Research studies

Le Droit international humanitaire et la protection des enfants contre le recrutement et la participation dans les conflits armés

 

Prepared by the researcher :   Pr Nouriddin EL IDRISSI/ Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales Souissi/ Université Mohammed V, Rabat.

Democratic Arab Center

Journal of extremism and armed groups : Tenth Issue – February 2023

A Periodical International Journal published by the “Democratic Arab Center” Germany – Berlin.

Nationales ISSN-Zentrum für Deutschland
ISSN 2628-8389
Journal of extremism and armed groups

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Abstract

Since the end of the First World War, the phenomenon of the recruitment of children has attracted the attention of the international community, owing to this disastrous effects of this phenomenon on children. Since then, initiatives to protect this group have emerged; The process of enacting international instruments began in this direction.

International humanitarian law (IHL) is an important part of this international legal arsenal. Several provisions of the Fourth Geneva Convention and the two Additional Protocols of 1977 have been devoted to this phenomenon.

To study this topic, we will try to answer the following problem : What protection does IHL provide for children against their recruitment and involvement in armed conflict ?

In order to address this problem, we will use, essentially, a content analysis approach to legal texts on the protection of children against recruitment that belong to IHL.

Introduction

Le recrutement des enfants dans les conflits armés, aubaine au profit des forces armées, groupes armés et groupes terroristes ; c’est un phénomène enraciné dans l’histoire et qui consiste à incorporer l’enfant dans les différentes hostilités, sans aucune considération de la vulnérabilité de cette catégorie des personnes. Ce recrutement[1] est presque l’apanage commun des diverses civilisations au fil de l’histoire. Avant la 2e guerre mondiale, la belligérance se déroulait entre les États, tandis qu’après cette guerre l’on a constaté l’extension des guerres civiles. Ce genre de guerre qui fait souvent recours à l’implication des enfants comme des « soldats » ou aussi pour leur exploitation à quelque titre que ce soit. Dans ce cadre, Olara Otunnu, l’ancien représentant spécial des Nations Unies (NU) pour les enfants et les conflits armés, souligne :

 La Première Guerre mondiale était une guerre de soldat à soldat, avec peu de victimes civiles, 5 % tout au plus. La Seconde Guerre mondiale a été terrible, surtout vers la fin, à l’époque des grands bombardements : 45 % des victimes étaient des civils, blessés, tués, déplacés. Aujourd’hui, ce sont des “guerres à l’envers”, soldats contre civils, des guerres modernes qui touchent et emportent femmes et enfants. (Larralde , 2006, paragr.5)

En outre, dans son rapport traitant la période allant d’août 2020 à juillet 2021, la même responsable onusienne, parle de 8 521 enfants qui ont été recrutés et utilisés par des parties belligérantes à des conflits ; que ce soit par les acteurs étatiques ou non étatiques. Le même rapport se réjouit de la libération, sur une période de 26 ans, de 160 000 enfants qui ont été impliqués dans les conflits armés.

Il est à préciser que les conflits internationaux et non internationaux qui ont touché le monde arabe suite aux soulèvements du « Printemps arabe », ont contribué à la recrudescence de ce phénomène de recrutement des enfants dans les conflits armés. C’est le cas par exemple de la Libye, la Syrie.

          De cette réalité amère pleine de violations des droits de l’enfants, découle l’importance de notre analyse de ce phénomène sur le plan juridique. Nous cherchons par cette étude à explorer les failles et les faiblesses des stipulations contenues dans les instruments du DIH ; dans le but de proposer des avenues pouvant les surmonter.

          Devant cette situation de violation de la dignité, de la vie saine et normale, ainsi que de l’atteinte à une croissance normale de l’enfant, et même une atteinte à la vie de cet être humain innocent en l’exposant aux effets désastreux des conflits armés ; la société internationale a entamé, après la fin de la 1re guerre mondiale, un trajet d’adoption de plusieurs déclarations et des textes juridiques internationaux visant la protection des enfants contre leur implication dans les conflits armés. Ces instruments juridiques, sont de différentes sortes et se rattachent aux plusieurs filiales de Droit international. D’ailleurs, on trouve, principalement, des instruments juridiques internationaux rentrant dans le cadre de Droit International des Droits de l’Homme (DIDH), et ceux faisant partie de du Droit International Humanitaire (DIH).

          Cette contradiction entre, d’une part l’abondance des dispositions qui ciblent la protection des enfants contre le recrutement et la participation aux hostilités, et d’autre part, un concret qui est plein de souffrances des enfants impliqués dans les guerres, et abusivement dits « enfants-soldats » ; nous incite à traiter dans cet article, et à partir du DIH, les garanties susceptibles de protéger l’enfant contre le phénomène de recrutement et de la participation dans les conflits armés. Pour ce faire, on s’attachera à répondre à la problématique suivante : Quelle protection assure-t-il le DIH contre le recrutement des enfants dans les conflits armés ?

Pour répondre à notre problématique, on sera amené à utiliser la méthode d’analyse du contenu des instruments juridiques en question. Ainsi, la réponse à cette problématique centrale, pourrait se réaliser par la réponse, tout d’abord, à d’autres questions subsidiaires ; telles :

  • La 4e convention de Genève, apporte-t-elle des mesures protectrices en faveur de l’enfant contre le recrutement ?
  • Quelles contributions des deux protocoles additionnels de 1977 en faveur de l’enfant contre le recrutement ?

Pour réagir à ces questions, on optera pour un plan qui s’attaquera dans la 1re partie au traitement conceptuel et historique du phénomène de recrutement et de participation des enfants dans les conflits armés. Alors que la 2e partie, s’occupera de l’étude de la protection assurée par le DIH aux enfants contre le même phénomène.

  1. Survol conceptuel et historique relatif au phénomène du recrutement des enfants dans les conflits armés

          Pour faciliter la compréhension du phénomène de recrutement et de l’utilisation des enfants dans les conflits armés, et aussi de saisir ses contours, il est édifiant tout d’abord de définir et de clarifier, dans la 1re sous-partie, quelques concepts afférents à ce phénomène, et qui suscitent toujours beaucoup de nuances. Puis, pour montrer les racines anciennes de ce fléau, dans la 2e sous-partie, on s’attèlera à parcourir rapidement quelques phases de la civilisation humaine touchées par ledit phénomène.

  1. Les précisions conceptuelles autour du sujet

Dans cet article, on aura recours à l’approche d’analyse de contenu des instruments juridiques en liaison avec notre sujet, cette donne nous incite à décortiquer quelques notions contenues dans ces instruments pour pouvoir comprendre le contenu manifeste de quelques dispositions, et aussi rendre explicite le contenu latent des autres. Avant d’entamer le traitement de notre sujet, il est utile de clarifier quelques notions. A savoir :

  • La portée du terme « enfant » en DIH :

          La définition de « l’enfant » ne fait point unanimité entre les différentes législations des États. Ce terme, est défini différemment en fonction des diverses sciences. Par exemple ; « l’enfant » d’un point de vue psychologique, n’est pas le même pour les juristes.

Même au niveau juridique, la définition de « l’enfant » est tributaire de la nature des instruments juridiques définissants. Dans notre cas, on se limitera de préciser la signification de « l’enfant » dans le DIH, le cadre juridique de notre étude.

Même au niveau des instruments juridiques composant le DIH, force est de constater que le mot                     « enfant » y fait objet de disparate et de discordance.

D’ailleurs, la IVe convention de Genève, ne définit pas exactement « l’enfant », n’utilise pas un même seuil d’âge pour déterminer les protections à assurer pour cette catégorie de personnes. D’autant plus, elle fait recours parfois à des termes semblables à celui de l’enfant, tels que mineur, et adolescent. Plusieurs stipulations illustrent cette réticence au niveau de la précision de l’âge de l’enfant, objet de protection par cette convention. Ainsi, dans l’article 14, on lit :

Dès le temps de paix, les Hautes Parties contractantes et, après l’ouverture des hostilités, les Parties au conflit, pourront créer sur leur propre territoire et, s’il en est besoin, sur les territoires occupés, des zones et localités sanitaires et de sécurité organisée de manière à mettre à l’abri des effets de la guerre les blessés et les malades, les infirmes, les personnes âgées, les enfants de moins de quinze ans….

Tandis que, l’article 17 de la même convention a resté muet à propos de l’âge de l’enfant. Il stipule : « Les Parties au conflit s’efforceront de conclure des arrangements locaux pour l’évacuation d’une zone assiégée ou encerclée, des blessés, des malades, des infirmes, des vieillards, des enfants, … ». Bien plus, pour traiter la question de l’identification des enfants lors des conflits armés, le paragraphe 3, article 24 de la 4e convention, indique : « En outre, elles s’efforceront de prendre les mesures nécessaires pour que tous les enfants de moins de douze ans puissent être identifiés, par le port d’une plaque d’identité ou par tout autre moyen ».

De ces dispositions, ressort que le DIH, ne définit pas l’enfant, mais il fixe des limites d’âge dépendantes des situations de protection ciblées par chaque disposition.

L’ambiguïté dans la détermination exacte de l’âge de l’enfance, pourra être observée aussi dans les deux protocoles additionnels aux conventions de Genève. En effet, pour traiter le sujet du recrutement et de la participation des enfants aux conflits armés, le 2e paragraphe de l’article 77 de 1er protocole relatif aux conflits armés internationaux (CAI) (1977), stipule :

Les Parties au conflit prendront toutes les mesures possibles dans la pratique pour que les enfants de moins de quinze ans ne participent pas directement aux hostilités, notamment en s’abstenant de les recruter dans leurs forces armées. Lorsqu’elles incorporent des personnes de plus de quinze ans mais de moins de dix-huit ans, les Parties au conflit s’efforceront de donner la priorité aux plus âgées.

Quant au 2e protocole additionnel relatif aux conflits armés non internationaux (CANI) (1977), en vertu de son alinéa (c) de 4e article, indique : « Les enfants de moins de quinze ans ne devront pas être recrutés dans les forces ou groupes armés, ni autorisés à prendre part aux hostilités ».

A l’instar de la IVe convention de Genève, les deux protocoles additionnels n’ont pas apporté une définition de l’enfant, mais ils se sont limités de fluctuer les seuils d’âge de l’enfant selon chaque situation traitée.

          En substance, le DIH n’a pas pu donner une définition exacte de l’enfant, non plus préciser l’âge légal qui lui est associé. Toutefois, les instruments de ce Droit, se sont contentés, sur la base des mesures de protection en faveur de l’enfant, d’offrir à la phase de l’enfance un âge oscillant entre quinze ans et dix-huit ans.

  • L’enfant-soldat :

          Ce concept n’est défini dans un aucun des instruments juridiques du DIH, le seul point qui y est précisée par rapport à ces enfants-soldats, c’est l’interdiction de recrutement des enfants de moins de 15 ans dans les conflits armés, ainsi que leur participation aux hostilités.  Par contre, des organisations internationales ont déployés des efforts louables pour donner une définition de « l’enfant-soldat ».

C’est ainsi que suite à un congrès scientifique organisé par le Fond des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF) en avril 1997 au Cap, en Afrique du Sud, et dans le cadre des « principes du Cap », adoptés au sein de cet évènement, une définition a eu lieu pour expliquer la portée de « l’enfant-soldat ». Ce vocabulaire, veut dire donc :

Toute personne âgée de moins de 18 ans enrôlée dans une force armée ou un groupe armé régulier ou irrégulier, quelle que soit la fonction qu’elle exerce, notamment mais pas exclusivement celle de cuisiner, porteur, messager et toute personne accompagnant de tels groupes qui n’est pas un membre de leur famille. Cette définition englobe les filles recrutées à des fins sexuelles et pour des mariages forcés. Elle ne concerne donc pas uniquement les enfants qui sont armés ou qui ont porté des armes. (UNICEF , 1997, p.10)

Selon cette définition, on peut dire que « l’enfant-soldat » ne signifie pas, exclusivement, l’enfant qui porte les armes. Cependant, est considéré comme enfant-soldat, toute personne âgée de moins de dix-huit ans, fille ou garçon, affilié à une force armée ou à un groupe armé, et quel que soit la nature de la tâche ou de service accompli par cet enfant. Exemples : combattants, cuisiniers, porteurs, messagers et espions, ou utilisé à des fins sexuelles.

Pour assurer une large protection aux enfants impliqués dans les conflits armés, et de ne pas se contenter, seulement, de protéger l’enfant en tant que soldat et participant directement aux hostilités, l’UNICEF encourage de plus en plus l’utilisation de l’expression « Enfant Associé à une Force ou Groupe Armé » (EAFGA). Cette expression, semble plus cohérente avec la définition contenue dans les principes du cap. De plus, la même instance onusienne reproche à l’expression « enfant-soldat », l’éloignement du champ de protection de tout mineur ne participant pas directement aux hostilités (CAMELLO , 2020, pp. 1-2).

  • Le recrutement :

          C’est la façon par laquelle des personnes sont devenues des membres de forces armées ou de groupes armés. Le recrutement pourra prendre plusieurs formes :

  • Le recrutement volontaire : Dans ce cas la personne, ou l’enfant s’enrôle de son propre gré, sans aucune menace ou coercition. Or, ce genre de recrutement est largement controversé à cause de l’absence d’une condition sine qua non de la validité du consentement, qui est le manque, chez l’enfant, de capacité de discernement ;
  • La conscription : se réalise via deux pratiques ; la première dite le recrutement obligatoire, alors que la deuxième est nommée le recrutement forcé. Pour la 1er pratique, trouve sa base dans des obligations légales de service militaire. S’agissant de la 2e option de conscription, dans ce cas le recrutement se fait par la coercition et sans le consentement de la personne concernée. Exemple : par enlèvement (ANAHITA , 2015, pp. 23-24) ;
  • Le recrutement illégal (Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, 2015, p.2) : concerne l’incorporation aux forces armées des enfants ayant un âge inférieur à celui prescrit dans les traités internationaux.
  1. L’historique du phénomène des enfants-soldats

          Le recrutement des enfants dans les conflits armés ne date pas de nos jours. C’est un phénomène qui remonte dans l’histoire le plus ancien. Pour en savoir quelques caractéristiques, on se limitera, ci-après, de survoler quelques phases historiques saillantes en rapport avec ce fléau.

          Pour la civilisation grecque, construire un enfant combattant est d’abord une mission des structures éducatives censées former les enfants pour les utiliser ultérieurement, même au cours de leur enfance, comme des combattants ; c’est une éducation obligatoire. A défaut de cette éducation, le jeune spartiate ne peut pas accéder à la pleine souveraineté, au cap d’élite, et au grade de la magistrature. En effet, Plutarque[2] disait : « Celui des citoyens qui ne supporte pas agogé[3] n’avait pas part aux droits civiques. » (LEVY, 1997, p.155). Aussi Xénophon[4], dans son ouvrage intitulé « La République des Lacédémoniens », daté de 387 av. J.-C, notait : « Les adolescents spartiates qui se soustraient à la rude éducation spartiate n’ont pas part aux honneurs. » (DIKPO, 2008, p.26)

L’agogé comme processus éducatif spartiate, débute à l’âge de sept ans et ne se termine qu’à l’âge de 30 ans. Cette éducation vise, à travers une formation obligatoire, collective, étatique et centrée sur les impératifs militaires, à préparer des jeunes Spartiates à devenir citoyens et hoplites[5].

Il sied de noter que tout le système éducatif spartiate est encadré par des vertus guerriers. C’est l’idée corroborée par Aristote[6] quand il a indiqué dans son ouvrage « La Politique », que l’éducation spartiate était « ordonnée en vue de la guerre ».

          Le moyen âge, fut aussi un temps d’exploitation des enfants et de leur recrutement dans les conflits armés. Dans cette ère, il est judicieux de rappeler un exemple parlant en la matière ; il s’agissait de la fameuse « croisade des enfants » en 1212. A cette campagne des enfants, à peine âgés de six ans, sont impliqués en répondant à l’appel de « pape » pour défendre la Ville Sainte tombée aux mains des musulmans. Ces innocents, ont péri avant d’arriver à Jérusalem. Ceci, a causé des véritables hécatombes et boucheries « héroïques », dans lesquels presque 30.000 enfants sont morts (،ص. 2782019مقصود خليل،).

          Quant à la France, son histoire est pleine d’illustrations qui marquent les souffrances des enfants à cause de leur incorporation dans les armées. L’exemple le plus significatif dans ce sens, c’est le cas de Napoléon Bonaparte[7], qui a écrit dans ses mémoires : « J’ai été officier à l’âge de 16 ans, 15 jours. » (DIPKO, 2008, p.30). Aussi, il est opportun de citer le décret autorisant la mobilisation de 300. 000 enfants « imberbes » au service de la Grande Armée. Le décret fut signé, en l’absence de Napoléon Bonaparte, par son épouse, alors qu’elle était présidente du Conseil de Régence.

La prédilection des enfants comme combattants au sein des forces armées françaises en cette période de Bonaparte, est étayée par le Maréchal Michel Ney dans son message à l’empereur de France. Il a y écrit :

Sire, donnez-moi beaucoup de ces petits jeunes gens-là…je les emmènerai où je voudrai. Les veilles moustaches en savent autant que vous ; ils réfléchissent, ont trop de sang froid : mais ces enfants intrépides ne connaissent pas de difficultés ; ils regardent toujours devant eux, jamais à droite ni à gauche. (DIPKO, 2008, p.31)

          Durant les deux guerres mondiales, les enfants n’ont pas été à l’abri de ce phénomène d’enrôlement. Concernant la première guerre mondiale, Richard van Emden[8], estimait le nombre des enfants-soldats dans l’armée britannique seule d’au moins 250.000 enfants (YVES, 2006, p.113). S’agissant de la deuxième guerre mondiale, il est impensable de parler des enfants-soldats dans cette période, sans retenir l’exemple de « la jeunesse hitlérienne », surnommés les Jungvolk. Ce sont des milliers de jeunes allemands au-delà de 10 ans, obligatoirement mobilisés pour une formation militaire d’enfer, pour être enfin incorporés au sein des forces armées (DIPKO, 2008, p.34).

          A l’ère de post guerre froide, une nouvelle taxonomie de conflits aura lieu, ce sont les conflits armés non internationaux (CANI) qui prendront le devant sur les conflits armés internationaux (CAI). Donc, de nouveaux acteurs autres que les États, entreront comme protagonistes dans les guerres, il s’agit des groupes armés appartenant aux différentes entités intra ou supra étatiques. Cette nouvelle donne aura des effets terribles sur l’enfance, on assistera à une réalité amère dans laquelle les souffrances des enfants s’accentueront, y compris l’enrôlement. La multiplication des CANI à travers le monde, a imposé par conséquent une extension du phénomène de recrutement des enfants dans les conflits armés. Cette corrélation, est logique ; auparavant les enfants sont impliqués juste dans les CAI. Or, dorénavant sont impliqués dans deux types de conflits. C’est-à-dire les CAI et les CANI. D’ailleurs, les enfants sont devenus des acteurs principaux dans les champs d’affrontements. A travers le monde, les exemples ne manquent pas ; on peut citer : Tchétchénie, Sierra Leone, Sri Lanka, Kurdistan, Colombie, Liberia, République démocratique du Congo, Myanmar, Rwanda, etc.

  1. La protection du DIH contre le recrutement et la participation des enfants dans les conflits armés

          L’exploitation des enfants est une infamie ancienne et perdure encore dans notre ère. Le pire, est que les effets de cette exploitation sont de plus en plus graves à cause de l’éclosion des conflits armés non internationaux, Pour faire face à cette situation désastreuse, dans l’objectif de protéger l’enfant contre l’une des plus graves formes de violations commises à son égard en temps des hostilités[9] ; qui est son recrutement dans ces conflits non internationaux et dans ceux internationaux, la société internationale s’est trouvée dans l’obligation d’intervenir pour mettre fin à ce drame. Pour y arriver, un processus de longue haleine pour l’adoption des textes juridiques relatives à ce problème, qui ébranle la dignité humaine, fut commencé dans les années qui suivent la fin de la 1re guerre mondiale. En 1923, la 1re déclaration des Droits de l’enfant fut adoptée par l’Union Internationale de Secours aux Enfants. Cette même déclaration, sera adoptée, sous l’appellation de « Déclaration de Genève » par la Société des Nations (SDN), le 28 septembre 1924 (44، ص، 2011بولحية،). Cependant, ces textes ont été jugés insuffisants et la réalité montre toujours l’exploitation des enfants dans les conflits armés. Une telle situation était flagrante durant et après la 2e guerre mondiale, ce qui a impulsé la société internationale, dans le cadre de DIH, à renforcer le cadre juridique international préexistant par l’adoption de la IVe convention de Genève, puis les deux protocoles additionnels aux quatre conventions de Genève de 1949.

  1. L’interdiction de recrutement des enfants suite à la IVe convention de Genève de 1949

          La convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, du 12 aout 1949, dite aussi la IVe convention de Genève, ne contient pas de dispositions claires pour lutter contre le recrutement des enfants dans les conflits armés. Toutefois, on y lit des stipulations qui parlent de la protection des enfants de moins de quinze ans et de les garder loin des effets de la guerre. En effet, le 1er alinéa de l’article 14 de ladite convention, stipule :

Dès le temps de paix, les Hautes Parties contractantes et, après l’ouverture des hostilités, les Parties au conflit, pourront créer sur leur propre territoire et, s’il en est besoin, sur les territoires occupés, des zones et localités sanitaires et de sécurité organisée de manière à mettre à l’abri des effets de la guerre les blessés et les malades, les infirmes, les personnes âgées, les enfants de moins de quinze ans, les femmes enceintes et les mères d’enfants de moins de sept ans.

De ce paragraphe, il ressort que chaque enfant ayant moins de quinze ans ne doit pas être suomi aux effets de la guerre. En outre, les parties belligérantes peuvent créer des zones sanitaires et de sécurité pour les catégories des personnes vulnérables, y compris les enfants de moins de quinze ans. Selon ce passage de la IVe convention de Genève, on peut déduire que les enfants de moins de quinze ans, sont protégés contre toute utilisation ou enrôlement dans les conflits armés. Toutefois, ce qui fragilise cette garantie de protection en faveur de ces enfants, c’est l’utilisation de verbe « Pouvoir »[10] au lieu de celui de « Devoir », pour ne pas laisser cette garantie à la discrétion des belligérants.

          Dans cette même convention, exactement dans son article 38, alinéa 5, une pareille protection que celle offerte à l’enfant appartenant à l’État concerné par le conflit, est assurée au profit de l’enfant étranger. On y trouve ce qui suit : « Les enfants de moins de quinze ans, les femmes enceintes et les mères d’enfants de moins de sept ans bénéficieront, dans la même mesure que les ressortissants de l’état intéressé, de tout traitement préférentiel ».

          Une autre disposition inscrite dans la IVe convention de Genève, vise à interdire l’enrôlement des enfants. Il s’agit de l’alinéa 2 de l’article 50 de ladite convention, qui stipule : « Elle [La Puissance occupante] prendra toutes les mesures nécessaires pour faciliter l’identification des enfants et l’enregistrement de leur filiation. Elle ne pourra, en aucun cas, procéder à une modification de leur statut personnel, ni les enrôler dans des formations ou organisations dépendant d’elle ». Cependant, cette protection manque de précision de l’âge de l’enfant objet de cette protection. Ce qui offre à la puissance occupante une grande marge de manœuvre pour interpréter ce vocabulaire « enfant » de son propre chef.

L’alinéa 5 de même article, affirme :

La Puissance occupante ne devra pas entraver l’application des mesures préférentielles qui auraient pu être adoptées, avant l’occupation, en faveur des enfants de moins de quinze ans, des femmes enceintes et des mères d’enfants de moins de sept ans, en ce qui concerne la nourriture, les soins médicaux et la protection contre les effets de la guerre.

Par cette disposition, la convention oblige la puissance occupante de maintenir les garanties préalablement assurées par l’État occupée en faveur de l’enfant telle quelles sont, notamment la protection contre les effets de la guerre. Ce qui implique, logiquement, la prohibition de toute incorporation des enfants de moins de quinze ans dans les conflits armés. D’autant plus si l’État occupé, fait partie de la IVe convention de Genève.

          Aussi, pour élargir la protection de l’enfant contre le recrutement, on lit dans le 1er alinéa de l’article 51 de la même convention « la Puissance occupante ne pourra pas astreindre des personnes protégées à servir dans ses forces armées ou auxiliaires. Toute pression ou propagande tendant à des engagements volontaires est prohibée ». C’est une insistance sur le principe affirmant que la puissance occupante ne peut pas obliger les personnes protégées, y inclus les enfants, à travailler au sein de ses rangs, et encore une interdiction de toute pression ou séduction conduisant la même catégorie de personnes à se rallier « volontairement » aux forces de cette puissance occupante. Néanmoins, une lecture minutieuse des termes de cette disposition, nous permet de déceler des lacunes qui nuisent à la garantie de la protection ciblée. D’ailleurs, l’emploi de l’expression ne pourra pas astreindre, sous-entend que le recrutement volontaire des enfants, en tant qu’une des composantes des personnes protégées, est permis. De surcroit, la stipulation de la prohibition de la pression et de la propagande en vue d’un recrutement volontaire, reste une interdiction théorique tant qu’il est difficile de prouver cette pression ou propagande exercée de la part de la partie forte ; qui est la puissance occupante. Donc, il aurait dû être mentionné l’interdiction absolue de recruter cette catégorie de personnes vulnérables, abstraction faite de type de recrutement, que ce soit volontaire ou forcé.

          De ce qui précède, il semble que la IVe convention de Genève, n’ait pas pu résoudre le phénomène de recrutement des enfants dans les conflits armés. Certes, elle comprend des dispositions énonçant la nécessité de garder les enfants loin de ces conflits et de leurs effets. Nonobstant, l’utilisation des termes flous, et vagues, ainsi que la non définition des concepts clés de cette convention, notamment « l’enfant», et l’octroi, parfois, au recruteur éventuel le choix pour respecter ou non de ce principe de non enrôlement des enfants, et ce en employant par exemple le verbe « pouvoir » au lieu de verbe « devoir », sont toutes des lacunes qui entachent la valeur contraignante de la convention, en offrant aux recruteurs des possibilités de s’échapper aux sanctions contre leur crime de recrutement et d’utilisation des enfants.

          En vue de parer à cette situation juridique qui n’a pas pu mettre fin à la continuité de ce fléau de recrutement des enfants, des efforts énormes ont été déployés par la communauté internationales, pour arriver à l’adoption de deux protocoles additionnels de 1977 aux quatre conventions de Genève.

  1. La contribution des deux protocoles additionnels de 1977 à la protection de l’enfant contre la participation aux hostilités

          La participation des enfants dans les conflits armés se continuera dans la période post deuxième guerre mondiale. C’est un phénomène qui sera accentué par la reconnaissance de la légitimité des mouvements de libération national, surtout en qualifiant leur combat de conflit armé international. A cela, s’ajoute un autre facteur, qui est la consécration de la reconnaissance des groupes armés aspirant l’autodétermination, ou le séparatisme. Dans ce cas précis, il s’agit de conflits armés non internationaux. Ceci, aboutira inévitablement à l’accroissement de nombre des enfants incorporés dans les conflits armés, que ce soit au sein des forces armées étatiques, ou dans les rangs des groupes armés officieux.

          Devant ce tableau sombre, le CICR tire la sonnette d’alarme pour mettre fin aux violations des règles de DIH, à leur tête la protection des enfants contre toute implication dans les hostilités. C’est ainsi que ce comité entamera des travaux préparatifs dès 1971 pour la préparation des deux projets protocoles. Il est à noter que les négociations pour l’adoption des deux projets, ont duré quatre ans, de 1974 à 1977, dans le cadre de la conférence diplomatique des experts gouvernementaux sur la réaffirmation et le développement du DIH applicable dans les conflits armés. C’était un moment de négociations touchant au divers domaines, politique, humanitaire, militaire et juridique. C’est alors, le cas le plus cohérent et convenable aux propos de Mr Geoffrey Best[11], qui disait « tout acte normatif constitue dans une certaine mesure un processus politique » (GEOFFREY, 1994, p.342). Ceci, est à fortiori vrai, quand on est en cours d’étudier et de préparer des traités-lois, de portée universelle et relatives à une question épineuse, qui est celle des conflits armés.

Assurément, les deux protocoles ne cherchent pas à invalider les quatre conventions de Genève, par contre ils les complètent en renforçant leurs dispositions, ou en y ajoutant d’autres règles protectrices des victimes des conflits armés. Ci-dessous, on se limitera de traiter l’apport de ces deux protocoles à un sujet jamais traité, explicitement, par d’autres instruments juridiques, il s’agit de la protection des enfants contre le recrutement dans les conflits armés.

B-1/- Le 1er protocole additionnel de 1977 relatif à la protection des victimes des CAI (PAI) :

          Pour surmonter les lacunes de la IVe convention de Genève au sujet du recrutement des enfants dans les conflits armés, le PA I a essayé de déterminer l’âge en deçà duquel l’enrôlement des enfants est interdit. Ainsi, le deuxième paragraphe de l’article 77 de ce protocole prévoit que :

Les Parties au conflit prendront toutes les mesures possibles dans la pratique pour que les enfants de moins de quinze ans ne participent pas directement aux hostilités, notamment en s’abstenant de les recruter dans leurs forces armées. Lorsqu’elles incorporent des personnes de plus de quinze ans mais de moins de dix-huit ans, les Parties au conflit s’efforceront de donner la priorité aux plus âgées.

De ce paragraphe, ressortent deux engagements pour les États parties. A savoir :

  • Une obligation de moyen : L’utilisation de l’expression « prendront toutes les mesures possibles » au lieu de la formule usée dans l’article 62 du projet de PAI « toutes mesures nécessaires », a privé la disposition de toute force contraignante. Par contre, a rendu son exécution très relative et dépendante de la volonté des États qui peuvent se cacher, en cas de leur implication dans ce phénomène de recrutement, derrière l’évocation de fait qu’ils ont fourni tous les efforts pour empêcher ce recrutement. Or, ceci n’a pas abouti. Cette formulation « souple » et réticente est due au refus des États de s’engager absolument dans cette lutte contre l’utilisation des enfants dans les conflits armés (DUTLI, 1990, p.459). Par cette expression « prendront toutes les mesures possibles », les États peuvent facilement s’échapper à toute poursuite judiciaire mettant en cause sa responsabilité internationale.

          Dans ce même contexte, le 2e paragraphe du PAI, interdit seulement la participation directe des enfants aux conflits armés, ce qui nous laisse entendre une autorisation tacite de participation indirecte à ces conflits. Sachant que, les deux types de participation sont de même degré de dangerosité pour les enfants. C’est une disposition largement contestée par le CICR (554.ص ،2007 علوان، و الموسى،).

          Une autre difficulté, s’ajoute à ce qui précède pour entraver une protection efficace des enfants contre tout enrôlement. Il s’agit cette fois-ci, de l’inexistence d’une définition exacte dans le DIH, ou encore d’une interprétation nette de la part des États et de la jurisprudence de l’expression « participation directe aux hostilités » (Comité International de la Croix-Rouge, 2010, p.43). Donc, le seul moyen de la définir, c’est de faire recours à l’alinéa 1 de l’article 31 de la convention de Vienne sur le droit des traités[12]. En effet, c’est l’interprétation avec de bonne foi des termes de cette expression qui peuvent trancher sur sa portée. Ceci dit, pour parler d’une participation directe, trois conditions cumulatives doivent être requises ; à savoir : un seuil de nuisance, contre l’adversaire, résulté des effets de cette participation au conflit, une causation directe ou lien de causalité direct entre la nuisance et l’acte de participation au conflit, et un lien de belligérance ; c’est-à-dire que les effets nuisibles atteignant le seuil requis, doivent être entrepris au profit d’un antagoniste au détriment d’un autre (Comité International de la Croix-Rouge, 2010, p.48).

          Une autre lacune dans ce paragraphe qui nécessite d’être signalée, c’est celle de l’emploi de l’expression « […], notamment en s’abstenant de les recruter dans leurs forces armées, […] ». Par cette formulation, le protocole vise, seulement, l’interdiction de recrutement perpétré par l’État, autrement dit, une autorisation implicite de l’enrôlement volontaire même des enfants de moins de quinze ans.

  • Une obligation de résultat : En vertu de même paragraphe, les États parties de ce protocole, ne peuvent en aucun cas incorporer des enfants de moins de 15 ans dans les rangs de leurs forces armées. Mais, dans l’objectif de trouver un compromis entre ceux qui veulent augmenter l’âge minimum de recrutement et ceux qui veulent le garder, dans ce cas, dans le plancher de 15 ans, une stipulation supplémentaire fut introduite dans ce paragraphe. C’est celle qui dit : « Lorsqu’elles [les Parties au conflit] incorporent des personnes de plus de quinze ans mais de moins de dix-huit ans, les Parties au conflit s’efforceront de donner la priorité aux plus âgées. » (Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux, 1977, article 77, para.2). Ceci, vaut dire, même en cas de respect de l’âge limite de 15 ans, les États doivent, parmi les personnes ayant entre 15 et 18 ans, préférer faire participer les enfants les plus âgés. Cette formule, laisse aux États une marge de manœuvre suffisante pour recruter les enfants âgés de plus de 15 ans et moins de 18 ans dans ces forces armées, sans même respecter la condition de priorisation des enfants plus âgés lors de recrutement. Cette possibilité est d’autant plus encouragée par l’utilisation dans cette stipulation de l’expression « les Parties au conflit s’efforceront de donner la priorité aux plus âgées ». Autrement dit, les États peuvent faire recours aux enfants moins âgés lors de recrutement dans les CAI, toute en prouvant, et contre la véracité de leurs agissements, qu’ils se sont efforcés de donner la priorité aux plus âgés.

          Bref, suite à cette analyse, on peut noter une contradiction flagrante dans le même paragraphe de PA I traité plus haut. La 1re partie de la 1re phrase du paragraphe oblige les États à prendre « les mesures possibles » pour que les enfants de moins de 15 ans ne participent pas aux hostilités, il s’agit donc d’une obligation de moyen. Tandis que la 2e partie de la même phrase dudit paragraphe, oblige les États parties à ne pas recruter dans leurs forces armées la même tranche d’âge d’enfants. Dans ce cas, on est devant une obligation de résultat. Par conséquent, en cas de violation de la 1re obligation, l’État n’est pas tenu légalement responsable, ou à vrai dire, sa responsabilité est quasiment impossible de la prouver, car il a toujours des larges possibilités pour arguer qu’il a pris toutes les mesures possibles pour ne pas incorporer les enfants aux combats, mais tout simplement, il n’y a pas réussi. Nonobstant, dans le cas de violation de la 2e obligation, l’État se trouve, théoriquement et pratiquement, tenu responsable sur le plan légal.

B-2/- Le 2e protocole additionnel de 1977 relatif à la protection des victimes des CANI (PAII) :

          Les efforts du DIH pour prohiber le recrutement et l’utilisation des enfants dans les conflits armés, se sont continués en vue d’élargir cette prohibition pour qu’elle puisse englober les CANI en plus des CAI. A cet effet, le paragraphe 3, alinéa (c) de l’article 4 du PA II (1977), prévoit que « les enfants de moins de quinze ans ne devront pas être recrutés dans les forces ou groupes armés, ni autorisés à prendre part aux hostilité ».

De ce passage, on dénote l’apport des avancées importantes de ce 2e protocole additionnel par rapport au 1er protocole. Ainsi, deux garanties sont adoptées pour assurer la protection des enfants de moins de 15 ans contre le recrutement et la participation aux hostilités dans le contexte des CANI.

          La 1re garantie, est celle de l’interdiction absolue de recrutement des enfants, que ce soit par les États dans ses forces armées, ou encore par les groupes non étatiques dans leurs groupes armés. Dans ce cas, il y a violation de PA II, chaque fois qu’il y ait recrutement ou aussi autorisation des enfants pour qu’ils participent aux hostilités. Donc, au contraire de ce qui a été stipulé dans le paragraphe 2 de l’article 77 du 1er protocole, « la prise de toutes les mesures possibles » par les parties au conflit pour empêcher cette participation, est une notion insignifiante. Il s’agit donc, d’une obligation de résultat qui ne laisse aucune issue échappatoire en faveur de toute partie impliquée dans ce crime.

          Pour la 2e garantie, elle concerne l’obligation de ne pas laisser les enfants de moins de 15 ans participer aux hostilités, que ce soient une participation directe ou indirecte, volontaire ou involontaire. La prudence des rédacteurs de ce paragraphe est très remarquable pour faire distinction entre les deux interdictions. C’est-à-dire le recrutement et la participation volontaire. Pour cela, ils ont utilisé la conjonction de coordination « ni[13] », qui éloigne toute possibilité d’une interprétation aberrante de la disposition en question. D’où, l’impossibilité pour tout recruteur d’évoquer le caractère volontaire d’une éventuelle participation des enfants de moins de 15 ans dans les rangs de ses forces armées (pour les Etats) ou aussi de ses groupes armés (pour les groupes armés non étatiques).

Il est pertinent de souligner que, selon les commentaires de PA II, on entend par participation indirecte des enfants de moins de 15 ans toute participations à des actes, tels que : la collecte de renseignements, la transmission d’ordres, le transport de munitions et de vivres, des actes de sabotage, etc. (Centre de Droit International Humanitaire de Diakonia, février 2022, p.26).

          En définitive, malgré que le PA II, n’a pas pu définir exactement le concept de « l’enfant », ni même élever l’âge de l’enfant à protéger au seuil de 18 ans. Pourtant, il est très clair que les dispositions de PA II sont plus bénéfiques aux enfants de moins de 15 ans contre le recrutement aux conflits armés, et aussi contre toute participation à ces conflits, sans faire de distinction entre une participation directe et indirecte. Ce qui élargit amplement la protection des enfants.

Conclusion

          Le DIH, a essayé dès sa naissance d’apporter des garanties de protection en faveur des personnes vulnérables contre les effets des conflits armés. Cependant, au niveau de la protection des enfants contre le recrutement et la participation dans les conflits armés, les apports du DIH, sont toujours lacunaires et incapables de faire face à ce phénomène de recrutement et d’utilisation des enfants dans les hostilités.

En effet, le DIH n’a pas donné une définition exacte du concept de « l’enfant ». Ce qui a impacté sur la fluctuation de l’âge de l’enfant à protéger par les instruments de cette branche du Droit international. Exemple : Tantôt, ils parlent de la protection des enfants de moins de quinze ans, tantôt, de ceux âgés de moins de 18 ans. Néanmoins, ce qui est certain, c’est que ce Droit ne protège, et d’une manière relative, contre le phénomène en question, que les enfants âgés de moins de quinze ans.

Aussi, il faut ajouter le caractère réticent du DIH face au fléau du recrutement des enfants. Ceci, est bien illustré par les expressions utilisées dans les articles traitant ledit fléau.

          Pour une protection fiable de l’enfant contre le recrutement et l’exploitation dans les conflits armés, que ce soient internationaux ou non internationaux, il faudrait que le DIH comprennent des dispositions fermes et claires en faveur de l’enfant ; à savoir :

  • L’interdiction nette de recrutement et de participation des personnes de moins de dix-huit ans dans les conflits armés ;
  • La jouissance de ces dispositions de caractère de règles impératives ou jus cogens;
  • L’imposition des sanctions sévères en cas de violation de ces dispositions.

          Dans cet article, on s’est limité d’analyser les instruments juridiques relevant du DIH. Cela ne signifie aucunement que cette branche du Droit est la seule qui s’occupe de la protection de l’enfant contre son exploitation dans les belligérances. Par contre, il y en a d’autres branches du Droit qui se charge de cette protection de l’enfant. A titre d’exemple, le Droit international des droits de l’Homme, notamment à travers la convention internationale des droits de l’enfant de 1989, ainsi que son protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés. D’ailleurs, d’autres analyses peuvent être menées pour éclaircir d’autres points relatifs au phénomène du recrutement des enfants et leur participation dans les conflits armés.

Références bibliographiques

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Camello, M. (20 novembre 2020). Enfants dans les conflits armés : recrutement et utilisation en 2019. Éclairage du GRIP, 7 p. https://grip.org/wp-content/uploads/2020/11/EC_2020-11-20_FR_MC-ENFANTS-SOLDATS.pdf

Jean-Manuel, L. (2006). Les réponses du droit international à la question des enfants soldats. Cahiers de la recherche sur les droits fondamentaux.  (5), pp. 65-78. https://doi.org/10.4000/crdf.7177

Maria Teresa, D. (Octobre 1990). Enfants combattants prisonniers. Revue Internationale de la Revue de la Croix-Rouge. (Numéro 785), pp. 456-470.

Tremblay, Y. (Hiver 2006). Enfants et adolescents en guerre. Bulletin d’histoire politique. Volume 14, (numéro 2), pp.109-127. DOI : https://doi.org/10.7202/1054439ar

Unicef (Février 1999). Principes de Cap et meilleures pratiques concernant le recrutement d’enfants dans les forces armées et sur la démobilisation et la réinsertion sociale des enfants soldats en Afrique. Document du symposium du 27-30 avril 1997. p.10. Le cap, Afrique du Sud.  https://www.yumpu.com/fr/document/read/37679326/principes-du-cap-et-meilleures-pratiques-watchlist

ANAHITA, Karimzadeh Meibody, (2015). Les enfants soldats : aspects de droit international humanitaire et de droit comparé. (Thèse de Doctorat, université de Strasbourg, Strasbourg, France), 738 p. https://theses.hal.science/tel-01124353/document

DIPKO, Thélesphore Toliton. (2008). La question des enfants soldats : quels problèmes pour la défense du droit, le maintien, la garantie et la promotion de la sécurité internationale ? (Thèse de Doctorat en sciences politiques, Université Jean Moulin Lyon 3, Ecole doctorale : Droit, Lyon, France), 410 p.

Comité International de la Croix-Rouge. (2010). La notion de participation directe aux hostilités en Droit international humanitaire. [Guide interprétatif], 88 p. https://www.icrc.org/fr/doc/assets/files/other/icrc_001_0990.pdf

Centre de Droit International Humanitaire de Diakonia. (Février 2022). Cadre juridique applicable au recrutement et à l’utilisation des enfants dans les hostilités par les parties au conflit armé au Mali. [Note juridique], 58 p. file:///C:/Users/Hp/Desktop/Le%20DIH%20et%20la%20protecition%20des%20enfants%20contre%20le%20recrutement%20dans%20les%20conflits%20armes/Cadre-juridique-Enfants-soldats-conflit-au-Mali.pdf

Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. (Mars 2015). Recrutement des enfants. [Note de référence], 4 p. file:///C:/Users/Hp/Desktop/Le%20DIH%20et%20la%20protecition%20des%20enfants%20contre%20le%20recrutement%20dans%20les%20conflits%20armes/opendocpdf.pdf

الكتب:

  • صفوان، مقصود خليل. . (2019) التجريم الدولي لتجنيد الأطفال في النزاعات المسلحة. مجلة جامعة الشارقة للعلوم القانونية. المجلد 16، ) العدد(2 ، ص. 275-300.
  • شهيرة، بولحية .(2011) .حقوق الطفل بين المواثيق الدولية وقانون العقوبات الجزائري، دراسة مقارنة، الإسكندرية، دار الجامعة الجديدة، مصر، 181ص.
  • محمد، يوسف علوان ومحمد، خليل الموسى.(2007). القانون الدولي لحماية حقوق الإنسان” الحقوق المحمية”، الجزء الثاني“، الأردن، دار الثقافة، ط1، ص..554

Periodicals :

  • GEOFFREY, B. (1994). War and law since 1945. Clarendon Press, Oxford, p.342.

[1] L’utilisation du vocable « recrutement » dans cet article, signifie l’enrôlement des enfants et leur incorporation dans les conflits armés.

[2] Est né vers 46 et mort vers 125. Philosophe, biographe, moraliste et penseur majeur de la Rome antique. D’origine grecque.

[3] Education militaire spartiate.

[4] Est un historien, philosophe et chef militaire. Né à Athènes vers 430 av. J.-C et mort vers 355 av. J.-C.

[5] Fantassin grec, pesamment armé.

[6] Aristote (384-322 av. J.-C.) est un philosophe et polymathe grec de l’Antiquité.

[7] Né le 15 aout 1769 à Ajaccio et mort le 05 mai 1821. Est un militaire et homme d’État français. C’était le 1er empereur des français du 18 mai 1804 au 6 avril 1814 et du 20 mars au 22 juin 1815, sous le nom de Napoléon Ier.

[8]Auteur britannique et producteur de documentaires télévisés spécialisé dans la Première Guerre mondiale.

[9] Les six violations graves commises envers les enfants en temps des conflits armés sont : Recrutement et utilisation d’enfants, meurtres et mutilations d’enfants, violences sexuelles faites aux enfants, attaques contre des écoles et des hôpitaux, enlèvements d’enfants, refus d’accorder un accès à l’aide humanitaire.

[10] « Dès le temps de paix, les Hautes Parties contractantes et, après l’ouverture des hostilités, les Parties au conflit, pourront créer sur leur propre territoire et, s’il en est besoin, sur les territoires occupés, des zones et localités sanitaires et de sécurité organisée de manière à mettre à l’abri des effets de la guerre les blessés et les malades, les infirmes, les personnes âgées, les enfants de moins de quinze ans, … ».

[11]  Un historien anglais connu pour ses études sur la guerre et ses travaux sur Winston Churchill.

[12] « Un traité doit être interprété de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son but ».

[13] Cette conjonction ne laisse aucune occasion aux parties belligérantes d’évoquer un cumul ou une confusion entre l’enrôlement volontaire et leur propre recrutement. Au contraire, elle marque une distinction nette entre les deux genres de participation des enfants aux hostilités.

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