Le gouvernement d’expédition des affaires courantes : Analyse constitutionnelle et politique à la lumière de la jurisprudence comparée

Prepared by the researche :Mouad souilah – Docteur en Sciences Juridiques et Politiques, – Université sidi Mohamed ben Abdellah de Fès, Maroc
Democratic Arabic Center
Journal of Afro-Asian Studies : Twenty-two Issue – August 2024
A Periodical International Journal published by the “Democratic Arab Center” Germany – Berlin
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Résumé
Cet article traite un problème lié à l’application de la théorie d’expédition des affaires, tout en soulignant la nature de cette théorie et ses principes les plus importants, puis en suivant sa portée pratique pour dégager ce qui relève des affaires courantes de ce qui ne relève pas.
En effet le gouvernement dans le système parlementaire n’est investi qu’après avoir obtenu la confiance de la chambre des représentants. Et par conséquent dans les cas où les fonctions du gouvernement prennent fin en raison de leur démission ou en raison de l’expiration de leur mandat légal, il ne lui est pas possible d’exercer ses pleins pouvoirs, et il se transforme en gouvernement d’expédition des affaires courantes; pour garantir assurer la continuité des services de l’Etat et de ses institutions ainsi que le fonctionnement régulier des services publics.
Il se révèle à partir les constitutions marocaines qui ont précédé la constitution de 2011, que la théorie d’expédition des affaires courantes était absente des textes de ces constitutions. Mais en pratique elle était présente. Le Roi annonçait dans les Dahirs relatifs à la cessation des fonctions du gouvernement que cette dernière devrait continuer à expédier les affaires courantes jusqu’à la formation du nouveau gouvernement.
Cependant avec la constitution de 2011, cette idée a mûri plus clairement, lorsque, d’une part, le législateur choisit de constitutionnaliser le concept d’expédition des affaires courantes à partir les articles 47 et 87. Et lorsque, d’autre part, confie à la loi organique 065.13 relative à l’organisation et à la conduite des travaux du gouvernement et au statut de ses membres, de déterminer strictement ce qui relèvent et ce qui ne relèvent pas de « l’expédition des affaires courantes ».
Abstract
This article deals with a problem related to the application of the theory of dispatch of current affairs, while emphasizing the nature of this theory and its most important principles, then following its practical scope to identify what is current affairs and what is not.
Indeed, the government in the parliamentary system is invested only after having obtained the confidence of the House of Representatives. Therefore in cases where the functions of the government end due to their resignation or due to the expiration of their legal mandate. it is not possible for it to exercise its full powers, and it transforms into a government of dispatch of current affairs; to guarantee ensure the continuity of the services of the State and its institutions as well as the regular functioning of public services.
It is revealed from the Moroccan constitutions that preceded the constitution of 2011, that the theory of dispatch of current affairs was absent from the texts of these constitutions. Nevertheless, in practice she was present. The King announced in the Dahirs relating to the cessation of the functions of the government that the latter should continue to dispatch current affairs until the formation of the new government.
However, with the constitution of 2011, this idea has matured more clearly, when, on the one hand, the legislator chooses to constitutionalize the concept of forwarding current affairs from articles 47 and 87. Moreover, when on the other hand, entrusts the organic law 065.13 relating to the organization and conduct of the work of the government and the status of its members, to determine what falls and what does not fall under the “dispatch of current affairs”.
INTRODUCTION
Le gouvernement sortant, que ce soit du fait de sa démission ou de l’expiration de son mandat légal, doit en principe se retirer de la scène politique. Car par-là, il a perdu son appui constitutionnel dans la gestion des affaires de l’Etat, et est devenu dépourvu de toute compétence pour traiter n’importe quelle affaire. Et tout ce qui est émis par ce gouvernement devient nul et n’aura aucun effet juridique, mais le principe de permanence et de continuité de l’État, qui est un principe général et fondamental reconnu par toute la jurisprudence constitutionnelle, donne à ce type de gouvernement un nouveau soutien général, et l’autorise à affronter les affaires de l’Etat pour ne pas s’arrêter ou interrompre son chemin de vie.
Dans ce cadre, le gouvernement dont il a été mis fin aux fonctions, pour quelque cause que ce soit, expédie les affaires courantes, dans l’attente qu’un nouveau gouvernement s’installe. Pour d’une part, assurer la continuité des services publics et sécuriser les besoins des citoyens et d’autre part, pour garantir la continuité de l’Etat au moment où il n’est pas possible d’engager la responsabilité politique du gouvernement, quand il ne dispose plus de la confiance du parlement -clé de voute de tout régime de tradition parlementaire-.
Au Maroc, concernant les constitutions qui précède celle de 2011, il s’avère qu’elles étaient dépourvues de toute référence à la théorie de l’expédition des affaires courantes, bien que cette dernière au niveau de la pratique fût présente. Le Roi, dans de nombreux cas, quand il a mis fin aux fonctions d’un gouvernement, lui confie l’expédition des affaires courantes jusqu’à la constitution de nouveau gouvernement.
Cependant, malgré cette présence, cette théorie reste complexe et floue, et n’a pas été encadrée juridiquement de manière suffisante et elle a été et demeure encore un objet de débat du point de vue juridique et politique.
Il s’agit donc, d’une période transitoire, mais non limitée dans la durée, laquelle peut être réduite à quelque semaine ou s’étendre sur plusieurs mois, et dont l’impact sur la gestion des affaires de l’Etat est plus ou moins étendue en fonction du système politique.
Dans ce contexte, cet article, se penche sur un problème lié à l’existence de la théorie de l’expédition des affaires courantes dans le système constitutionnel marocain, tout en retraçant ses principes fondateurs les plus importants, ainsi que les bases juridiques sur lesquelles le gouvernement sortant s’appuie pour exercer ses fonctions. Puis en mettant en évidence les affaires qui peuvent être inclus dans le périmètre des affaires courantes, et en même temps les affaires qui sortent du champ de compétence du gouvernement d’expédition des affaires courantes.
Afin d’aborder ce problème, cette étude adoptera un ensemble d’approches, dont peut-être la plus importante est l’approche analytique, l’approche juridique institutionnelle et l’approche comparative pour cerner les différents aspects de la théorie de l’expédition des affaires courantes, et nous nous appuierons également sur l’approche fonctionnelle pour déterminer les fonctions du gouvernement sortant jusqu’à la formation d’un nouveau gouvernement.
I – LE FONDEMENT JURIDIQUE DU GOUVERNEMENT D’EXPEDITION DES AFFAIRES COURANTES
Dans cette section on va retracer les contours théoriques du concept « d’affaires courantes », tout en déterminant l’essence de gouvernement d’expédition des affaires courantes (paragraphe 1), puis en s’appuyant sur les bases qui donnent à ce gouvernement la légitimité pour expédier des affaires courantes (paragraphe 2).
A – Essence Du Gouvernement d’expédition Des Affaires Courantes
Afin de se situer sur le concept de gouvernement d’expédition des affaires courantes, il faudra d’abord le définir puis examiner les différentes difficultés qui empêchent le gouvernement, dont il a été mis fin aux fonctions, pour quelque cause que ce soit, de continuer avec des pleins pouvoirs.
- Définition du gouvernement d’expédition des affaires courantes
Le concept de gouvernement d’expédition des affaires courantes est l’un des concepts vagues dont les juristes ne se sont pas mis d’accord sur une définition complète.
Le gouvernement d’expédition des affaires courantes est considéré comme un gouvernement transformé d’un gouvernement ordinaire avec les pleins pouvoirs, à un gouvernement avec des pouvoirs limités, dans le but est d’assurer la continuité du travail gouvernemental dans ses limites administratives, pour une période temporaire, jusqu’à la formation d’un nouveau gouvernement conformément aux règles constitutionnelles existantes, afin d’éviter le vide gouvernemental ou l’Etat à éclipse[1].
Certains sont allés le définir comme un gouvernement apolitique chargé de gérer les questions formelles et administratives dans la période comprise entre la démission d’un gouvernement responsable et la formation d’un nouveau gouvernement.
Certains autres l’ont ensuite défini comme un gouvernement aux pouvoirs limités. La portée de son travail se limite au travail administratif ordinaire et quotidien qui facilite la poursuite des travaux dans les institutions de l’État et les services publics.
Tandis que d’autres le considéraient comme un gouvernement temporaire dépourvu d’autorité dans le but de gérer les affaires courantes pour une période de temps spécifique. la période après le retrait de la confiance du gouvernement ou après la fin de l’existence légale du Parlement, ou une circonstance d’urgence qui a empêché la formation du nouveau gouvernement ou son retard, et ce gouvernement n’a pas le droit de décider de questions de nature future et fatidique, et son travail est limité pour les affaires urgentes du ministère, ses compétences sont limitées et il n’a pas le droit de mener des initiatives et des actions aux conséquences politiques. La plus importante de ses tâches est de gérer les affaires des différents ministères avec un minimum de continuité administrative et de gérer les intérêts des citoyens.
Ces définitions montrent que l’expédition des affaires courantes est le résultat d’une conciliation de deux principes opposés [2]: d’une part, le gouvernement sortant est obligé de freiner ses initiatives et interventions, ou du moins de les légaliser, d’éviter de patauger dans les questions politiques et d’interférer dans les pouvoirs de son successeur. D’autre part, le gouvernement ne doit pas rester les bras croisés, ne pas faire preuve de complaisance dans le traitement des dossiers qui concernent les affaires publiques et ne pas s’abstenir de prendre les décisions nécessaires à la préservation et à la protection du bien public.
- Difficultés empêchant le gouvernement sortant de continuer comme un gouvernement de plein exercice
L’objectif qu’un gouvernement reste au pouvoir malgré la cessation de ses fonctions et la perte de la confiance du Parlement, est d’empêcher la création d’un vide inter-gouvernemental et d’assurer une sorte de stabilité, car ce vide a de graves effets sur la vie économique, Sociale, Sécuritaire et politique…
Cependant, le gouvernement d’expédition des affaires courantes se caractérise par une faible légitimité démocratique, puisque cette dernière repose entièrement sur le principe de la représentation. La théorie constitutionnelle fonde en effet l’autorité des gouvernants sur le concept de représentation, l’autorité du gouvernement et son acceptation par les citoyens étant liée précisément à l’élection. Dans un système parlementaire, les seules élections sont les élections législatives, il n’y a pas d’élections spécifiques à la branche exécutive du gouvernement. Le mandat du gouvernement est donc intrinsèquement lié à celui des représentants élus au parlement et dépend à leur confiance. Ce sont les élections parlementaires qui déterminent la composition de l’exécutif. Celui-ci est en effet composé de membres du gouvernement qui bénéficient de l’appui d’une majorité au parlement[3].
Par conséquent, le gouvernement exerce ses fonctions en vertu de la confiance qui lui est accordée par le peuple représenté au Parlement, et il ne peut exercer ses pouvoirs constitutionnels que s’il jouit d’une telle confiance, mais dans le cas où les fonctions du gouvernement prennent fin, en raison de sa démission ou en raison de l’expiration de son mandat légal, il perd logiquement la confiance du Parlement. En outre, il existe un risque que le gouvernement d’expédition des affaires courantes soit dans un conflit d’intérêt avec le potentiel futur gouvernement et soit tenté « d’assurer ses arrières »[4].
L’existence de gouvernement d’expédition des affaires courantes pose de multiples difficultés. D’une part, Il y a un risque accru de conflit d’intérêts flagrant durant la période électorale. Il est à craindre que les membres du gouvernement utilisent leurs pouvoirs à des fins politiques ou personnelles pour influencer les résultats des élections. Ils peuvent utiliser les ressources publiques à des fins partisanes, afin d’influencer l’opinion publique. D’autre part, Cette période s’avère propice aux abus de pouvoir du gouvernement. Les ministres peuvent émettre des décisions de nomination au sein de leurs services ministérielles, en fonction de la poursuite de leur activité au sein de ces derniers. Ou de promouvoir certains membres des départements ministériels avant le changement du ministre[5]. Ou conclure des contrats, sachant avec certitude que leurs successeurs, surtout lorsqu’ils sont issus d’une majorité politique différente, ne feront pas de même. Ou que ce gouvernement, qui n’a pas la confiance du Parlement, peut prendre des décisions dans cette période qui pourraient ne pas être approuvées par la nouvelle majorité au Parlement[6].
Au vu de ces difficultés et des risques qui accompagnent l’existence du gouvernement, dont il a été mis fin aux fonctions, au niveau du pouvoir. Il est devenu nécessaire de rappeler la notion d’expédition des affaires courantes. Pour limiter l’étendue des pouvoirs de ce gouvernement et éviter les abus qui se produisent au niveau de la pratique.
B – les principes fondateurs de l’existence d’un gouvernement d’expedition des affaires courantes
La base de l’existence du gouvernement d’expédition des affaires courantes est due à deux raisons juridiques principales : la première est de nature administrative/organisationnelle liée à la nécessité de la continuité des services publics, et la seconde est de nature constitutionnelle/politique liée à l’irresponsabilité politique du gouvernement sortant.
1- la continuité de service public est une raison administrative de l’existence de gouvernement d’expédition des affaires courantes
Le principe de continuité de service public est l’un des principes les plus importants sur lesquels repose la théorie de service public, et il repose sur deux éléments fondamentaux, à savoir : la continuité de l’État et la continuité du service public pour assurer la satisfaction des besoins de la population[7].
Le principe de continuité de service public est essentiel pour la continuité de la vie nationale et de l’État. Le Conseil d’État français a donné à ce principe la valeur de principes juridiques généraux par sa décision sur l’autorité de régulation du droit de grève (CE 7 juillet 1950, Dehaene, GAJA, n°59). Et à son tour, le Conseil constitutionnel français, par l’une de ses décisions, a attribué la valeur constitutionnelle au principe de continuité de service public, considérant que les services publics sont les outils les plus importants appartenant à l’administration, qui constituent les aspects fonctionnels les plus importants du gouvernement. Et certains sont allés lier le principe de continuité de service publique à l’existence ou à la continuité de l’État, selon le commissaire du gouvernement F. Gazier la continuité de service public vise à éviter la décadence ou l’éclipse de l’État,
Compte tenu de cette importance du principe de continuité de service public, il apparait à quel point il est important pour le gouvernement de continuer à exercer ses fonctions, quel que soit son statut juridique, afin d’assurer le fonctionnement normal de service public de manière régulière et ininterrompue. De ce point de vue, le gouvernement sortant, pour quelque cause que ce soit, continue d’exercer ses fonctions, mais de manière limitée, qui consiste uniquement à gérer les affaires courantes, pour garantir la continuité des services de l’Etat et de ses institutions ainsi que le fonctionnement régulier des services publics[8].
De plus, le gouvernement est considéré comme l’élément le plus important de la vie politique. Les politologues s’accordent à dire que ses fonctions ont deux aspects principaux : l’aspect du leadership et de la perception, et l’aspect de la mise en œuvre et de la coordination[9], de sorte que l’absence du gouvernement reflète non seulement la paralysie de la vie politique et constitutionnelle de l’État, mais également reflétée sur la vie économique et sociale, et affecte la satisfaction des besoins publics et fondamentaux de la société. La nature des choses exige que l’État soit géré en permanence, indépendamment de tout changement de gouvernement. Il y a un minimum de travail à faire chaque jour, de manière continue et ininterrompue, et il y a aussi des besoins que des circonstances exceptionnelles exigent d’être satisfaits sans délai, sinon l’existence même de l’État est en danger[10], et Tant qu’il n’est pas possible de former un nouveau gouvernement pour remplacer directement le gouvernement démissionnaire ou le gouvernement sortant, dans ce cas nous ne sommes qu’en face du gouvernement démissionnaire ou du gouvernement sortant. Mais ce gouvernement, tant qu’il n’a plus la confiance du Parlement, sa compétence devrait être limitée à l’exercice de fonctions qui assurent la continuité minimale des services publics, et ainsi il est possible d’assurer l’existence d’une autorité qui peut agir et prendre la décision appropriée dans les circonstances exceptionnelles que l’Etat peut connaitre[11].
Dans ce sens, le Conseil d’État français, dans un arrêt en 1952, a fait valoir que la décision réglementaire ne peut être considérée comme une décision rendue dans l’idée de décharger les questions en cours, car le champ de cette idée peut exister dans l’intérêt de la nécessaire continuation des Services publics[12].
Le Conseil d’État belge, dans un arrêt de 1974, va également dans ce sens lorsqu’il décida qu’ « en vertu du principe de continuité des Services publics, les ministres démissionnaires conservent, dans tous les cas, le pouvoir de réglementer les matières pour lesquelles ils estiment que l’élaboration de solutions n’est pas de nature à retarder»[13]. Dans une autre décision de 1975, il confirma cette tendance en déclarant : « L’article 78 de la Constitution, qui reconnaît le droit du gouvernement à exercer le pouvoir, suppose que les ministres jouissent de la confiance du Parlement devant lequel ils sont politiquement responsables, et que dans le cas où le roi refuse la démission du gouvernement, ce qui n’est pas réalisé dans ce cas. Le Gouvernement démissionnaire doit être considéré qu’il ne jouit plus de cette confiance, et qu’il n’a plus de responsabilité envers le Parlement… Considérant qu’il est de la responsabilité du roi d’assurer la continuité des Services publics, qui ne peut s’acquitter de cette tâche que par l’intermédiaire de ministres qui contresignent les décisions rendues, dont la légitimité dépend de l’existence de cette signature… Ces ministres ayant présenté leur démission, ils ne peuvent exercer leurs pouvoirs que dans des limites étroites et à des fins nécessaires et justifiées. Alors que la règle non écrite selon laquelle le gouvernement démissionnaire se limite à la conduite des affaires courantes ressemble à une règle contraignante… Surtout pour assurer la continuité des services publics… Le Conseil d’État estime que le ministre des Finances, en signant l’arrêté royal contesté, relevait de sa compétence[14].
Il s’avère donc que la base juridique sur laquelle le gouvernement sortant exerce ses pouvoirs d’expédition des affaires courantes est liée à la nécessité pour les services publics de continuer à exercer leurs fonctions nécessaires afin de garantir la continuité de la vie publique. Mais à côté de cette raison administrative, une autre raison de nature politique s’ajoute, le gouvernement sortant n’a pas la possibilité d’être politiquement responsable devant le Parlement, et donc il ne peut pas exercer ses pleins pouvoirs, et en conséquence il se transforme en gouvernement d’expédition des affaires courantes.
- L’absence de confiance du parlement est une raison constitutionnelle / politique de l’existence de gouvernement de l’expédition des affaires courantes
Déterminer la compétence du gouvernement sortant dans l’expédition des affaires courantes, selon le critère de la continuité de service public, peut ne pas être une raison convaincante, selon certains. Le service public peut continuer à fournir ses services et à exercer ses fonctions quotidiennes, sans prêter attention à la présence ou à l’absence d’un gouvernement au sommet du pouvoir, car les travaux qu’il effectue sont effectués par les autorités administratives ordinaires.
La crise qui résulte de la démission du gouvernement, ou de l’échec de la formation d’un nouveau gouvernement après les élections législatives, n’affecte pas les services publics d’exercer leurs fonctions normales, mais affecte plutôt la relation du gouvernement avec le Parlement. Par conséquent, la compétence du gouvernement sortant est déterminée par un critère de nature cohérente avec la relation particulière entre les deux autorités pendant cette crise.
Ce critère découle d’une coutume constitutionnelle dans les systèmes parlementaire et mixte, selon laquelle le gouvernement sortant perd la confiance que lui accorde le Parlement, et donc il n’y a aucune possibilité de le tenir politiquement responsable, selon les règles constitutionnelles spécifiques de responsabilité politique. Dans ce sens ; Le juriste Marcel Waline estime que le gouvernement démissionnaire n’a rien à redouter du point de vue politique, On ne tue pas les morts ; on ne renverse pas les gouvernements démissionnaires[15].
En fait, la responsabilité politique, comme le dit Maurice Duverger, n’est rien d’autre qu’une sorte d’isolement des membres du gouvernement par le Parlement. Ou comme le dit Laferrière, la perte de confiance des Chambres des Représentants entraîne immédiatement la perte de l’existence politique du ministère. Le principe de responsabilité du gouvernement devant le parlement est une condition préalable à l’exercice de ses pouvoirs constitutionnels dans leur intégralité, et l’absence de possibilité de sa responsabilité devant le Parlement limite ses pouvoirs, et paralyse son mouvement. Ainsi, il apparaît que le maximum que le Parlement peut faire envers le gouvernement est de lui retirer sa confiance ou de le forcer à démissionner. Donc si l’affaire est effectivement réalisée, le contrôle du Parlement dans ce cas semble inutile, sans valeur et même impossible[16]. Par conséquent » la restriction de la compétence du gouvernement à expédier les affaires courantes trouve son fondement dans l’incapacité du Parlement à contrôler l’exercice des pouvoirs du gouvernement et non dans aucune autre justification.
II – LA PORTEE PRATIQUE DE LA THEORIE DE L’EXPEDITION DES AFFAIRES COURANTES
La voie légale pour sortir de cette situation, où le gouvernement sortant continue d’assumer la responsabilité de la continuité de l’État ; et en même temps, ne jouit pas de la confiance du Parlement, est d’introduire une règle selon laquelle ce gouvernement peut conserver la compétence pour expédier les affaires courantes, et cette règle est une exception à la règle de l’incompétence totale de ce gouvernement. Quelles sont les questions qui peuvent relever de l’expédition des affaires courantes ? Quelles sont les questions qui sortent du cadre de l’expédition des affaires courantes et que le gouvernement dans cette situation ne peut pas diriger ?
A – les questions relevant des affaires courantes.
Les gouvernements sortants ont traditionnellement géré les affaires courantes, mais la nature de ces affaires, qu’ils peuvent se charger de gérer, est restée floue et entachée de beaucoup d’ambiguïté, le chef de l’Etat, lors de l’attribution du gouvernement sortant, n’a évoqué que le maintien de ce gouvernement dans l’expédition des affaires courantes jusqu’à la formation d’un nouveau gouvernement, sans préciser le contenu de ces affaires.
L’absence du contenu des affaires courantes que le gouvernement sortant reprend, sur le contenu des constitutions dans de nombreux pays, a ouvert la voie aux avis doctrinaux et à la jurisprudence du pouvoir judiciaire administratif de définir ce contenu et de tracer les limites dans lesquelles ces gouvernements opèrent et ne peuvent dépasser.
Dans ce cadre, une distinction peut être faite entre les affaires courantes dans des circonstances normales, qui concernent des décisions nécessaires au fonctionnement normal des Services publics, et les affaires courantes dans des circonstances exceptionnelles, qui concernent des décisions imposées par un état d’urgence ou des circonstances exceptionnelles.
1-l’expédition des affaires courantes lors des circonstances normales
Dans le document constitutionnel de 2011, le législateur marocain a tenté de limiter certains problèmes et questions qui ont été soulevés sur les compétences du gouvernement lors de la l’expédition des affaires courantes. En invoquant la notion de l’expédition des affaires courantes, notamment au chapitre 87, qui prévoyait une loi organique[17] qui définit les règles relatives à l’organisation et à la conduite des travaux du gouvernementales et au statut juridique de ses membres, ainsi que les règles de l’expédition des affaires courantes par le gouvernement sortant. En effet l’article 37 de cette loi organique stipulait qu’on entend par “expédition des affaires courantes” l’adoption des décrets, des arrêtés et des décisions administratives nécessaires et des mesures urgentes requises pour garantir la continuité des services de l’Etat et de ses institutions ainsi que le fonctionnement régulier des services publics.
Le Conseil d’Etat Belge, dans un arrêt rendu en 1974[18], a tracé les premiers contours des questions qui peuvent être gérées par l’exécutif au titre d’ « affaires courantes », et a prévu que les affaires courantes sont :
a- les affaires banales ou de gestion journalière (à savoir les affaires dont le règlement n’implique pas de décision sur la ligne politique à suivre pour autant qu’il s’agisse d’affaires qui affluent régulièrement) ;
b – les affaires en cours, (à propos desquelles la décision constitue le prolongement et l’aboutissement de procédures entamées antérieurement) ;
c – les affaires urgentes (celles pour lesquelles un retard dans leur solution serait générateur de dommages et de nuisances pour la collectivité).
De même, Dans une décision de 1966[19], le Conseil d’État français a déclaré que les affaires courantes ou ordinaires sont les affaires qui n’exposent pas la responsabilité du gouvernement à des résultats politiques, car le gouvernement est régi par la confiance du peuple représenté par le Parlement, et le gouvernement démissionnaire qui perd la confiance du Parlement est incapable et n’a aucune autorité constitutionnelle pour prendre des décisions politique.
Pour Francis DELPEREE ; la catégorie juridique des affaires courantes s’est construite autour de trois éléments : l’ordinaire, l’engagé, et l’urgent[20].
Les affaires courantes ce sont, d’abord, les affaires ordinaires, banales ; sans incidence politique. Elles relèvent de la gestion quotidienne – celles de la fonction publique.
Les affaires courantes sont aussi celles qui étaient engagées avant la survenance de la crise et que le gouvernement entend mener malgré tout à bonne fin. Une affaire dont l’importance dépasse celle des affaires de gestion journalière et qui n’est pas urgent peut être finalisé par le gouvernement, si la procédure a été engagé bien avant la période critique, si elle ensuite été réglée sans précipitation et si les questions, qui ont pu poser sur le plan administratif, ont été résolues avant cette période critique.
Ce sont encore les affaires urgentes, celles que le gouvernement doit prendre en charge sans désemparer. Tout retard pourrait faire courir à l’Etat et aux intérêts dont il a la charge de graves dangers.
Au Liban, le Conseil d’État, basée sur la doctrine et la jurisprudence françaises, a distingué entre les actes d’administration ou de gestion et les actes de disposition.
Les actes de disposition ce sont ceux que le gouvernement démissionnaire ne peut pas effectuer. ils sont liées à la politique suprême de l’État, aux choix fondamentaux et aux sujets fatidiques sensibles tels que la conclusion d’accords et de traités internationaux, ou qui sont liés au futur de l’État comme l’octroi de prêts et la création de nouvelles charges financières ou le décaissement de crédits importants, ou l’approbation de plans de développement complets à long terme.
Pour les actes de l’administration, le gouvernement démissionnaire peut les effectuer, ils sont centrées sur la gestion des affaires quotidiennes et routiniers qui ne peuvent pas être gelés, qui ne restreint pas en principe les gouvernements suivants dans la poursuite de la politique suprême qu’ils voient et ne sollicite pas leurs finances, ainsi que le travail administratif qui doit être effectué, dans le cadre des délais fixés par la loi sous peine de chute et d’invalidation.[21]
- l’expédition des affaires courantes lors des circonstances exceptionnelles
La portée du travail du gouvernement sortant dans des circonstances normales est déterminée dans les affaires courantes quotidiennes ordinaires. C’est-à-dire le travail administratif ordinaire qui tourne autour de la gestion des affaires quotidiennes et routinières, qui en principe ne restreint pas le gouvernement ultérieur et n’est pas lié à la politique suprême de l’État, mais ce concept initial n’est pas si rigide que le “gouvernement d’expédition des affaires courantes” ne peut pas bouger le petit doigt en cas où le pays nécessite son intervention quel que soit son statut constitutionnel[22]. De nombreuses décisions, même si elles s’écartent par leur nature des affaires normales ou routinières de l’administration, sont incluses dans les affaires courantes, en raison des circonstances urgentes ou exceptionnelles que traverse le pays. Ce qui rend le concept « d’expédition des affaires courantes » décrit comme “relatif” en raison des circonstances et des besoins qui caractérisent l’identification des affaires normales qui relèvent des compétences et des pouvoirs d’un gouvernement d’expédition des affaires courantes, en particulier lorsque sa période de travail s’étend sur une longue période.
Le concept « d’expédition des affaires courantes » peut être étendu et élargi encore plus lorsqu’il existe des circonstances exceptionnelles qui nécessitent la protection de l’État, la préservation de ses droits, la préservation de l’ordre public ou de ses obligations internationales. Le gouvernement sortant dans ces circonstances aura des pouvoirs et des compétences beaucoup plus étendus qu’il n’en a lors des circonstances normales. Car sa réticence à agir dans de telles circonstances met en péril le principe de la continuité de l’Etat, et remet même en cause la légitimité et l’existence du gouvernement[23].
Du point de vue étymologique, il demeure une incertitude sur l’expression « affaires courantes », qui peut signifier aussi bien « affaires en cours », qu’ « affaire banales et insignifiantes ». M. Delvolvé retient à la fois ces deux interprétations lorsqu’il distingue les affaires courantes par nature, préparées par les bureaux, sur lesquelles le ministre se borne à apposer sa signature, et les affaires urgentes. Pour lesquelles, normalement, le gouvernement aurait dû s’abstenir, mais l’urgence justifie son intervention. Maurice Faure a proposé une définition très souple des affaires courantes, dans laquelle il considérait que les affaires courantes ne sont pas des affaires secondaires et subalternes, mais les affaires dont l’urgence vient à échéance au moment où un gouvernement bien que renverser, n’est pas encore remplacé par un autre ministère[24].
Selon Francis DELPEREE, il existe des considérations relatives au temps qui contribuent à affiner les contours de la catégorie des “affaires courantes”, l’examen de la compétence du gouvernement en période d’affaires courantes ne se réalise de manière abstraite, il faut tenir compte les circonstances dans lesquelles la décision a été prise[25], car la longue durée de la période d’affaires courantes conduirait à donner à tout dossier une autre dimension. Par exemple, en Belgique au printemps 2010, il n’y avait aucune nécessité d’intervenir dans un ensemble de dossiers économiques. Mais à l’automne 2011, il y avait une urgence manifeste a statuer sur le même objet. L’écoulement du temps a suffi à conférer au dossier une autre dimension. En raison de la longue période d’expédition des affaires courantes[26], le roi de Belgique a demandé au premier ministre de soumettre le budget 2011 au Parlement et de prendre les mesures nécessaires dans les meilleurs délais pour répondre aux exigences européennes en matière de politique fiscale et de réforme structurelle pour les années à venir, et lui a également demandé de prendre les mesures nécessaires aux niveaux économique, social et financier pour assurer le bien-être des citoyens[27].
La jurisprudence belge a élargi la nature des affaires courantes à d’autres actes proportionnés à la nature des crises politiques et à leurs prolongements, tels que l’approbation des accords internationaux, ainsi qu’aux actes et mesures approuvés par le Parlement, tels que la préparation et la présentation d’une loi de finances. Une catégorie d’affaires courantes a également émergé, celle dont le traitement est rendu indispensable par le droit international (ainsi, par exemple, la Belgique ne pouvait se soustraire à la présidence européenne ou à une action militaire concertée par l’OTAN au seul motif qu’elle était en situation de crise politique)[28]. Et dans l’une de ses décisions, le Conseil d’État belge s’est prononcé sur la détermination des prix des matières premières et a estimé que les questions de détermination des prix sont de nature à nécessiter une action rapide à leur sujet[29].
À cet égard, le Conseil constitutionnel marocain (actuellement la Cour constitutionnelle), lors du contrôle de la conformité des dispositions de la loi organique 065.13, a attiré l’attention sur ce qui est requis en cas de nécessité. Il a affirmé dans sa décision [30]; que lors de la mise en œuvre de cette obligation, il est nécessaire de prendre en compte les mesures législatives ou réglementaires qui peuvent être requises en cas de nécessité.
B – questions ne relevant pas des affaires courantes
Il ne fait aucun doute que la limitation de la portée des affaires courantes est importante pour contrôler le comportement du gouvernement sortant et pour tracer les limites de ses pouvoirs, mais il reste important à déterminer les catégories des affaires qui échappent à ses compétences et dépassent ses pouvoirs. L’expédition des affaires courantes n’est pas seulement une prérogative du gouvernement démissionnaire, qui l’utilise librement pour maintenir la continuité de service publique, mais c’est aussi une limite qui lui est imposée, et cette limite des pouvoirs du gouvernement démissionnaire apparaît à certains juristes comme un principe général de droit.
Le législateur marocain était conscient de l’importance d’identifier les matières qui ne relèvent pas des affaires courantes. Il a déterminé ce que l’on entend par affaires courantes dans l’article 37 de de la Loi organique n ° 065.13, puis il a souligné, dans le même article que “les mesures susceptibles d’engager durablement le futur gouvernement, notamment l’approbation des projets de loi et des décrets réglementaires, ainsi que la nomination aux fonctions supérieures, ne relèvent pas de l’expédition des affaires courantes.
Clarifier la réalité des questions qui ne relèvent pas de l’expédition des affaires courantes, nécessite de mettre en lumière les plus importantes de ces questions et les fondements juridiques qui les rendent hors du champ des compétences du gouvernement sortant.
Ces questions seront révélées à travers ce qui suit :
1 – décisions politiques de grande importance
Parmi les décisions politiques de grande importance, qui sortent du cadre de l’expédition des affaires courantes, on peut citer les projets de lois et décrets réglementaires, auxquels se réfère la loi organique 065.13 dans sa quatrième partie, ainsi que la décision de proposer de modifier la Constitution.
- l’approbation des projets de loi : Le principe de base est que le gouvernement intérimaire n’a pas le droit de soumettre des projets de loi, car l’exercice de cette compétence constitutionnelle nécessite une nouvelle initiative du gouvernement, et parce que les projets de loi reflètent l’orientation législative de ce dernier. ils constituent une traduction de ses idées et de ses choix politiques sous forme de principes ou de règles normatives, et tout cela peut susciter la responsabilité politique du gouvernement. de plus, les projets de loi peuvent avoir des répercussions financières directe ou indirecte, qui peuvent affecter le travail du prochain gouvernement.
- Approbation des Décrets Réglementaires : Le pouvoir réglementaire est le pouvoir conféré par la Constitution au pouvoir exécutif de promulguer des règlements ou des décrets réglementaires, c’est-à-dire le pouvoir dont dispose le gouvernement de prendre des mesures de nature générale. Ces mesures, qui peuvent être individuelles, comme la nomination d’une personne à l’un des postes, et peuvent être organisationnelles lorsqu’elles concernent le grand public. Le règlement est la forme par laquelle l’action du gouvernement se manifeste dans l’exercice du pouvoir réglementaire.
Compte tenu de l’importance des actes règlementaires et des choix politiques majeurs qu’elles impliquent, le législateur, conformément à la situation du gouvernement sortant, où ses pouvoirs sont réduits à l’expédition des affaires courantes, a exclu les décrets réglementaires du champ des” affaires courantes ” en raison des implications financières ou politiques qu’ils peuvent entraîner.
- Proposition de modification de la Constitution : Le législateur, en vertu de l’article 172 de la constitution de 2011, a garanti au Roi, au Premier ministre, à la Chambre des Représentants et à la Chambre des conseillers le droit de prendre l’initiative de réviser le Constitution. cette initiative comprend un choix politique judicieux et très important, en raison des changements qu’elle peut apporter au niveau de la structure de l’autorité. En principe cette question dépasse le cadre des affaires courantes, elle doit être traitée par un gouvernement de plein pouvoir.
2 – les questions administratives qui impliquent des choix politiques clairs.
Il y a certaines questions qui sortent du cadre de l’expédition des affaires courantes, car elles impliquent des choix politiques clairs tels que :
- La nomination aux fonctions supérieures : L’article 37 de la loi organique 065.13 énumérait parmi les questions qui ne relèvent pas de l’expédition des affaires courantes, la nomination aux fonctions supérieurs. Cette exclusion trouve sa justification dans le fait que la nomination à des postes de responsabilité est considérée comme l’une des décisions politiques à travers lesquelles le gouvernement incarne ses orientations et ses choix. Il s’agit d’un outil important pour la mise en œuvre de ses programmes, de sorte que le gouvernement sortant devrait s’abstenir de décisions de ce genre afin de ne pas engager sa responsabilité politique.
- Décisions modifiant le statut des institutions publiques et des services publics : La jurisprudence des expériences comparatives est allée considérer des décisions qui n’ont pas un caractère urgent et qui entraînent des modifications ou des changements dans le statut des institutions publiques et des services publics, ne relèvent pas de l’expédition des affaires courantes. la question va au-delà des affaires routinières qui peuvent être effectué par le gouvernement sortant pour assurer la continuité.
Dans ce sens, le Commissaire du Gouvernement Delvolvé a confirmé que les décisions qui incluent une modification du statut d’un service publique ou de son statut juridique sont en dehors du champ des affaires courantes. Le Conseil d’État belge dans un arrêt en 1975, a décidé que la décision qui introduit une modification du statut d’organisme public, est considéré une décision politique importante, car elle inclut une nouvelle initiative gouvernementale. Ce genre d’initiative sort du champ des affaires courantes[31].
- Décisions impliquant une modification ou une violation des droits reconnus par la loi : Ces décisions sont considérées comme des questions qui ne relèvent pas de la compétence du gouvernement d’expédition des affaires courantes. La jurisprudence administrative au Liban, par exemple, lorsqu’elle a défini le sens de des affaires courantes, a reconnu que les décisions organisationnelles de base et les règlements qui modifient les dispositions légales et les droits reconnus par la loi, ne relèvent pas des affaires courantes.Il en a été de même pour le Conseil d’État français dans l’affaire des « Quotidiens d’Algérie », où il a invalidé la décision rendue car elle comportait une atteinte à la liberté de la presse réglementée par la loi[32].
CONCLUSION
La théorie de l’expédition des affaires courantes est l’une des théories importantes et modernes qui sert à gérer les Affaires Publiques. Il s’agit en fait d’un mécanisme politique qui permet aux responsables du pouvoir exécutif à continuer de gérer les affaires de l’Etat malgré le manque de soutien parlementaire pour assurer la continuité de service publique, même si que cette logique soulève des violations des principes du processus politique en général et des règles constitutionnelles en particulier. Cependant, l’intervention du législateur constitutionnel en stipulant ce mécanisme dans le document constitutionnel et en se référant à ses dispositions à une loi organique, atténuerait l’intensité des critiques qui pourraient être portées sur cette structure constitutionnelle.
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[1] – Conclusion F.Gazier sur CE, Ass., 7juillet 1950, Dehaene, RDP, 1950, p. 691. Cité également par A.Dupie, Le principe de continuité de service public, Economica, 1982, p.39.
[2] – Francis DELPEREE, les gouvernements intermédiaires en Belgique, RFDA, 34ème année, N°6, Novembre-Décembre 2018, P. 1024.
[3] – Rivka Weill, Constitutional Transitions: The Role of Lame Ducks and Caretakers, Utah L. Rev (2011), p.1097.
[4] – Idem.
[5] – Amina Massoudi, le travail des membres du gouvernement au Maroc pouvoirs-frontières-responsabilités 1955-2016, new success press, Casablanca, 2017, p. 281.
[6] – Chambre des représentant de Belgique, Rapport fait au nom de la commission de révision de la constitution ; des réformes institutionnelles et du règlement des conflits par M. LANDUYT, N°996/1, 7 mai 1993, P : 3.
[7] – Claude DIDRY, Léon Duguit ou le service public en action, Revue d’histoire moderne & contemporaine, 2005/3 no 52-3, p.93
[8] – Dahir n ° 1.15.33 du 28 Joumada I 1436 (19 mars 2015) portant promulgation de la Loi organique n ° 065.13 relative à l’organisation et à la conduite des travaux du gouvernementales et au statut juridique de ses membres, Bulletin officiel n ° 6348, 12 Joumada II 1436 (2 avril 2015), P.1136.
[9] – Amina Al-Masoudi, marges du changement politique, imprimerie Najah El jadida, Casablanca, première édition, 2011, p. 80.
[10] – Adel al-Tabtabai, les compétences du gouvernement démissionnaire : une étude comparative, Fondation koweïtienne pour l’avancement des sciences, Koweït, 1986, p. 60.
[11] – Francine Batailler, Le conseil d’Etat et le juge constitutionnel, Bibliothèque de droit public, Paris, 1966, p.421.
[12] – Conseil d’Etat, Assemblée, 4 avril 1952, Syndicat régional des quotidiens d’Algérie, requête numéro 86015, publié au recueil Lebon. « …cet acte réglementaire qui devait, non pas appliquer simplement mais transposer en Algérie. compte tenu des circonstances locales, le système de la loi du 11 mai 1946, fixe les règles de droit applicables aux actes individuels de transfert à intervenir ultérieurement, ne peut être regardé comme une affaire courante, si extensive que puisse être cette notion dans l’intérêt de la continuité nécessaire des services publics ; qu’il suit de là, sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre moyen de la requête, que les requérants sont fondés à demander l’annulation du décret ci-dessus visé du 17 juin 1946 pour défaut de qualité de ses auteurs »
[13] – Conseil d’Etat de Belgique, 21 juin 1974, A.S.B.L. Fédération des Industries chimiques de Belgique, n° 16.490, R.A.C.E., 1974, P : 648.
[14] – L’arrêt C.G.E.R. du 14 juillet 1975. Cité par : Christian BEHRENDT, Le régime des affaires courantes et la Constitution belge, Exposé prononcé dans le cadre de la matinée d’études du Centre d’études Jacques Georgin, du parti politique “Défi”, à la Chambre des représentants, Bruxelles, 29 novembre 2019. Disponible sur le site web : http://hdl.handle.net/2268/241079.
[15] – F. Bouyssou : L’introuvable notion d’affaires courantes : l’activité des gouvernements démissionnaires sous la Quatrième République, Revue française de science politique, 20ème année, n°4, 1970, P : 664.
[16] – Adel al-Tabtabai, Op.cit. , p. 64
[17] – Dahir n ° 1.15.33 du 28 Joumada I 1436 (19 mars 2015) portant promulgation de la Loi organique n ° 065.13 relative à l’organisation et à la conduite des travaux du gouvernementales et au statut juridique de ses membres, Bulletin officiel n ° 6348, 12 Joumada II 1436 (2 avril 2015), P.1136.
[18] – C.E., 21 juin 1974, ASBL Fédération des industries chimiques de Belgique, n° 16.490. Voy. aussi : C.E., 14 juillet 1975, associations du personnel wallon et francophone des services publics, n° 17.131.
[19] – C.E., Ass, 22 Avril 1966, Fédération nationale des syndicats de police, A.J., 1966, P. 355, concl.Galmot.
[20] – Francis DELPEREE, les gouvernements intermédiaires en Belgique, RFDA, 34émme année N° 6, Novembre-Décembre 2018, P : 1024.
[21] – Le Conseil de la Choura d’État, la troisième chambre, Résolution n ° 614 du 17-12-1969 sur le procès de Fouad Iskander Rashid contre l’État libanais, Journal de la Justice 1969, P. 467.
[22] – Marcel LACHAZE : « L’expédition des affaires courantes en période de crise ministérielle », Dalloz- Chron. Hebdomadaire, 1952, P : 65 et s.
[23] – Sam Sulaiman Dallah, gouvernement intérimaire du concept politique au briefing juridique, Journal de la Charia et du droit, Université des Émirats arabes Unis, numéro 68, octobre 2016, P. 159.
[24] – F. Bouyssou : L’introuvable notion d’affaires courantes : l’activité des gouvernements démissionnaires sous la Quatrième République, Op.cit., P. 647.
[25] – Francis DELPEREE, les gouvernements intermédiaires en Belgique, Op.cit., P : 1024.
[26] – Le gouvernement Leterme II veille pendant 541 jours à la gestion des affaires courantes.
[27] – Communiqué envoyé le mercredi 2 février 2011 par le Palais royal : « Le Roi a reçu en audience cet après-midi au château de Laeken Monsieur Yves Leterme, Premier ministre. Vu la longueur de la période d’affaires courantes, le Roi a demandé au Premier ministre que le gouvernement d’affaires courantes présente au Parlement le budget 2011 et prenne les dispositions nécessaires pour répondre dans un proche avenir aux exigences européennes en matière de politique budgétaire et de réformes structurelles pour les prochaines années. Le Roi a également demandé au Premier ministre que le gouvernement d’affaires courantes prenne toutes les mesures nécessaires sur le plan économique, social et financier pour préserver le bien-être des citoyens. » Site La Libre Belgique, 3 février 2011.
[28] – Xavier BAESELEN, Jean-Charles LUPERTO, « Quelle activité parlementaire en période d’affaires courantes ? », les cahiers de l’ULB et du parlement de la fédération Wallonie-Bruxelles, N° 1, 2014, P : 11.
[29] – C.E.B., 21 juin 1974, Fédération des industries chimiques de Belgique
[30] – Résolution n ° 955.15 du 13 Joumada I 1436 (4 mars 2015), Journal officiel n ° 6342 du 21 Joumada I 1436(12 mars 2015), p. 1652.
[31] – Adel al-Tabtabai, les compétences du gouvernement démissionnaire : une étude comparative, Op.cit., p. 53.
[32]– Idem.