Research studies

SYSTEMES ET TECHNIQUES D’IRRIGATION TRADITIONNELLE DANS L’OUED-NOUN-REGION DE GUELMIM

TRADITIONAL IRRIGATION SYSTEMS AND TECHNIQUES IN THE OUED-NOUN-REGION OF GUELMIM SOUTH OF MOROCCO

Prepared by the researcher – M’bark  BOULLAH  ,  Abdellah BOULLAH – Chercheurs en Géographie , Centre des Etudes et des Recherches sur L’Espace Marocain. Marrakech- Maroc

Democratic Arab Center

Journal of African Studies and the Nile Basin : Tenth Issue – January 2021

A Periodical International Journal published by the “Democratic Arab Center” Germany – Berlin

Nationales ISSN-Zentrum für Deutschland
ISSN  2569-734X

Journal of African Studies and the Nile Basin

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ABSTRACT

            The exploitation of water resources in Moroccan Saharan areas, in particular the oasis, is known as an elaborate measure adopted by the farmers of OUED Noun. The irrigation systems and techniques used for collection, distribution and distribution bear witness to long-standing agricultural history and a great adaptation to the natural and climatic conditions of the Saharan areas.

            Water resources for irrigation depend on collection techniques, through the use of runoff and floods. Groundwater is also used for irrigation, as the KHATARAT technique is one of the most widely used methods in the past, which allows the natural flow of water without the use of lifting techniques or use of mechanical energy. In addition to the use of individual wells, relying on traditional methods of water withdrawal.            the aiguadier, By its qualities and its importance as a main element in the field of irrigation; is responsible for controlling the flow of sources and monitoring the underground pipes of khettaras and those of open seguias             In this article, we review the traditional techniques and methods used in the exploitation of water in the oases of OUED NOUN, in addition to the role that the water manager plays through the development of his functions and l importance of its position within the oasis community.

             L’emploi de l’irrigation, dans l’Oued-Noun qui constitue un point de passage stratégique, a permis une attraction humaine et la fixation d’une population attachée solidement à ses terres et à leur droits sur l’eau. Ces communautés ont fondé leur organisation socio-économique sur l’irrigation afin d’exploiter le milieu envie d’une meilleure productivité possible.

           Le système hydraulique mis en place, les techniques employé ; de collecte, de répartition et de distribution, témoignent d’une histoire agricole prospère et d’une remarquable adaptation aux conditions physiques et climatiques du milieu présaharien. La présence des oasis dans ce milieu où le climat est un facteur déterminant montre l’importance. et l’évolution de ces systèmes d’irrigation.

Cet héritage est le résultat de la grande expérience de nos ancêtres depuis des temps immémoriaux qui a survécu aux contingences historiques locales jusqu’a nos jours.

A – Origine et nature des ressources en eau destinées à l’irrigation : 

          Le labyrinthe des séguias qui parcourent les périmètres irrigués de l’Oued-noun constitue un dispositif de canaux d’irrigation considérable ; ayant chacun leur prise sur les oueds débouchant sur les dépressions topographiques ou alimenter par  des khettaras [1] ou par des sources naturelles. Ces ressources hydrauliques ont permis la création des secteurs d’irrigation distincts qui varient selon l’origine et l’importance de l’eau.

En se basant sur les exemples rencontrés sur le terrain, nous avons réussi à distinguer dans ce bassin hydraulique les différentes catégories de ressources en eau suivant leur particularités et les modalités de leur exploitation :

– En premier lieu, on trouve les eaux superficielles qui forment une originalité de la région ; leur mobilisation est basée sur l’utilisation des eaux de ruissellement et des crues, qui sont exploités avec une grande ingéniosité.

  • La deuxième catégorie de ressources englobe les eaux d’origine souterraines ; en particulier les eaux des puits, des khettaras, des sources naturelles et les résurgences des  lits des oueds.

  • Les eaux superficielles : méthodes traditionnelles de captage :
    • – L’irrigation à partir des eaux de ruissellement :

         Ce système d’irrigation est très limité dans l’espace, son existence est liée à la présence des ravins et des torrents qui coulent sur les cônes de déjection et sur les terrasses avoisinantes, ainsi que la présence des pentes qui favorisent le ruissellement et la concentration de l’écoulement.

          En effet, l’exploitation de ces eaux qui ruissellent est réalisée grâce à la pratique d’une technique simple et rudimentaire qui est la construction des vallons aménagés sur les endroits de concentration de l’écoulement. Le type le plus répandu de cet aménagement élémentaire consiste à construire de simples digues nommées localement  allal , d’une hauteur de 40 à 80cm  et faites essentiellement de matières prises sur place , en particulier des pierres sèches, de l’argile et des troncs de palmiers, déposés sous forme d’obstacles échelonnés du haut en bas, séparés les uns des autres de 5 à 10m de distance par endroit et leur construction faites perpendiculairement par rapport à l’axe de l’écoulement.

          Ces aménagements rudimentaires destinés à retenir les eaux des averses qui ruissellent derrière ces levées, permettent d’étaler les eaux piégées et de les diverger sur la première planche. Dès que celle-ci est saturée, l’eau en excédent déborde et s’écoule vers la planche située en contrebas. La même opération se déroule d’une planche à l’autre, jusqu’à la dernière qui laisse écouler le surplus de l’eau vers les zones très basses situées en aval. On rencontre la pratique de cette technique de captage chez les habitants des villages situés à proximité des cônes de déjection, en particulier aux alentours de Tagant, Toutline, Iguissel et ksabi.

1-2 – L’irrigation à partir des eaux de crues :

          L’irrigation par épandage des eaux de crues se pratique le long des oueds importants, et ce depuis longtemps, dans le but de faire bénéficier les cultures céréalières d’apport en eau complémentaire en plus des précipitations naturelles.

 L’exploitation de ces eaux s’effectue par leurs dérivation vers les zones basses dites maâders ou ’’ zones faïds ’’ , ce terme désigne toutes les terres inondées par les eaux de crues ; d’où un simple aménagement permet d’amener l’eau vers les terrains à irriguer par une simple dérivation. Pour effectuer cette tâche dans une période très courte, ce travail exige au fellah de faire appel à la main d’œuvre  familiale disponible pour dériver dans le délai le plus court le maximum des eaux suffisantes pour garantir une bonne production des cultures céréalières pratiquées. En effet, dans cette région, les principales zones d’irrigation à partir des eaux de crues se localisent aux alentours des villages de Fask, Tighmert et Assrir ; zones qui dominent touflit Aït Hmad et les maâders d’Aït Massâoud, ainsi que la zone de confluence de l’Oued Seyad et Oued Oum-Laâchar à la hauteur des villages d’Ouaâroun et Ksabi où prédomine les maâders d’Aït Lahcen riches en limon et argile, sans oublier le périmètre situé au alentours de Tagant qui profite des eaux de crues occasionnelles.

2-L’exploitation des eaux souterraines :

  • -L’irrigation à partir des sources naturelles :

          Dans cette région d’étude, nous distinguons trois types de sources qui alimentent les périmètres existants :

– Les sources des piémonts des bordures montagneuses sud de l’Anti-Atlas notamment celles liées aux cluses (foums).

– Les sources et les résurgences du lit des oueds.

– Les sources qui affleurent dans les plaines et les petites dépressions.

La distribution de l’eau des sources s’effectue d’une manière permanente ; jour et nuit. L’eau est recueil liée dans des bassins quand il s’agit des sources à faible débit ou se répand continuellement dans les canaux à partir de la source.

Quand aux sources et résurgences du lit des oueds, leur exploitation exige l’aménagement d’un barrage traditionnel construit perpendiculairement par rapport à l’axe de l’oued. Cet ouvrage permet l’augmentation du niveau de l’eau afin qu’elle puisse être acheminée dans les canaux d’amenés par simple gravité. Ce système de captage direct et permanent nécessite une méthode de répartition ayant comme base la durée et non la quantité, de sorte que le propriétaire ne reçoit pas sa part d’eau en volume, mais jouit du droit d’utiliser l’eau pendant un temps limité.

Ph n° 1 : partiteur des eaux des villages d’Asrir et Tighmert

                                                                                                                 (source Boullah)

2-2 – L’irrigation à partir du khettara : une technique impressionnante adaptée au milieu pré-saharien :

             Cette technique très répandue dans le passé, persiste encore aujourd’hui dans cette région. Son intérêt et de permettre un écoulement naturel par simple gravité, sans l’emploi des moyens techniques d’élévation et sans énergie mécanique. Elle consiste à capter l’eau de la nappe et l’acheminer à l’aide d’une galerie souterraine creusée à un niveau inférieur à celui de la nappe.

          La construction des khettaras nécessite la perforation, le long du parcours du drain, d’un nombre considérable de puits pour évacuer les déblais enlevés du fond et permettre l’aération de la galerie pendant les travaux, leur importance devient aussi indispensable lors du curage et du nettoyage périodiques.

Figure n ° : 1     Schéma Théorique d’une Khettara à LEGZAZMA

                                                                            Source : élaboration personnelle

            Dans la majorité des khettaras visitées, les puits sont distants de 8 à 12m environ et leur profondeur varie entre 7 et 10m. L’ensemble de ces puits est lié par une galerie souterraine creusée soigneusement à partir d’un point d’eau, pour permettre l’écoulement des eaux à l’aide d’une faible pente bien calculée afin de ralentir l’écoulement pour éviter le creusement du lit. En effet, la khettara commence du point d’eau repéré, où les constructeurs creusent le puit  principal nommé localement ’’rass-aqbou’’. Ce puit de tête, creusé verticalement à partir de la surface, permet d’atteindre l’eau de la nappe souterraine. De ce puit débute le creusement d’une galerie étroite de 0,80m de largeur et d’environ 1m de hauteur.

 

                                                 Figure n° 2 :  Vue aerienne d’une Khettara

exploitations

exploitations

                                                                                              Source : élaboration personnelle

             Les descriptions précédentes permettent de dégager les composantes des khettaras visitées, qui se résument dans une conduite souterraine aérée par des puits et une tranchée à ciel ouvert qui débouche sur un bassin d’accumulation. D’où, la nécessité de ce bassin vient de son importance dans l’organisation et la gestion des eaux ; qui due d’une part à son rôle de stockage des eaux et d’autre part  à la répartition et à la distribution des parts d’eau entre les ayants droit.

                                  Pho. n°2 : Bassin  d’accumulation à Tighmert 

Source :Boullah

2-3 – Les puits individuels et les modalités traditionnelles de puisage :

L’effondrement de la structure sociale traditionnelle et la faiblesse de la pluviométrie, ont incité les paysans à chercher un autre procédé de la mobilisation des eaux qui se réalise à  l’aide du forage des puits.

Selon nos investigations et les traces rencontrées sur le terrain, nous distinguons deux types de puits à équipement traditionnel :

à )  Le puits à naora :

           Ce système se particularise par les différents éléments qui le composent , il s’agit d’un système constitué de deux poulies fabriquées généralement en bois ou en métal ( nommé localement ’’jerrara’’) dont celle de dessus est attachée à une branche, souvent en tronc de palmier. Cette dernière et soutenu par deux mûrs battu en majorité en pisé ou en pierres. Sur chaque poulie passe une corde à laquelle est attachée une outre en caoutchouc muni de deux ouvertures, une grande qui permet le remplissage en eau et une petite qui sert à vider l’eau puisée.

           Ce mécanisme fonctionne à l’aide de la traction animale, souvent un âne, un bœuf ou un chameau, d’où l’opération de puisage s’effectue par un mouvement de va et vient de la bête de trait sur un chemin incliné constitué essentiellement pour faciliter ce mouvement. A chaque montée de l’outre, l’eau se vide automatiquement dans un petit bassin, d’où elle passe directement dans un deuxième bassin d’accumulation.

b ) Le puits à dalou :

           L’équipement de ce puits consiste à installer sur son ouverture deux branches verticales liées par une troisième branche horizontale. Cette dernière permet la fixation d’une poulie ’’ jarrara ’’ par laquelle passe une corde attachée à un sceau en caoutchouc nommé localement ’’ dalou ’’ qui signifie au même temps le nom de ce système.

              Il convient de préciser que dans ce type de puits, le puisage de l’eau s’effectue à l’aide de la traction humaine. En effet l’énergie utilisée permet la montée du sceau remplit d’eau et le versé directement dans un petit bassin. A partir de ce dernier, l’eau s’achemine directement par un système de rigoles dirigés vers les planches à irriguer sans être accumuler dans le bassin de réception.

                    Ph n° 3 : distribution de l’eau au niveau de la parcelle à irriguer

                                                                                                                     Source :Boullah

            En résulte que malgré leur importance socio-économique dans l’histoire de l’agriculture, il semble que la création des puits traditionnels ce n’est qu’une phase de l’évolution des systèmes d’irrigation. Car leur incapacité de répondre aux besoins en eau pour intensifier les cultures et étendre les superficies irriguées, a entraîné l’abandon de ce procédé et l’introduction d’un nouveau model d’irrigation. Ce changement marque le début d’une nouvelle époque d’irrigation caractérisée par l’apparition et l’installation des moto-pompes au sein des exploitations traditionnelles.

B- Gestion et contrôle des systèmes d’irrigation traditionnelle:

            La valeur de l’eau et la complexité de son problème, demande une solide entente et une parfaite organisation sociale pour éviter les litiges et les affrontements provoqués par les problèmes liés à la question de l’eau . Quoi qu’il en soit, la mobilisation de ce don précieux nécessite le contrôle d’un organisme expérimenté dans la matière afin d’assurer une bonne gestion de l’eau. Dans le but de réaliser cet objectif, la communauté oasienne désigne un important appareil administratif connu localement par la jmaâ [2]; constitué des membres appartenant exclusivement du même village et qui ont un sens communautaire en matière de gestion et d’entretien du réseau hydraulique. Ce groupe constitué de membre de l’assemblée générale s’occupe de la gestion de l’eau et se charge aussi de maintenir l’ordre social entre les différentes communautés hydrauliques avoisinantes et groupes d’irrigants.

        Pour assurer le bon fonctionnement du système hydraulique et les conditions optimales de sa gestion, la jmaâ désigne un aiguadier  ( responsable de la répartition de l’eau ) et des assistants pour chaque seguia . La fonction de ce personnage consiste à veiller sur le bon état du canal d’irrigation dont il est responsable ainsi  que le contrôle du partage des parts d’eau entre les ayants droits.

1 – L’aiguadier : gestionnaire des eaux et responsable du réseau d’irrigation :

            Dans les oasis de l’Oued-Noun, la distribution de l’eau des sources est confiée par la jmaâ de chaque village à une ou plusieurs personnes connus par leur justice, leur honnêteté et leur connaissance profonde en matière hydraulique. Par ses qualités et son importance comme élément principal dans le domaine de l’irrigation ; l’aiguadier se charge du contrôle du débit des sources et la surveillance des canalisations souterraines des khettaras et celles des seguias à ciel ouvert.

           Le nom de ce personnage de première importance varie selon la diversification des oasis de l’Oued-Noun. En effet la variabilité de cette nomination dérive de la différence des origines et des cultures des communautés arabe et amazigh qui détiennent les seguias. Selon ces critères l’aiguadier est connu par exemple à la palmeraie d’Asrir par ’’ mqadam almasref ’’, une nomination arabe qui signifie chef du seguia. Le même responsable   connu à la palmeraie de Tagant par la nomination ’’ amin-o-aman ’’ cette nomination Amazigh signifie chef de l’eau.

           En outre dans toutes les seguias, quelques soient leurs importance, ce responsable principal est aidé dans ses fonctions par des assistants dont le nombre varie d’une seguia à l’autre. En effet l’appellation de ces administrateurs de second degré varie aussi d’un village à l’autre selon la variation des origines ethniques de ces derniers.

           A titre d’exemple, l’assistant est nommé à Asrir et Tighmert par ’’ Sarrat ’’ ; désignation arabe qui signifie celui qui partage de l’eau, au moment où le même personnage est connu  à Tagant et à Timoulay par ’’ Ahssab ’’, nomination Amazigh qui signifie mesureur. D’où, malgré la variation de ces nominations locales, la fonction de ces personnages reste la même dans toutes les seguias.

  • Le rôle de l’aiguadier et sa responsabilité de contrôle et d’entretien du réseau :

           Le travail quotidien de l’aiguadier débite par l’annonce des noms des irrigants et les parts qu’ils détiennent avant le début de chaque nouba ( tour d’eau ), ainsi qu’il tient à parcourir le long de la seguia pour s’assurer qu’il n’a pas d’obstacles qui pourraient gêner l’écoulement de l’eau  . Comme il doit aussi s’assurer qu’il n’a pas de fuites ou détournement de l’eau dans une autre direction en dehors de  tour d’eau  .

             L’aiguadier est chargé aussi pour veiller à une meilleur utilisation et une bonne distribution de l’eau, pour éviter les fraudes et lutter contre les déficiences du réseau d’irrigation. Chaque propriétaire d’eau doit le consulter pour connaître le début de son tour d’eau et la durée qui convient pour détourner sa part d’eau écoulée dans la seguia à son profit.

            Aussi, dans le cadre de l’organisation des communautés traditionnelles et par la procuration de la jmaâ, c’est l’aiguadier qui veille sur les travaux d’entretien des seguias qui sont connu localement par l’opération d’Afrat, qui signifie la mobilisation pour le nettoyage qui vise le curage des ouvrages et la construction des prises des seguias chaque fois qu’il est nécessaire. Pour cela, il est chargé d’appeler la population pour fournir les conditions et les modalités des prestations de travail qui varient d’une seguia à l’autre en fonction du réseau à entretenir et les travaux à effectuer.

              Généralement, les travaux concernant l’artère principale sont à la charge de l’ensemble des irrigants, tandis que l’entretien des canaux secondaires est à la responsabilité des propriétaires des parcelles qu’elles desservent. D’où, en fonction de l’ampleur des travaux à effectuer, l’aiguadier décide les formalités et les modalités des mouvements des gens qui peuvent être mobilisé soit d’une façon partielle ou générale.

  • Rémunération de l’aiguadier et l’évolution de sa fonction :

a ) – Rémunération de l’aiguadier :

         Considérant les services effectués, l’aiguadier est rémunéré par la jmaâ qui lui confie la responsabilité de la seguia. Souvent la rémunération est en nature, soit une part de récolte ou une quantité d’eau quantifié par  nouba  ou par  nombre d’heure . Effectivement, tous les ayants droit sont concernés à participer à cette redevance qui doit être appliqué  en fonction de leur droit à l’eau.

           Il arrive aussi, dans certains villages, que l’aiguadier effectue son travail contre une somme d’argent fixée par la communauté des irrigants. A ce propos, il convient de citer l’exemple du seguia d’Asrir, où l’aiguadier a le droit à 1/3 de l’argent des infractions qui rentre à la caisse de la jmaâ.

b ) – L’évolution du métier de l’aiguadier :

        Le savoir faire de l’aiguadier lui incite à employer son intelligence pour créer et appliquer de nouvelles méthodes envie d’une meilleure utilisation du système hydraulique. De plus, il arrive que dans certaines seguias, l’aiguadier joue le rôle d’un banquier ; car  dans sa gestion de l’eau, il utilise des méthodes relativement  semblables  aux services habitués chez les agences bancaires.

        Contrairement aux règles traditionnelles dont chaque irrigant doit utiliser sa part d’eau dans une nouba fixe pendant chaque tour d’eau, l’aiguadier de Tagant par exemple a proposé une nouvelle solution considérée efficace, par laquelle chaque usager peut avoir sa part d’eau entière à n’importe qu’il moment d’irrigation, comme elle peut l’avoir aussi partagée en portions durant la période du tour d’eau principal.

         Certes, cette proposition répond aux besoins des cultures en eau, surtout pendant les périodes estivales où la nécessité des cultures en eau augmente. Précisément ces facilités permettent  à chaque propriétaire d’utiliser son eau  à n’importe   quel  moment, mais à condition qu’il prévient l’aiguadier, pour que ce dernier puisse faire son calcul afin de donner l’eau aux demandeurs en nécessité et reporte le tour des irrigants qui n’ont pas besoin à une nouba ultérieure où ils préfèrent en profiter.

          D’une autre façon très détaillée et à titre d’exemple dans la seguia de Tagant où le cycle d’irrigation est sur 28 jours, le propriétaire d’eau peut partager sa part en trois portions ; ce qui lui permet d’utiliser le 1/3 de sa part trois fois par tour d’irrigation, c’est à dire presque une fois tous les dix jours. Comme il peut aussi partager sa part en deux portions, ce qui lui permet de profiter de la moitié de sa part deux fois par tour d’eau ; c’est à dire ½ de sa part tous les quatorze jours. D’où, cette méthode connue localement par amardal  a permis aux irrigants d’employer les cultures de leur choix et leurs assurées l’irrigation au moment nécessaire. De ce fait vient le rôle de l’aiguadier comme banquier et les parts des irrigants constituent des capitaux dont il doit assurer leur bonne gestion.

          Ajoutons à cela, que l’aiguadier a aussi un rôle important en ce qui concerne les opérations de vente et de location des parts d’eau. Il joue le rôle d’intermédiaire entre les usagers ; chaque irrigant doit le contacter s’il veut vendre, acheter ou louer une part d’eau.

           A Tagant par exemple, le prix d’une tassa ou tanast ( unité de mesure ) coûte 20 DH pour un temps déterminer, cependant la valeur de la location d’une tassa d’eau et de 400 DH par an. Quand à la vente définitive d’une tassa d’eau peut atteindre 9000 DH. En effet,  à ces prix s’ajoute une somme d’argent considérée comme bénéfice gagné par l’aiguadier contre son intervention.

                                        ph n° 4 : ’’ tanast ou tassa ’’ : unité de mesure

                                                                                                                               source :Boullah

               En revanche, malgré l’évolution des méthodes appliquées et la modernisation introduite dans ces périmètres traditionnels, notamment l’utilisation de la montre au lieu des anciens moyens de mesures rudimentaires, la situation actuelle dans nos oasis nous permet de conclure que ces transformations en un effet négatif sur le rôle et l’importance de ces fonctionnaires de l’eau. En résulte que ces derniers ont subi une dégradation de leurs valeurs et leurs prestiges dans la société oasienne.

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[1] -La khettara est un ouvrage hydraulique complexe qui réalise à la fois le captage et l’adduction d’eau de la nappe souterraine au moyen d’un système de galeries drainantes, dont la pente est plus faible que celle de la nappe et que celle du terrain naturel qu’elle dérive jusqu’au terrain à irriguer ; elle assure ainsi un arrosage par gravité. Elle est ponctuée de puits d’aération, tous les 10 à 20 mètres, seuls visibles de l’extérieur et qui sont indispensables au creusage et à l’entretien de l’ouvrage.

[2] – la «Jmaa», forme de propriétaires qui règlent la distribution de l’eau, veillent à l’entretien et arbitrent les contestations.

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