Évaluation et cartographie des risques d’inondation en milieu rural : application d’un modèle hydraulique 1D
Prepared by the researche : Abdelmonaim OKACHA1, Hamid FATTASSE2, Kamal LAHRICHI2, Mohamed MAKHCHANE3
- 1 Département de la Géographie, Université Abdelmalek Essaâdi, Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de Tétouan, Martil, Maroc
- 2 Département de la Géographie, Université sidi Mohamed ben Abdellah, Faculté des Lettres et des Sciences Humaines sais, Fès, Maroc
- 3 Département de la Géographie, Université Mohamed V, Faculté des Lettres et des Sciences Humaines Rabat, Maroc
Democratic Arabic Center
Journal of African Studies and the Nile Basin : Twenty-Eighth Issue – December 2024
A Periodical International Journal published by the “Democratic Arab Center” Germany – Berlin
Journal of African Studies and the Nile Basin
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Résumé
La délimitation des zones inondables constitue un enjeu central dans la gestion du risque d’inondation, pour lequel les techniques de simulation des données offrent un potentiel significatif. Ce travail vise à élaborer une carte des zones exposées aux inondations en suivant une approche en deux étapes : l’estimation des débits de crue et la simulation des données hydrologiques. Dans la première étape, trois types de méthodes sont appliquées pour estimer les débits de crue : une méthode statistique, une méthode hydropluviométrique de prédétermination des crues, et des formules empiriques permettant de déterminer une valeur moyenne. La seconde étape repose sur un modèle de simulation 1D, utilisé pour représenter les débits de crue et pour générer une cartographie précise des zones à risque.
Abstract
Defining flood-prone areas is a central challenge in flood risk management, where data simulation techniques hold significant potential. This study aims to develop a flood hazard map based on a two-step approach: flood discharge estimation and hydrological data simulation. In the first step, three methods are employed to estimate flood discharge: a statistical method, a hydro-rainfall method for flood pre-determination, and empirical formulas to determine an average value. The second step uses a 1D simulation model to represent flood discharge and generate a precise map of high-risk zones.
Introduction :
Les inondations représentent l’un des phénomènes naturels les plus répandus et les plus dévastateurs à l’échelle mondiale. Selon le rapport du PNUD de 2004, des milliards de personnes dans plus de 100 pays subissent périodiquement les effets de ces catastrophes, qui se distinguent par leur fréquence et leur impact sur les populations. Le Maroc n’est pas épargné, avec des événements tragiques tels que les inondations de l’oued Ourika en 1995, de l’oued Larbaa en 1999 et 2003, et celles de 2008 ayant touché diverses régions (Driouich, Beni Bouayache, Nador, Taza, Tanger, Fnideq…) (B. Layan, 2013 ; D. El Hafid, 2006 ; M. Lasri, 2015). En 2014, l’oued Talmadart a également été le théâtre de crues dévastatrices.
Dans ce contexte, le bassin versant de Nekkor a connu des précipitations exceptionnelles entre le 17 et le 19 novembre 2003, causant des inondations dévastatrices et des dommages matériels et humains importants (A, Okacha, 2020). Des précipitations cumulées de 242 mm à Tamellaht, 222 mm à Zaio, et des valeurs similaires dans d’autres stations, témoignent de l’intensité des perturbations climatiques ayant frappé la région. Ces inondations, comme dans de nombreux autres cas, illustrent la nécessité d’une gestion proactive des risques, basée notamment sur la délimitation précise des zones inondables, élément essentiel pour protéger le domaine public hydraulique, conformément à l’article 1 de la loi n°36-15 sur l’eau, qui considère les berges jusqu’au niveau atteint par les crues comme partie intégrante de ce domaine.
La précision de la délimitation des plaines inondables repose en grande partie sur l’efficacité des techniques de modélisation hydraulique, dépendantes elles-mêmes de la qualité des données de base telles que les débits de crue, ainsi que des données géométriques et topographiques. C’est pourquoi, dans ce travail, l’estimation des débits de crue a été réalisée en s’appuyant sur trois approches : une méthode statistique, une méthode hydropluviométrique pour la prédétermination des crues, et des méthodes empiriques. En complément, des données géométriques ont été élaborées à partir d’un modèle numérique de terrain (MNT) de haute résolution et de profils topographiques en travers, visant ainsi à garantir une délimitation fiable et précise des zones à risque.
- Localisation de la zone d’étude
Le bassin versant de Nekkor se situe dans la partie orientale des montagnes du Rif, au nord-est du Maroc, et s’étend sur les provinces de Taza, Al Hoceima et Driouich. Il est délimité entre les latitudes 34° 69′ et 35° 19′ Nord et les longitudes 3° 36′ et 4° Ouest, couvrant une superficie d’environ 916 km² (Figure 1). Cette région présente une forte densité démographique, avec une population principalement composée d’agriculteurs sédentaires, en majorité âgés (El Abassi, H. 1997 ; Okacha, A. 2020).
Le bassin de l’Oued Nekkor évolue sous un climat méditerranéen semi-aride, marqué par une pluviométrie hautement variable, tant dans le temps que dans l’espace. Les versants exposés aux perturbations océaniques de l’ouest bénéficient de précipitations plus importantes, tandis que les zones orientées vers l’est sont généralement plus arides. L’occupation des sols est dominée par la céréaliculture et l’arboriculture, tandis que la végétation naturelle se limite à quelques zones de matorrals très dégradés.
Sur le plan morphologique, les parties amont du bassin se caractérisent par des crêtes montagneuses atteignant jusqu’à 2 000 mètres d’altitude, avec des pentes souvent abruptes, dépassant 30 %. Les zones intermédiaires se composent de moyennes montagnes et de collines, offrant un relief plus doux et des pentes moins prononcées. Au nord du bassin s’étend la plaine de Nekkor, où les pentes deviennent progressivement plus douces.
Sur le plan tectonique, le bassin versant est traversé par la faille de Nekkor, une des principales discontinuités du Rif, qui joue un rôle crucial dans l’évolution géodynamique de la région (Salhi, 2008). Cette faille est à l’origine de nombreux séismes, avec des répercussions importantes tant sur les populations que sur l’économie locale. Lithologiquement, le bassin est principalement constitué de marnes, schistes, flyschs, calcaires, marno-calcaires, et grès, qui influencent les dynamiques d’érosion et de ruissellement.
Figure 1 Situation géographique de la zone d’étude.
Les phénomènes extrêmes, notamment les épisodes de précipitations intenses, constituent un risque majeur dans la région du bassin versant de Nekkor. Un exemple frappant de ces événements est l’épisode pluvieux du 19 novembre 2003, où, entre 6 h et 9 h, des pluies intenses ont été enregistrées sur une large portion du nord-est du Maroc (Figure 2). Au cours de cette période de trois heures, des quantités exceptionnelles de pluie ont été relevées, atteignant jusqu’à 87 mm dans certaines localités. Cette répartition spatiale et temporelle des pluies a provoqué des crues soudaines, exacerbant les risques d’inondation et occasionnant des dégâts humains et matériels considérables le long des oueds du bassin. Ces événements extrêmes soulignent l’importance de la modélisation des inondations et de la gestion des risques dans cette région sujette à de fortes variabilités climatiques.
Figure 2 La réparation spatiale des pluies en mm pendant trois heures du 19/11/2003 de 06 h à 09 h dans le Nord-Est du Maroc.
Méthodologie et outils :
- Estimation des débits de Crues :
La prédétermination des débits maximums des crues est un intérêt socio-économique en raison des effets destructifs sur les milieux physiques et les infrastructures.
La validité et la fiabilité des résultats obtenus par la modélisation dépendent fortement à la disponibilité et la qualité des données de base. À ce titre, pour obtenir sur une plateforme des données de base de haute qualité nous avons suivi une méthodologie cohérente qui nous permet d’obtenir sur des résultats fiables. Dans le même sens, l’estimation des débits de crue a été basée sur trois types des méthodes qui permettent d’estimer les débits des crues sont comme suit : Méthode statistique, Méthode hydropluviométrique de prédétermination des crues et méthodes basées sur l’application des formules empiriques (tableau 1).
- Méthode statistique :
Les méthodes statistiques permettent de calculer la probabilité pour qu’un débit supérieur à une valeur donnée survienne un nombre de fois données pendant une durrée donnée (M. Achite et al, 2006). L’analyse fréquentielle d’une longue série de débits maximaux permet de déterminer le temps de retour d’une valeur particulière. Le modèle fréquentiel choisi dans cette analyse c’est le modèle le plus utilisé dans la description du comportement statistique des valeurs extrêmes qui est la loi de Gumbel.
- Méthode hydropluviométrique de prédétermination des crues :
Ce type des méthodes permet de transformer les pluies maximales en débits maximums. Parmi les méthodes hydropluviométriques de prédétermination des crues, on retrouve la méthode de Gradex (1967), cette dernière est une approche probabiliste du calcul des débits de crue à partir d’une série des pluies journalière. Elle représente l’une des méthodes les plus efficaces pour l’estimation des crues de projet. En effet, cette méthode est vérifiée par plusieurs auteurs de différentes régions du monde (France, Amérique, Australie et Afrique du sud) ( Hershfied D.M et Kholer M.A, 1960 . CTGREF, 1972).
- Méthodes basées sur l’utilisation des formules empiriques :
Il existe plusieurs méthodes basées sur l’application des formules empiriques, on peut les regrouper en trois groupes :
- Formules empiriques utilisant seulement la surface du bassin ;
- Formules empiriques faisant intervenir la précipitation ;
- Formules empiriques faisant intervenir la période de retour.
Dans cette partie, l’estimation des débits de crue a été basée sur quatre formules empiriques faisant intervenir la période de retour (Formule de Maillet et Gauthier, Méthode Rationnelle, Formule de Hazan Lazaravic et formule de Fuller II) et une seule formule empirique faisant intervenir la précipitation (Formule de Possenti).
Méthodes | Noms | Formules ou mode d’application. | Années |
Maillet et Gauthier. | (Enoncé, Coutagne, 1951) | ||
QT : débit de pointe en m3/s de période de retour Tannées | |||
A : superficie du bassin versant en km2 | |||
empiriques |
L : longueur du talweg principal en km | ||
Hm : hauteur moyenne de la précipitation en mètres | |||
k : paramètre (facteur pluviométrique considéré dans sa variabilité) | |||
a : paramètre (facteur pluviométrique considéré moyennement) | |||
Rationnelle | (enoncé initial, Mulvaney.T.J, 1851) (Modifié, Kuichling. E, 1889) | ||
Q : débit en m3/s. | |||
C : coefficient de ruissellement en %. | |||
I : intensité de l’averse en m/s de durée égale au temps de concentration du bassin et de fréquence égale de celle du débit cherché. | |||
A : surface du bassin versant en m². | |||
Hazan Lazaravic | |||
Pour le Rif oriental K1 = 7.58 et K2 =0.808. | |||
a : coefficient variant de 2 à 3,5. | |||
t : temps de retour. | |||
Fuller II | (enoncé initial, Fuller, 1914) (Modifié, Bouziane, 1997) | ||
a : coefficient variant entre 0.7 et 1.7 et pouvant dépasser 2 dans les régions arides | |||
N : coefficient généralement pris égal à 80 en plaine et 100 en montagne | |||
Possenti | (Enoncé, EMI, 1999) | ||
Q = débit maximum en m3/s | |||
Hm : pluie maximum en 24 heures | |||
Am : superficie de la région montagneuse du bassin en km2 | |||
L : longueur du talweg | |||
Ap : superficie de la région plaine du bassin en km2 | |||
: coefficient d’ajustement compris entre 700 et 800 | |||
hydropluviométrique | Gradex | Mode d’application de la méthode” tel qu’il a été énoncé par M. Guillot | (Enoncé, Guillot et al, 1967) |
statistiques
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loi de Gumbel |
Avec la variable réduite suivante : a et b sont les paramètres du modèle de Gumbel. |
Tableau 1 – Méthodologie adoptée pour estimer les débits des crues.
Certaines méthodes empiriques se sont basées sur le temps de concentration. L’estimation de temps de concentration a été basée sur quatre méthodes sont comme suit : Méthode de Kirpich californienne, méthode d’Epagnole, méthode de Turraza Passini et méthode de Venture (tableau 2).
Noms | Formules |
Kirpich californienne | |
Tc : est le temps de concentration en min. | |
L : est longueur du Talweg en m. | |
I : est la pente moyenne du talweg en m/m. | |
Epagnole | |
P : est la pente moyenne du talweg en m/m. | |
Turraza Passini | |
A : la superficie du bassin versant en km² | |
Venture |
Tableau 2 – Méthodologie adoptée pour calculer le temps de concentration.
- Modélisation hydraulique :
La détermination des zones inondables a été basée sur la modélisation hydraulique, cette dernière s’est basée sur le logiciel Hec-Ras qui permet de déterminer les caractéristiques de l’Aléa hydrologique (déterminer les zones inondables, la hauteur d’eau et la vitesse …). Les données de base pour la mise en place du modèle ont été fournies par différents établissements public et puis complétées par le travail du terrain.
La préparation des données géométriques et topographiques s’est basée sur Hec-Geo-RAS à l’aide d’un modèle numérique du terrain (MNT) du système fluvial étudié de haute résolution 6m*6m et des profils topographiques ont été élaborés à l’aide d’un appareil altimétrique.
Discussion et résultats :
- Méthodes utilisées pour estimer les crues de retour :
- Méthode hydropluviométrique de prédétermination des crues :
Tableau 3 – Gradex des pluies,Volumes,lames d’eaux, précimitations journaliéres maximums, variables réduites, Coefficients de ruissellement et débits pour différentes période de retour |
La méthode du GRADEX est une approche hydropluviométrique probabiliste du calcul des débits de crues extrêmes de différentes périodes de retour. Cette méthode a été établie par (Guillot et Duband, 1967), elle a été modifiée par (Maurro Da Ghumba Naghettini, 1994). Elle représente l’une des méthodes les plus eficaces pour l’estimation des crues de projet. En effet, cette méthode est vérifiée par plusieurs auteurs des différentes régions du monde (France, Amériques, Australie et Afrique du sud) (Hershfield D.M et Kholer M.A, 1960. CTGREF, 1972). Le mode suivi dans l’application de cette méthode ” tel qu’il a été énoncé par M. Guillot en 1967 (voir le tableau 3). En comparaison avec les valeurs adoptées, cette méthode montre des écarts faibles pour les différentes périodes de retour (voir la figure 6 et 7).
- Temps de concentration :
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Tabeau 4- Comparaison de 4 formules de temps de concentration |
À titre de comparaison entre les différentes formules utilisées pour calculer le temps de concentration, on observe que la formule de Kirpich Californienne et la formule d’Espagnole donnent des résultats comparables surtout dans les petits bassins versants (voir le tableau 4). Et c’est la même chose pour les formules de Turrazza Passini et la formule de Venture donnent des résultats semblables (voir le tableau 4). Cela peut expliquer par les paramètres utilisés dans les formules, les deux premières formules utilisent la longueur et la pente du talweg comme des paramètres communs et les deux dernières formules utilisent la superficie du bassin versant comme un paramètre commun. On peut donc dire que c’est difficile de trouver le domaine de validité des formules de temps de concentrations, d’autant plus que selon les littératures, pour une même formule, les temps de concentration de validité varient. C’est pourquoi nous avons utilisé plusieurs méthodes afin de déduire une valeur moyenne.
- Méthode statistique :
Le modèle fréquentiel choisi dans cette analyse c’est le modèle le plus utilisé dans la description du comportement statistique des valeurs extrêmes qui est la loi de Gumbel (loi double exponentielle).
Etant donné qu’il n’a pas de station hydrologique au niveau de la zone étudiée, la station hydrologique la plus proche se situe presque 6 km en amont de la zone étudiée. C’est pourquoi nous avons utilisé la formule empirique des auteurs Francou et Rodier (1969) qui ont constaté que dans les régions relativement homogènes, les points étaient ou moins alignés. Ils en ont déduit une formule générale de la forme (Taha .B.M.J. Ouarda et al. 2001) :
Q/Q0 = (A/A°)1-k/10
Où :
Q = débit maximum en m3/s
Qo = débit maximum d’une crue observée dans un bassin de superficie Ao (en km2)
A = superficie du bassin versant en km2
k = coefficient de Francou-Rodier.
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Tableau 5 – Débits maximums instantanés annuels en m3/s de l’oued Nekkor au niveau du centre rural Arbaâ Taourirt calculés selon la méthode de Francou et Rodier et classés en ordre croissant (Source : Agence du bassin hydraulique de Loukkos) |
Les données de base utilisées dans l’analyse fréquentielle sont constituées par une série des débits maximums d’une période de 18 ans de station hydrologique de Takensouft transformées par la formule de Francou et Rodier (Tableau 5).
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Tableau 6 débits de l’oued Nekkor au niveau du centre rural de Arbaâ Taourirt pour différentes période de retour selon la méthode statistique. |
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Tableau 7 débits de l’oued Ait Amar pour différentes période de retour selon la méthode statistique. | ||||||||||||||||||||||||
- Méthodes basées sur l’utilisation des formules empiriques :
- Formules de Maillet et Gautier :
Cette méthode est souvent utilisée au Maghreb, selon Mohamed ACHITE et al cette formule pourra être utilisée comme moyen d’estimation des crues dans les bassins non jugés à conditions biophysiographiques similaires aux caractéristiques du bassin d’oued Sly. Le bassin versant de l’oued Nekkor est caractérisé par des conditions biophysiographiques comparables aux celles de bassin de l’oued Sly. Les valeurs adoptées, des deux bassins versants, par cette méthode sont très proches à celles obtenus par la moyenne des formules empiriques (voir le tableau 8)
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Tableau 8- débits pour différentes période de retour selon Méthodes basées sur l’utilisation des formules empiriques. |
- Méthode Rationnelle :
Cette méthode a été conçue pour estimer les débits de pointe des bassins versants dont la superficie est inférieure à 200 km².
En comparaison avec les valeurs adoptées, cette méthode montre des écarts faibles pour les faibles périodes de retour. Ces écarts prennent de l’ampleur au fur et à mesure que le temps de retour devient de plus en plus grand (voir la figure 4 et 5). Cela peut expliquer par la grande sensibilité des paramètres de cette formule.
- Formule de Hazan lazaravic :
La méthode de Hazan lazaravic est adaptée aux bassins versants marocains. Les auteurs de formule de Hazan Lazaravic ont utilisé des données provenant d’une quainzaine des stations hydrologiques réparties sur différents bassins couvrant le territoire marocain (Bouziane, 1997).
Pour le bassin versant de haut Nekkor, les valeurs des débits obtenues par cette méthode sont très proches à celles des valeurs adoptées pour les périodes de retour 10, 20, 50 et 100 et montrent des écarts moins importants pour la période de retour millennale (voir le tableau 6 et la figure 5). Pour le bassin versant de l’oued Ait Amar, cette méthode montre des écarts constants pour toutes les périodes de retour (voir le tableau 6 et la figure 4).
- Formule de Fuller II :
Cette approche est plus adéquate pour les deux bassins versants étudiés, la courbe des débits obtenus par cette méthode est conforme approximativement juste à celle des valeurs adoptées par la moyenne de différentes méthodes (voir les figures 3 et 4).
- Formule de Possenti :
D’après l’analyse des graphes des figures 4 et 5, on peut déduire que la formule de Possenti est plus adéquate pour les grands bassins versants que pour les petits.
Figure 3 Débits maximums des crues obtenus par différentes méthodes utilisées pour différentes périodes de retour de l’oued Ait Amar. |
Figure 4 Débits maximums des crues obtenus par différentes méthodes utilisées pour différentes périodes de retour de l’oued Nekkor. |
Toutefois, toutes les méthodes montrent des écarts faibles pour les faibles périodes de retour. Ces écarts prennent de l’ampleur au fur et à mesure que le temps de retour devient de plus en plus grand (voir la figure 3 et 4).
La méthode statistique donne des valeurs faibles (voir figure 4), surtout dans le bassin versant haut Nekkor, on suppose qu’il y a la série de débits analysée n’est pas assez longue (18 ans) ou il y a un problème au niveau du jaugeage (certaines valeurs des débits ne sont pas homogènes avec celles des pluies enregistrées dans les stations pluviométriques de voisinage). Si l’ajustement est réalisé sur des séries trop courtes, cela peut conduire à des estimations loin de la réalité. Donc, cette méthode est appropriée pour les bassins versants avec de longues séries de débits.
Si nous ne prenons pas en compte la méthode statistique, toutes les méthodes donnent des résultats comparables surtout dans le bassin versant Haut Nekkor. Donc, les méthodes adéquatent pour estimer les débits de crue utilisés dans la simulation des zones inondables au niveau du centre rural de l’Arbaâ Taourirt sont comme suit : Méthode hydropluviométrique de prédétermination des crues, formule de Maillet et Gauthier, méthode Rationnelle, Formule de Hazan Lazarevic, formule de Fuller II et la formule de Possenti.
- Modélisation hydraulique :
Pour cartographie les zones inondables au niveau de la zone d’étude, nous avons élaboré un modèle hydraulique s’est basé sur les éléments suivants : une image raster de résolution de 6m*6m, des débits de retour des périodes 10 ans, 20 ans, 50 ans, 100 ans et 1000ans, des images satellitaires récente de haute résolution des profils topographiques correctés à partir de travail de terrain.
Figure 5 Zones inondées par différentes crues de retour au niveau de centre rural Arbaâ Taourirt. |
Dans la figure 5, la carte des zones inondées par différentes crues de retour montre qu’une grande extension de la crue décennale (300 mètres de la largeur) et des faibles écarts spatiaux entre les différentes crues de retour. Cela peut expliquer par le style fluvial et le type de la dynamique fluviale dominant dans cette zone ; la plaine alluviale de l’oued Nekkor au niveau du centre rural Arbaâ Taourirt est constituée par un lit en tresse très large sa la largeur peut atteindre dans certains endroits 280 m, ce lit regroupe à la fois le lit mineur et le lit moyen et comprend un grand nombre des chenaux d’écoulements. Les différentes crues de retour peuvent donc remplir complètement ce lit. La capacité de transport de la dynamique latérale est supérieure à celle de la dynamique longitudinale.
Figure 6 – Zone inondée par la crue Centennale (Couleur Blue) de l’oued Nekkor au niveau de centre rural Arbaâ Taourirt. |
Photo 1 – Centre rural Arbaâ Taourirt. (A, B, C et D sont des points de repères choisis de façon à permettre une liaison entre la figures 7 et la photo 1) |
Le centre rural Arbaâ Taourirt s’est développé sur les deux rives de l’oued Nekkor, ce développement plus remarquable sur la rive gauche (voir la photo 1). Les habitants se sont installés sur le lit majeur de l’oued Nekkor en raison de la disponibilité des terres plates et des sols fertiles, et à cause de l’absence des normes juridiques à organiser les constructions dans cette zone. Cette extension spatiale des habitats sur les zones inondables est justifiée par les résultats obtenus, la carte des zones inondées par les différentes crues de retour montre qu’une partie de la rive gauche de l’oued Nekkor sur laquelle a été développé le centre rural Arbaâ Taourirt est submergée par les différentes crues de retour (voir les figures 5 et 6). Il faut noter que ce centre est constitué par deux noyaux, le noyau principal se situé sur la rive gauche de l’oued Nekkor et l’autre noyau se situé sur l’autre rive. Malheureusement, il y n’a pas d’un pont pour que les citoyens puissent s’y déplacer entre les deux rives, et pour que les enfants puissent à l’école sans danger au moment de la montée de la crue, surtout que les établissements scolaires concentrés au sein du noyau gauche. Les seuls moyens qui permettent de déplacement des citoyens entre les deux rives sont les pistes temporaires qui sont tracées par le passage répété des véhicules et par le creusement des eaux des chenaux du lit en tresse.
Conclusion et perspectives :
Les résultats de cette étude ont permis d’identifier les méthodes les plus adaptées pour estimer les débits de crue dans le bassin versant de l’oued Nekkor, à Arbaâ Taourirt. Les méthodes hydro-pluviométriques et les formules empiriques se sont révélées les plus performantes pour ce cas d’étude, tandis que les méthodes statistiques ont montré leurs limites face à la courte durée des séries de données disponibles.
Par ailleurs, la simulation numérique a permis de délimiter les zones inondables et de mettre en évidence la vulnérabilité de certaines zones du centre rural Arbaâ Taourirt face aux crues. Ces résultats soulignent l’importance de disposer de cartes des risques d’inondation pour une gestion efficace de ce risque.
L’intégration de ces cartes dans les documents juridiques constitue une avancée majeure pour la prévention des risques d’inondation. En effet, cette démarche permet de :
Mieux informer les populations : Les cartes des risques permettent de sensibiliser les citoyens aux dangers liés aux inondations et de favoriser une culture de la prévention.
Améliorer l’aménagement du territoire : En identifiant les zones à risque, il est possible d’orienter les projets d’aménagement vers des secteurs moins exposés aux inondations.
Concernant les perspectives, cette étude ait apporté des éléments de réponse intéressants, plusieurs pistes de recherche restent à explorer :
Affiner les modèles hydrologiques : Pour améliorer la précision des simulations, il serait intéressant de développer des modèles hydrologiques plus complexes, intégrant notamment les effets du changement climatique.
Intégrer d’autres sources de données : Les données de télédétection, les données géologiques et les données socio-économiques pourraient apporter des informations complémentaires pour une meilleure compréhension des processus d’inondation.
Évaluer l’évolution des risques dans le temps : Il serait pertinent de réaliser des études diachroniques pour analyser l’évolution des risques d’inondation en fonction des contraintes climatiques et des aménagements du territoire.
Développer des outils d’aide à la décision : Des outils d’aide à la décision pourraient être développés pour aider les décideurs à mettre en œuvre des mesures de prévention et de gestion des risques.
En conclusion, cette étude met en évidence l’importance de la modélisation hydrologique pour une meilleure compréhension des processus d’inondation et pour une gestion efficace des risques. Les résultats obtenus ouvrent des perspectives intéressantes pour de futures recherches et pour l’amélioration de la gestion des risques naturels dans le contexte du changement climatique.
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