Research studies

A quoi servent les termes d’adresse et de politesse dans une interaction commerciale ? Le cas de quelques petits commerces à Fès

What are the terms of address and politeness used for in a commercial interaction? The case of some small businesses in Fez

 

Prepared by the researcher :  MHANDEZ TLEMÇANI ZAKARIA – Université Sidi Mohammed Ben Abdellah- MAROC – Faculté des Lettres et des Sciences Humaines Sais-Fès – CEDOC : langues, patrimoine et aménagement du territoire – Laboratoire : Discours, Créativité, Sociétés et Religions

Democratic Arabic Center

Journal of cultural linguistic and artistic studies : Thirty Issue – December 2023

A Periodical International Journal published by the “Democratic Arab Center” Germany – Berlin

Nationales ISSN-Zentrum für Deutschland
 ISSN  2625-8943

Journal of cultural linguistic and artistic studies

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Résumé

Ce travail porte sur un genre particulier d’interaction, celle commerciale, déroulant entre Vendeur et Client dans certains petits commerces de la ville marocaine de Fès. Il s’intéresse au fonctionnement pragma-énonciatif de l’activité de l’adresse. Or, comme il est attesté dans une grande part du corpus, les termes d’adresse à la marocaine sont aussi mis au service de la politesse. Mettre la lumière plus précisément au discours du vendeur en tant qu’expert de la vente, c’est parce qu’il a tendance à orienter le script de l’interaction pour des fins lucratives. Il s’agira donc de localiser et d’interpréter les principales fonctions de ces procédés langagiers, leurs principales formes et ce que laissent entendre leurs différents usages comme effets pragmatiques.

Abstract

This work focuses on a specific type of interaction, the commercial one, taking place between sellers and customers in certain small businesses in the Moroccan city of Fes. It examines the pragma-enunciative functioning of the act of addressing. As demonstrated in a significant portion of the corpus, Moroccan forms of address are also employed to convey politeness. Shedding more light on the discourse of the seller as an expert in sales is essential because they tend to guide the interaction script for profitable purposes. Therefore, the goal is to identify and interpret the primary functions of these linguistic processes, their main forms, and what their various uses imply as pragmatic effects.

  1. Cadrage théorique :
    • Préliminaires introductifs : système et comportements d’adresse :

Comme il existe dans le système linguistique de chaque langue des universaux partagés avec d’autres langues, autrement dit, des similitudes avec elles et des régularités qui déterminent leur fonctionnement communicatif commun, il existe aussi des particularités linguistiques, dans d’autres termes, des comportements communicatifs propres à une langues donnée.

« Précisons à ce propos que si par « langue » on entend l’ensemble de toutes les règles ou régularités qui sous-tendent la production et l’interprétation des énoncés attestés, on doit y admettre aussi celles qui commandent le fonctionnement de phénomènes tels que : les actes de langage directs et indirects, les mécanismes inférentiels, le système des tours de parole, l’enchaînement des interventions et des échanges, les connecteurs pragmatiques et conversationnels, les marqueurs de la relation interpersonnelle et les rituels de politesse, etc.»(Orecchioni, 2002, 36).

Cela concerne davantage « le système et les comportements d’adresse » (Braun, 1988) étant des marqueurs de la relation interpersonnelle, qui « varient d’une langue et d’une culture à autre »(Orecchioni, 2010, 3)  et qui ont des effets pragmatiques et interactionnels différents. EN EFFET, travaillant sur les termes d’adresse et de politesse, le chercheur doit s’intéresser aux emplois prototypiques du côté du système, comme aux emplois atypiques d’un point de vue du comportement. Il doit s’engager donc dans l’analyse de ces traces qui reflètent la conception d’une société envers les rapports sociaux et le fait communicatif, voire «certains aspects spécifiques de l’idéologie collective en matière de communication »(Orecchioni, 2002, 38) afin d’en tirer une certaine logique conversationnelle sous-jacente et une autre culturelle propre à une société ou une catégorie données, et surtout incarnée au sein d’elles.

Là, on s’intéresse plus particulièrement aux formes nominales d’adresse (FNA), dans la mesure où elles représentent un matériau capital dans l’activité de l’adresse en arabe marocain y compris spécifiquement le genre interactionnel du commerce. On s’intéresse aussi aux FNA, parce qu’elles sont des outils efficaces pour s’adresser à autrui et parce qu’elles donnent accès à une large interpénétration du linguistique, du social et du culturel. Mais, la question qui se pose ici est si ces FNA sont prédéterminées par la particularité culturelle et l’éthos communicatif de l’arabe marocain ou sont liées seulement au genre d’interaction commerciale. On peut préluder une sorte de réponse en disant que celle-ci se trouve dans le système pronominal de l’arabe en matière d’adresse, ainsi que dans la nature du corpus étudié.

« Et en ce qui concerne le pronom d’adresse ; une seule forme en anglais et en arabe, langues dans lesquelles on peut penser que les formes nominales d’adresse vont jouer un rôle accru pour le marquage de la relation interpersonnelle, par rapport au français ou ce marquage repose d’abord sur l’opposition entre « Tu » et « Vous » (forme dite de politesse, lorsqu’elle dénote un allocutaire singulier) »(Orecchioni, 2014, 9).

On s’explique encore par mentionner clairement que, contrairement au français et d’autres langues similaires, on rencontre en arabe l’existence d’une particule à caractère vocatif et du caractère exceptionnel au niveau du pronom-sujet. Ce qui confirme l’intérêt que l’on porte à ces formes nominales d’adresse, c’est de même le fait de trouver une variété des observables au niveau des comportements d’adresse attestés tels les noms propres, les surnoms, les diminutifs, les honorifiques, les noms indiquant une adhésion socio-professionnelle, les termes de parenté, les termes affectifs, etc.

1.2 Fonctions et valeurs des FNA :

  • Fonction interpellative :

«Il y a des messages qui servent essentiellement à établir, prolonger ou interrompre la communication, à vérifier si le circuit fonctionne (…), à attirer l’attention de l’interlocuteur ou à s’assurer qu’elle ne se relâche pas (…) »(Jakobson, 1963, 217).

La fonction désormais appelée interpellative est la fonction de base des formes nominales de l’adresse. A travers cette fonction, les formes nominales de l’adresse servent à attirer l’attention d’une personne interlocutive afin d’établir avec elle une interaction verbale, à la relancer en cas de désengagement de celle-ci, à rétablir avec elle le contact tout au long de l’échange verbal et ses séquences à savoir séquence d’ouverture et séquence de fermeture et à identifier la personne adressée, si l’on assiste à une interaction avec plus de deux personnes.

Loin d’une analyse séquentielle et que ça soit au début de l’interaction ou bien à sa fin, les termes d’adresse dans leurs formes nominales assument toujours cette fonction nommée phatique dans la terminologie de R. Jakobson. Mais, sur la base de cette dernière, il est nécessaire de mentionner qu’ils sont aussi des marqueurs discursifs forts dans l’organisation et «la gestion des tours de parole »(Orecchioni, 2010, 6). Car, «ce sont aussi des outils efficaces pour allouer, réclamer, négocier la prise de parole »(Ibid., 6), surtout dans des situations polylogales.

  • Fonction captative :

Lorsque le contact est déjà maintenu et lorsque la nature de la personne et du lien interlocutifs est déjà déterminée, les formes nominales de l’adresse interviennent afin d’exercer leur seconde fonction captative, ce que Orecchioni désigne par valeur de renforcement de l’acte de langage, ainsi qu’afin de « renforcer l’impact de l’énoncé sans disparaitre complètement la valeur de base »(Ibid., 6), celle interpellative.

Là, on voudrait dire par fonction captative le sens que donne Charaudeau à celle-ci, étant « l’un des trois espaces dans lesquels sont mises en œuvre des stratégies de discours »(Charaudeau et Maingueneau, 2002, 92). Cela veut dire qu’à partir des noms d’adresse, le locuteur vise à capter l’attention de son interlocuteur tout au long de l’échange verbal et le faire entrer dans son univers de pensée ; ce qui lui facilite le fait de partager des idées et des émotions, de charger l’échange par un air de familiarité et de connivence et d’atteindre enfin les objectifs visés.

  • Fonction relationnelle :

Si l’on dit souvent que les termes d’adresse sont des relationnels extrêmement puissants, c’est parce que leur fonction relationnelle est largement prédominante, mais toujours accompagnatrice des deux autres évoquées là-dessus. De ce fait, « (une FNA n’est jamais relationnellement neutre). On peut l’envisager par rapport aux deux principales dimensions relationnelles qui sont classiquement reconnues comme structurant l’espace interactif »(Orecchioni, 2010, 6). Ce sont les deux axes ou bien les deux grandes dimensions (horizontale et verticale), celle qui touche à la familiarité, la solidarité, la proximité et la distance, ainsi que celle qui concerne le pouvoir, l’égalité et la hiérarchie, etc. à ces deux dimensions, Orecchioni pense que l’ajout d’une troisième concernant le caractère conflictuel ou consensuel (coopératif) de l’échange interlocutif est nécessaire. Dans ce sens, il est à signaler finalement que cette valeur relationnelle des noms d’adresse dépend aussi du sens de la forme et du contexte dans lequel ils sont utilisés.

1.3 Des maximes conversationnelles aux maximes de politesse :

Si l’échange langagier est le résultat d’un effort de coopération fourni par les participants de l’interaction verbale, et si chacun de ces participants tisse un but commun et une direction interactionnelle commune accordée, cela impose, selon Grice, le respect parallèlement des maximes conversationnelles. Ce qui donne à dire que ce principe coopératif constructif implique le respect de ces maximes, tout en traçant un cadre interactionnel où il n’y a ni rudesse, ni confrontation, ni impolitesse, comme il est défini ainsi :

« It is] a rough general principle which participants will be expected (ceteris paribus) to observe, namely: Make your conversational contribution such as is required, at the stage at which it occurs, by the accepted purpose or direction of the talk exchange in which you are engaged »(Grice, 1989, 61).

Pour les maximes conversationnelles, étant les caractères définitoires d’une conversation selon Grice, la maxime de quantité «concerne la qualité de l’information qui doit être fournie»(Ibid., 61), donnant les informations nécessaires afin qu’un énoncé soit compris ; la maxime de qualité est liée à la règle de la véridicité du contenu de l’énoncé, en d’autres termes, «que votre contribution soit véridique »(Ibid., 61); la maxime de relation ou de pertinence est attachée à la règle de « parlez à propos »(Ibid., 61) ; en dernier lieu, la maxime de manière touche à la clarté du propos et à la question de « comment on doit dire ce que l’on dit »(Ibid., 61). Sur la base de ces principes, chaque participant de l’échange est sensé de mobiliser aussi «l’ensemble des procédés auxquels recourent les participants pour maintenir entre eux une relation relativement harmonieuse, par la préservation de leurs « faces » mutuelles »(Orecchioni, 2001, 106). Ainsi, pour y parvenir au maintien de ce type de relation interpersonnelle, il est nécessaire, aux yeux de Geoffrey Leech, de respecter ce qui propose appeler maximes de politesse « maxims of politeness »(Leech, 1983, 131-138).

Tact maxim: (in impositives (directives) and commissives)

o Minimize cost to other

o Maximize benefit to other

– Generosity maxim (in impositives (directives) and comissives)

o Minimize benefit to self

o Maximize cost to self

– Approbation maxim (in expressives and assertives)

Remercier, féliciter, pardonner, blâmer, louer and condoléancer.

o Minimize dispraise of other

o Maximize praise of other

– Modesty maxim (in expressives and assertives)

o Minimize praise of self

o Maximize dispraise of self

– Agreement maxim (in assertives)

o Minimize disagreement between self and other

o Maximize agreement between self and other

– Sympathy maxim (in assertives)

o Minimize antipathy between self and other

o Maximize sympathy between self and other

2—étude de cas :

Ce schéma si mentionné précédemment explique et donne assez de clarté au caractère coopératif et poli des interactions commerciales, objet d’étude de ce travail. De cela, on comprend que même si l’interaction commerciale est basée sur le potentiel discursif du vendeur, elle est par contre surdéterminée par la satisfaction de la clientèle. C’est dans ce paradoxe où réside la spécificité pragmatique des termes d’adresse et de politesse qui dévoilent l’orientation discursive du locuteur-vendeur d’une part, et le grand intérêt donné à la recherche de l’accord avec son interlocuteur de l’autre. De ce fait, on tente de comprendre comment l’usage des différentes formes nominales de l’adresse sert de bonne pratique du commerce, s’il est bien métrisable, indiquant des informations plus ou moins précises concernant la nature de l’interlocuteur et manifestant un haut degré de politesse envers lui.

A ce titre, l’analyse porte sur un corpus d’interaction dans des petits commerces à la ville marocaine de Fès enregistré dans une épicerie, une boulangerie, une herboristerie et un magasin de tissus en 2019. Dans ce sens, l’analyse comprend les types et les formes des FNA attestés dans le corpus susmentionné, ainsi que leurs rôles et leurs fonctions pragmatiques au sein de l’interaction.

A—noms, prénoms et patronymes :

Avec certains clients et plus particulièrement des hommes, on trouve dans beaucoup de nos corpus un usage fréquent des noms, des prénoms et des patronymes, comme il est le cas dans les répliques ci-dessous.

?a fin had l-ġabra ?a ssi benkiran

?aš xbar-ek ?a ssi bannani

ši ḥaža xra ?a ssi ḥmed

Dans ces extraits, l’usage de cette forme nominale de l’adresse indique une proximité effective du vendeur vis-à-vis de ses clients, en les adressant la parole avec leurs noms personnels, soit leurs noms de famille soit leurs prénoms s’il ne connait que l’un d’eux. Certes, si l’adresse sage par le nom est lié à la non-connaissance du prénom, il désigne aussi un fort degré de respect, voire de politesse par rapport à la personne adressée, donnant à l’interaction un sens de familiarité et au client un caractère d’habitué.

B—monsieur, madame :

En arabe marocain, différentes formes dialectales apparaissent des termes (monsieur, madame) selon qu’ils apparaissent seuls ou bien combinés syntagmatiquement avec d’autres éléments linguistiques notamment les noms personnels.

bqa li-na ġi d l-fino ?a lalla

šuf / had tafṣila dayr-a 80dh ?a lalla /ġa-n-xalli-ha li-k b 60dh !

ma-n-qder-š  wa-llah /fi-ha ši baraka alil-a ?a sid l-ḥāž

Là, dans ces extraits, on observe clairement que ces FNA dans leur forme arabe dialectales sont très attestées dans notre corpus interactif de type commercial, du moment qu’elles peuvent accompagner toutes les autres fna. Utilisées à valeur de mise en infériorité, ces FNA corporalisent cette stratégie de politesse qui vaut l’effet pragmatique d’une hiérarchie familière connue culturellement comme spécificité du système de l’adresse arabe. Dans ce sens, il est à signaler que cet usage ne devient plus frappant, il est par contre routinier à force qu’il est incarné quotidiennement dans la politesse et la culture marocaines.

C—titres honorifiques :

Il existe dans le parler arabe marocain beaucoup de termes d’adresse à contenu religieux. Mais, dans le cadre restreint et précis de notre corpus d’analyse, on ne rencontre que celui de « l-ḥāž », ayant une double valeur à savoir religieuse et honorifique. Notons aussi que celui-ci est le plus utilisé même dans le cadre interactionnel global au niveau de la société marocaine.

ma-n-qder-š  wa-llah /fi-ha ši baraka alil-a ?a sid l-ḥāž

allah y-katter xir-ek ?a l-ḥāž

A partir de cet extrait, on comprend qu’il est « employé dans la religion musulmane pour une personne qui a fait le pèlerinage à la Mecque. Dans les milieux populaires musulmans, il est aussi utilisé pour s’adresser à des personnes âgées, comme marque de respect»(Dimachki et traverso, 2014, 341). C’est dans ce sens où réside le potentiel discursif des termes d’adresse et de politesse dans une interaction commerciale, dans la mesure où ils donnent des indications sur la nature de l’interlocuteur sans être dans l’obligation de le voir.

« All the informant agreed that the term has two usages. It is used to anyone who had actually perfomed the hagg, and by extension to an older respected person in the community. Some added that as a further requirement, the addressee must have an air of goodness about him (karam, tiiba) to really deserve the term »(Parkinson, 1985, 150).

D—noms de métiers :

En ce qui concerne les noms de métiers rencontrés dans les fragments si dessus, ils sont le fruit d’un choix discursif précis, du moment que le locuteur-vendeur aurait eu la possibilité d’utiliser la forme arabe de (madame, monsieur), et du moment que l’usage du terme « ?ustad-a » n’est pas ordinaire comme celui de « ?ustad » en cas d’un interlocuteur masculin.

had-i zayd-a men ԑand-i l-?ustad-a dyal-na

tfaḍḍel ?a ?ustad

Dans une telle interaction, ce choix discursif précis désigne l’impression de supériorité que donne le locuteur-vendeur à son client pour lui afficher son respect. En effet, en employant donc ces termes d’adresse, le locuteur exprime la supériorité du destinataire sans avoir une véritable relation hiérarchique, car il les utilise « de manière plus ludique que pour véritablement afficher le respect dû à des statuts socioprofessionnels asymétrique» (Hmed, 2003, 150).

E—termes de parenté et diminutifs :

A l’excepte de certains cas rares où vendeur et client ayant une relation de parenté, l’usage de ces termes se fait d’une manière métaphorique dans une interaction commerciale. Ce sont des termes que l’on rencontre très fréquemment dans tout type de conversation arabe, commerciale ou autres, ainsi qu’ils sont utilisés seuls, si les participants de l’échange interlocutif ne se connaissent pas, ou bien accompagnés du nom personnel. Comme ils peuvent exprimer toute sorte de relations interpersonnelles symétriques ou asymétriques, ces termes relationnels sont donc surdéterminés par de nombreux facteurs externes tels l’Age, le sexe, le milieu social, etc.

šnu n-zid-ek ?a weld-i ? safi ?

hak ?a lalla bent-i !

a n-dir-ha li-k f-ši xniša ?a xit-i

A ce titre, concernant ces répliques, les valeurs répondues sont celles de la fraternité, de la proximité, de l’affectivité, de l’adoucissement, de l’évaluation positive de la relation, du respect, de l’exclusion de tout sens de séduction et de connotation sexuelle, etc. sans oublier que dans ces extraits, sachant que l’on est face à une des inter actants musulmans, ces termes expriment aussi l’appartenance à une même communauté fondée sur des repères plus ou moins religieux.

F—termes affectifs :

« Les termes affectifs, au contraire des précédents, sont très couramment employés dans les interactions de service, entre des personnes qui ne se connaissent pas et qui entretiennent une relation formelle et distante. Leur usage est plutôt populaire, mais leur fréquence dans ce contexte pourrait aussi conduire à parler à leur propos d’usage commercial »(Dimachki et traverso, 2014, 360).

had-u zwin-in bezzaf ?a ḥbib-a

twaḥḥaš-na-k ?a l-ġzal-a

Le premier extrait inclut le terme « ḥbib-a » qui a une connotation affective. Son emploi n’est pas réservé uniquement à des situations entre personne qui se connaissent, au contraire, son usage est attesté dans des relations distantes. Le second extrait, quant à lui, dénote la présence du terme « l-ġzal-a » qui figure dans des situations où les personnes se connaissent vraiment. Cela est renforcé par l’emploi de la structure verbale «twaḥḥaš-na-k ». 

Bilan conclusif :

–En arabe marocain, la valeur pragmatique de la FNA ne dépend ni de son emplacement distributionnel ni de son apparition en séquence, autrement dit, elle n’est pas liée à la séquence d’ouverture ou de fermeture. elle peut donc apparaitre tout au long de l’interaction, dans la mesure où elle peut accompagner tout acte de langage.

–Dans un corpus arabe de type commercial comme il est le cas du notre, on peut attester souvent une grande instabilité au niveau du choix des FNA de la part d’un locuteur-vendeur, tout en s’adressant à un interlocuteur à partir de l’usage d’un nom de métier, après un terme de parenté, en suite un terme affectif, etc.

–On observe aussi qu’en arabe toutes les FNA expriment une relation de hiérarchie dans un emploi souvent asymétrique. Ce qui veut dire que l’usage fréquent des termes exprimant une sorte d’infériorité vaut une stratégie de politesse, associant paradoxalement hiérarchie et proximité, infériorité et affectivité.

–Vue que l’exploitation du paradigme des FNA disponibles est largement répandue chez les arabophones, il s’ajoute au caractère de l’instabilité de ces FNA celui de leur complexité. En effet, le locuteur arabophone rencontre considérablement un problème angoissant du choix particulier de la forme convenable et appropriée afin d’éviter toute sorte de malentendus. Ce qui donne à dire par conséquent que la bonne maitrise de ces formes dans des cadres situationnels précis laisse entendre une maitrise même des effets interactionnels produits, étant une compétence langagière à acquérir par tout locuteur-vendeur.

Bibliographie :

  • Friederike, Braun, Terms of Address. Problems of Patterns and Usage in Various Languages and Cultures. Berlin/NewYork/Amsterdam : Mouton de Gruyter, 1988.
  • Patrick, Charaudeau et Dominique, Maingueneau, Dictionnaire d’analyse du discours, Ed. Seuil, 2002.
  • Loubna, Dimachki et Véronique, Traverso, « Les formes nominales de l’adresse dans les interactions en arabe », in : S’adresser à autrui : les formes nominales d’adresse dans une perspective comparative interculturelle. Université de Savoie 2, collection : Langages, 2014.
  • Paul, Grice, « Logique et conversation », Communications no : 39. Paris, Editions du seuil, 1979.
  • Paul, Grice, Studies in the Way of Words, Cambridge, MA, Harvard University Press, 1989, pp : 22/40
  • Neijete, Hmed, Analyse comparative des interactions. Le cas de trois commerces : français, tunisiens et franco-maghrébin, Thèse de doctorat en sciences du langage, Université Lumière Lyon 2, 2003, P. 150.
  • Roman, Jakobson, Essais de linguistique Générale, Ed Les Etudes philosophiques ; 1963.
  • Catherine, Kerbrat-Orecchioni, « Système linguistique et ethos communicatif », Cahiers de praxématique, n : 38 | 2002.
  • Catherine, Kerbrat-Orecchioni, « Je voudrais un p’tit bifteck », Les Carnets du Cediscor, no : 7 | 2001.
  • Catherine, Kerbrat-Orecchioni, « Pour une approche contrastive des formes nominales d’adresse French Language Studies », 20, Cambridge University Press, 2010.
  • Catherine, Kerbrat-Orecchioni, S’adresser à autrui : les formes nominales d’adresse dans une perspective comparative interculturelle. Université de Savoie 2, collection : Langages, 2014.
  • Geoffrey, Leech, Principles of Pragmatics, Londres, Longman, 1983, pp : 131-138
  • Dilworth, Parkinson, Constructing a social context of communication. Terms of adress in Egyptian Arabic, Berlin/ New York/ Amsterdam : Mouton de Gruyter, 1985.

[1] Programme National d’Evaluation des Acquis des élèves de la 6ème année du primaire et de la 3ème année du secondaire collégial, 2019, p19.

[2] Christine Delory-Momberger, “G. Brougère. Jouer/Apprendre”, L’orientation scolaire et professionnelle [Online], 35/3 | 2006, Online since 28 September 2009, connection on 31 August 2023. URL: http://journals.openedition.org/osp/1033; DOI: https://doi.org/10.4000/osp.1033

[3] 6ème année de l’enseignement primaire

[4] Raynal. F, Rieunier. A. (1997), Pédagogie : dictionnaire des concepts clés, Paris : ESF éditeur, p 213

[5]Tardif, M., & Lessard, C. (1999), Le travail enseignant au quotidien: expérience, interactions humaines et dilemmes professionnels. Presses Université Laval.

[6] Laurent Di Filippo, « Contextualiser les théories du jeu de Johan Huizinga et Roger Caillois », Questions de communication [En ligne], 25 | 2014, mis en ligne le 01 juillet 2016, consulté le 31 août 2023. URL : http://journals.openedition.org/questionsdecommunication/9044 ; DOI : https://doi.org/10.4000/questionsdecommunication.9044

[7] Conseil de l’Europe. (2001). Un Cadre Européen Commun de Référence pour les langues apprendre, enseigner, évaluer. Paris: Didier.p, 112

[8]  Cuq, J-P. (2003),  Dictionnaire de didactique du français langue étrangère et seconde, CLE International, p106

[9]Sheils, J. (1993),  La communication dans la classe de langue, Strasbourg,  édition du conseil de l’Europe. p170

[10]Vlad , D, Les activités théâtrales en classe de français langue étrangère, Synergies Roumanie n°9 – 2014 p. 93-99

[11] En ce qui concerne les attentes curriculaires, nous avons fait une étude des documents ministériels, du guide de l’enseignant ainsi que le manuel de l’apprenant dans le but de relever les compétences langagières relatives à la 6ème AEP

[12]Avant d’entamer l’atelier théâtre, nous avons administré aux apprenants un pré-test afin d’identifier leurs  besoins langagiers. A la lumière des résultats obtenus, nous avons  fixé des objectifs et élaboré des séquences d’apprentissage pour les atteindre.

[13] Raynal. F, Rieunier. A. (1997), Pédagogie : dictionnaire des concepts clés, Paris : ESF éditeur, p76

[14] Meirieu .Ph. (2016), Apprendre…oui, mais comment ?, Paris : ESF éditeur, p 181

[15] Les  pièces contiennent d’autres aspects  liés au fonctionnement  de la langue relatifs au programme de la 6ème  AEP. Nous nous sommes contentés  de présenter  c

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