouver une solution au problème ukrainien à travers une adhésion à l’UE (Jacques Rupnik, 2022, p. 12). La déclaration des ministres des Affaires étrangères du Triangle de Weimar signée le premier avril 2014, intitulée “Nouer un partenariat plus fort avec nos voisins : Une nouvelle dynamique pour la politique Européenne de voisinage” (Jacques Rupnik, 2022, p. 13), a marqué un tournant dans ce projet visant à renforcer les liens avec les pays de l’Europe orientale, dont l’Ukraine fait partie. En parallèle, les débats sur l’adhésion à l’OTAN, remontant à 2008, ainsi que la volonté américaine de créer une communauté euro-atlantique, ont été interprétés par Moscou comme une menace militaire pointée vers le cœur de la Russie (Philippe Gros, 2022), surtout compte tenu de l’accord de 1997 (OTAN, 1997) selon lequel l’OTAN a promis à la Russie de ne pas stationner de troupes dans les États membres frontaliers avec la Russie.

C’est à la fois autour des risques d’une présence militaire américaine sur ses frontières, que c’est autour de cette question des valeurs et de la non-appartenance de la Russie à l’Europe que se construit le discours centre-européen sur les causes et les enjeux de la guerre en Ukraine (Jacques Rupnik, 2022, p. 2).

              Nous entreprendrons cette étude dans le but de démontrer le rôle significatif joué par la géopolitique dans cette crise, tant dans sa genèse que dans sa gestion. Le fait que certains États adoptent une politique de recherche et d’exploitation des opportunités, même au détriment de la création des crises, témoigne de la réalité de la dépendance de leur politique étrangère à cette stratégie.

                 L’étude de la relation entre la géopolitique et la guerre, qui se déroule actuellement en Ukraine, s’inscrit dans un contexte théorique particulier. C’est un contexte où les décideurs politiques sont familiers avec les géopoliticiens, comme c’est le cas de Zbigniew Brzeziński, dont les idées ont façonné la politique américaine et demeurent une référence incontournable pour les dirigeants, ainsi que d’Alexandre Douguine, penseur proche du Kremlin et fondateur du Mouvement International Eurasien. En tentant en relief cet intérêt théorique, pratiquement les acteurs de cette crise se trouvent guidés par une géographie particulière, un héritage historique, ou des préoccupations de sécurité nationale et de puissance, qui sont essentiels tant dans la naissance que dans l’atténuation de la crise en Ukraine (de ne plus tomber dans les pièges de la gestion de l’ordre international à travers les crises). Tous ces éléments doivent donc être pris en compte pour parvenir à une analyse réussie de la relation de causalité entre la géopolitique et la crise en Ukraine.

             C’est précisément autour de cette question majeure que nous allons articuler notre hypothèse꞉

 Dans quelle mesure peut-on adhérer à la thèse de corrélation entre la géopolitique et la crise en Ukraine ?

           Le présent thème s’appuie sur une étude spécifique des facteurs influençant la relation entre la géopolitique et la crise en Ukraine. Cette approche est l’approche géopolitique, dédiée à l’imposition méthodologique de l’appui sur des théories établies par cette discipline, à leur analyse et à la mesure de leur degré de vérification et de validité vis-à-vis de notre crise actuelle.

           Le territoire, en tant qu’enjeu du conflit ou des rivalités entre les acteurs dans l’approche géopolitique, a prouvé sa centralité dans cette crise, illustrant ainsi l’importance de la science géopolitique. Cet enjeu est évidemment renforcé par le cimentage entre les détenteurs du pouvoir de décision et les géopoliticiens, induisant un retour incontestable de la question géopolitique, influencé par les idéologies politiques en vigueur. Cette dynamique s’intensifie également en tenant compte de la position que l’Ukraine occupe selon les théories élaborées et défendues par les théoriciens de cette branche (Première Partie). Mais en tenant compte, d’autre part, que chaque période historique a ses caractéristiques qui créent involontairement sa spécificité, la validité des théorèmes géopolitiques sera relativisée, voire lacunaire (Deuxième Partie), car ce qui renvoie au XIXe siècle n’est plus applicable dans toutes ses acceptions à ce siècle.

Partie I : La crise en Ukraine, une accession évidente de la question géopolitique

   Dans un contexte de crise, la géopolitique semble revêtir un rôle prédominant, en mettant en avant à la fois la politique de containment et l’annexion des territoires. Allant même plus loin, le choix de la force dans la logique de l’héritage géopolitique demeure omniprésent. Tous ces indicateurs convergent pour démontrer que la géopolitique est à la pointe de la genèse de cette crise (première sous-partie), tandis que l’Ukraine s’efforce de trouver une issue à cette situation. De plus, la géopolitique n’hésite pas à emprunter les stratégies même des États engagés dans des conflits belliqueux, en devenant un élément déterminant de ces stratégies (deuxième sous-partie).

1-La géopolitique à la pointe de la genèse de la crise

        Survenue à partir de 2014, la crise en Ukraine est profondément enracinée dans des considérations géopolitiques complexes qui reflètent les enjeux de puissance entre les acteurs régionaux et mondiaux. L’Ukraine, qui jouit d’une prééminence primordiale au sein des théories fondatrices de cette branche scientifique, est au centre de maints enjeux. Ces enjeux ont conduit à la place de l’Ukraine, de manière concomitante, au centre de la pensée Eurasienne et Atlantique.

En tant que courants divergents, ils se distinguent en ce qui concerne le sujet de l’Ukraine. Chacun fonde ses théories qui servent ses intérêts, alimentant ainsi la dynamique de puissance continue dans la sphère internationale. C’est ainsi que la géopolitique a façonné les dynamiques complexes de cette crise, illustrant les défis auxquels sont confrontés les États lorsqu’ils poursuivent leurs aspirations nationales et proposent des stratégies pour faire face à ces défis.

Toutefois, avant d’aborder les causes de cette crise, il est adéquat de partir des théories fondamentales de ce tournant vers l’Ukraine : l’Eurasisme vs l’Atlantisme.

Au prisme de la géographie, l’Ukraine se situe à la croisée des chemins entre l’Europe de l’Est et celle de l’Ouest. Elle partage une frontière avec la Russie à l’Est et entretient des liens avec l’Europe Centrale et Occidentale, notamment en raison de son appartenance historique à l’Empire austro-hongrois et à la Pologne, ainsi que de son aspiration à se rapprocher de l’Union Européenne. Évidemment, ces deux flancs (l’Europe de l’Est et l’Europe Occidentale) sont au cœur des théories des courants pré-mentionnés qui sont en compétition pour l’identification géographique de l’Ukraine.

En compétition, de sorte à placer l’Ukraine dans un dilemme de choix et une question continue sur son identité qui est en quête de clarification.

En effet, si le concept de crise a toujours été manipulé de manière imprévue et surprenante, de nos jours, avec l’exemple de cette crise, il prend une autre signification, celle de la planification, à savoir se préparer à lui.

La preuve en est que Washington elle-même, avant que le conflit commence, l’a anticipé en lançant des avertissements répétés, prouvant sa proximité (Frédéric Lasserre et Olga Alexeeva, 2022, p. 15). Washington, l’État qui croit en l’Atlantisme et qui voit son complément avec ses alliés européens, y compris l’Ukraine, a joué un rôle promoteur dans le processus de sa gestion.

En tentant d’examiner la première approche, celle de la pensée eurasiatique, dont la Russie fait partie, certains intellectuels eurasiens cherchent à redéfinir l’identité et le rôle géopolitique de la Russie dans un contexte eurasien distinct, considérant l’Ukraine comme faisant partie intégrante de l’espace eurasien et de la sphère d’influence russe. Par conséquent, elle devrait maintenir des liens étroits avec la Russie. Une idée présente chez Alexander Douguine, qui voit que géopolitiquement, les régions méridionales (et occidentales également) sont liées à la mission Russie-Eurasie, et que dans la discussion sur le problème du Sud (dont l’Ukraine fait partie), il n’y a pas seulement de sens à parler de la géopolitique intérieure de la Russie, car tous les faits internes russes rendent simplement impossible de les séparer sans violer le tableau géopolitique général. Pour le Sud (l’axe géopolitique de l’histoire), il y a une constante, à savoir l’océan Indien. Cela signifie la centralité et l’unité du développement sur la base des méridiens, ce qui équivaut à la domination de l’axe Châl-Sud. Et toute la distance qui sépare les terres russes de la côte méridionale de l’Eurasie représente, du point de vue géopolitique, une bande dont la superficie doit être réduite à zéro (Alexandre Douguine, 2004, p. 392).

Selon Douguine, le simple fait de l’existence du RimLand au Sud (et à l’Ouest), qui représente une bande active mais potentiellement problématique, pose un problème ouvert à la Russie, ce qui nécessite une géographie agressive dans son ensemble. Cela implique aussi que sur l’ensemble du sud de l’Eurasie, il est impératif pour la Russie d’établir un nouveau système géopolitique basé sur le principe de l’intégration globale et sociale (Alexandre Douguine, 2004, p. 393).

Ces idées trouvent leur traduction dans la politique prônée par le penseur plotinien qui refuse le caractère étatique de l’Ukraine, soutenant que l’Ukraine et la Russie formaient en réalité un seul et même peuple, et que son existence n’était donc due qu’aux conséquences de la chute de l’URSS (Frédéric Lasserre et Olga Alexeeva, 2022, p. 12).

Un autre témoignage réside dans l’action de l’invasion elle-même, qui semble avoir été inspirée par ce penseur influent sur la politique étrangère de Poutine (Alexander Douguine) (3), confirmant ainsi que le régime russe croit ouvertement que son système ne peut survivre que si la Russie est un empire. Cela implique un empire réunissant les territoires de l’ancienne URSS sous son contrôle, ce qui signifie que la souveraineté et l’intégrité de ces autres États ne sont que des expédients aux yeux de la Russie (Stephen Blank, 2014, p. 18).

Il semble que ces arguments sapent les prétextes de la Russie contre son invasion de l’Ukraine, en affirmant qu’elle défend la minorité russe du Donbass ou fait face à la menace de l’OTAN. Ces arguments sont totalement crédibles, si l’on se rappelle que Vladimir Poutine, à la suite du sommet OTAN-Russie de 2008, aurait déclaré qu’en cas d’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN, son pays pourrait envisager l’annexion de l’Ukraine orientale et de la Crimée (Frédéric Lasserre et Olga Alexeeva, 2022, p. 12).

De plus, le concept de “l’étranger Proche” inventé par la Russie pour légitimer sa mainmise sur les États frontaliers n’est qu’un concept purement géopolitique. Il reflète l’aspect révisionniste de la Fédération Russe, et le régime continu de Poutine semble être une tentative de faire renaître l’Union Soviétique, ce qui laisse croire à un retour de la guerre froide (Ferry de Kerckhove, 2020, p. 3).

Restant dans cet angle de vision qui conçoit les États issus de l’ancienne Union Soviétique (ayant acquis leur indépendance) comme des États qui doivent garder leur allégeance au centre représenté par la Russie: “l’axe de l’histoire”, selon Douguine.

Les autorités politiques russes voient dans cet espace géographique (l’Etranger Proche), structuré par les États post-soviétiques et limitrophes à la Russie, des territoires vitaux qu’elles tiennent à préserver contre toute présence et influence occidentale (Sophie Marineau, 2017, p. 5).

En résumé, les raisons évoquées par la Russie pour justifier son action d’envahir l’Ukraine se résument en trois points : le déni de la légitimité de l’Ukraine, la défense des russophones du Donbass et la crainte de voir l’Ukraine, ce pays frontalier, devenir membre de l’OTAN et de l’Union européenne (Frédéric Lasserre et Olga Alexeeva, 2022, p. 11). Ces justifications sont centrées autour d’une réalité que la Russie dissimule, même si elle paraît claire : celle de son parcours pour accroître sa puissance, et son aspiration à contenir l’Amérique à travers l’OTAN et leurs alliés, l’Union européenne. C’est à ce croisement précis que nous atteignons le courant opposé symbolisé par l’”Atlantisme”.

Il est important de noter que ce terme est généralement associé à la coopération et à l’alliance entre les pays de l’Europe occidentale et les États-Unis, souvent incarnés par l’OTAN. L’alliance Nord-Atlantique, ayant pour vocation la garantie de la sécurité de l’Europe occidentale en instaurant un couplage fort avec les États-Unis, a perdu sa principale raison d’être dès la fin de la guerre froide avec la dissolution de l’URSS, et semble avoir changé de vocation, devenant un outil manipulé par les États-Unis. En effet, la juste lecture de cette raison, dans son majeur pourcentage, réside dans le problème de l’élargissement de l’OTAN, un événement central d’une stratégie plus vaste visant à éloigner l’Ukraine de l’orbite russe, en l’intégrant à l’Occident (John J. Mearsheimer, 2014, p. 1).

C’est ainsi que les dirigeants américains et européens ont commis une grave erreur en tentant de faire de l’Ukraine une forteresse occidentale à la frontière de la Russie (John J. Mearsheimer, 2014, p. 2), ce qui leur coûte cher aujourd’hui.

Assurément, le rapprochement Ukraine-OTAN résulte essentiellement d’une volonté délibérée de Washington de renforcer son influence à l’Est. Depuis le sommet de Munich en 2007, la Russie tend à s’opposer à l’unilatéralisme américain, fruit du caractère unipolaire du système mondial actuel. Elle a bien prouvé son existence sur l’échelle mondiale, notamment sur plusieurs théâtres d’opérations (comme en Syrie et en République centrafricaine), considérant l’alliance Ukraine-OTAN comme un appui stratégique, ou, comme le décrit Stéphane Delory, comme “un cheval de Troie, privé de volition propre, et l’Ukraine comme un instrument explicitement utilisé contre la Russie” (DELORY Stéphane, 2006, p. 208).

Cependant, il est intéressant d’observer pourquoi la crise s’est transformée en une lutte géopolitique entre la Russie et les États-Unis, sachant que les États-Unis se situent de l’autre côté du monde. C’est une réponse à l’héritage historique de la nature de leurs relations qui continue à façonner leur relation actuelle et leurs comportements l’un envers l’autre (Anastasia Avetisova, 2015, p. 2).

Un autre déterminant est que, dans le cas de l’Ukraine, l’atlantisme est souvent considéré comme un moyen de renforcer l’indépendance nationale, la démocratie et l’État de droit, surtout pour l’Amérique qui a volontairement pris la responsabilité de garantir l’accomplissement de ce métier dans l’ordre international.

Cet État qui se vante toujours de son modèle démocratique réussi a considéré la présence militaire russe en Ukraine ainsi que l’annexion de la Crimée comme des comportements violant la démocratie occidentale : «… ceci est considéré comme une violation majeure de la souveraineté de l’Ukraine » (La déclaration du président Obama en 2014).

D’autre part, l’Ukraine, souvent associée à une orientation pro-occidentale, marquée par une aspiration à se rapprocher de l’Union européenne et de l’OTAN, a fait l’objet de projets ambitieux de la part de l’Occident. Parlant de « la politique étrangère et extérieure des PECO » (4), après la chute du mur de Berlin en 1989 et de l’URSS en 1991, s’est édifiée autour de la rhétorique du « retour vers l’Europe », une rhétorique qui s’est manifestée pratiquement par un rapprochement et une adhésion aux structures politiques, économiques et de sécurité euro-atlantiques, dont l’UE et l’OTAN figuraient les principales priorités (Elsa Tulmets, 2017, p. 141). Ce débat de rapprochement et d’adhésion de l’Ukraine a été lancé en 2004 avec le projet de « la politique européenne de voisinage » proposé par la Pologne, un État membre de PECO (Elsa Tulmets, 2017, p. 144-145).

Ces attitudes trouvent leurs racines dans l’école géopolitique américaine, qui a fait de l’Ukraine un objet stratégique. En effet, selon l’un de ses grands théoriciens (Spikeman), la Région du RimLand, située entre l’HeartLand et les mers entourant le cœur du monde, est une zone de conflit entre les puissances terrestres et maritimes. Celui qui contrôle le RimLand domine l’Eurasie, et celui qui contrôle l’Eurasie domine le monde. C’est pourquoi, il est nécessaire d’empêcher l’unification de l’Europe et de l’Asie (Radhwan Bouhidel, 2016, p. 228) : la théorie qui a contribué à établir les fondements de la politique américaine basée sur la contention (représentée par l’OTAN), et visant à empêcher tout rapprochement possible entre l’Europe et la Russie.

Sous cette école, un autre courant, celui du courant nationaliste, perçoit qu’en matière de relations internationales, les acteurs internationaux ne se comportent pas sur une base idéologique mais sur la base d’assurer leur continuité et d’étendre leur influence. Par conséquent, la démocratie n’est pas un critère pour atteindre la paix, celle-ci étant déterminée par la défense des grandes puissances du système auquel elles appartiennent, pour contrôler de vastes territoires. Ce courant considère que le principal danger pour les États-Unis est la possibilité d’une alliance entre l’Europe et le Japon et la Russie. Dans ce contexte, Brzeziński estime qu’il est nécessaire pour les États-Unis de bloquer toute convergence russo-européenne ou russo-japonaise (Radhwan Bouhidel, 2016, p. 229). Pour être précis, dès 2004, Zbigniew Berzezinski a anticipé cette démarche qui évolue sur ses traces à Washington aujourd’hui. Et ceci est décrit dans son livre Le vrai choix, qui s’occupe de répondre à la question : pourquoi et comment contrôler l’Eurasie ? La question à laquelle il attribue cette réponse : «l’Eurasie reste l’échiquier sur lequel se déroule la lutte pour la primauté mondiale », en déclarant que « le but de ce livre est de formuler une politique géostratégique cohérente pour l’Amérique sur le continent eurasien » (Gabriel Galice, 2019, p. 8).

Cette politique part de l’idée que l’Eurasie est centrale, de ce fait, l’Amérique doit y être présente pour dominer la planète. De ce fait, l’OTAN et l’UE doivent étendre leur influence en Eurasie. En se basant sur ceci, l’auteur articule la future stratégie de l’Amérique entre cinq acteurs géostratégiques (à savoir : la France, l’Allemagne, la Russie, la Chine, et l’Inde), et cinq pivots stratégiques (l’Ukraine, l’Azerbaïdjan, la Corée, la Turquie, et l’Iran). Berzeziński a incité à étendre le triangle de Weimar, dans l’intention de créer la colonne vertébrale de la sécurité européenne (Anastasia Avetisova, 2015, p. 9), qui s’est adoptée ultérieurement.

Bref, le scénario de Berzezinski et des autres savants relevant des deux courants s’est suivi et s’est déroulé tel que prévu. Cela signifie que cette crise, non seulement ses catalyseurs sont pré-mentionnés par la géopolitique, mais plus encore, la manière d’y répondre ou d’y réagir à ces alternatives géopolitiques a pris la forme d’une escalade par la guerre. Cette croyance, comme observée, présente dans la pensée eurasiatique (Alexander Douggine et la Nouvelle Eurasie), s’est transmise au Kremlin en identifiant deux points, dont leur soulèvement est déjà une source de tensions : le déploiement du projet américain à proximité du territoire russe, et son intégration au sein de l’OTAN (5).

      De ces considérations, il devient évident pourquoi la Russie et les États-Unis, spécifiquement, sont impliqués dans ce différend dès le début de la question de l’identité de l’Ukraine. Bref, c’est une raison de puissance, de sauvegarde de la position internationale suprême, dont l’Ukraine paraît géopolitiquement le garant de ses privilèges. De même, ces considérations bouleversent profondément notre vision de la conception de la crise, de la guerre, vue que le présent exemple avec l’Ukraine est très illustratif.

Enfin, ces illustrations montrent que leurs mises en œuvre ne servent qu’à soutenir l’idée que la géopolitique reste à la source de l’émergence et de l’escalade de cette crise. Il reste maintenant à essayer d’appréhender l’architecture de cette crise, élaborée par les États parties à cette crise. Une architecture qui fait appel à la géopolitique en tant qu’un élément déterminant de la politique de son management.

2-La géopolitique en tant qu’un élément déterminant du management de la crise :

      La mission de la science géopolitique ne se limite pas à diagnostiquer l’origine de cette crise. Elle intervient désormais pour mettre en œuvre des stratégies suivies par les États qui croient en l’efficience de la géopolitique, et dont les institutions décisionnelles sont influencées par cette convergence entre les géopoliticiens et les responsables politiques. L’exemple pratique de la Russie et des États-Unis, les deux États directement impliqués à la base de cette crise, en est un exemple concret.

Par essence, le “Management des Crises”, également appelé “La gestion des Crises”, est une approche du leadership et de la gestion qui se concentre sur la préparation, la réponse et la récupération face à des situations d’urgence ou de crise. Cette approche vise à minimiser les dommages potentiels d’une crise, à assurer une réponse efficace, et à favoriser la reprise de la situation normale après l’événement de la crise.

Le plus important est d’articuler les stratégies de gestion autour du bon choix. C’est l’événement clé pour réussir un bon Management et pour assurer une sortie sécurisée de la crise. Se focaliser sur les points complexes à l’origine de cette crise, essayer de concilier entre eux, c’est la voie d’échappatoire de toute crise. Tel est le principe selon lequel “la gestion de la complexité est devenue une clé de la résolution moderne des crises” (Daniel Möckli, 2008, p. 1).

Ces principes fondamentaux du processus de “Management des Crises” semblent connaître un nouveau tournant avec les États responsables de cette crise. Ils semblent basculer dans un processus inverse : la gestion de l’ordre international par le biais des crises. Cela prouve que les pratiques des États sur le terrain renforcent l’idée que les tactiques adoptées par eux sont loin de rechercher un règlement pacifique. En effet, leurs méthodes de gestion ont plutôt tendance à approfondir cette crise au lieu de la résoudre. Même si l’on se souvient, comme conclusion tirée de la première sous-unité précédente, que la crise est à l’origine une “fausse Crise” ou une “fausse bannière”, et que les États impliqués l’ont déjà préparée.

Bien que cela puisse être théoriquement possible, une telle pratique est controversée et hautement condamnée dans le domaine de la politique internationale (6).

Vu que la crise en Ukraine revêt une nouvelle facette qui la distingue de la sphère à laquelle nous sommes habitués en matière de crises internationales, il est certain que la gestion adoptera une forme différente. Une gestion qui tient compte de la géopolitique et des stratégies de commandement développées par celle-ci, dans une tentative de trouver ce qui convient le mieux et ce qui lui servira le mieux.

Ainsi, cette corrélation interactive entre la gestion de la crise en Ukraine et la géopolitique s’explique dans cette sous-partie dans le cadre pratique, dans le choix des stratégies de gestion de la crise ukrainienne par les parties impliquées.

Ce corpus pratique emprunté à la science géopolitique se rattache à l’idée que les acteurs étatiques sont engagés dans un conflit, sous l’équation du calcul de leurs bénéfices en agissant sur les paramètres qui valident leurs intérêts. À ce niveau, ils font référence à la géopolitique, tant qu’ils ont trouvé leur orientation dans cette science.

Vu la spécificité de la crise, il semble que les États connaissent bien les voies qui doivent être prises par leurs politiques de gestion. Ces États ont choisi de faire face, non pas parce que ̏l’évitement des crises n’est pas une stratégie efficace″, mais parce que ̏les stratégies d’évitement sont coûteuses en stress et en perte de temps″ (Mazouni Mohamed et Ben Ahmed Tahar, 2022, p. 795). C’est plutôt parce qu’ils se trouvent face à une phase charnière de l’histoire qui va intervenir après pour dicter ses propres résultats sur le système international, et peut-être sur la nature de ce système.

C’est évidemment au nom de cette raison qu’on justifie l’intervention de ces États dans le management de la crise en Ukraine. En essayant ensemble d’assimiler les stratégies adoptées à la fois par les deux camps (les États-Unis avec l’Union européenne/la Fédération russe) dans le cadre de l’opération de gestion de crise en Ukraine.

Choisissant de commencer par l’Amérique, cet État qui détient un rôle majeur dans la crise ukrainienne en tant que levier clé dans la percée du bouclier géopolitique de la Fédération russe, et également en tant qu’un pivot crucial pour dominer l’Eurasie.

En tant que levier clé dans la percée du bouclier géopolitique de la Fédération de Russie, les États-Unis appuient la politique de containment pour accéder aux zones d’influence russe et renforcer leur contrôle sur elles.

En tant que pivot crucial pour dominer l’Eurasie, les États-Unis tentent de déséquilibrer la géographie de l’Eurasie en créant des points de pénétration vers la Russie. Ils s’appuient sur les États membres de cette cartographie (l’Eurasie) pour empêcher la concrétisation du projet russe d’une Eurasie complète et unie, ce qui expose le territoire russe à toute future influence américaine : L’objectif de l’Amérique est clair dans ces stratégies.

Les États-Unis ne participent pas directement aux combats entre les armées russes et ukrainiennes. Ils préfèrent confronter la Russie à travers un genre de guerre hybride. En effet, les États-Unis, qui n’ont jamais reconnu l’Union soviétique comme leur égale et qui ont une histoire prestigieuse dans le leadership des crises durant les deux guerres mondiales et la guerre froide (7), ont choisi de rester en retrait sur la scène de l’affrontement direct en fournissant leur aide à l’Ukraine pour qu’elle assume cette mission à leur place. C’est simplement la politique des guerres hybrides.

Ce genre de guerres s’inscrit dans une approche indirecte des conflits visant à éviter de provoquer la riposte d’adversaires jugés militairement plus puissants (Bentebibel Doria Yasmina, 2023, p. 1012), mais à les entraîner dans certains types de guerres qui finiront inévitablement par avoir des conséquences négatives pour eux (8).

L’hybridation concerne essentiellement la nature des véritables acteurs engagés dans les guerres, qui sont dans le présent cas les États-Unis et la Russie.

Il est utile de comprendre pourquoi l’Amérique a fait ce choix, une question dont une partie de la réponse a été précédemment abordée : se protéger contre tout risque potentiel qui pourrait découler d’une intervention militaire directe. Reste l’autre partie de la réponse, qui trouve son fondement dans la perspective géopolitique selon laquelle les États-Unis et la Russie, dans ce nouvel ordre stratégique, restent deux superpuissances nucléaires avec les arsenaux destructifs les plus vastes au monde. Ces deux États occupent toujours une position particulière dans le système des relations internationales. En effet, si les États-Unis aspirent à la position d’hégémonie, la Russie cherche la domination régionale (Anastasia Oshurkova, 2012, p. 12). C’est une raison qui justifie l’intérêt mutuel des deux États l’un envers l’autre. Depuis 1991, l’émergence d’un espace sécuritaire commun a été empêchée en raison de l’érosion des principaux mécanismes de sécurité russo-occidentaux ou russo-américains (Igor Delanoë, 2022). Cet espace est devenu un enjeu de puissance et de différend continu, comme le souligne l’interprétation : “la guerre froide n’a pas abouti à une relation pacifique, elle a plutôt conduit à une paix froide entre les États-Unis et la Russie” (Anastasia Avetisova, 2015, p. 22).

Au-delà de la politique des guerres par mandataires, ces conflits armés dans lesquels des puissances extérieures soutiennent et financent des groupes armés ou des gouvernements tiers qui mènent le combat pour leur compte, à travers laquelle les États-Unis et leurs alliés ont soutenu l’Ukraine par les armes (9), se situe la politique des sanctions. Cette politique, lancée par les pays adhérant à l’Atlantisme, a englobé les secteurs économiques et diplomatiques.

Il est remarquable que le dilemme du partenariat économique entre l’Occident et l’Ukraine d’une part, et l’Ukraine et la Russie d’autre part, a anticipé la crise conflictuelle, voire même préparé le terrain pour celle-ci. C’est par la compétition entre l’Union européenne et la Russie pour l’orientation géoéconomique future de l’Ukraine que la crise ukrainienne a été précédée (Dmitri Trenin, 2014, p. 4).

En premier lieu, il est primordial de souligner que la guerre économique, une notion relativement nouvelle dans le champ scientifique (Nait Abdesselam Hakim, 2020, p. 348-349), est une pierre angulaire dans la pensée atlantiste. En effet, l’auteur Zbigniew Brzezinski, dans son livre Le Grand Échiquier (1997), a promu une géostratégie visant à assurer la dominance des États-Unis sur la scène internationale. En reprenant les thèses de ses prédécesseurs dans le domaine, notamment celles de Halford John Makinder et Nicholas Spykman, il pointe du doigt l’Ukraine comme l’un des principaux éléments géopolitiques de l’échiquier eurasien, car “sans l’Ukraine, la Russie cesse d’être un empire eurasien”. Selon lui, le contrôle de l’Ukraine est crucial car la région est riche et facilite l’accès à la Mer Noire, ainsi que le passage vers la Mer Méditerranée (Zbigniew Berzezinski, 2016, p. 95).

Considérant que les États-Unis sont devenus la “première puissance globale de l’histoire” à la suite de l’effondrement du communisme, et qu’aucune puissance ne peut « prétendre rivaliser dans les quatre domaines clés – militaire, économique, technologique et culturel – qui définissent une puissance globale» (Eric Rugraff, 2004, p. 50), ils ont pris sur eux la responsabilité de gouverner le monde. Cela s’est manifesté par l’utilisation de mécanismes économiques pour maintenir leur supériorité, conduisant à des sanctions américaines et européennes ciblant explicitement les flux financiers en Russie. Ces sanctions ont placé le pétrole, le charbon et les produits raffinés sous un embargo complet, visant des secteurs stratégiques pour la Russie (Hervé Baudu et Frédéric Lasserre, 2023, p. 16).

En outre, suite à l’annexion de la Crimée par la Russie, les États-Unis et le Canada ont imposé de nombreuses sanctions politiques, financières et commerciales à Moscou en 2014 et 2017. Cela comprenait l’exclusion de plusieurs banques russes du système bancaire SWIFT, ainsi que l’interdiction de vente d’avions et d’équipements aux compagnies aériennes russes (Boran Tobelem, 2024). En 2022, de nouvelles sanctions diplomatiques ont été mises en place, notamment l’expulsion de diplomates russes des États-Unis et de certains pays membres de l’UE.

De tout cela, pour ceux qui s’interrogent sur la situation de la Russie, il convient de noter que ces sanctions ont certes affecté l’économie russe, mais on ne peut pas affirmer qu’il s’agit d’une situation aussi dramatique qu’on pourrait le penser.

Cependant, pour l’État qui impose ces sanctions à un partenaire économique important comme la Russie, il est inévitable d’être affecté par ce risque. En d’autres termes, l’État qui impose des sanctions n’est pas à l’abri des contrecoups économiques. Cela est illustré par l’exemple des États appliquant ces sanctions, comme l’UE, qui dépend trop du gaz russe pour suivre la politique ferme des États-Unis et qui s’engage à réduire ses importations en attendant le développement de solutions de substitution. Pour compenser ce défi, ils se tournent vers les États-Unis et la Norvège (Hervé Baudu et Frédéric Lasserre, 2023, p. 16).

Bien que ces sanctions imposées soient sans précédent à l’encontre d’un seul pays, on constate que la Russie résiste encore bien à ces mesures, tout en prenant le temps nécessaire pour s’adapter à ces contraintes et pour financer parallèlement sa guerre en Ukraine (Hervé Baudu et Frédéric Lasserre, 2023, p. 23).

En observant la manière dont la crise en Ukraine a été gérée par la Russie, en réaction aux sanctions occidentales, on constate que la Russie a tenté de renforcer ces mêmes secteurs visés par les sanctions. Grâce à ses importantes ressources fossiles, Moscou a réussi à restructurer et à consolider sa dette comme aucun autre pays industrialisé (Nait Abdesselam Hakim, 2020, p. 348-349).

En outre, cette guerre a renforcé la politique des alliances que la Russie a menée pour contrer la politique des États adversaires.

Étant donné que la crise en Ukraine représente un pur témoignage de la reconstitution des blocs (Gabriel Galice, 2019, p. 7), le groupe BRICS représente pour la Russie un intérêt avant tout de nature géopolitique, inscrit dans une dynamique de renforcement de la puissance de la Fédération Russe et de son autonomie. Même si le Kremlin espère un accroissement du commerce et des investissements “Sud-Sud”, cet objectif apparaît secondaire (Bobo Lo, 2016). Il n’y a pas de barrière étanche entre les questions économiques et leurs implications géopolitiques. La construction de l’Union économique eurasiatique, inspirée des idées de l’Eurasisme, ne se limite plus à de simples projets de marché connu. L’idée de l’Union eurasienne est celle d’une structure très intégrée politiquement et économiquement, centrée sur la Russie dans une logique de puissance qui doit couvrir sur le plan géographique l'”étranger proche”, et elle serait l’expression politico-institutionnelle de cette sphère d’influence que la Russie revendique (Jean-Sylvestre Mongrenier, 2014, p.259).

Ce que la Russie appelle “l’opération militaire spéciale” est présente en tant qu’une réponse à cette crise, précisément une politique de gestion : la politique de la force dure.

 Le facteur ukrainien représente un point faible dans la ceinture occidentale russe, et constitue ce qui reste dans sa ligne de défense contre l’Occident. À tel point que Douggine voit dans l’existence d’une “Ukraine indépendante” une déclaration de guerre géopolitique contre la Russie, une question qui ne relève pas seulement de l’Ukraine elle-même, mais aussi des acteurs comme l’OTAN et les SeaPower (Alexandre Douguine, 2004, p. 437-438).

Dans sa guerre contre l’Ukraine, la Russie a choisi de débuter son opération militaire par la capitale Kiev. Kiev, le centre de décision, une priorité que l’Eurasie a glorifiée, est l’une des priorités de la future présidence de Vladimir Poutine figurant dans son projet d’Union eurasiatique (David Thurtrie, 2012). De là, une nouvelle politique de réorganisation des rangs s’est tournée vers d’autres républiques à majorité russe (Donbass, Louhansk, ainsi que Zaparijjia et Kherson), afin de préserver l’intégrité territoriale de la Russie face à la présence des forces de l’OTAN à ses frontières. La Russie a réussi à travers les référendums organisés dans ces régions dans leur annexion, une suggestion précédemment évoquée par le géopoliticien Alexander Douggine : “Il n’est pas permis que l’Ukraine unifiée persiste, et cette région doit être divisée en plusieurs bandes correspondant à un ensemble de facteurs géopolitiques et ethno-culturels” (Alexandre Douguine, 2004, p. 435).

Un autre mécanisme investi par la Russie, qui répète la stratégie adoptée par elle durant la guerre froide, est celle de la mobilisation militaire partielle. Une décision suivie par Vladimir Poutine qui semblait être fondamentale pour renforcer l’efficacité de l’armée (Karine Bechet-Golovko, 2022, p. 2).

        Face à ces observations, nous constatons bien que ces stratégies sont loin d’être considérées comme de vraies stratégies de gestion de cette crise, puisque ce dernier est une approche proactive qui vise à atténuer la crise, non à l’intensifier. En d’autres termes, cette crise conduit à s’interroger sur la gestion des conflits, à réviser notre vision à propos du processus de gestion des crises dans son ensemble. Malheureusement, cette question, avec l’exemple présent de la crise ukrainienne, risque de ne plus admettre de réponse claire. Et c’est tout à fait rendu à cette référence à la géopolitique qui ne parvient pas à fournir une gestion réussie des crises tant qu’elle s’appuie sur un calcul de gain de pouvoir comme un atout indéniable.

Le récit de cette guerre, autant la contribution de la science géopolitique dans sa hiérarchie que son commandement, confirme la réalité suivante : cette posture est pleinement influencée par la géopolitique. Pour être précis, c’est dès l’année 2011 qu’on témoigne d’une certaine “géopolitisation” des relations internationales, dont le modèle de guerre en Ukraine, qui a ébranlé le modèle classique de la guerre, est l’exemple le plus marquant. Ce dialogue permet d’appréhender ce nouvel tournant dans la politique étrangère, compte tenu de la place prépondérante qu’elle tient la géopolitique dans la crise en Ukraine. Malgré le fait que l’enjeu relève plutôt d’un contentieux de nature géopolitique, d’autres volets interviennent dans la hiérarchie de cette crise.

Partie II : La crise en Ukraine, une vision assez lacunaire de la question géopolitique :

Tel que proclamé par “Peter Drucker” : « Les lois et les institutions qui ont réussi pour un jour peuvent échouer demain », ce qui ne manque pas de prouver cette divergence entre la pratique et la théorie (la première sous-partie). En bref, un fossé qui met en évidence les contraintes que la théorie rencontre sur le terrain pratique. Un terrain qui reflète parfois une difficulté d’ancrage, car ce que l’on perçoit n’est pas toujours quasiment identique à ce à quoi l’on est confronté. Certes, l’écart persiste et les lacunes sont incontournables. Un autre examen auquel la géopolitique est confrontée est celui de la dialectique de l’actualité contre l’historique (La deuxième sous-partie). Vue que celui qui est bien adapté à une telle période historique ne peut jamais confirmer sa validité à n’importe quelle période qui lui succède. Certes, les spécificités entravent.

1-La divergence entre la pratique et la théorie :

         Dans cette section, nous nous engageons à clarifier les divergences entre les théories géopolitiques et leur application par les États impliqués dans ce conflit, dans le but de comprendre la difficulté réelle de concilier la théorie et la pratique. En effet, la théorie est généralement basée sur l’observation, qui est sujette à des changements constants, ou sur des hypothèses qui, à leur tour, sont sujettes à vérification et ne peuvent pas toujours cerner la réalité dans toute sa complexité. Par conséquent, l’application sera en dehors des attentes théoriques.

Dans un essai visant à mieux comprendre la divergence entre la pratique et les théories de la géopolitique, il est approprié de partir de l’implication de la géopolitique, qui renvoie de manière évidente à deux types de conflits : les conflits « externes », synonymes d’« internationaux », et les conflits « internes » relevant de la géopolitique interne de cet État (Philippe Subra, 2020, p. 48). Une organisation que le droit international humanitaire partage, mais qu’ils traitent de manière séparée, à la différence de la géopolitique qui l’ignore (comme on l’a vu) pour se concentrer sur la guerre en tant qu’un outil d’atteinte des intérêts politiques des États, est loin d’être aussi systématique qu’on le croit. Comme l’indique justement l’académicien Nicholas Spykman, « c’est leur action et réaction simultanées qui créent le phénomène complexe connu sous le nom de “politique étrangère”» (Manlio Graziano, 2024), et que la tâche difficile consiste à trouver « des corrélations entre les facteurs contraignants et les typologies de la politique étrangère » (Manlio Graziano, 2024). Cette difficulté est rendue au fait que ces facteurs diffèrent d’un pays à un autre, influencés par les croyances des personnes en gouvernement.

Une critique fréquemment formulée à l’égard de la géopolitique est son caractère fataliste et déterministe, mettant l’accent sur des facteurs préexistants. Selon les partisans du libre arbitre, présenter la politique comme dépendant uniquement de circonstances préexistantes revient à négliger le rôle des individus dans la construction de leur propre destin. En réalité, c’est tout le contraire : en reconnaissant et évaluant les circonstances matérielles et psychologiques, ainsi que leurs interrelations, nous prenons pleinement conscience de la réalité qui nous entoure et nous pouvons devenir les architectes de notre propre destin (Manlio Graziano, 2024).

Le caractère déterministe de la géopolitique, au nom duquel les deux fronts adversaires mènent une guerre pour attirer l’Ukraine soit vers l’ECU, soit vers l’OTAN et l’UE, n’est aujourd’hui plus le même. Comme l’a écrit Arkady Moshes un an complet avant ces événements : « la stagnation de l’intégration eurasiatique est un scénario réaliste à moyen terme. Dans ce cas, l’adhésion de l’Ukraine à l’Union douanière peut sembler plus critique que jamais pour les architectes de cette dernière » (Svante E. Cornell, 2014, p. 181).

Un autre détracteur a émergé à travers la gestion de cette crise, qui porte sur l’idée de la géographie de l’Eurasie. Si la géographie de l’Union européenne est partagée entre le futur Union eurasiatique, que la Russie aspire à rejoindre, et l’Atlantique éloigné.

La question concernant la relation entre l’UE et l’Union eurasiatique a même conduit à blâmer la crise sur la prétendue mauvaise gestion de la politique de voisinage oriental par l’UE (Svante E. Cornell, 2014, p. 181-182). Peut-être cela est-il dû au fait que la géopolitique a ignoré le sujet de l’Ukraine, écarté de toute appartenance soit à l’Eurasie, soit à l’Atlantisme.

En fin de compte, cet État reste à la fois un État issu de l’ancienne Union soviétique et un État situé en Europe de l’Est. Ceci constitue un argument qui a empêché l’UE d’anticiper l’éventualité du recours à la force militaire par le gouvernement russe, dans le but d’empêcher l’Ukraine de s’engager sur la voie de l’intégration européenne. Bien que la volonté d’utiliser la force dans le voisinage russe ait été largement documentée, comme le mentionnent les géopoliticiens et le président Vladimir Poutine, remontant au sommet de l’OTAN à Bucarest en 2008. Vladimir Poutine a déclaré au président américain que l’Ukraine “n’est même pas un État” et que “la plus grande partie de son territoire est un cadeau de notre part”, et si l’Ukraine rejoignait l’OTAN, “l’existence même de l’État pourrait être menacée” (Svante E. Cornell, 2014, p. 184-185).

En outre, la géopolitique qui a tendance à créer cette Union eurasiatique a négligé une diversité de contradictions, qui pourraient entraver la réalisation de ce projet. Il existe une incompatibilité fondamentale entre les plans russes pour une Union eurasiatique et les États post-soviétiques objets de cette Union. Un tel État ne peut pas faire partie d’une sphère d’influence russe s’il n’est pas soumis à la Russie. C’est ce que cherche la Russie à atteindre en Ukraine, par l’application d’une stratégie axée sur le maintien de conflits non résolus, avec pour intention claire de créer un statu quo en Ukraine. Ainsi, la sphère d’influence russe est incompatible non seulement avec la forme d’intégration européenne envisagée par le partenariat oriental, mais aussi avec le type que les instruments de l’UE aideraient à créer. Alors que les dirigeants européens veulent un voisinage stable, la Russie cherche à le rendre instable : là où la compétition entre la Russie et l’Europe n’est pas seulement d’ordre géopolitique, mais également d’ordre idéologique (Alexey Gromyko, 2015, p. 49).

Si Poutine voit dans l’effondrement de l’URSS “la plus grande catastrophe géopolitique du siècle” (10), il ne peut pas compter sur la géopolitique pour mettre fin à son conflit. Car si les géopoliticiens du courant eurasiatique ont appelé à la guerre pour soumettre l’Ukraine, ils n’ont jamais précisé quand il incomberait à la Russie de se retirer, et ils ne peuvent pas encore estimer les scénarios finaux de cette guerre pour proposer des alternatives. Ainsi, sur le terrain pratique, quelle que soit l’endurance et la force de frappe de la Russie, elle ne peut pas rester longtemps en Ukraine au risque de subir une guerre d’usure et de porter atteinte à son image militaire et stratégique (S. Frederick Starr and Svante E. Cornell, 2014, p. 6-7). À l’inverse, les États-Unis et l’Europe ne peuvent plus abandonner l’Ukraine et retirer leurs sanctions contre la Russie ; au contraire, ils doivent fournir des armes à l’Ukraine, comme dans le cas de la guerre dans la bande de Gaza.

Pour éviter d’être partial dans notre jugement envers la géopolitique, un aspect important à rappeler concerne le processus de prise de décision. Ce processus obéit à des normes institutionnelles bien précises, légiférées au sein de n’importe quel État, et implique des organismes dédiés spécifiquement à l’accomplissement de cette mission. Cela démontre que si la géopolitique représente une référence dans la prise de décision en période de crise, cette dernière ne peut être entièrement institutionnalisée aux théories géopolitiques uniquement. Un exemple est la Russie, dont le processus de prise de décision est étroitement lié à des organisations et à des processus organisationnels qui définissent, organisent, coordonnent et mettent en mouvement les différentes étapes tactiques dans chaque situation concrète (S. Frederick Starr and Svante E. Cornell, 2014, p. 10-11).

L’idée d’une Union eurasiatique visant la Russie ne manque pas de signaler des lacunes depuis des années, suscitant beaucoup d’incertitude. Par exemple, le degré d’intégration fonctionnelle et l’étendue géographique de la nouvelle Union restent en cours de développement (Richard Weitz, 2014, p. 35).

Sans aucun doute, cela est expliqué par le désir des États post-soviétiques de se libérer de l’autorité du Kremlin et de se rapprocher de l’UE et de l’OTAN.

À partir de ce qui précède, la Russie doit rectifier sa vision concernant le rêve d’une Eurasie unie et intégrée. Cela est expliqué par une réduction du plafond des ambitions envers l'”étranger proche”, un concept qui permet de consoler les Russes des amputations territoriales que leur pays a subies, tout en leur faisant envisager un retour de ces provinces au sein du giron russe (Ludovic Royer, 2005, p. 60).

Perçue comme un enjeu à somme nulle, cette géopolitique constitue néanmoins une source d’indétermination majeure. Tout d’abord, incapable de concevoir un nouvel ordre mondial intégrant la Russie, puis cherchant à pousser leur avantage plus loin aux dépens de solutions plus coopératives (Eric Lahille, 2016). Incapable aussi de concevoir l’Amérique (la pensée atlantiste) hors de la position de leader, l’approche de l’Amérique se présente comme une stratégie à géométrie variable qui ne suit pas un modèle déterminé. Simplement, on le voit s’affronter avec cette crise à son règlement, tant qu’une telle continuation va lui servir trop. Une approche qui cherche essentiellement le surplus, tel que décrit par Rudolf Kjellèn (l’auteur qui a été le premier à utiliser le terme géopolitique) dans un contexte de signaler la différence entre l’Occident et l’Orient : «la parole de l’Américain ‘go ahead’, ce qui signifie littéralement ‘vers l’avant’. Cela reflète l’optimisme géopolitique interne et naturel ainsi que le progressisme de la civilisation américaine. Quant aux Russes, ils représentent généralement le mot ‘Ничего страшного – pas de souci’, ce qui reflète ‘le pessimisme’, ‘la contemplation du destin’, et ‘l’attachement aux traditions caractéristiques de l’Orient’» (Hamdis Makboula, 2023, p. 531).

Il semble clair que la résolution de la crise et la manière de la gérer ne dépendent pas tant des théories géopolitiques que de la volonté. Selon la déclaration antérieure de Rudolf Kjellèn, il semble plus évident que l’équation politique est difficile à encadrer ou à limiter suivant un seul cadre théorique, car elle reste finalement soumise aux perceptions des détenteurs du pouvoir. De sa part, le savoir théorique reste relatif face à une réalité changeante qui exige une application dépassant le cadre théorique. C’est ce que nous observons dans ce conflit, caractérisé par une oscillation entre plusieurs dimensions, en plus de la dimension géopolitique à laquelle nous reconnaissons une présence forte. Cette justification paraît découler de l’incapacité de cette science à balayer tous les aspects du conflit, de ses causes et de ses théories régissant les moyens d’accéder au pouvoir et de le maintenir, plus que les moyens de gérer les crises. Tout cela a contribué d’une manière ou d’une autre à l’émergence de ce niveau de disparités entre l’application et la théorie, d’autant plus que la gestion de la crise a relevé une contradiction au sein même de la science de la gestion de crise en cherchant à adapter la géopolitique à cette science, ce qui a abouti à rendre les stratégies de gestion, des stratégies en réponse entre elles.

Ensuite, l’attention géopolitique portée aux impératifs de contrôle l’a rendue négligente à bien des égards vis-à-vis des réalités qui constituent l’essence même de tout projet russe visant à édifier une Union Eurasiatique intégrée et durable, tout comme de tout projet atlantique visant à assurer la pérennité de la domination américaine sur un système international unipolaire, incluant notamment la volonté des pays impliqués dans ce conflit.

De la part de la Russie : « la question de fond est de savoir si la Russie peut trouver un intérêt à ménager un pays qui veut lui tourner le dos. Or on ne voit pas ce qu’elle aurait à perdre à ce que cette vision soit en crise. D’autant que les relations entre les deux pays seront mauvaises de toute façon, ne serait-ce qu’en raison de la Crimée » (Pascal Marchand, 2020). Cette question n’a jamais été traitée par la géopolitique, nonobstant qu’elle constitue une condition de durabilité de l’institution eurasiatique future intégrant l’Ukraine. Le libre choix ou la persuasion est demandé de la part de l’Ukraine, car jamais la Russie ne peut continuer à imposer ses normes à cet État.

De son côté, il convient à l’Amérique de se rappeler que si elle s’appuie sur la volonté ukrainienne de se libérer de l’autorité du Kremlin et de la dépendance envers la Russie, l’Ukraine entretient des liens historiques forts avec la Russie et qu’elle a également des liens économiques qu’elle ne peut pas rompre. Pendant longtemps, l’Ukraine a été considérée comme une extension naturelle de la Russie. Sur le plan de la sécurité, de nombreuses industries de défense sensibles y étaient implantées. Certaines le sont toujours, ainsi que des éléments vitaux de l’arsenal stratégique. Bien que l’effondrement de l’URSS ait profondément modifié la situation, certaines interconnexions persistent. Géographiquement, l’Ukraine demeure un élément crucial pour le contrôle de la Mer Noire, l’accès aux Balkans, et l’un des principaux lieux de transit des matières premières énergétiques russes. Bien que les relations entre l’Ukraine et la Russie ne soient plus abordées en termes de profondeur stratégique ou de menace militaire, la réponse rigoureuse de la Russie à la transition démocratique montre que la question du contrôle politique du partenaire mineur par le partenaire majeur reste au cœur de l’approche russe (DELORY Stéphane, 2006, p. 212), au même degré que ces relations continues entre les deux États dans des domaines particuliers prouvent qu’il paraît difficile de se fier aux théories géopolitiques pour parvenir à ce degré d’indépendance totale entre les deux pays (la Russie vs l’Ukraine).

          En fin de compte, voilà les points d’achoppement tels que pré-indiqués qui sont à l’origine de cette divergence entre la pratique et la théorie, soit prouvée ultérieurement sur le terrain réel, soit prouvée ultérieurement par les décisions politiques des États qui gèrent cette crise. La géopolitique, conçue dès le départ pour réfléchir à l’ordre spatial du monde (nomos), a négligé que l’utilité de ces théories repose sur la préservation de ce Statu Quo, qui est difficile à maintenir dans un ordre international en pleine dynamique. Et à ce niveau-là, on atteint une autre variable non négligeable dans cette crise : celle du “temps”.

2-La dialectique contemporaine face à l’histoire :

          La condition temporelle joue un rôle incontestable dans la manipulation des situations contemporaines. La géopolitique, discipline remontant à plusieurs décennies, cherche à s’adapter aux exigences du monde contemporain. Cependant, dans une large mesure, elle demeure profondément enracinée dans son volet historique. Parfois, elle tend à le reconstruire, comme c’est le cas de l’Eurasie et de cet attachement tenace à la période de gloire soviétique. Comme l’a souligné Eric Delbecque, la “crise” s’est métamorphosée, «devenant quasiment quotidienne, profondément originale et donc difficilement comparable aux crises du passé» (MAZOUNI Mohamed et BEN AHMED Tahar, 2022, p. 796), ce que la crise objet de notre étude a suscité. C’est ce que nous nous proposons de démontrer dans ce contexte ; ces divergences qui se présentent entre la période dans laquelle certaines théories géopolitiques ont été formulées et ce que reflètent les réalités de la situation actuelle aujourd’hui.

Pour commencer, la Russie peine toujours à définir sa nouvelle identité, ce qui implique un débat ouvert sur l’héritage de l’époque soviétique et sur les anciens pays faisant partie de l’Union des Républiques Soviétiques. Cette quête a été lancée 13 ans après l’effondrement de l’URSS et demeure au cœur des préoccupations auxquelles est confrontée la Russie. En effet, depuis la chute de l’URSS, la politique étrangère russe s’est nourrie de cette quête ambitieuse de retrouver la gloire de ses prédécesseurs, comme en témoigne la loi sur la “nation russe” en novembre 2016. Pour les Russes, ce passé semble –à tort- rétrospectivement constituer un moment de puissance et de suprématie.

Sous cet angle, une deuxième lecture de cette crise émerge, autre que la géopolitique, consistant à interpréter la crise comme un défi lancé par la question de l’identité.

Toutefois, cette identité historique sur laquelle la Russie s’appuie dans la détermination de sa politique étrangère envers son voisinage proche, crée une responsabilité envers ces pays, ce qui résulte en des relations empreintes de tensions. En effet, la Russie continue de manipuler l’Ukraine en tant qu’État vassal, voire politique qui lui est subordonné.

Une insistance sur l’identité ukrainienne, visant à gommer le discours russe contemporain, semble s’accentuer depuis quelques années sous la présidence de Poutine, avec un discours mettant en avant le roman national, comme cela s’est d’ailleurs abondamment pratiqué dans tous les États occidentaux à la fin du 19e siècle et au début du 20e siècle. Le phénomène n’est donc pas nouveau : il est fortement remobilisé à des fins politiques (Antoine Brunet, 2023, p. 65).

En accord avec ce sujet, de nouveaux observateurs estiment que parmi les États post-soviétiques, l’indépendance de l’Ukraine a été la plus difficile à accepter pour les Russes. De nombreux Russes considèrent une grande partie de l’Ukraine comme une province historique de la Russie et les Ukrainiens comme des frères ethniques proches. Ces considérations ont été traduites, en juillet 2021, par l’essai de Vladimir Poutine élargissant les affirmations qu’il avait déjà faites concernant les liens de l’Ukraine avec la Russie, affirmant que les Russes et les Ukrainiens sont « un seul peuple » (Congressional Research Service, 2021, p. 14).

Poutine, qui ambitionne une Eurasie intégrant l’Ukraine, oublie que ces affirmations ne dépassent pas leur cadre. Elles restent des observations anciennes d’une époque révolue, et que la réalité est que les relations entre les deux États ont connu des turbulences majeures depuis l’effondrement de l’URSS.

Il est important de spécifier que cette crise survient dans un contexte déjà très alarmant, après huit ans de conflits armés. Des experts prétendent d’ailleurs que l’Ukraine est le seul État du groupe des anciennes républiques soviétiques qui n’a toujours pas atteint, au minimum, la qualité de vie dont il jouissait lorsqu’il faisait partie de l’URSS (LCol C.O.G. Corneau, 2016, p. 5-6).

En se basant sur ce qui précède, on peut déduire que la géopolitique n’a pas totalement saisi toutes les conditions de son architecture, dont le volet contemporain fait partie. En effet, l’Ukraine soviétique n’est plus identique à celle de l’Ukraine post-soviétique. La révolution orange en est le témoin. Cependant, la société civile, qui revendiquait contre cette ingérence russe dans ses affaires, est souvent perçue comme le réveil de la société civile en Ukraine. Les révolutions de couleurs en Géorgie (2003) et en Ukraine (2004) ont profondément surpris l’élite dirigeante en Russie en tant que signe évident de l’affaiblissement de l’influence russe dans l’espace post-soviétique. C’est alors que les dirigeants russes ont pris conscience du problème d’image que la Russie avait et de la nécessité de reformuler en des termes plus attrayants sa politique envers ̏l’étranger proche″ (RAPHAËL ROBITAILLE, 2020, p. 56-57).

Le discours relatif au passé soviétique que le pouvoir russe a commencé à promouvoir à partir de 2000 nécessite d’être rectifié. Une urgence déjà confirmée par l’Ukraine quelques mois avant la désintégration de l’Union soviétique. En effet, le 24 août 1991, la République socialiste d’Ukraine a déclaré son indépendance. Et le 1er décembre 1990, cette indépendance a été confirmée par un référendum où 90% des Ukrainiens se sont prononcés en faveur (Sophie Marineau, 2017, p. 55). Cette volonté d’anticiper son indépendance, avant une chute concrétisée de l’URSS, est l’indice le plus marquant d’une volonté forte de se débarrasser de ce fardeau de subordination.

Comme la politique mémorielle représente une pierre angulaire du régime poutinien, à la fois le renforcement de l’État et la réanimation de l’image de la grande puissance sont présentés par Vladimir Poutine comme le retour à la tradition de l’État fort russe puis soviétique. Par conséquent, la gestion de la perception de l’époque soviétique s’avère nécessaire, dans la mesure où le passé soviétique réévalué constitue la base du récit national patriotique (Elena MORENKOVA, 2014, p. 361). Ce revirement s’exprime à travers les conceptions que la géopolitique cherche à promouvoir sur le monde en s’appuyant sur les données des époques passées.

Pour la Russie, qui imagine mal son futur sans l’Ukraine, aux yeux des hommes politiques et des géopoliticiens, l’État ukrainien n’est qu’une création artificielle temporaire, et l’indépendance de l’Ukraine n’est qu’un contresens historique. C’est pourquoi Alexandre Soljenitsyne affirme qu’il ne peut s’imaginer une Russie qui se limite à la Russie soviétique sans inclure aucune autre république comme l’Ukraine, la Moldavie et la Biélorussie. Plusieurs autres intellectuels russes, tels que le philosophe Alexander Tsipko, l’historien Louri Afanasiev et le politologue Andranik Migranian, vont jusqu’à décrire l’Ukraine comme une “formulation ethnopolitique fragile, artificielle et hétérogène, dépourvue de toute réelle chance de former son propre État” (Sophie Marineau, 2017, p. 55).

Ces quelques considérations reflètent les arguments sur lesquels la Russie tend à s’appuyer pour relativiser la déclaration d’indépendance de l’Ukraine. Cependant, les deux États entretiennent des relations pleinement délétères depuis la chute de l’URSS, comme mentionné précédemment, ce qui entrave leur union dans ce projet d’Eurasie. La fracture illustrée par le conflit russo-ukrainien prouve que l’Eurasie n’est pas cette “maison commune” et ne peut jamais l’être ; les États issus de l’URSS ne partagent pas de valeurs qui pourraient cimenter leurs relations (Anne de Tinguy, 2017, p. 5). De sa part, la fragmentation de l’Eurasie et la fin de ce qui a été un empire russe sont notables (Anne de Tinguy, 2017, p. 11).

Face à l’inclination ukrainienne vers l’Occident et son partenaire l’UE, le fait de dresser l’Ukraine semble être une tâche impossible.

La volonté de “retour à l’Europe” est au cœur de la politique étrangère de l’Ukraine, de la Géorgie et de la Moldavie depuis les années 1990, ce qui les a guidés à signer des accords d’association avec l’Union européenne en juin 2014, tous entrés en vigueur. Ainsi, les intérêts économiques de ces États se situent aujourd’hui dans la coopération avec l’Union européenne, qui représentait respectivement 37,5 %, 31,9 % et 53,1 % de leur commerce extérieur en 2015, tandis que la Russie ne comptait plus que 16,3 % et 7,9 % (Anne de Tinguy, 2017, p. 6).

Ainsi, le poids du passé que la Russie tente de faire perdurer avec ses voisins est complètement écarté. Conjugué à la proclamation de l’indépendance, les relations russo-ukrainiennes demeurent marquées par la méfiance. La nouvelle politique de balancier entre la Russie et l’Occident exercée par Kiev depuis l’indépendance traduit l’ambiguïté d’une relation fondée sur la nécessité et la méfiance (DELORY Stéphane, 2006, p. 211-212).

On peut conclure que l’effondrement de l’URSS a mis en avant la nécessité d’une nouvelle base juridique des relations, que la Russie et le courant eurasiatique nient. Ce déni ne doit pas négliger la cause fondamentale à la pointe de la fin de l’URSS : l’empire soviétique qui «s’est désamorcé suite à des tentatives de réformes internes et non sous la pression extérieure, malgré ce que pensent certains» (M. Dmitry Kirizliev, 2005, p. 8).

L’actualité relance également un débat sur la nature des relations entre l’Ukraine et l’Occident, notamment les États-Unis. Soulignant les traits de ces relations, qui commencent à se développer sérieusement depuis 1991, date de la dissolution de l’URSS. Les relations avec les ex-républiques soviétiques deviennent une priorité à l’agenda des États et de l’Occident. Elles s’affirment peu à peu, selon Henry Kissinger, comme l’«aspect le plus sensible, au plan psychologique, des relations entre les États-Unis et la Russie» (Julien zarifian, 2012, p. 482).

Dès 1993, on a noté que les États-Unis s’impliquaient ainsi diplomatiquement, politiquement et économiquement dans les affaires des pays de l’ex-URSS, exerçant une influence de plus en plus forte et multivectorielle. Ce volet a été accentué avec l’arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine en Russie, qui a confirmé cet aspect concurrentiel entre la Russie et les États-Unis en Eurasie (Julien zarifian, 2012, p. 482).

Si, il y a trente ans, une euphorie régnait dans les milieux stratégiques occidentaux, l’Amérique était au centre du monde et devenait, de facto, « l’empire du milieu ». Les années qui ont suivi la fin de la guerre froide ont été celles d’une glorification des valeurs occidentales qui se confondaient avec le processus de mondialisation, attirant ainsi de nombreux partisans. Toutefois, ayant abusé de leur avantage et développé une vision de l’unipolarité teintée d’unilatéralisme, les États-Unis ont suscité des résistances à un ordre mondial qui leur était favorable (François Xavier Noah Edzimbi, 2022, p. 26).

Bien que les États-Unis soient un acteur hégémonique, cherchant à imposer un système normatif construit autour de ses propres valeurs et profitant de l’argument de la « démocratisation » pour atteindre ses objectifs, ce pays, plutôt colonisé que colonisateur, est perçu comme un intrus dont la présence est motivée par des intérêts matériels et, plus récemment, symboliques, « grâce à la volonté des États-Unis d’être le moteur de la démocratie et de la paix dans le monde » (Jacques ABEN, 2005, p. 16).

La mission de démocratisation des États, que les États-Unis ont pris pour leur responsabilité, est un processus relevant de la volonté interne de l’État, d’un parcours d’harmonisation des normes législatives et des institutions politiques en place. Il s’agit d’un cheminement complexe qui doit être pris en charge par l’État concerné lui-même, et non imposé via des politiques au profit de l’État promoteur, telles que l’adhésion à l’UE ou à l’OTAN. En bref, la démocratisation ne peut être conditionnée.

Cette idée remet en question le réalisme de la science géopolitique, qui semblait être utopique. Peut-être que cela peut être justifié par le désir américain de sauvegarder son rang en tant que pôle unique du monde. Il y a certaines réalités qui commencent à s’implanter dans cet ordre même, appelant l’Amérique à se débarrasser de cette vision hégémonique qu’elle impose. Nous sommes depuis 2011 dans une nouvelle phase de l’ordre international, une phase de réaffirmation du statut de plusieurs États, comme la Russie et la Chine.

C’est d’ailleurs ce que martèle Vladimir Poutine depuis un bon moment. Pour comprendre les mots de Kari Roberts : «Putin has been very clear since taking office in 2000 that he sees Russia as a great power deserving of respect and maneuverability with regard to its national interests» (RAPHAËL ROBITAILLE, 2020, p. 9-10).

D’une manière générale, les événements en Ukraine ont accentué les divisions internes aux PECO sur les questions de politique extérieure et, par contraste, renforcé l’idée de s’unir militairement et d’obtenir des garanties de la part de l’OTAN et de l’UE sur le plan sécuritaire (Elsa Tulmets, 2017, p. 168).

À mesure que cette guerre progresse, les divisions s’accentuent même entre les États membres de l’UE, notamment concernant la gestion de cette crise et la vision du projet de l’UE dans les pays ex-soviétiques. Le niveau d’accentuation a atteint le seuil des échanges d’accusations, et un appel à mettre fin à cette guerre qui dure depuis trois ans a été lancé.

Il convient mieux à l’Amérique et à ses alliés, qui ont pris la responsabilité de la restructuration de l’ordre géopolitique en Ukraine, d’être conscients des résultats de cette prise de risque, en particulier si l’on considère que le président Poutine a évoqué à plusieurs reprises la possibilité d’une guerre. Ils doivent également être conscients de ce que leurs médias ont propagé même avant le début de l’intervention militaire russe en Ukraine, promouvant l’idée d’une opération militaire russe possible. Ceci ne résulte pas d’un manque de conscience, mais plutôt de la stratégie américaine de gestion de l’ordre mondial à travers les crises, dans laquelle elle excelle.

       La géopolitique nous a fourni des théories qui ont été considérées pendant un certain temps comme révélatrices de cette crise, mais il est nécessaire de chercher des compléments de puissance. Elle a laissé une diversité de points qui exigent une adaptation urgente, ainsi que des points non traités qui exigent d’être pris en compte.

En concluant notre étude, il est impératif de rompre avec le passé et de se concentrer sur le présent avec ses multiples variables, que ce soit pour parvenir à une compréhension rigoureuse de la crise en Ukraine ou pour en assurer une gestion appropriée.

Sans subjectivité, nous ne cherchons pas à défendre le géopolitisme. La géopolitique peut nous fournir une base solide pour expliquer cette crise, mais elle demeure une base parmi d’autres. Bien que cette crise ait mis en lumière la géopolitique, son apport reste critiquable et plutôt lacunaire dans l’analyse de cette crise.

Ces diverses considérations ne font que mettre en évidence l’élasticité de la géopolitique dans l’interprétation de la crise ukrainienne. Privée de la capacité à élaborer une base théorique complète capable d’embrasser ce débat avec ses multiples paramètres, la géopolitique, qu’elle soit dans son cadre ancien ou renouvelé, présente des vulnérabilités potentielles. Elle suit un cheminement inverse du traitement scientifique habituel ; plutôt que de partir de ce qui est perceptible pour construire une théorie valide, elle semble présumer une construction géopolitique, en référence à l’ordre géographique. Ainsi, la politique devient un enjeu conditionné par la conservation de ces valeurs théoriques, qui sont déjà, à priori, des notions mobiles.

Conclusion

Pour conclure, il est indéniable que la géopolitique ne constitue qu’un aspect parmi d’autres dans l’explication de l’invasion de l’Ukraine par la Russie et des préoccupations américaines concernant le containment de la Russie par le biais de l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN. Bien que la politique étrangère d’un État dépende de sa géographie, cette notion ne fournit qu’une partie de l’explication. Les défis de perte et de gain persistent dans les choix des États en matière de politique étrangère. Il est également important de noter que l’Ukraine se trouve géographiquement divisée entre l’Occident et la Russie depuis l’effondrement de l’Union soviétique, ce qui en fait un point de discorde permanent depuis des siècles.

D’ailleurs la spécificité, le caractère majeur qui marque cette crise, entraine à considérer comme des résultats ce qui suive :

  • La guerre en Ukraine nous a ramenés à l’époque de la guerre froide, lorsque les tensions entre les Etats-Unis et l’URSS étaient à leur apogée, principalement autour des questions d’hégémonie stratégique.
  • La dimension géopolitique est indéniable dans cette crise, identifiée par deux courants antagonistes, dont l’Ukraine est malheureusement le dernier enjeu à ne pas perdre dans la poursuite de leurs projets d’hégémonie.

D’où il semble adapté de préconiser :

  • Associer d’autres variables à la question géopolitique dans l’analyse de cette crise, afin de parvenir à une vision plus exhaustive et objective des causes de la genèse de la Crise en Ukraine.
  • Avec l’exemple de cette guerre, les chances de succès d’un règlement pacifique ou d’une résolution future ne peuvent être envisagées que si les parties concernées manifestent une véritable volonté de compromis et sont prêtes à renoncer à une partie de leurs intérêts nationaux au profit d’intérêts communs. En bref, ils sont entièrement conditionnés par une application juste du principe du droit international de ̏Non-Intervention dans les affaires Internes des Etats″. Il est essentiel de permettre à l’Ukraine de jouir librement de l’exercice de ce principe, sans aucune pression extérieure, même si cela semble un peu difficile à réaliser.

       Quels que soient les événements futurs, cette conjoncture influencera l’ordre international et pourrait annoncer une nouvelle réorganisation avec ses conséquences. À ce stade, il convient de se demander si cette crise, par son ampleur, imposera de nouvelles données dans des domaines spécifiques du système économique international, qui ont été considérablement affectés depuis ses débuts ?

Liste des marges :

(1)-C’est ce qui a tiré ̏Aymeric Chauprade″, provisoirement, en tant que déduction en répondant à la question꞉ « Quel cadre de référence faut-il se fixer à priori pour l’étude géopolitique ?». Que꞉ « Mais d’une manière ou d’une autre, par lui, avec lui ou contre lui, tout tourne autour de l’Etat, tout y revient. L’Etat est la forme à la fois séculaire et moderne que les sociétés humaines ont inventé pour produire du politique, à l’’intérieur d’elles-mêmes mais aussi entre elles ». Voir : Aymeric Chauprade, (2007), Géopolitique : constantes et changements dans l’histoire, 2éme édition, ELLIPSES.

(2)-Le Triangle de Weimar est une coopération trilatérale née le 28 août 1991 de la volonté des ministres des Affaires étrangères de France, d’Allemagne et de Pologne. Il se trouve, depuis l’entrée de la Pologne dans l’UE en 2004, au cœur de l’espace européen. Avec son début, l’objectif portait par cette coopération était, d’après la déclaration commune signée en 1991, d’accélérer l’entrée de la Pologne dans l’OTAN et surtout dans l’UE. Voir : Déclaration commune des ministres des Affaires étrangères de France, de Pologne et d’Allemagne sur l’avenir de l’Europe (Weimar, le 29 août 1991).

(3)-Alexander Douggine qui a confirmé l’aspect hypothétique d’un risque de guerre dirigée contre l’Ukraine꞉ « Il convient donc de considérer dès le début la composition de la bande intérieure du Sud de la Russie comme un pont potentiel », plus clairement que꞉ «la souveraineté de l’Ukraine représente, du point de vue de la politique russe, un phénomène dont la négativité est si grande qu’elle peut, en principe, susciter un conflit armé ». Révisez : arabisé par : Imed Hatem, Alexandre Douguine, (2004), les fondements de la géopolitique : l’avenir de la Russie, 1ére édition, Maison d’Edition Al-Kitab Al-Jadid Al-Mutahida.

(4)-PECO, désigne l’ensemble des six pays ; l’Estonie, Hongrie, Pologne, République Tchèque, Roumanie, et Slovénie ; qui sont engagés à promouvoir les normes de l’UE et l’OTAN. Sachant que la détermination de ces normes s’effectue en fonction de l’identité politique de la politique étrangère. C’est en effet au nom de la promotion de ces normes qu’une solidarité est exprimée par certain PECO envers d’autres pays européens, alors même qu’il n’existe parfois pas ou peu de relations historiques, comme entre les Pays Baltes et ceux des Balkans. Elsa Tulmets, LES INFLEXIONS DE LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE DES PAYS D’EUROPE CENTRALE ET ORIENTALE APRÈS LA CRISE EN UKRAINE, Cairn.info pour Presses de Sciences Po, « Les Champs de Mars », N° 29, pages 139 à 173, 2017, p. 144. Article disponible en ligne à l’adresse : https://www.cairn.info/revue-les-champs-de-mars-2017-1-page-139.htm

(5)-Comme l’a déclaré Poutine : «… lorsque l’infrastructure d’un boc militaire se déplace vers nos frontières, cela suscite chez nous des préoccupations et des questions. Nous n’avons d’autre choix que de prendre des mesures en réponse… avoir des bases militaires américaines si proches de nos frontières affecterait la sécurité de la Russie ainsi que les intérêts internationaux… ». Poutine soutient aussi que les Etats-Unis s’efforcent d’inciter les anciens Etats soviétiques, en particulier l’Ukraine, à choisir entre la Russie et l’Occident. Voir : Anastasia Avetisova, (2015), The Ukraine crisis: A geopolitical power struggle between Russia and the US, Bachelor Thesis in Peace and Development Studies, Linnæus University, p. 3.

(6)-Tel souligné par l’article 2/ p (4) de la charte des Nations Unies : «Les membres de l’organisation s’abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à (…) toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies», ces butes qui sont déjà prémentionnés dans son 1ér article ; de maintenir la paix et la sécurité internationales(article 1/p 1), et d’être un centre où s’harmonisent les efforts des nations vers ces fins communes (article 1/ p 4). Les deux buts moraux que ̏les fausses crises″ enfreignent. De ce fait ces pratiques (les fausses crises) sont contraires aux principes éthiques, aux normes internationales et au droit international. Voir : article 1 et 2 de la charte des Nations Unies adopté en 26 juin 1945.

(7)-Après la seconde guerre mondiale, les Etats-Unis ont bien profité de leur dollar, pour tirer des bénéfices de la création et du flux des richesses mondiales, basés sur leur ventes d’armes et de matériel de guerre à leurs alliés. Ces pays qui se sont trouvés lourdement endettés envers les Etats-Unis, sont soumis à des accords qui serviraient les intérêts économiques et des politiques des Etats-Unis (avec des conditions de remboursement préfixés, et non acceptable). S’appuyant sur l’hégémonie du dollar, les Etats-Unis ont joui de privilèges presque illimités et qui leur ont permis de s’élever en tant 1ére puissance économique mondiale. Voir : Les Etats-Unis, le plus grand destructeur de la paix dans le monde après la seconde guerre mondiale, Xinhua News Agency , publié le 17-09-2021, vue le 14-01-2024. Disponible sur : http://french.news.cn

(8)-En effet, « un conflit hybride, est une forme ambiguë d’affrontement, combinant des actions militaires conventionnelles et non conventionnelles ainsi que des actions non militaires, fondée sur une stratégie de déstabilisation de l’adversaire par l’usage de leviers variés et complémentaires. Il réserve une part importante aux actions d’influence dans tous les domaine en exploitant notamment des outils psychologiques, les manœuvres d’intimidation, les opérations de désinformation et les cyber attaques afin d’atteindre l’objectif final recherché en jouant sur les asymétries et en affaiblissant jusqu’à annihiler la résistance de l’adversaire» BENTEBIBEL Doria Yasmina, (2023), Ni Guerre Ni Paix : Désintégration de l’Ordre Politique et Mutations de la Conflictualité, POLITQUE MONDIALE, Volume (7), N° (2), (p.1009 – p.1019), p.1012.

(9)-En effet, c’est pour la première fois en histoire qu’on note que l’UE finance l’achat et la livraison d’armements et d’autres équipements à l’Ukraine. Voir : Fiche 3 : les formes de soutien et d’aide à l’Ukraine, Académie de Versailles, dispo sur : https://histoire.ac-versailles.fr.

(10)-KGB, ou КГБ en russe, était l’acronyme du Komitet Gosudarstvennoy Bezopasnosti, ce qui signifie en français « Comité pour la Sécurité de l’État ». Il s’agissait du principal service de renseignement et d’espionnage de l’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS). Le KGB était responsable de la sécurité intérieure, du contre-espionnage, de la surveillance des citoyens et de la répression des dissidents politiques en Union soviétique. Après la dissolution de l’URSS en 1991, le KGB a été dissous et ses activités ont été réparties entre plusieurs agences de sécurité et de renseignement des nouveaux États indépendants

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