Research studies

L’Afrique face aux rivalités de puissance : les routes de la soie et le Global Gateway

 

Prepared by the researche :Maska Elmahjoub – Docteur en sciences politiques et relations internationales – Politologue et spécialiste de l’Afrique, Université Cady Ayyad Maroc.

Democratic Arabic Center

Journal of Strategic and Military Studies : Twenty-fourth Issue – September 2024

A Periodical International Journal published by the “Democratic Arab Center” Germany – Berlin

Nationales ISSN-Zentrum für Deutschland
 ISSN  2626-093X
Journal of Strategic and Military Studies

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Résumé

Notre article étudie les relations de l’Afrique avec ses géants partenaires, qui sont l’union européenne et la chine. L’approche se veut comparative entre les deux fameuses stratégies économiques qui ont marqué  le 21eme siècle, à savoir les routes de la soie et le ‘’Global Gateway’’. En effet, le vieil ami (l’union européenne) a signé des dizaines de traités de partenariat avec les pays africains et organisé des sommets avec l’union africaine. Idem pour la chine, néanmoins, cette dernière tentait d’être plus proche, respectueuse des partenaires africains. Par conséquent et suite au rapprochement sino-africain, l’Europe emboite le pas à l’empire du milieu, tout en traitant le partenaire africain d’égal à égal, en concentrant les efforts sur les domaines stratégiques et en mettant fin au traitement parfois dégradant. Cette concurrence accrue sur le sol africain suscite notre curiosité scientifique à explorer les fruits et les caractéristiques  de chaque partenariat, et voir jusqu’à quelle mesure l’Afrique tire profit des projets phares qui sont en train de se construire dans les quatre coins du continents.

Introduction

Occupant 6 °/° de la surface de la terre, l’Afrique est un géant continent.[1] Elle est le berceau des sciences, et la terre des premières innovations. Les grands philosophes occidentaux et les fameux médecins passaient par là, puisque, le système scolaire était, alors, l’un des meilleurs, notamment au sin de la civilisation musulmane dont la contribution est non négligeable à l’essor scientifique, et il suffit de citer les grands savants qui ont marqué le moyen-âge et les siècles suivants. Néanmoins, les westerns étaient très ingrats à l’égard de l’Afrique et les Africains. Après le déclin des puissances africaines et musulmanes, l’occident tend à sous-estimer leur pouvoir et ignorer leur passé glorieux, qualifiant l’Afrique de terra nullius , et ses habitants de ‘’ blank tabula rasa’’[2].

L’Afrique est un continent riche, représentant 8% des réserves du pétrole à l’échelle internationale, ajoutant à cela, ses ressources abondantes en hydroélectrique, diamant, chrome et l’or. Aussi, des ressources rares comme le platine, l’uranium et le cobalt se trouvent en Afrique avec des quantités incroyables. Dans le domaine de l’agriculture, les terres cultivables s’étendent sur des millions d’hectares.

Les exportations du gaz africain  battent du record en record, faisant du continent un partenaire indispensable d’autant plus durant les crises qui secouent de temps en temps le marché de l’énergie.

Ce continent restait très longtemps marginalisé. La colonisation en est la cause. Il  découlait de cet état de fait un mépris à l’égard de ses peuples, car les superpuissances s’obstinent à la garder dans la périphérie du monde, en la divisant en  zones d’influence. En fait, les vestiges de cette période sombre subsistent et l’Afrique peine à s’en débarrasser car  la dépendance de la tutelle occidentale est très ancrée, ainsi que les élites qui servent les intérêts de l’ex-colonisateur mènent un combat féroce pour la garde de cet héritage qui s’adapte sans cesse aux mutations que connaissent les relations internationales.

Même si les chances d’un changement radical restent problématiques, quelques  états osent prendre leur destin entre les mains, et choisir les alliés tels qu’il tient à ses gouvernements et au service de ses peuples qui aspirent à l’émancipation et au développement. A vrai dire, en Afrique, des états sont sortis de l’axe des humiliés, d’autres espèrent  leur emboiter le pas, dans ce sillage ; et vu les changements géopolitiques que marqueront l’ère post unipolarisme américain,

Problématique :  L’Afrique est-elle en mesure de tirer profit d’un partenariat diversifié dans le cadre d’un multilatéralisme qui se dessine de plus  en plus ?

I/ L’Afrique et les routes  de la  soie: enjeux énormes

Depuis des siècles, l’histoire du monde est jalonnée de périodes de partenariat et d’échanges de biens entre l’Asie et l’Afrique, l’intensification du commerce international impose, chaque siècle, la mise en place d’une nouvelle forme de coopération. L’ère de la mondialisation est un peu différente pour Mama Africa, s’est caractérisée par une ouverture sur les  nouveaux marchés après une période d’aliénation totale  vers l’ex colonisateur qui, dans la quasi majorités des pays du continent imposait un régime économique taillé sur mesure, guidé à distance, dont l’élaboration des plans de développement est laissée à sa  discrétion.

Lorsque la chine a posé le premier jalon des routes de la soie, le premier objectif était de s’affirmer comme un acteur incontournable dans les relations internationales, et étendre son influence partout dans le monde. A la fin du vingtième siècle, l’Empire du Milieu est devenu une superpuissance mondiale qui concurrence les Etats Unis et l’Europe.

D’emblée, la chine n’est pas un nouveau arrivant en Afrique, car elle tendait la main aux africains lorsque ceux-ci étaient sous l’emprise coloniale, souffrant le martyre dans leur lutte contre l’impérialisme. Mais depuis les années soixante-dix,  une coopération économique mutuellement bénéfique est devenue la pièce maîtresse de la politique chinoise à l’égard de l’Afrique[3].

 A partir du 2013, au faîte de sa puissance, le nombre de ses partenaires a doublé, avec la stratégie ‘’BRI’’, suscitant l’admiration d’autant plus des Africains qui veulent s’ouvrir sur des marchés autres que ceux des ex-puissances coloniales.

De nos jours, l’Afrique fait partie des nouvelles routes de la soie, avec des corridors économiques passant par le continent, le mobile majeur de ce rapprochement est, d’une part, la quête des ressources naturelles par les chinois ; et d’autre part, les Africains ont compris que l’enjeu de développement est incontestablement lié à l’ouverture sur l’Asie.

  Les chinois misent sur les hydrocarbures en Afrique où les multinationales continuent de réaliser des investissements directs. Au début, l’effort chinois s’est concentré sur l’Afrique centrale, une zone minière et pétrolière très riche qui suscitait pendant longtemps les convoitises des puissances extérieures ainsi que ses peuples ont été  soumis à des pressions durant les années de colonisation. Le grand consommateur du pétrole traite les africains d’une manière assez respectueuse, donnant une valeur non moindre à ses partenaires ; sa politique du gagnant-gagnant constituait un tournant dans les relations internationales contemporaines d’autant plus  lorsqu’on évoque la relation afro-européenne et ses méfaits sur le développement durable des pays du tiers monde qui cherche encore  une formule magique pour se relever et réaliser des progrès au double plan de l’économie et de la gouvernance économique.

Après les désillusions et les désappointements de l’ère post-colonisation,  il y avait un optimisme de la part de la jeune génération qui reste   déterminée à  changer la ligne politique traditionnelle  en constituant des systèmes politiques à même de recevoir les impulsions et les demandes des citoyens à l’effet de les transmettre en décisions osées qui rendent compte de carences et intérêts suprêmes. Ceci nécessite une certaine fluidité, ainsi que des systèmes modernes avec des leaders non alignés mais aussi une structure économique qui peut se développer d’une manière harmonieuse et dynamique. La chine dépend en moyenne  de 75°/° du pétrole pour maintenir le processus de production et d’industrialisation exceptionnellement réussi et incroyablement géré par un parti unique s’appuyant sur des structures économiques nullement trouvées ailleurs.

L’Afrique représente une zone géopolitique vitale, avec les gisements de pétrole et les trésors miniers. Néanmoins,  l’engagement des chinois  était limité[4] ; d’autant plus lorsqu’on sache que le commerce avec l’Afrique ne constitue que 4°/° , (4,4°/° pour les exportations et  3,6 °/° des importations)[5].

La recette secrète de la méritocratie chinoise tourne autour de certaines stratégies du développement des infrastructures de ses partenaires africains, d’autant plus que ceux-ci aspirent à la mise sur pied d’un commerce efficace.  En effet, ce partenariat englobe des plans de route très prometteurs en ce sens là. C’est l’un des principaux bailleurs de fonds en Afrique, ayant financé des projets d’aménagement dans le domaine du transport surtout en Afrique de l’ouest. A vrai dire, les acteurs chinois impliqués financent la construction des infrastructures vitales. Evidemment, les besoins sont pressants, ainsi que cette superpuissance en auraient besoin tout autant. Car, pour accroitre les échanges économiques avec ses partenaires, et pour réaliser le taux de croissance espéré, la chine, consciente de l’importance de réduire les frais de transport, se met depuis des décennies, dans un esprit opportuniste à mettre à niveau les infrastructures nécessaires, là où elle pourrait réaliser un taux d’échange exceptionnel, contribuant à l’accélération de sa miraculeuse croissance économique.

Indéniablement, Dans le continent africain, la tendance est de se rapprocher de Pékin, cela pour profiter des avantages que propose la fameuse stratégie BRI. Celle-ci vise, par-dessous tout, le marché Européen. Cependant, plus la chine rallie les Africains à son orbite plus elle s’impose sur la scène internationale, car la réussite du projet Eurasien dépend, en grande mesure, de l’existence de quelques facteurs déterminants dans la performance de ce projet phare qui va secouer les postulats de puissance. Ainsi, pour trôner au sommet, elle devrait se servir des pays qui grouillent à la base, et c’est le cas des pays émergeants qui ont des réserves de pétrole[6] et des ressources naturelles abondantes, ajoutant à cela, les états vivant dans le chaos qui sont prêts à jouer le rôle des pions ou des états satellites en échange de donations et d‘aides.

En fait, le ralliement des états Africains permettrait à cet empire moderne d’étendre son influence géostratégique, ceci est l’objectif primordial des puissants asiatiques qui espèrent devenir les rois du Monde d’ici vingt ans, leurs stratégies se basant sur la construction des infrastructures pour les pays ayant un manque à ce niveau et le soutien financier – à travers des prêts à taux très bas et des dons –  donné à ceux dont le budget est épuisé voire  la balance économique est en déficit.  L’Ironie du sort, un nombre important des membres de l’union africaine vivent dans une situation de vulnérabilité. Cette organisation, consciente de cette réalité amère,  se montre intéressée à participer à l’essor de ses relations avec la chine, désirant resserrer les liens avec les différents acteurs chinois, ouvrant des perspectives de développement à même d’aider les pays africains à se construire en tant que nations modernes.

Après l’euphorie des premières années de coopération et les promesses données, il s’est révélé un déficit évident au niveau des partenariats signés sur fond des investissements qui peinent à relever les défis et à réaliser les objectifs tracés surtout par les gouvernements Africains. En fait, ils ont mis beaucoup d’espoirs dans cette seconde puissance mondiale qui promet de les accompagner dans leur quête de prospérité. L’économiste Yifu Lin Justin[7] considère l’Afrique comme une zone propice où le savoir-faire chinois et ses solutions peuvent donner de bons  résultats et un meilleur rendement. Cet expert très sollicité avance des arguments prometteurs, telle que la scolarisation des enfants qui a augmenté ces dernières années grâce aux partenariats signés avec la chine, ainsi que le taux de mortalité des enfants et les épidémies qui sévissent en Afrique qui sont en baisse.

Les deux partenaires doivent s’attaquer à certains problèmes s’ils ont vraiment l’intention de créer les conditions propices à la mise en place d’un climat d’échange fructueux d’où sortent  ‘’gagnant-gagnant’’ comme prétend réaliser, à travers la stratégie des routes de soi, la propagande économique chinoise. Les enjeux majeurs que veulent atteindre les dirigeants chinois concernent surtout l’adéquation des ‘’FDI’’ avec la capacité de production des pays africains, ce qui permettrait le transfert des connaissances et du savoir-faire indispensables à la réduction du déficit dont souffre le climat des affaires en Afrique.

Pour les chinois, changer la politique africaine de fond en comble ne jouerait pas en leur faveur. Ce qui compte pour le gouvernement de XI jinping, c’est le soutien des partenaires africains à leur intégrité territoriale, notamment la question du Taiwan, qui depuis leur retour au bercail, constitue une priorité pour la diplomatie chinoise dans sa coopération avec les Etats africains. Leur ralliement à cette cause surtout au sein du conseil de sécurité a permis aux plus pauvres de profiter de certains dons durant les périodes de crise, même si cela ne passe pas inaperçus, et en profite énormément la chine, qui pourrait plutôt lever beaucoup de restrictions sur l’entrée de ses compagnies dans le marché africain. Ainsi, les produits chinois entrent avec des volumes importants, bénéficiant de la levée des droits de douanes dans pas mal de pays qui signent avec Pékin  des accords économiques. Néanmoins, à partir de 2016,  le nombre  des investissements chinois commencent à reculer, et l’octroi des prêts est devenu très compliqué, avec une nouvelle conditionnalité, du fait de retard des africains à payer, ajoutant à cela les problèmes de la corruption qui ne laisse pas une marge de manouvre à la jeune génération, qui veut profiter de la présence chinoise surtout en termes  d’expertise, mais aussi les espaces culturelle et universitaires, qui sont  loin d’être à même de créer un climat de recherche et d’échange propice à la formation  des experts  et des technocrates qui pourraient sauver la face à ce continent riche en matières énergétiques, cependant souffrant du carence à propos du capital humain  qualifié.

Grosso modo,  depuis le lancement de la ‘’Belt and Road Initiative’’ en 2013, le bilan de ce partenariat se révèle mi-figue mi-raisin. Qu’en-t-il du partenariat euro-africain ?

II/ L’Afrique et l’union européenne : des accords de Yaoundé à la ‘’Global Gateway’’

A l’instar de la chine, l’union européenne veut investir dans des infrastructures à travers l’établissement « des liens plus résilients avec le monde »[8].

L’histoire a retenu que l’Afrique a beaucoup souffert de la colonisation européenne dont la propension visait une négation totale de l’historicité du continent et l’appropriation de ses territoires.  Grosso Modo, cette parenthèse était pleine de leçons.

Les accords de Yaoundé représentent la première tentative institutionnalisée visant la mise en place d’un partenariat euro-africain, cette convention a été signé le 20 juillet 1962 entre la communauté économique européenne et les Etats Africains. Le Fonds européen de développement s’est engagé à financer les projets d’aménagement dans les domaines d’infrastructure et d’investissement, ainsi qu’améliorer les structures de production agricole. Ce rapprochement s’est fait entre la communauté européenne à l’époque et les ex-colonies françaises.   Depuis le temps de décolonisation, la France a maintenu une politique de conservation de l’accès aux matières stratégiques de l’Afrique, tout en empêchant les autres puissances d’y accéder, celles-ci n’arrivaient pas à avoir un accès total sur la mine énergétique africaine que récemment avec cette nouvelle tendance de certains pays de tourner le dos aux amis français d’autant plus que les pays francophones n’ont pas développé des industries qui pourraient faire la fierté de l’Afrique.

La France est le deuxième détenteur d’actif étranger en Afrique avec 60 millions de dollars. Aussi, un quart des investissements français est destiné à l’Afrique, les flux financiers entre les deux rives ont pris, durant les dernières décennies, une ampleur gigantesque. Cependant les profits, dont bénéficient les pays qui vivent encore à la Mercie des partenariats avec Paris, sont loin de satisfaire les attentes et les ambitions de cette nouvelle génération qui aspire à un décollage économique qui permet au continent de se relever

Dans les années soixante-dix,  de nouveaux horizons se dessinent pour l’Afrique, les accords de Lomé viennent concrétiser les ambitions des Africains qui voulaient obtenir  à leur marchandises un accès au marché communautaire, cet objectif  a été réalisé via la signature de cette convention qui enlève les restrictions quantitatives et les droits de douane, ceci créa un cadre de coopération qui motive les africains à  traiter les états de la communauté comme des Nations plus favorisées notamment dans le secteur minier dont les recettes d’exportation comptent énormément pour l’Europe qui accorde une assistance sans conditions aux gouvernements qui coopèrent.

Le partenariat Afrique-Union européenne s’est beaucoup concrétisé depuis le sommet du Cotonou qui a marqué l’année 2000.

Les accords de ‘’Cotonou’’ incluent les éléments essentiels qui concernent les droits de travail et le rôle de la société civile dans la mise en place d’une coopération qui postule le respect des droits de l’homme, et la promotion des principes démocratiques. La convention met en avant la nécessité d’une coopération multilatérale qui facilite le dialogue et les consultations sur les intérêts mutuels des deux communautés et qui concernent surtout les domaines stratégiques tout en réalisant un environnement stable où règne la paix et sécurité :

‘’Le dialogue doit faciliter les consultations et renforcer la coopération entre les parties au sein des enceintes internationales, de même qu’il doit promouvoir et soutenir un système efficace de multilatéralisme. Le dialogue porte sur l’ensemble des objectifs et finalités définis dans le présent accord ainsi que sur toutes les questions d’intérêt commun général ou régional, y compris les questions relatives à l’intégration régionale ou continentale. Par le dialogue, les parties contribuent à la paix, à la sécurité et à la stabilité et à la promotion d’un environnement politique stable et démocratique..Le dialogue se concentre, entre autres, sur des thèmes politiques spécifiques présentant un intérêt mutuel ou général en relation avec les objectifs énoncés dans le présent accord, notamment dans des domaines tels que le commerce des armes, les dépenses militaires excessives, les drogues, la criminalité organisée…’’[9]

Dans la même année, le 3et le 4, les deux continents ont organisé le sommet  EU-Afrique au Caire, pour  signer un document stratégique[10] qui comprend leurs attentes et  visions  du partenariat. Ainsi, ce qui caractérise cette convention est la dimension stratégique que les leaders voulaient donner au partenariat du  21ème siècle entre l’Europe et l’Afrique. Ils s’engagèrent à renforcer les liens existants tout en respectant l’esprit de coopération dans le domaine politique et économique à travers la mise en place d’un cadre effectif pour un dialogue constructif[11].  Suite à cet accord, la commission européenne prépare une stratégie globale de l’union Européenne qui concerne ses intérêts dans cette région, par conséquent et en vue de concrétiser la présence européenne sur ce vaste continent, le conseil européen adopte la stratégie européenne du 2005. Celle-ci vise de renforcer les rapports bilatéraux, et qui suppose le respect des principes d’égalité et du partenariat. Cependant, les européens n’ont pas tenu les promesses du sommet de Caire, le leadership africain étant marginalisé, d’autant plus au niveau de l’élaboration de cette stratégie censée répondre aux attentes des deux continents. Toujours, après une telle déception, les européens promettent de palier aux déficiences et élaborer un plan de changement qui peut faire sortir les africains du clan des humiliés. Ces derniers ne cessent d’évoquer leur dignité et le respect de leur leadership sur la terre africaine, mais aussi les intérêts de leurs peuples qui sont animés des mêmes désirent et passions que les autres, et qui méritent de vivre dans des conditions similaires à celles dans lesquelles vive la population européenne.

L’Europe joue le jeu dans un esprit moins cartésien, et le processus du rapprochement pragmatique prend des formes diverses. En effet, , chaque fois que l’occasion se présente, l’UE prétend créer de nouveaux horizons qui, apparemment, répondent aux ambitions que l’Afrique place en tel partenariat. Paradoxalement, il sert uniquement et exclusivement l’intérêt vital communautaire, tout en maquillant les faiblesses des accords et l’insatiabilité des désirs.

Après la déception des premières années de 21èmesiècle, une nouvelle étape a été franchie en 2007.

Pour élever la gestion des projets du partenariat économique au niveau stratégique requis, l’union européenne et l’union africaine, signent une nouvelle convention à Lisbonne. C’est la ‘’The joint africa-EU Strategy’’ qui a été adoptée pour donner un nouvel élan de partenariat aux relations économiques intercontinentales, qui servent les intérêts mutuels avec une responsabilité partagée concernant la paix et la sécurité dans les deux rives.

Cette ‘’joint strategy’’ se veut un cadre globale qui améliore le dialogue politique sur tous les niveaux, et qui donne des résultats quantifiables dans tous les domaines de partenariat[12]. Ceci tourne autour d’un système multilatéral avec des institutions légitimes et représentatives. A travers cette stratégie ; l’Europe et l’Afrique s’engagent à promouvoir le rôle de la société civile et les acteurs non étatiques , en étayant une approche globale et mettant l’accent sur la sensibilité aux conflits qui menace la stabilité et la prospérité des pays qui risquent de virer dans chaos[13].

Pour faire face à leurs concurrents étrangers d’autant plus la Chine, l’Europe a mis en place des initiatives dont l’objectif primordial est de défendre les intérêts de « l’équipe de l’Europe ».

Dans ce sens-là, et en vue de réaliser ses ambitions, l’union Européenne crée une initiative globale qui a pour vocation la réduction de déficit d’investissement mondial, l’Afrique devrait, bien évidemment, faire figure d’un partenaire prioritaire, ayant les ressources rares recherchées par les pays industriels.  Cette stratégie est le ‘’global Gateway’’.

Le global Gateway est un projet à long terme, mis en place par l’EU en vue de rendre opérationnelles ses ambitions géopolitiques sur la scène internationale.

L’union européenne promet, comme à l’accoutumée, d’aider ses partenaires africains de mettre en place un agenda de développement durable, et de servir leurs intérêts géopolitiques d’autant plus l’accès à de nouveaux marchés. Cette stratégie se veut être un agenda conforme au programme de développement durable des Nations Unies (2030).

Les occidentaux proposent  un paquet d’investissements qui vise à accélérer la transition écologique et numérique ainsi que réaliser une croissance durable qui garantisse la création d’emplois décents[14].

D’après les responsables européens, ce paquet  va faciliter la mobilité des capitaux entre les deux continents, ainsi que entre les membres de l’union Africaine, à travers la construction d’une infrastructure hautement sophistiquée qui rendra facile la mobilité des humains et des capitaux, chose que la chine a déjà accomplie dans certains pays qui se sont tournés vers l’empire du milieu dès qu’ils ont constaté que la balance de coopération économique exclusivement concentrée sur l’Europe ne pourrait pas les aider à se relever.

Donc, l’UE fait tardivement le constat que la mise à niveau d’une infrastructure moderne est le secret de réussite des chinois, et ce n’est plus un secret de polichinelle.

Cette nouvelle tendance peut s’avérer comme une politique de jeter de la poudre aux yeux des Africains, qui aspirent à la modernité et au développement, pourtant, les Européens n’ont pas le choix, puisque la coopération avec les chinois, donne des résultats plus ou moins prometteurs. A vrai dire, l’infrastructure s’est modernisée, et le gap entre le passé et le présent est très large. Les exemples sont abondants.

En effet, l’infrastructure est le catalyseur de la transformation structurelle en Afrique. Conscient de cet état de fait, les Etats dans les quatre coins du continent ont commencé à investir dans ce domaine, avec les moyens dont ils disposent. Les deux secteurs cruciaux pour l’industrialisation en Afrique sont les transports et l’énergie, leur état pitoyable nécessite d’impliquer,  à contre gré,   un partenaire étranger qui contribue au développement de l’infrastructure, étant ‘’une charpente de l’industrialisation rapide’’[15] et qui  peut générer davantage des ressources intérieures’’[16]. Cela pourrait aussi accroitre le PIB  de 2 pour cent[17]

Bien entendu, la transformation de l’Afrique demande le développement de l’infrastructure. En vue de satisfaire les attentes de la jeune génération des leaders africains, qui sont plus intègres et déterminés à mettre en place des projets phares qui auront une valeur ajoutée immense pour l’avenir du continent, la stratégie du ‘’Global gateway’’ promet un financement colossal, qui pourrait atteindre les 150 milliards de dollars[18]. Cela rentre dans le cadre d’une stratégie européenne globale qui vise à améliorer l’infrastructure dans le monde entier.

Réaliser l’intégration régionale et la connectivité entre les quatre coins du continent est une condition sine qua non pour le progrès et le développement des membres de l’union Africaine. Donc, pour rivaliser avec le ‘’Belt and road’’, l’Europe mise sur les domaines stratégiques qui sont nécessaires à la réalisation de cet objectif que les africains placent au sommet de leurs priorités.  Le dernier sommet entre les deux unions (février 2022) insiste une fois de plus sur l’amélioration des moyens de transport et de communication, mais aussi l’infrastructure digitale et physique. La mise à niveau des capacités africaines en la matière ne pourrait que faciliter l’importation des produits énergétiques dont le monde est en besoin urgent notamment l’Europe qui pourrait souffrir le martyre si la guerre en Ukraine s’étend dans le temps, plus pire, si jamais Putin ferme le robinet, et manifeste un rejet catégorique de coopérer avec les Européens, au cas où ces derniers resserrent l’étau sur son armée, et imposent autres régimes de sanctions plus sévères avec lesquelles le néo-Keiser se trouverait obligé de passer à un autre stade plus avancé dans sa guerre globale avec l’occident qui s’obstine à imposer le fait accompli.

Dans cet environnement instable, les projets phares de l’énergie se révèlent prometteurs pour l’UA, surtout avec la hausse des prix à l’échelle internationale. Suite à la crise Russo-ukrainienne, l’Afrique pourrait devenir un partenaire potentiel qui satisfait les attentes du vieux continent, et subvient aux besoins des Etats totalement dépendants du Gaz russe, dont l’importation avec un prix supportable reste conditionnée à une position neutre vis-vis de la guerre en Ukraine. Evidemment, les membres de l’OTAN ont mis au défi le kremlin qui répond aux sanctions à sa manière, tout en durcissant les procédures et rendant l’exportation plus difficile et couteuse.

Cette fenêtre d’opportunité qui se présente aux Etats Africains producteurs du Gaze doit être prise au sérieux, ils sont tenus de sauter là-dessus, tout en imposant les conditions qui servent les intérêts vitaux, avec des contrats contraignants qui ne laissent aucune marge de manœuvre à ceux qui sont habitués de marginaliser et humilier les membres de l’UA.

Conclusion :

En effet, les ressources énergétiques aiguisent l’appétit des puissances émergentes, mais aussi les superpuissances économiques traditionnelles. L’Europe se trouve dans l’embarras, d’autant plus après le déclenchement de la guerre en Ukraine. En même temps, éclaboussés par l’hypocrisie qui règne, les Africains aspirent à un changement, et montre une disponibilité, même si prudente, à coopérer avec un agenda clair axé sur les valeurs suprêmes de partenariat.

Bibliographie :

[1] Artwell Nhemachena, Tapiwa V Warikandwa, Samuel K Amoo, Social and Legal Theory in the Age of Dcoloniality (Re)Envisioning Pan-African Jurisprudence in the 21st Century, Langas Research, Publishing CIG Mankon, Bamenda, 2018, p 151

[2] Ibid, XIV.

[3] Arkebe Oqubay and Justin Yifu Lin, China-Africa and an Economic Transformation, published to Oxford Scholorship Online: June 2019.

[4] Thierry Pairault, China’s Presence in Africa is at Heart political, The diplomat, August 11, 2021.

[5] Ibid.

[6]  Les pays membres de l’OPEP coopérant avec la Chine sont L’Angola, le Gabon, la Guinée équatoriale, le Nigéria.

[7] Justin Yifu Lin est doyen de l’Institut de la nouvelle économie structurelle et de l’Institut de la coopération et du développement Sud-Sud.

[8] Josep Borrell, le haut representant / vice-président.

[9]  L’accord de Cotonou, signé le 23 juin 2000,  Titre II : la Dimension politique, Article 8, Dialogue Politique, Alinéa 2,3,4.

[10] Anold H.Kammel, The EU-Africa Partnership: Another Lost Year?, Austria institute  Fur Europa-UND Sicherheitspolitik, FOKUSS? 8/2014. Page 1.

[11] Africa-Europe Summit under the Aegis of the OAU and the EU cairo, 3-4 April 2000,7 April 2000

 Disponible sur le lien suivant: https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/PRES_00_901

[12] The Africa-EU Strategic Partnership : A Joint Africa-EU Strategy, Council of the Euorpean Union, Lisbon, 9 December 2007, 16344/07(Press 291), Page 2. Disponible sur le Lien suivant: https://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/en/er/97496.pdf

[13] Ibid.

[14] UE-Afrique : paquet d’investissement « Global Gateway », le site officiel de l’UE, disponible sur le lien suivant : https://commission.europa.eu/strategy-and-policy/priorities-2019-2024/stronger-europe-world/global-gateway/eu-africa-global-gateway-investment-package_fr.

[15]  16 projets d’infrastructures pour l’intégration Africaine, commission économique pour l’Afrique et NEPAD 2016, Aout 2016, page 14. Disponible sur lien suivant : file:///C:/Users/Ebis/Downloads/b11869495.pdf  .

[16] Ibid.

[17] Ibid.

[18]  Matthew P. Goodman, Akhil Thadani, Global Gateway’s Infrastructure Plan for Africa Announced at EU-AU Summit, Fabruary 28, 2022. Disponible sur lien suivant: https://www.csis.org/analysis/global-gateways-infrastructure-plan-africa-announced-eu-au-summit

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