Flood risk management of the Oued Martil in the cities of Tétouan and Martil-western North of Morocco
Gestion des risques d'inondation de l'Oued Martil dans les villes de Tétouan et Martil au nord ouest du Maroc
Prepared by the researcher
Samira Ibn Idris Alami, Ibn Tufail University / “Environment, Development and Field Management Laboratory” Faculty of Arts and Human Sciences, Department of Geography / Kenitra, Morocco.
Issa Bouzidi- Professor of Geography, Director of “Environment, Development and Field Management Laboratory”, College of Arts and Human Sciences, Ibn Tofail University / Kenitra, Morocco.
Democratic Arab Center
Journal of African Studies and the Nile Basin : Tenth Issue – January 2021
A Periodical International Journal published by the “Democratic Arab Center” Germany – Berlin
Journal of African Studies and the Nile Basin
Abstract
The phenomenon of flooding in Morocco is increasingly felt after the installation of major infrastructure projects in several regions, in particular that of Tangier-Tétouan-Al Hociema. This research aims to treat the problem of Flood risk management of the OuedMartil at the level of the cities of Tétouan and Martil in the western North of Morocco.
This area is rich in natural potential, in this case water resources (sources of hazards, socio- economic and environmental impacts), the area isalso vulnerable due to the aggravation of extreme phenomena (drought and heavy rains), anthropic pressures and erosive action (accentuated by deforestation) causing siltation of dams (often designed as a source of flood risk). The construction of a new dam, and the rehabilitation of the plain and the OuedMartil for an urban centre, will certainly re-expose this space to floods. The final observation allows us to conclude that the stakeholders of flood risk management do not adopt in their plans, the appropriate ecological and economic measures, in the sense of sustainability, prevention and profitability.
Introduction générale :
Depuis le début des années 1970, la prise de conscience du problème de l’environnement est devenue une réalité de plus en plus persistante. Le point de départ a été, d’un côté un certain nombre de catastrophes survenus au XX° siècle et dont le rythme s’accélérait de plus en plus. D’autre part, la prise de conscience de la nécessité de préserver le capital matériel et humain pour assurer et rationaliser la croissance économique qui a été réalisée. Le Territoire marocain, malgré son caractère semi-aride ou aride, est soumis, comme tous les pays du pourtour Méditerranéen, à des crues importantes qui peuvent être très dommageables pour les infrastructures et la population. Le phénomène d’inondation est ressenti plus fortement aujourd’hui en raison de la croissance démographique, urbaine et économique, notamment au niveau de la région Tanger-Tétouan-Al-Hoceima et plus précisément dans le bassin hydraulique de l’Oued Martil qui appartient au domaine rifain du l’extrême nord du Maroc. C’est un espace qui donne sur le détroit de Gibraltar, limité au Nord par les deux provinces (M’diq-Fnideq et Fahs-Anjra) à l’Ouest par les deux provinces (Fahs-Anjra et Tanger- Assilah), au Sud par les deux provinces ( Ksar el Kbir et Chefchaouen) et à l’Est par la mer méditerranéenne. Ce bassin versant se localise géographiquement entre les deux parallèles 35.2° et 35.8°N et les deux méridiens 5.6° et 5.8°W. Les deux villes Tétouan et Martil se situent dans la basse vallée de ce bassin versant de part et d’autre du chenal principal sur le flanc entre les jbels : Dersa et Ghorghiz (Fig.1). Ces deux villes font parties aussi des principales villes du Nord du Maroc : Tanger, Chefchaouen et jouissent d’une position géostratégique privilégiée reliant l’Europe et l’Afrique. Les deux villes Tétouan et Martil occupent respectivement une superficie de 84 Km² et 33,5 Km² (HCP. 2014).
Source : Commune urbaine de Tétouan (service du SIG) (Sheffields du découpage territorial de 2009) et l’Agence du Bassin Hydraulique Loukkos (Sheffields du bassin versant d’oued Martil). Revue
Figure.n°1 : Localisation du bassin versant de l’Oued Martil
L’objectif de cette recherche est de traiter la problématique de la gestion du risque d’inondation au niveau de cet espace qui est riche en ressources naturelles et vulnérable en même temps, du fait de la croissance démographique des deux villes Tétouan et Martil, des quartiers clandestins sous équipés se forment le long de l’Oued Martil, sur la plaine dont l’altitude est parfois inférieure à celle de l’Oued. Cet espace est sujet à des inondations fréquentes qui menacent les populations et leurs biens, les infrastructures publiques et perturbent un certain nombre d’activités. Pour gérer ce risque d’inondation, plusieurs programmes sectoriels, plans communaux et mesures avant et après la catastrophe ont été planifiés et élaborés. Parmi les plus importantes de ces mesures: la construction d’un nouveau barrage (après l’envasement des autres barrages de cette zone), l’aménagement de la vallée de l’Oued Martil et la réhabilitation de la plaine pour un pôle urbain. Ces mesures vont rétablir le même scénario et réexposer certainement cet espace aux inondations et énormes dégâts au niveau naturel, humain et financier étant donné que l’approche sociale, économique et environnementale n’a pas été prise en considération. Pour traiter cette problématique, nous allons utiliser comme méthodologie l’outil S.I.G (Système d’Information Géographique) et les images satellitaires pour l’évaluation des facteurs limitants du risque d’inondation (Aléa,
vulnérabilité et enjeux) et la mise en place d’une base de données numérique de l’espace d’étude. Pour analyser la gestion effective du risque d’inondation dans le cadre du développement durable, nous allons diagnostiquer les plans de gestion du risque d’inondation de différents secteurs concernés, et entretenir avec les parties prenantes.
I-Présentation du Bassin versant de l’Oued Martil
Ce chapitre abordera le contexte naturel, humain et socio-économique de l’espace d’étude en se basant sur les données démographiques et les documents cartographiques (topographique, géologique, hydrographique, occupation des sols).
1-Composantes du milieu physique
Le bassin versant de l’oued Martil s’étend sur une aire géographique caractérisée par un paysage essentiellement montagneux (Fig.2) à topographie très accidentée et tourmentée, à l’exception de certaines zones à relief peu élevé et de quelques plaines méditerranéennes très exiguës, telle celle de Martil. Les pentes (Fig.3) sont très variables du fait de la position entre la chaîne du Rif et la mer méditerranéenne.
Sur le plan géologique, les caractères litho-stratigraphiques généraux de la chaîne rifaine y sont bien représentés, c’est indiqué par le chevauchement de plusieurs nappes de charriage (flyschs) formant la ligne de crête au-dessus de l’unité marneuse de Tanger. Le bassin versant de l’oued Martil est composé de deux zones (EL GHARBAOUI A.1981) :
*La zone amont formée par les terrains paléozoïques situés à l’extrémité Ouest du bassin versant et dont les crêtes n’excèdent pas les 400 mètres d’altitude. Cette zone intègre également les collines des flyschs situées à l’extrémité Ouest du Bassin Versant et qui correspondent aux basses montagnes de l’unité de Tanger dont le matériel imperméable est de nature marneuse ou marno-schisteuse.
*La zone avale du bassin correspond à la plaine de l’Oued Martil qui est une zone inondable. La variété lithologique du bassin versant de Martil a permis le développement d’une mosaïque pédologique assez importante formée par des sols hydromorphes peu évolués et des lithosols (Fig.4).
Source : La carte de Tétouan 25.JPG (1/25000). Agence nationale de la conservation foncière du cadastre de la cartographie. Edition 2007. Projection conique conforme de Lambert. L’équidistance des courbes est de 10 m, origine des altitudes : niveau moyen de la mer (Nivellement général du Maroc). Revue
Figure n° 2 : Carte hypsométrique du bassin versant de l’Oued Martil
Source : La carte de Tétouan 25.JPG (1/25000). Agence nationale de la conservation foncière du cadastre de la cartographie. Edition 2007. Projection conique conforme de Lambert. L’équidistance des courbes est de 10 m, origine des altitudes : niveau moyen de la mer (Nivellement général du Maroc), plus les données des degrés des pentes. Revue
Figure n°3 : Carte des pentes du bassin versant de l’Oued Martil
Source : La carte géologique de la chaine rifaine 1/500000, ministère de l’énergie et des mines (Editions du service Géologique du Maroc : Notes et mémoires N° 245a. 1980). Revue
Figure n°4 : Carte géologique du Bassin Versant de l’Oued Martil
Le bassin de l’Oued Martil est l’un des bassins méditerranéens qui se caractérise par une superficie relativement grande et une morphologie variée, avec un réseau hydrographique assez dense. Sa surface est de 1126 km² correspondant à un périmètre de 183 km. Ce bassin versant est subdivisé en 8 sous bassins versants importants (ABHL. 2006).Du point de vue hydrogéologique, le bassin versant de l’Oued Martil fait partie des bassins méditerranéens constituant la zone axiale de la chaîne du Rif. Les affluents supérieurs se développent dans les massifs de la Dorsale Calcaire qui assurent une régularisation très partielle des eaux recueillies, ce qui n’empêche que l’Oued Martil présente un régime torrentiel très prononcé. Les chutes sont importantes du fait de la proximité des montagnes par rapport à la mer. Les trois quarts des Oueds de ce bassin passent par la cluse de la ville de Tétouan, le cours d’eau principal reçoit ces eaux de trois grands affluents : Mhajrat, Khemis et Chekkoûr (fig.5) puis il traverse la ville de Tétouan avant de se déverser dans la Méditerranée dans la partie sud de la ville de Martil avec un débit minimal en périodes d’étiage de 0,23 m³/s(ABHL.2006). Il est
à noter que l’Oued Martil se subdivise en un tronçon supérieur à pente raide qui traverse à son tour la dorsale calcaire et, un autre (à partir de Benkarich) à pente faible qui traverse la ville de Tétouan avant d’arriver à l’embouchure.
Source : La carte de Tétouan 25.JPG (1/25000). Agence nationale de la conservation foncière du cadastre de la cartographie. Edition 2007. Projection conique conforme de Lambert. L’équidistance des courbes est de 10 m, origine des altitudes : niveau moyen de la mer (Nivellement général du Maroc). Revue
Figure n°5 : Carte du Réseau Hydrographique du Bassin Versant de l’Oued Martil
Le climat de la zone d’étude se caractérise par deux saisons très différenciées : la première humide et fraiche, s’étend d’octobre à avril, la seconde subhumide et chaude, commence en Mai et se prolonge jusqu’à la fin de septembre. Les précipitations varient en hauteur, en intensité et dans leurs distributions géographiques avec une alternance de longues périodes de sécheresse suivies par des précipitations torrentielles et irrégulières (Fig.6), une augmentation significative de la moyenne annuelle des précipitations a été enregistrée pendant les deux dernières décennies. On est ainsi passé d’une moyenne d’environ 570 mm pour la décennie 1974-84 à plus de 900 mm pour celle de 1994-2004 et d’environ 620 mm pour celle de 2004- 2014. Cette augmentation significative des précipitations est due notamment à l’accroissement des épisodes pluvieux courts et intenses depuis les années 1990.
Source: Agence du Bassin Hydraulique du Loukkos (ABHL.2009) et la direction de la recherche et de la planification de l’eau de Tétouan, Ministère de l’Equipement. Revue.
Figure n°6: Moyennes des précipitations annuelles du Bassin Versant de l’Oued Martil (Stations : Tétouan, Oued Martil, Malaliene et Smir)
Les débits maximaux de l’Oued Martil s’enregistrent généralement entre le mois d’octobre et le mois d’avril, ils peuvent atteindre des débits de pointe importants de 1000 à3000 m3/s (fig.7). Ainsi les fortes crues montrent des temps de baisses de 15 à 20 heures et des temps de montée courts de 5 à 6 heures.
Source: Agence du Bassin Hydraulique Loukkos (ABHL). Mai 2011). “ Protection de la ville de Tétouan et de la plaine de Martil contre les inondations de l’Oued Martil ”
Figure n°7: Débit de la crue de décembre 2000 au niveau de la ville de Tétouan
(Entre 26 et 28/12/2000)
Le 26 décembre 2000, une crue inonde la ville de Tétouan sur près de 2 400 ha (débit de 3 350 m3 /s) après 4 jours de fortes précipitations (150 mm). Entre le 20 et le 28 décembre,
28 176 mm de précipitations ont ainsi été enregistrées (80 % des précipitations mensuelles) dont 50 mm pour la journée du 26 décembre (ABHL.2011). On ce qui est des débits d’étiages de l’Oued Martil, ils sont soutenus par les sources de la Dorsale Calcaire. La majorité de ces sources sorte des massifs calcaires blancs et se situent à des altitudes de 140 à 1090m. (Mounir Karrouchi.M, Ouazzani.M.2016). Il est à signaler que le bassin versant de l’Oued Martil présente des versants très raids, ce qui favorise la dégradation des sols et entraîne un écoulement rapide. Ce bassin versant abrite aussi un important couvert végétal, bien qu’il montre un important recul notamment dans la moitié Nord (Fig.8). Le périmètre urbain des deux villes Tétouan et Martil est occupé par 1123 ha de forêt, 133 ha de zones marécageuses et 3075 ha de zones urbanisées (calculés par Google Earth) (Mounir Karrouchi.M, Ouazzani.M.2016).
Source : La carte de Tétouan 25.JPG (1/25000). Agence nationale de la conservation foncière du cadastre de la cartographie. Edition 2007. Projection conique conforme de Lambert. L’équidistance des courbes est de 10 m, origine des altitudes : niveau moyen de la mer (Nivellement général du Maroc). Plus Image satellitaire de 2016 https://search.asf.alaska.edu/. Revue
Figure n° 8 : Carte d’occupation du sol du Bassin Versant de l’Oued Martil
2-Caractéristiques humaines
D’après les résultats du Recensement Général de la Population et de l’Habitat de 2014 et l’annuaire statistique régional, La population des deux villes Tétouan et Martil s’élève à
445 142 habitants, elle a enregistré respectivement un taux d’accroissement annuel moyen de 1,63% (Tétouan) et 5,17% (Martil), entre 2004 et 2014 contre1,25% au niveau national, un taux d’urbanisation provincial (fig.9) de 72,3% (Tétouan) et 94,3% (M’diq-Fnideq à laquelle appartient la commune urbaine de Martil), contre 60,4% à l’échelle nationale, cette croissance humaine et urbaine (Photo n°1) est alimentée par l’exode rural et les flux migratoires extérieurs à la région pour chercher des opportunités de travail et d’immigration vers l’Europe.
Source : Monographie de la province de Tétouan 2015. (PP : 96) (Tableau 5, P : 24), et la Monographie de la province de M’diq-Fnideq 2018 (PP : 104) (Tableau 5, P : 25). Revue
Figure n°9 : Taux d’urbanisation provincial (en %) en 2004 et 2014
En matière des potentialités économiques, cet espace dispose d’une importante infrastructure de base et d’équipement (fig.10) et repose essentiellement sur le petit commerce et le tourisme balnéaire (Photo n°2) compte tenu sa situation privilégiée, son relief diversifié unissant plages, montagnes et forêts, ainsi que son climat et son enracinement dans l’histoire, sont autant d’atouts qui la prédisposent à occuper une place favorite en tant que destination touristique. Il est à signaler aussi la prépondérance des activités informelles en tant que villes frontalières (Photo n°3).
Figure n°10 : Dynamique économique régionale importante (densification du réseau routier dont la rocade méditerranéenne, l’autoroute et le réseau ferré (TGV) reliant Tétouan et Martil à la capitale administrative (Rabat) et la capitale économique (Casablanca), plus le grand projet de hub économique (Le complexe portuaire
Tanger Méditerranée). |
Source :www.skyscrapercity.com/showthread.php,
Consulté le 17-12-2019 |
Photo n°2 : Corniche de la ville de Martil (Côte urbanisée pour le tourisme balnéaire). 03-09-2018 |
Photo n°1 : Bras mort de l’Oued Martil (zone aval) : habitat anarchique pour location à bas prix aux étudiants en tant que ville universitaire et aux immigrés de différentes destinations (rurales, urbaines, pays africains). 03-09-2018 |
Photo n°3: (Prise le 10-05-2017). Economie parallèle de la contrebande au niveau de l’enclave espagnole de Sebta (Chaque jour, près de 40 000 marocains (en majorité des femmes) traversent la frontière pour s’approvisionner en marchandises détaxées. www.economia.ma › content › linformel-des-frontières Consulté le 17-12-2019) |
Conclusion :
A partir de la précédente analyse des différents paramètres, on note que le relief est à dominance montagneuse, des formations géologiques imperméables, des précipitations relativement intenses et concentrées, un réseau hydrographique assez développé, et un régime hydrologique caractérisé par des crues importantes, rapides et souvent violentes avec des étiages très prononcés, des débits de pointe importants de 1000 à 3000 m³/s pendant des temps de montées courts (quelques heures). Parallèlement à cela, la zone est relativement peuplée et connaît pendant cette dernière décennie un essor économique important qui s’appuie sur l’exploitation de ses potentialités naturelles et sa situation géographique stratégique. Ce développement est impulsé par la volonté des pouvoirs publics de donner à la région (Tanger-Tétouan-Al-Hoceima) la vocation d’un important pôle de développement socio-économique national, voire international. Les projets ne cessent de s’accroitre, les constructions et le bétonnage se multiplient dans le lit majeur de l’Oued Martil et au détriment de la forêt, augmentant les risques à chaque crue, ce qui exige et nécessite une évaluation qualitative et quantitative du risque d’inondation avant chaque projet d’aménagement urbain pour une bonne maitrise de la gestion du risque d’inondation pendant les périodes de crise.
II-Evaluation du risque d’inondation de l’Oued Martil
Le risque d’inondation est la conséquence de deux composantes (Pière Martin,2007) :
* La présence de l’eau qui s’écoule habituellement dans son lit mineur mais qui peut aussi en sortir occasionnellement pour recouvrir une partie ou la totalité de la vallée ou la plaine (lit majeur) : c’est l’aléa inondation.
* La présence de l’homme qui s’installe dans l’espace alluvial : c’est le degré de la vulnérabilité.
1-Facteurs limitants du risque d’inondation
Pour évaluer le risque d’inondation de l’Oued Martil au niveau des deux villes Tétouan et Martil, on a adopté la méthode « Inondabilité » (CHASTAN.B, O.GILARD.1995) qui repose sur l’occupation du sol et les images satellitaires (Fig. n°11).
Modélisation hydraulique des cures |
Carte de récurrence des inondations
Degré : *Faible : Période de retour de 100 ans *Moyen : Période de retour de 50 ans *Elevé : Période de retour de 10 ans |
Carte de submersion des inondations
Degré :
*Faible : Hauteur< 0,5 m *Moyen : 0,5 m < Hauteur <1 m *Elevé: Hauteur > 1 m |
Carte de la vulnérabilité Degré :
*Négligeable : Zone marécageuse, lac et barrage *Faible : Forêt naturelle, matorral, reboisement, terrain dénudé et dunes de sable *Moyen : terrain de culture *Elevé : agglomération urbaine, habitation dispersée en zone rural, infrastructures. |
Combinaison (SIG) |
Carte de récurrence des inondations
Degré : *Faible : Période de retour de 100 ans *Moyen : Période de retour de 50 ans *Elevé : Période de retour de 10 ans |
Carte d’occupation du sol |
Photos aériennes et images satellitaires |
Combinaison (SIG) |
Carte du risque d’inondation
Degré: *Négligeable *Faible *Moyen *Elevé: |
Source : GILARD O. et P. GIVONE (1997). Flood risk management: New concepts and methods for objective negotiations. “Destructive Water: Water Caused Natural Disasters, their Abatement and Control” (Proceedings of the Conference held at Anaheim, California, June 1996). IAHS Publ.N° 239, pp. 145‑155. Revue
Figure n°11 : Cadre méthodologique de l’évaluation cartographique du risque d’inondation
1.1- Aléa d’inondation
L’aléa représente la crue en tant que phénomène physique, naturel et non maîtrisable, indépendamment de ses effets potentiels sur l’environnement et les activités humaines. L’aléa dépend du comportement hydrologique du bassin versant et du fonctionnement hydraulique du réseau hydrographique. L’aléa se représente par une carte qui permet d’identifier les zones où les inondations sont susceptibles de se produire soudainement suite à la conjonction de plusieurs facteurs, de façon plus ou moins étendue et fréquente (CHASTAN, 1995). Il repose sur la combinaison des deux notions suivantes : la récurrence d’une inondation et la submersion (Fig n°11).
L’analyse historique des crues de la basse vallée de l’Oued Martil a permis de constater que la plaine de Martil a connu souvent des pulsations brutales et violentes de son cours d’eau principal et de ses affluents. Des exemples des événements hydrologiques extrêmes démontrent les données suivantes(ABHL.2011) :
1)- En décembre 1998, le débit de pointe a atteint 1927 m3/s.
2)- L’inondation du 26 décembre 2000 (Photos n°4 et 5), ou le débit de pointe arrive à 2674 m3/s, a causé des pertes humaines importantes : 8 morts et 2 disparus (d’après les autorités locales).
Source : Agence du bassin hydraulique Loukkos (ABHL). (Mai 2011). Protection de la ville de Tétouan et de la plaine de Martil contre les inondations de l’oued Martil. Tétouan.
Photo n°5 : Inondation de 26 décembre 2000 Usine Salam Gaz (au bord de l’oued Martil au niveau de l’entrée de la ville de Tétouan) |
3)- L’inondation du 17 janvier 2006 a causé des dommages matériels énormes évalués à 83 Million de Dirhams, et la submersion de 2400 ha.
Source : Agence du bassin hydraulique Loukkos (ABHL). (Mai 2011). Protection de la ville de Tétouan et de la plaine de Martil contre les inondations de l’oued Martil. Tétouan.
Photo n°4 : Inondation de 26 décembre 2000 Quartier Coelma de la ville de Tétouan (Habitat anarchique sur la zone aval de l’Oued Martil)
Le suivi continu et le cumul de ces données plus un traitement statistique spécial permet aux services concernés, notamment l’ABHL, de réaliser la modélisation hydraulique des crues de l’Oued Martil au niveau des deux villes Tétouan et Martil. Ceci permet à son tour d’élaborer la carte des hauteurs de submersion et la carte de récurrence de l’inondation (Fig.n°11). Selon la notion de la combinaison des deux cartes précédentes et on utilisant le logiciel Arc.Gis, on obtient la carte de l’aléa d’inondation de l’oued Martil au niveau des deux villes Tétouan et Martil (Fig.n°12). Les valeurs sont définies comme faibles, moyens et élevés selon la fréquence et la profondeur de la submersion des inondations. A travers ces résultats on constate que la superficie concernée par les inondations est importante. Les zones les plus touchées se situent en grande partie dans la plaine alluviale aux abords des rives et dans l’exutoire de l’Oued Martil. Ce résultat s’explique par la topographie relativement plate de la plaine, en plus de l’importance des apports d’eaux de surface de l’Oued Martil, donnant naissance à de large étendue d’épandage des eaux en périodes de crues.
Source : Image satellitaire de l’espace d’étude (googleEarth. 2016) plus la carte de la submersion et la carte de la récurrence des inondations de l’Oued Martil (Sheffields ABHL). Revue
Figure n°12 : Carte d’aléa d’inondation de l’oued Martil
(au niveau des villes : Tétouan et Martil)
1.2- Vulnérabilité et enjeux
On distingue deux approches pour évaluer la vulnérabilité. Les approches analytiques qui déterminent les causes directes et indirectes d’une catastrophe, alors que les approches systémiques sont basées sur la modélisation explicative ou prédictive d’un système complexe (MEDTL2011/2012). En général, la vulnérabilité est la mesure de dommage de tous les types d’enjeux soumis à un aléa d’intensité et d’occurrence donné. Ces enjeux sont généralement classés en trois types : Les enjeux humains, économiques et environnementaux. La détermination de leur vulnérabilité (négligeable, faible, moyenne, élevée) et leur représentation cartographique (Fig. n°13) dans notre cas se repose sur l’occupation du sol et un travail de prospection sur le terrain (Fig. n°11). Dès lors, il est évident qu’une zone marécageuse à un degré de vulnérabilité négligeable aux inondations, par contre, les habitations et les infrastructures constituent, parmi d’autres, des enjeux très vulnérables.
Source : Image satellitaire de l’espace d’étude (googleEarth. 2016) et la carte d’occupation du sol du bassin versant de l’Oued Martil (Fig.8)
Figure n° 13 : Carte de la vulnérabilité des espaces limitrophes de l’Oued Martil
(au niveau des villes : Tétouan et Martil)
Le facteur de la vulnérabilité est réparti dans l’espace d’étude approximativement (calculé par le logiciel ArcGis) comme la suite :
- Vulnérabilité faible sur une superficie de 9 Km2
- Vulnérabilité moyenne sur une superficie de 7 Km2
- Vulnérabilité Forte sur une superficie de 18 Km2
Il convient de signaler également que l’occurrence des inondations au niveau de la plaine par le débordement de l’Oued Martil intervient souvent à un moment où la plaine se trouve déjà saturée par la stagnation des eaux pluviales conséquente à l’absence d’un système de
drainage adéquat et en raison du fait que l’aménagement actuel de la plaine ne tient pas compte des risques de son inondabilité (CUT. 2013).
2-Caractéristiques des inondations
Selon le cadre méthodologique de l’élaboration de la carte du risque d’inondation (Fig. n°11), cette dernière est résultante de la combinaison des deux cartes précédentes : la carte de l’aléa d’inondation et la carte de la vulnérabilité. On se basant aussi sur le travail de prospection sur le terrain et le calcul approximatif des superficies des zones à risque par le logiciel Arc Gis, les résultats révèlent ce qui suit :
*Zones à risque fort : la superficie approximative s’élève à 4,25 km2, ces zones sont occupée par : L’usine salam gaz, quartier Taboula et Touibla, quartier Korat sbaa,la nouvelle gare routière et les infrastructures voisines, faculté des sciences, quartier el M’hannech, quartier Coelma, quartier Diza situé à l’embouchure d’oued Martil, lotissement al Wad et lotissement Rbahi).
*Zones à risque moyen : la superficie approximative s’élève à 2,43km2, ces zones sont occupée par : la route secondaire 608, Lotissement Alaoui et Inara (situé avant l’aéroport).
*Zones à risque faible : la superficie approximative s’élève à 0,75 km2,ces zones sont occupée par :la plaine agricole de Martil et l’aéroport de Tétouan.
À travers ces résultats, le risque d’inondation est important dans les zones bâties et peuplée (vulnérabilité forte) situées dans une zone d’aléa élevé ou moyen et, à l’inverse, le risque de dommages sera faible pour une forêt dans une zone d’aléa faible ou moyen.
Source : Image satellitaire de l’espace d’étude (googleEarth. 2016) plus la carte de l’aléa d’inondation et la carte de la vulnérabilité. Revue
Fig. n° 15 : Carte de risque d’inondation de l’Oued Martil
(Au niveau des villes : Tétouan et Martil)
Conclusion
Suite aux résultats obtenus, on note que les facteurs anthropiques aggravent le risque d’inondation. De nombreuses agglomérations et infrastructures des deux villes Tétouan et Martil se sont développées à proximité ou sur le lit mineur et majeur de l’Oued Martil, modifiant son équilibre hydrologique et diminuant les champs naturels d’extension des crues. S’ajoute à ceci l’imperméabilité des sols et l’accroissement des épisodes pluvieux courts et intenses qui accentue le risque d’érosion et l’envasement des barrages, sans oublier l’incompétence de réseau d’assainissement. Ceci rend les citoyens face à un véritable risque d’inondation qui exige de toute urgence une gestion rationalisée et intégrée.
III-Gestion du risque d’inondation et le développement durable
La gestion des risques naturels est une composante du développement durable. Les stratégies de lutte contre les risques d’inondations passent incontestablement par la
compréhension scientifique de la cause du risque, de son impact au niveau social, économique et environnemental, et des mesures à prendre au niveau réglementaire, institutionnel, juridique et technique pour réduire les dégâts.
1- Cadre institutionnel, réglementaire et juridique
Plusieurs institutions et ministères sont, d’une manière ou d’une autre, concernés par la gestion des risques notamment les inondations. Il s’agit, entre autres, du Ministère de l’Intérieur, du Ministère de l’Energie, des Mines, de l’Eau et de l’Environnement, du Ministère délégué chargé de l’Eau et de l’Environnement, du Ministère des Affaires Générales et de la Gouvernance, du Ministère de l’Equipement, du Transport et de la Logistique, du Ministère de la Santé, du centre de veille des crises (Ministère de l’Intérieur), du Centre Royal de la Télédétection Spatiale, de la Direction de la Météorologie Nationale et des institutions de recherche. On ce qui est du cadre juridique, parmi les principaux textes de loi relatifs à la protection contre les inondations, il y a entre autres: La loi n° 10-95 sur l’eau (www.environnement.gov.ma), d’où les chapitres suivants:
*Chapitre III, article 12 relative à la conservation et protection du domaine public hydraulique
*Chapitre IV, section III relative à la planification de l’aménagement des bassins hydrauliques pour prévenir les risques des inondations.
*Chapitre XI, section 2, (article 94, 95, 96, 97) relative à la lutte contre les inondations.
On retient également la lettre (ABHL.2013) du Ministère chargé de l’Habitat et de l’Urbanisme, Nº 824/02173, du 20 février 2003, adressée aux directeurs des agences urbaines, dont l’objet est notamment de créer un Plan de Protection Régional contre les Inondations avec les Agences des Bassins Hydrauliques Régionales, d’intégrer dans les nouveaux Marchés et Termes de Référence relatifs à l’établissement des documents d’urbanisme la carte
du risque d’inondation, et de prévoir des règles rigoureuses comme additifs aux demandes d’autorisation de lotir et de construire.
Selon un rapport de la Cour des Comptes en 2016 sur l’analyse du cadre juridique et institutionnel et sur l’évaluation du cycle de gestion des risques (notamment les inondations), il y a lieu de mentionner ce qui suit :
les textes juridiques relatifs à la gestion des risques ne s’intègrent pas dans un cadre qui prenne en compte la prévention et la lutte contre les catastrophes. «Ce domaine est plutôt régi par des circulaires ministérielles».
la prise en compte des risques naturels dans les politiques publiques est insuffisante, ainsi que le retard dans la mise en place de la stratégie intégrée de gestion des risques et l’exploitation limitée du système d’information géographique.
- L’absence d’un cadre global de la coordination, la multiplicité des plans sectoriels et des acteurs, le retard dans l’adoption d’un système assurantiel des catastrophes naturelles et l’insuffisance des programmes de sensibilisation des citoyens aux
- l’évaluation des actions entreprises dans le cadre du Plan national de lutte contre les inondations a révélé que les points noirs n’ont été que partiellement traités et que les moyens financiers alloués sont restés en deçà des budgets prévus (28% du budget prévisionnel).
Finalement, la Cour des Comptes a émis un ensemble de recommandations, qui mettent l’accent principalement sur :
-L’obligation de l’amendement et la mise en œuvre des textes législatifs en relation avec la protection contre les inondations (loi sur l’eau, et éventuellement les lois relatives à l’urbanisme (les lois 12-90 et 25-90 relatives respectivement à l’urbanisme et aux lotissements). Autrement dit, la prise en compte des exigences de la protection contre les inondations dans tous les documents de planification sectorielle, les plans d’aménagement du territoire, les plans d’urbanisme (schémas directeurs d’aménagements urbains (SDAU), plan de zonage, plans d’aménagements, permis de lotir…), et lors de l’implantation des projets industriels, touristiques et d’infrastructure (l’obligation de la réalisation par les promoteurs publics ou privé des études détaillées de prévention des risques d’inondation).
–L’obligation d’établir des cartes des zones inondables à une échelle raisonnable par les agences des bassins hydrauliques, Ces cartes ne devront cependant pas dispenser les promoteurs de leur responsabilité en matière de protection de leurs projets.
– L’obligation de la mise en œuvre des mécanismes d’assurance et d’indemnisation sur les pertes subies et de compensation sur les immobilisations abandonnés dans le cadre de la révision d’occupation du sol imposée par l’administration.
Par ailleurs, la Cour des Comptes relève que la gestion des risques reste en général sectorielle et se focalise surtout sur la gestion des crises, après la catastrophe, au lieu d’adopter une stratégie de prévention et de résilience.
2-Perception de la gestion du risque d’inondation par les parties prenantes
Nous avons suivi la méthodologie de l’entretien et l’enquête de terrain pour évaluer la perception des parties prenantes. Plusieurs entretiens sont menés auprès de 23 parties prenantes en relation avec la question de la gestion du risque d’inondation au niveau des deux villes : Tétouan et Martil.
2.1- Catégories des parties prenantes
Ces parties prenantes concernent les différentes institutions intéressées par les risques et la gestion des inondations. On a opté pour le choix de quatre catégories :
*Autorités locales et administrations :Elles sont représentés par la Wilaya de Tétouan et préfecture M’diq-Fnideq (à laquelle appartient la ville de Martil ), les deux communes urbaines de Tétouan et Martil, la protection civile, la direction provinciale des eaux et forêts, l’Agence urbaine, l’Agence du Bassin Hydraulique du Loukkos, la Direction provinciale de l’Equipement, des Transports, de la Logistique et de l’Eau, la Direction régionale de l’Aménagement du Territoire National, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de la Ville.
*Société civile (comme représentant de la population) : association des habitants du quartier Coelma-Tétouan, association des enseignants de sciences de la vie et de la terre, association « Ensemble pour sauver Oued Martil » au niveau de la ville de Martil, (on a choisi les trois acteurs associatifs les plus connus et intéressés par les questions de l’Oued Martil, de l’inondation, et de l’environnement en général).
*Secteur privé : Il s’agit ici des sociétés : Amendis (société chargé auprès des deux communes de Tétouan et Martil de la gestion déléguée de l’eau, de l’électricité et de l’assainissement liquide), Mecomar –Geopro (société délégataire de la gestion des déchets solide), Agence Alaomran (entreprise publique pour la mise en œuvre de la politique de l’État en matière d’habitat), Groupe Aafir immobilier, Groupe immobilier Rbahi, Banque populaire, Assurance Atlanta.
*Université : Faculté des Sciences (Département de Géologie et Biologie), Faculté des Lettres et Sciences Humaines (Département de Géographie).
2.2- Mesures et approches de la gestion du risque d’inondation
Les principales questions posées lors des entretiens s’articulent autour des méthodes effectives pour la gestion du risque d’inondation, et les propositions des parties prenantes (en tant que secteurs concernés) pour une gestion plus efficace qui peut assurer la durabilité, la rentabilité, la rationalisation des dépenses et la préservation des ressources, des biens et des personnes. D’après les réponses, on a classé les mesures de la gestion du risque d’inondation selon les normes suivantes :
– Mesures techniques : elles sont réalisées surtout par l’ABHL, Amendis, quelques autorités locales et quelques administrations concernées. Ces principales mesures sont :
- l’amélioration de la prévision et de l’annonce des inondations par la modernisation, l’automatisation et l’extension du système d’annonce de crues au niveau du bassin de l’Oued Martil afin de couvrir tous les
- L’atténuation ou la réduction de l’aléa naturel par la mise en œuvre des mesures structurelles qui concourent à la protection. Il s’agit surtout des réalisations suivantes:
- Des digues au niveau de la voie de contournement entre le rond-point Rommana et la Gare routière sur environ 2 km, la gare routière Torreta sur environ 700 m (Photos n°6 et 7), le quartier Couelma sur 4 km, la zone entre le bras mort et l’embouchure de l’oued, sur une longueur de 3.5
Photo n°7 : Aménagement des bords de l’oued Martil par les digues on adoptant l’approche technique (au niveau de la voie de contournement entre le rond-point Rommana et la Gare) (2019-10-29)
Source : prise de vue personnelle le 2019-10-29
Photo n°7 : Aménagement des bords de l’oued Martil par les digues on adoptant l’approche technique (au niveau de la voie de contournement entre le rond-point Rommana et la Gare) |
Photo n°6 : Aménagement des bords de l’oued Martil et réhabilitation de la plaine pour un pôle urbain au niveau de l’entrée de la ville de Tétouan (2019-10-29) |
-Des murs de protection au niveau du quartier Touibla sur 2.5 km
-Redimensionnement de certains ouvrages de franchissement, notamment le pont de la route secondaire RS 608 situé au niveau du quartier Couelma. Ces ouvrages permettront d’assurer un niveau de protection centennal.
-Canalisation des oueds Samsa, Bousafou et Chejra
-Curage périodique de l’Oued Martil.
D’autre part, la réalisation du barrage Charif El-Idrissi ( qui a été nommé Barrage Oued Martil avant la fin de sa réalisation ) dont la retenue est estimée à 120 millions de m³ et un volume annuel régularisé de 70 millions de m³, pour l´alimentation en eau potable de la ville de Tétouan avec sa région côtière au-delà de l’horizon 2030, et la garantie de la disponibilité de l’eau pour l’irrigation des périmètres agricoles d’une superficie dominée de 1.000 hectares, tout en protégeant la ville de Tétouan et la vallée de Martil des inondations.
-Mesures organisationnelles, juridiques et institutionnelles : Toutes les parties prenantes ont déclaré que ces procédures restent soumises aux décideurs, aux administrations centrales et à la politique publique en la matière. Elles ont également approuvé les mêmes résultats indiqués dans le rapport de la Cour des Comptes (2016) (qui a été déjà examiné) sur l’analyse du cadre juridique et institutionnel et sur l’évaluation du cycle de gestion des risques (notamment les inondations). De plus, il est à noter la prise en compte de la question du retard de l’activation de la régionalisation avancée et la décentralisation administrative de la part de la plupart de ces parties prenantes (notamment les responsables). Autrement dit, le transfert des compétences, des attributions, et de budget va doter l’administration locale de véritables pouvoirs de décision, cela permettra la gestion du risque d’inondation selon les mesures convenables aux spécificités de l’Oued Martil et les deux villes Tétouan et Martil au lieu d’appliquer les programmes centraux que ce soient convenables ou non, D’ailleurs le renforcement de la régionalisation avancée et les nouvelles responsabilités des conseils régionaux en matière d’aménagement du territoire constituent une autre voie à privilégier pour renforcer la résilience au niveau local, sans oublier les mécanismes de contrôle et de sanction qui sont également comme un enjeu clé pour les questions d’urbanisme au sens large pour tous les autres risques. Ces parties prenantes ont met l’accent aussi sur la question de l’amélioration de la gouvernance des risques en général pour renforcer les liens avec les politiques locales de développement durable, d’aménagement du territoire et d’urbanisme, de gestion de l’eau et de lutte contre le changement climatique, mettre en place une dynamique d’action multi-acteurs et partenariale, et assurer la cohérence des actions de prévention à l’échelle du territoire.
-Mesures écologiques, sociales et économiques : Seuls quelques enseignants et étudiants chercheurs de l’université et quelques enseignants de l’association des sciences de la vie et de la terre ont abordé l’approche écologique, sociale et économique à travers la recherche scientifique qui insiste sur la solution écologique qui peut garantir la durabilité, la pérennité, les opportunités et la rentabilité pour les prochaines générations, en préservant les ressources naturelles, en économisant les dépenses, les budgets et les dommages des risques naturelles, et en assurant la réconciliation sociale. Cette approche se repose sur les piliers suivants :
-Le reboisement par les espèces authentiques pour lutter contre l’érosion, l’envasement des barrages, le risque climatique et contribuer naturellement à l’aménagement du bassin versant.
-L’activation du rôle régulateur de la plaine de Martil par la restauration des activités agricoles pour contribuer au règlement des deux coefficients de la perméabilité et
d’écoulement qui ont un rôle très important on ce qui concerne la question d’inondation. Cette mesure va résoudre aussi le problème de chômage (les métiers verts) et de l’exode rurale, ainsi que les risques sociaux suite à la transaction des terres des agriculteurs pour la spéculation foncière.
-La prise en compte du rôle important des crues en intégrant davantage la composante
« dynamique » d’un cours d’eau. Les crues sont des phénomènes naturels faisant parties intégrantes du régime naturel des cours d’eau, Elles constituent le véritable moteur de la dynamique fluviale et sont indispensables à la « Vie » d’un fleuve. Elles ont un rôle régulateur : lors d’une crue, les eaux « s’étalent » dans la plaine alluviale, ralentissant ainsi le débit des cours d’eau, et peuvent par la suite contribuer à la recharge des nappes alluviales en s’infiltrant. Elles ont également un rôle épurateur et sont très importantes pour le fonctionnement et la reproduction des écosystèmes aquatiques. Les apports de nutriments (matières organiques et minérales) générés par les crues, de l’amont vers l’aval (jusqu’aux zones marines) et également dans les plaines inondables (lit majeur du cours d’eau), conditionnent la survie de nombreuses espèces aquatiques et marines ainsi que certaines activités humaines comme la pêche et l’agriculture (fertilisation des sols).
-La Revitalisation du port ferroviaire historique de Martil sur l’embouchure originale et naturelle de L’Oued Martil, il est à signaler que les autorités ont dévié le cours en 1963 pour régler le problème des crues récurrentes de l’Oued Martil à cause de la faiblesse des moyens pour un dragage permanent de l’estuaire. Deux digues ont ainsi été construites pour couper la tête de l’Oued Martil. Une erreur monumentale! L’Oued ayant pris des centaines de milliers d’années pour trouver son chemin optimal, ces quelques mètres de béton ou de roches n’ont pas été en mesure de l’empêcher de revenir systématiquement à son lit. La région de Martil devient alors un grand marécage, l’eau s’infiltrant systématiquement en dessous du canal qui a été tracé. En plus du fait que cela empêche toute navigation à cause de la faible profondeur du canal, cette décision a permis l’installation d’habitat insalubre sur l’ancienne embouchure de l’Oued: le fameux quartier Diza de Martil (très fortement densifié). Le problème des inondations de Martil ne sera jamais réglé donc, et les défis écologiques et sociaux du projet soutenu par l’Union pour la Méditerranée via son programme «Urban Projects Finance Initiative» qui se vend comme étant durable et intégré, seront durs à relever.
Concernant les méthodes les plus efficaces : l’approche écologique, sociale et économique est la méthode la plus efficace pour la gestion du risque d’inondation, cependant lors de l’entretien avec les parties prenantes, aucun d’eux sauf quelques chercheurs,
enseignants et associations (comme j’ai déjà noté) n’a recommandé cette approche au contraire ils ont recommandé l’approche financière qui se base sur :
-La mise en œuvre des mécanismes d’assurance et d’indemnisation en cas de catastrophe comme il est déjà expliqué et recommandé par la Cour des Comptes.
-Le développement des mécanismes du financement à travers les demandes de la coopération et les subventions internationales.
3-Plans nationaux et locaux de la gestion de risque d’inondation
3.1- la stratégie nationale de l’eau, et les deux Plans nationaux de l’eau et de la protection contre les inondations, ont mis en place plusieurs actions d’ordre technique, organisationnel et financier, outre la réalisation des travaux palliatifs de protection des sites exposés aux inondations pour un investissement de 25 milliards de dirhams (www.emwis.org), ainsi que d’autres actions non-structurelles (www.ondh.ma), à savoir :
*Le développement de la capitalisation du savoir-faire des compétences nationales dans le domaine de l’ingénierie de la protection contre les inondations, et de la prévision météorologique couplée à la modélisation hydrologique.
*Le développement de l’annonce et de la prévision des crues et des plans de secours, à travers la généralisation de la télémesure hydrologique et la mise en œuvre de modèles de prévision des écoulements.
*L’équipement de petits barrages en moyens de mesure des niveaux d’eau, de l’évaporation, de la pluviométrie et en moyens modernes de transmission des données et l’externalisation de la réparation du matériel de mesure et de jaugeage éventuellement.
L’actualisation du Plan National de Protection contre les Inondations s’avère nécessaire, d’une part parce que durant la dernière décennie, des dégâts énormes ont été enregistrés à cause des fortes crues exceptionnelles qu’a connu plusieurs régions du Royaume, d’autres part, la mise en œuvre de la stratégie nationale de l’eau qui a considéré l’adaptation aux changements climatiques et la réduction des risques liés aux inondations, l’un des principaux axes d’orientation de la nouvelle Stratégie de l’Eau au Maroc.
3.2- Plan national d’aménagement des bassins versants et lutte contre l’érosion
Pour la préservation des bassins versants, le Haut-Commissariat aux Eaux et forêts a lancé, en 1996 et pour une durée de 20 ans (www.eauxetforets.gov.ma), le Plan National d’Aménagement des Bassins Versants doté d’un budget annuel de 150 millions de DH en vue de conserver les sols à l’amont et réduire les rythmes d’envasement à l’aval, ainsi que le risque d’inondation. Cependant, les recommandations techniques des projets de ce plan sont pauvres
en matière de techniques de plantation, de choix des essences et d’insertion vis-à-vis des pratiques de la population. L’étude des réalisations révèle une confusion entre plantations de production et de protection, à des rares et récentes exceptions. De ce fait, dans le domaine spécifique de la protection, les recommandations n’ont pas eu de suite. Ainsi, les plantations en bandes sur matorral dans la région du Loukkos n’ont jamais été réalisées.
3.3- projet d’aménagement intégré de la plaine de Martil
C’est l’un des principaux axes des deux plans de développement urbain du grand Tétouan et Martil (CUT, Amendis,.2013), parmi ses principaux axes : la protection contre les inondations, la dépollution de lit de l’Oued, la revalorisation de l’assiette foncière de la plaine. D’après la visite sur terrain, la première tranche (à partir de l’entrée de Tétouan jusqu’à la gare routière), est réalisée directement sur les bords de l’Oued avec des terrains sportifs de proximité, projets de construction de l’école de l’architecture….sachant que ces zones doivent demeurer comme zone d’épandage des crues et ne doivent pas accueillir des projets.
3.4- Plan national d’assainissement liquide
La première phase de ce plan lancé depuis 2011, Le Maroc compte actuellement 147 stations d’épuration y compris 8 émissaires en mer alors qu’avant le lancement du Plan national d’assainissement on n’en disposait que de 21. La ville de Tétouan est actuellement lancée dans de grands chantiers (Amendis .2013) en matière d’assainissement avec un système unitaire qui reçoit dans les mêmes canalisations les eaux usées et les eaux pluviales dans l’espoir d’améliorer ce dernier par un système séparatif. La construction d’un grand collecteur au niveau des villes de Tétouan, Mdiq et Martil et de la station de surpression (qui permet de renvoyer les eaux usées en haute mer via un émissaire marin) va atténuer le risque d’inondation, on empêchant le colmatage des canaux et de l’embouchure de l’Oued. En revanche, Amendis procède à la construction d’une traversée en galerie en bas du bassin Boujarrah (considéré comme point noir à cause des inondations fréquentes) au niveau de l’avenue des FAR afin de drainer les eaux pluviales de façon optimale.
3.5- Le plan d’organisation des secours ou “Plan ORSEC”
Le plan ORSEC constitue le plan générique de la réponse d’urgence au Maroc au niveau des territoires (Ministère de l’intérieur.2017), (OCDE. 2018), c’est un document établi à l’échelon de chaque préfecture et province, il est aussi l’équivalent du plan communal de gestion des crises au niveau des communes. Concernant les lacunes de ce plan, ils se révèlent surtout au niveau de l’application : ex : La coordination de l’action des multiples acteurs demande un pilotage clair et reconnu et une chaine de commandement et de responsabilité
bien établie, il est à signaler aussi l’importance de la communication de crise en direction des citoyens afin de favoriser les bons comportements et renforcer la confiance dans les institutions publiques.
Conclusion
La gestion du risque d’inondation s’est longtemps tournée exclusivement vers la question de l’aléa, que ce soit des ouvrages de génie civil (digue, barrage) ou des mesures plus douces comme les champs d’expansion des crues, la protection a primé sur la prévention, mais les limites des mesures structurelles et le coût croissant des dommages ont amené des réflexions de gestion plus globalisée et concertée. A cet égard, les politiques publiques tentent d’introduire des mesures de prévention qui passent par la régulation des enjeux et la réduction des vulnérabilités. Cependant, l’entretien mené avec les parties prenantes au niveau local révèle que la priorité s’accorde à l’approche financière qui se base sur la mise en œuvre des mécanismes d’assurance et d’indemnisation en cas de catastrophe sans mettre l’accent sur l’importance et l’efficacité de l’approche écologique, sociale et économique qui garantit le développement durable.
Conclusion générale
Le Bassin Versant de l’Oued Martil représente un territoire d’étude privilégié. Il est en effet exposé aux inondations fréquentes qui ont déjà dévasté le territoire (plus précisément au niveau des villes de Tétouan et Martil) et furent révélatrices des failles de la gestion du risque dont la nature des aménagements et le contexte territorial complexe. Les gestionnaires peinent à atteindre une gestion performante, les projets se succèdent sans jamais totalement aboutir, l’analyse montre des lacunes au niveau de la prise en compte des risques naturels dans les plans d’aménagement, au niveau de la cartographie des zones à haut risque et au niveau de la définition d’une stratégie globale de prévention contre les risques des inondations. Ces lacunes confirment l’importance et l’efficience de la solution écologique qui peut garantir le développement durable. Autrement dit, cet espace va être réexposé certainement au risque d’inondation, mais cette fois- ci, les dommages seront bien plus graves, compte tenu des énormes budgets qui seront alloués au projet d’aménagement de la basse vallée de l’Oued Martil en particulier et au projet de la réhabilitation de la plaine comme cadre d’un pôle urbain en perpétuelle extension. Ces projets n’ont pas pris en compte la question de la réorientation de l’Oued vers son embouchure naturelle, ainsi que les impacts escomptés de l’envasement du nouveau barrage « Charif El-Idrissi ». Ce sont donc, des contraintes qui vont accentuer de plus en plus, à notre sens, la vulnérabilité de ce bassin versant, affectant même, partiellement les espaces des agglomérations en aval.
Selon la stratégie de Kobe 2005-2015 : « Chaque État a la responsabilité de prendre des mesures efficaces pour réduire les risques et protéger ses populations, ses infrastructures et son patrimoine national des conséquences des catastrophes » (www.eird.org), la gestion des risques naturels (notamment les inondations) est une composante très importante du développement durable, elle dépasse le cadre de compétence d’une commune et des autorités locales compétentes, elle rentre plutôt dans la politique de l’état en matière de la gestion des ressources en eau et d’aménagement des bassins versants.
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« Dynamique économique régionale : Région Tanger-Tétouan-Al-Hociema”