Research studies

Les politiques de la qualité totale et d’excellence dans l’enseignement supérieur : un outil pour étendre l’hégémonie néolibérale

 

Prepared by the researcher : MALIKA NASEH, Professeur Omar HNICHE, Professeur Badre-Eddine CHEGRI – Université Mohammed V, Royaume du Maroc

Democratic Arab Center

International Journal of Economic Studies : Twenty-four Issue – February 2023

A Periodical International Journal published by the “Democratic Arab Center” Germany – Berlin.

Nationales ISSN-Zentrum für Deutschland
ISSN  2569-7366
International Journal of Economic Studies

Résumé 

Il est bien connu qu’au cours de la dernière décennie, les universités ont été critiquées en tant qu’institutions rigides et fermées sur elles-mêmes. Elles ne parviendraient pas à se conformer aux exigences du marché et des étudiants eux-mêmes, et seraient gérées de manière obsolète et inefficace (Commission européenne 2006, 2011), comme Peter Drucker l’a rappelé : “Le domaine le plus important pour le développement de nouveaux concepts, de nouvelles méthodes et de nouvelles pratiques sera la gestion des ressources de la société en matière de connaissances – en particulier, l’éducation et les soins de santé, qui sont tous deux aujourd’hui suradministrés et mal gérés.”(Drucker 1997, 24).

Les suggestions faites par les politiciens et les entrepreneurs favorisent l’introduction de l’approche néolibéral visant à promouvoir des thèmes et des “programmes” commerciaux et à intégrer les méthodes de gestion et d’évaluation du secteur des affaires dans le monde académique. Explicite dans les discours sur ce que l’on peut entendre par néolibéralisme dans le domaine de l’éducation se trouve l’idée que ce serait la conjonction de trois phénomènes : la dérèglementation, la privatisation et le désengagement de l’État. Cet article pose donc la question de savoir si Le néolibéralisme dans le domaine de l’enseignement supérieur peut être circonscrit à ces trois phénomènes. Nous allons essayer de répondre à cette question en l’étayant d’abord par des réflexions sur la nature même du néolibéralisme avant d’analyser ses implications pour l’enseignement supérieur et montrer que dans le contexte du néolibéralisme et du nouveau management public, les politiques d’excellence constituent fondamentalement une transformation radicale de l’université humboldtienne, autrefois consacrée à la recherche et aujourd’hui remplacée par une «MacUniversité » néolibérale.

Cet article est composé de deux sections. La première section est consacrée à la dynamique des forces et des composantes de l’approche néolibérale. Ainsi, le concept de néolibéralisme est au centre de l’article. La deuxième section rappelle les politiques d’excellence et de qualité totale comme les deux principaux aspects du néolibéralisme dans l’enseignement supérieur.

L’approche néolibéral

Plutôt que d’enfermer a priori la notion de néolibéralisme dans une définition savante, il est apparu fécond de prendre acte de sa puissance et de sa polysémie. Pour bien la cerner, voyons tout d’abord ses quatre principales composantes : en premier, le fait que l’État n’intervient plus de façon réactive pour compenser les défaillances du marché, mais de manière proactive pour permettre au marché d’être plus concurrentiel et les entreprises plus compétitives.

Pour cela, il a deux outils principaux : la dérèglementation d’une part, et la diminution des dépenses sociales d’autre part, deux mesures favorables au secteur privé. Il s’ensuit que l’État œuvre pour le marché et ne s’y oppose donc plus comme auparavant ; ils sont désormais alliés dans une sorte de couplage. Il y a ensuite la croyance selon laquelle c’est l’offre qui crée la demande et non l’inverse. Il n’est donc nul besoin de politique keynésienne pour relancer l’activité économique par la demande comme c’était le cas à l’ère du fordisme et ses effets sur la croissance économique (Boyer 1987).

Désormais, en appliquant la Loi des débouchés de Jean-Baptiste Say (1803), on pense qu’il suffit de prendre toutes les mesures augmentant la compétitivité des entreprises pour qu’elles investissent davantage, recrutent et créent de l’emploi, ce qui à terme mène à une augmentation de la consommation, ce qui, à son tour, est favorable à la croissance et aux entreprises. Il faut donc pratiquer une politique de l’offre et non de la demande ; un renversement idéologique d’importance. En troisième lieu, se trouve la croyance suivant laquelle, d’une part, les marchés (le privé) sont plus efficients que le public et qu’ils s’autorégulent, ce qui signifie que l’État peut les dérèglementer ; et de l’autre, qu’il faut accroître l’efficacité du public, soit en privatisant certaines activités (par exemple, santé, transport, éducation), soit en appliquant au secteur public les règles modernes de gestion inspirées du privé, qui s’est traduite par «la déréglementation et la privatisation des services publics, et la mise au pas des organisations syndicales »(Gélinas 2008, 151)).

Des principes abstraits de gestion organisationnelle sont appliqués au secteur public ; on entre dans le New Public Management, la démarche gestionnaire de la gouvernance, centrée sur l’efficacité et l’atteinte d’objectifs technocratiquement préétablis. Selon (Saint-Martin 2005, p.89), il s’agit « d’un coup d’État conceptuel » autrement dit, un changement radical de paradigme. Les systèmes éducatifs sont nécessairement confrontés à cette évolution. Les pratiques de ce nouveau management y sont de plus en plus présentes et ce n’est pas sans conséquences sur les pratiques pédagogiques. Enfin, on considère, que trop d’impôt tuant l’impôt, il faut limiter les taxes et autres charges pour laisser plus de place à l’initiative privée. Cela conduit à une baisse des dépenses de l’État, donc des services publics, et à terme à un désengagement de l’État en général et à une déconstruction de l’État-providence en particulier. Il y a donc de moins en moins d’opposition entre le privé et le public.

L’amoindrissement de l’intervention de l’État s’opère principalement dans les mécanismes de la société (dans le domaine social). La question primordiale est de savoir si la séparation de l’État avec le social est une tendance historique du même ordre que la séparation de l’État avec le législatif et le judicaire, c’est-à-dire irréversible ? L’analyse de ce phénomène renvoie à la distinction que l’on peut faire entre les trois sphères de la société : la sphère personnelle, lieu des intérêts des individus ; la sphère du privé, lieu des intérêts des entreprises ; et la sphère publique, lieu des intérêts collectifs, le domaine de l’État.

Historiquement on peut distinguer les tendances suivantes : à compter du XIXe siècle (avec le fordisme), alors que jusqu’alors les trois sphères étaient relativement distinctes, les sphères privée et publique ont empiété sur la sphère personnelle au moment où le « social » est inventé, c’est-à-dire où est apparu un nouveau domaine d’actions pour l’État. Avec la concentration urbaine des populations, le travail de masse en usine, et l’organisation scientifique du travail, des besoins grandissants se sont fait sentir pour assurer l’ordre public, un minimum sanitaire, la santé publique, l’éducation des masses, et leur transport. D’où l’apparition de tout un appareillage étatique pour contrôler, contenir, superviser, et mesurer (Boismenu, Loranger, et Gravel 1995; Dockès 1993; Vercellone 1990).

Il y avait donc bien immixtion de la sphère publique dans la sphère personnelle. La réduction de la sphère personnelle qui s’en est suivie, caractérisée notamment par une perte d’autonomie des individus, dépendant désormais pour leur simple survie de la bonne volonté des entreprises puisque ils n’étaient plus maîtres de leur outil de production[1], a conduit peu à peu à un besoin de compensation de la part de l’État, d’où l’apparition progressive, dans un deuxième temps, de l’État-providence. Il s’agissait donc d’un nouvel empiétement de la sphère publique sur la sphère personnelle tandis que la protection apportée par l’État-providence limitait d’autant celle apportée par les familles, les voisins, les communautés de toutes sortes (Moreno 2006).

On assisterait à l’heure actuelle à un renversement progressif avec le recul du « social », le désengagement de l’État-providence et donc un éloignement de la sphère personnelle de la sphère publique. On observe d’ailleurs que cette reconquête de la sphère personnelle s’accompagne de plus de consommations individualisées, d’activités personnelles, de temps libre, de réseaux sociaux, d’associations, de formes contractuelles, de partenariats, et de moins de consommation de masse, de hiérarchie, de règles régissant la vie et les mœurs, de contraintes de tous et de toutes sortes. Si le modèle du salariat a été au centre du contrat social fordiste pour plus d’un siècle avec ses fondations solides reposant sur trois unités : unité de lieu de travail (l’atelier, la fabrique, l’usine, le bureau), unité de temps de travail (les horaires de travail hebdomadaires, les périodes de repos) et unité d’action (l’organisation collective du travail), ce modèle semble aujourd’hui traverser une crise avec la mondialisation, l’évolution technologique, les transformations de l’organisation et du fonctionnement des entreprises, l’assouplissement de la législation du travail en faveur de l’employeur et les réformes successives du système de la protection sociale (chômage, retraite etc.), perçues comme désavantageuses pour les salariés (Bernier, Jobin, et Vallée 2003; Bouffartigue et al. 2018; Castel et Zecca 1995; Gautié 2003; Mazuyer 2013), remettent en cause les promesses de sécurité et de progrès économique du salariat (le désengagement des entreprises envers les salariés).

A contrario, un désengagement des salariés s’est aussi développé avec de plus en plus de salariés qui ne veulent plus d’un engagement sur une longue durée ou trop contraignant avec une entreprise, préférant construire une carrière en changeant régulièrement d’emploi. L’engagement réciproque a été remplacé par des relations éphémères et peu contraignantes, tandis que la sécurité et la solidarité garanties par les institutions ont laissé la place à l’incertitude et l’individualisme. Bien sûr, cela ne concerne pas tous les travailleurs, mais la crise de la Covid -19 avec son cortège de plans sociaux (malgré la mise en place du système de chômage partiel en Europe) et le développement du capitalisme de plateforme (E-commerce, livraison à domicile, etc) a accéléré la « liquéfaction[2]» du travail (Hussenot 2022) et la fragilisation du modèle social historique.

En même temps, les sphères publique et privée se rapprochent, l’État et les entreprises faisant front ensemble pour relever le défi de la mondialisation et de la compétitivité. On observe aussi dans les temps présents que la sphère publique (lieu de la protection de l’intérêt collectif) ne semble plus être la chasse gardée de l’État. La sphère privée (tant le secteur monétaire marchand que le secteur non monétaire, le tiers secteur) empiète sur la sphère publique. Ainsi peut-on noter la disparition de monopoles publics (communications, transports publics, fourniture d’eau, d’électricité), et le rôle plus grand joué tant par le secteur privé que par le tiers secteur (les associations et les entreprises socialement responsables) dans les secteurs de la santé, de l’éducation, des retraites, de la sécurité, et en matière de lutte contre le chômage et les exclusions sociales(Moreno 2006).

En clair, les fonctions sociales de l’État tendent à se séparer peu à peu de l’exécutif, tandis que les sphères privée et publique se rapprochent. Après les trois premières séparations (d’avec le religieux, le législatif et le judicaire), une quatrième séparation est donc en œuvre, celle du social d’avec l’État. Ce qui nous ramène à notre propos initial et à poser une question fondamentale sur les conséquences de ce changement pour l’éducation, Or, on vient de voir que le néolibéralisme conduisait bien, dans le domaine de l’éducation, à une dérégulation (plus d’autonomie en particulier), à une certaine privatisation (plus d’institutions privées) et à un désengagement de l’État. L’hypothèse initiale est donc vérifiée, même si à ces trois phénomènes il faut ajouter comme indiqué plus haut l’application des règles du New Public Management aux établissements publics d’enseignement.

Néolibéralisme et enseignement supérieur

Quant aux traductions concrètes de la libéralisation dans le domaine de l’enseignement supérieur, elles résident essentiellement dans une participation financière plus importante de l’usager, l’établissement d’une concurrence internationale, la transparence des informations sur le produit, le choix et la libre circulation des étudiants (ECTS : European Credit Transfer System) et l’adoption de l’objectif de la qualité totale et d’excellence qui est était auparavant réservé au monde des entreprises, que cela concerne le personnel, la finance, le marketing et évidemment la production. C’est une transformation radicale de l’université humboldtienne, autrefois consacrée à la recherche et aujourd’hui remplacée par une «MacUniversité»[3] néolibérale.

La mobilité étudiante, c’est-à-dire le nombre d’étudiants étrangers solvables que chaque pays d’Europe est capable de capter, représente l’enjeu premier de ce marché des services car, du point de vue économique, leurs dépenses de subsistance (logement, nourriture, etc.) sont comptées comme des exportations vers leurs pays d’origine. S’ajoutent à ces consommations les services éducatifs eux-mêmes, que l’on conseille aux universités de vendre (prestations d’enseignement par le biais des droits d’inscription, mais aussi des services éducatifs “accessoires”.

Cette libéralisation n’est donc pas incompatible, en l’état actuel, avec les subventions accordées par l’État. Elles sont pensées comme une compensation au « surcoût » qu’impliquent les missions d’intérêt général fixées à cette catégorie de biens. La réforme du financement permettant un engagement plus fort de l’usager, ainsi que les procédures de mise en place de l’assurance qualité et d’excellence ont été déjà impulsées dans un grand nombre de pays d’Europe depuis le début de la décennie 2000(Brusoni et al. 2014).

Le mot même « excellence » est passé dans l’usage commun, devenant l’archétype de la réussite et détrônant le « très bien » à l’université. C’est dans ce dernier domaine que la qualité et l’excellence sont devenues une politique. Politique qui désormais concerne tous les domaines d’actions des institutions de l’enseignement supérieur (Parker et Jary 1995). Ces nouvelles orientations représentent un défi important pour les universités. Elles doivent répondre à des questions comme : Qu’est-ce qu’un bon cours ? À quoi reconnaît-on un bon enseignant ? Il ne peut s’agir que d’évaluer les produits, il convient aussi de s’intéresser aux processus : à la qualité des enseignements proprement dite, s’ajoutent des questions relatives à la qualité des enseignants, incluant critères de sélection et de promotion, formation pédagogique initiale et continue, profils d’innovateurs pédagogiques (Parmentier 2006). Les questions qui se posent portent sur la nature même des politiques suivies par les universités, les objectifs qu’elles poursuivent, les principaux moyens de mise en œuvre de ces politiques, et enfin les résultats de ces politiques et leurs limites.

Une politique d’excellence dans l’enseignement supérieur peut répondre à deux objectifs majeurs. Le premier est de fortement accroître le niveau de qualité tant de la formation que de la recherche. Bien que de nombreuses définitions de l’excellence en enseignement puissent être trouvées, certains modèles principaux communs peuvent être discernés (Gibbs 2008):

  • Une concentration sur l’étudiant, sur l’apprentissage des étudiants et sur le soutien personnel aux étudiants et à leur développement, plutôt que sur l’enseignement formel ;
  • Une macro-concentration sur l’environnement d’apprentissage plus large et le développement du programme ou du curriculum, plutôt qu’une micro-concentration sur l’enseignement ;
  • Une emphase traditionnelle sur le professeur lui-même, et les notes d’évaluation des étudiants sur le professeur, sur le dossier de recherche du professeur et sur ses connaissances en matière, et sur la reconnaissance externe du professeur, avec peu de concentration sur les étudiants, sur l’apprentissage, sur l’environnement d’apprentissage ou sur le processus de développement de l’enseignement ;
  • Une emphase sur les efforts pour développer l’enseignement, en particulier par l’innovation, en influençant les autres et en dirigeant l’enseignement ;
  • Une emphase sur la « scholarship of teaching» en tant que forme particulièrement valorisée de développement de l’enseignement.

Ainsi, lorsque cette politique se réalise par le recrutement des meilleurs enseignants et la sélection des meilleurs étudiants, on peut parler de politique d’excellence élitiste (Robichaud et Crevier 2016). Une telle politique permet de relever le niveau de qualité des universités par rapport aux autres institutions du supérieur dans le monde et accessoirement de les voir mieux placées dans les classements internationaux ; ceci contribue à leur prestige et leur attractivité, ce qui n’est pas un objectif négligeable dans le contexte de concurrence mondiale qui se développe dans ce domaine(Cosnefroy et al. 2016). Le second objectif consiste à permettre au plus grand nombre de réussir ses études supérieures (il s’agit donc d’une excellence sociale ou inclusive) et d’acquérir les connaissances et les compétences lui permettant de remplir au mieux ses responsabilités, sociales et sociétales, notamment en termes d’environnement : il s’agit donc d’une excellence sociétale (Cosnefroy et al. 2016; De Ketele 2015). On observe qu’un plus grand nombre de pays poursuivent une politique élitiste qu’une politique sociale et sociétale (Cosnefroy et al. 2016). Ces politiques d’excellence ont pour la plupart été introduites durant la dernière décennie du fait que cela a résulté de facteurs relativement récents , parmi lesquels on peut mettre en avant la mondialisation, l’autonomie accrue des universités, les classements internationaux, mais aussi le processus de Bologne (Palomba 2015). La mondialisation est le premier facteur que l’on peut mettre en avant pour expliquer le développement récent des politiques d’excellence. La mondialisation, qui accroît fortement l’interdépendance économique des nations, exacerbe aussi la concurrence commerciale entre ces dernières. Tandis que les biens et les services nécessitant une main-d’œuvre peu qualifiée et bon marché sont de plus en plus produits par les pays émergents, les entreprises des pays avancés voient leur compétitivité et leur production fondre en même temps que leur demande de main-d’œuvre. Les pays avancés n’ont donc d’autre solution que de se spécialiser dans les produits et services à forte valeur ajoutée (Proulx 2016; Tsogas 2012). L’offre d’emplois dans ces pays change ainsi dramatiquement pour des qualifications, des connaissances et des compétences supérieures. Il s’ensuit une massification de l’éducation supérieure, mais aussi une demande sociale pour un enseignement dans ce domaine de plus haute qualité. Par ailleurs, parce qu’elle conduit à une mobilité plus grande des personnes, la mondialisation mène directement à l’internationalisation des universités qui ne peuvent réussir dans ce domaine qu’à condition d’être parmi les meilleures, d’où les politiques d’excellence ; autant de facteurs qui expliquent l’apparition de politiques d’excellence.

L’autonomie des universités, deuxième facteur, est importante car elle leur confère la possibilité de mettre en œuvre des stratégies leur permettant d’accroître leur notoriété et donc leur attractivité par une politique d’excellence visant à recruter les meilleurs enseignants et à sélectionner les meilleurs étudiants. Cette politique permet aux universités d’espérer, à terme, une position plus élevée dans les classements internationaux grâce aux effets de leur politique sur la notoriété des enseignants et la qualité de leur recherche et donc le nombre d’articles scientifiques parus et référencés, qui sont des éléments contribuant à un meilleur classement. On peut avancer que l’autonomie plus grande des universités deviendra plus importante encore au vu des difficultés des finances publiques dans de nombreux pays et au vu de la prévalence du New Public Management qui requiert de la part des universités davantage d’efficacité et d’efficience (Aghion et al. 2008; Musselin et Teixeira 2014).

Troisième facteur, les classements internationaux. Au cours de la dernière décennie, le terme “université de rang mondial” est devenu une formule favorite, non simplement pour améliorer la qualité de l’enseignement et de la recherche dans l’enseignement supérieur mais aussi, de façon plus importante, pour développer la capacité de rivaliser sur le marché mondial de l’enseignement supérieur à travers l’acquisition, l’adaptation, et la création de connaissances avancées. Avec des étudiants cherchant à fréquenter les meilleures institutions supérieures possibles dans la mesure de leurs moyens financiers, souvent hors des frontières nationales, et avec des gouvernements motivés par la maximisation du rendement de leurs investissements dans les universités, la réputation mondiale devient un sujet de plus en plus important pour les institutions à travers le monde (Williams et Van Dyke 2007).

Les deux classements internationaux les plus complets, qui permettent des comparaisons générales des institutions au-delà les frontières nationales, sont ceux préparés par le Times Higher Education Supplement (THES depuis 2004) et, et le Shanghai Academic Ranking of World Universities, établi depuis 2003 par l’Université Jiao Tong de Shanghai (SJTU). Ce dernier classement, qui est celui qui a le plus d’impact dans le monde, utilise une méthodologie qui se fonde exclusivement sur des indicateurs objectifs, tels que les performances académiques et scientifiques des enseignants et des diplômés, pour identifier les 500 premières universités du monde. Les mesures utilisées comprennent les publications, les citations, et les récompenses internationales (telles que les prix Nobel et les médailles Fields) (Eloire 2010; Salmi 2009). Sont donc évidentes les raisons qui incitent les universités à développer une politique d’excellence élitiste tâchant de répondre à ces critères et celles qui poussent les ministères chargés de l’enseignement supérieur d’aller également dans ce sens pour des raisons de prestige national(Hazelkorn 2015).

Le processus de Bologne est le quatrième facteur d’importance expliquant la genèse des politiques d’excellence, un facteur qui se limite cependant à l’espace européen. L’Union européenne s’est construite sur l’idée fondamentale que devaient être libérés les mouvements de biens, de capitaux et de personnes. La mobilité des personnes est cependant limitée par l’hétérogénéité des formations universitaires, d’une part, et des systèmes nationaux de qualifications de l’autre. Lancé par quelques pays en mai 1988, le processus de Bologne compte désormais 47 pays dont 19 hors de l’Union européenne.

Ce processus a indiscutablement conduit à une mobilité plus forte qu’auparavant tant des étudiants que des travailleurs. Mais il a aussi incité les universités à comparer entre elles la qualité de leurs formations et la valeur de leurs diplômes, d’où est ressorti une certaine compétition, sinon une concurrence entre elles et donc la mise en œuvre de politiques d’excellence pour accroître leur attractivité (Brusoni et al. 2014). Les politiques d’excellence peuvent se concentrer soit sur l’enseignement, soit sur la recherche, soit sur les deux. Il apparaît que la dernière approche (enseignement et recherche) est majoritaire, tandis que la première (enseignement seul) vient en deuxième position tandis qu’une politique visant à rechercher l’excellence dans la recherche seule est en train de gagner du terrain (Gunn 2018).

La déclaration de Bologne préconise dans son 7éme objectif d’«améliorer la qualité de l’enseignement dispensé par les universités européennes et assurer leur vérification à l’aide de critères et de méthodes communs internationaux (européens) à l’aide d’indicateurs et de procédures externes internationaux (assurance qualité): Il est objectivement fondé sur le concept de normes de qualité communes qui sont déterminées de l’extérieur et ensuite « garanties », c’est-à-dire mises en œuvre, développées et maintenues. Le résultat final est l’idée que les universités seront dotées d’outils qu’elles pourront utiliser pour s’améliorer constamment et évalueront volontairement la qualité de toutes leurs activités sur une base continue, de préférence en utilisant les services d’agences d’évaluation externes. Tant l’imputabilité (reporting, principalement au sens financier du terme) que le contrôle externe de la qualité ont fait l’objet de discussions (Enders et al. 2006).

Au niveau européen, les engagements en faveur de l’assurance qualité dans l’enseignement supérieur ont impulsé le réseau ENQA (European Network for Quality Assurance in Higher Education) mandaté par le Conseil de l’Union Européenne pour présenter des propositions, en collaboration avec l’AUA (l’Association européenne des universités), pour le développement d’un ensemble de standards, procédures et guides de procédures qualité (Brusoni et al. 2014) . Il est chargé de faire des propositions pour la mise en place de procédures externes d’assurance qualité pour les agences d’évaluation et d’accréditation qui, elles-mêmes, devront être soumises à l’évaluation de la qualité des évaluations auxquelles elles procèdent. Au sein des universités, une des formes sous laquelle pénètre l’assurance qualité est l’évaluation des enseignements ; autrement dit sous une forme qui ne fait pas explicitement référence à la relation structurelle qu’elle entretient avec le processus de constitution d’un marché.

Elle se présente d’une manière apparemment plus neutre et plus difficile à contester : la valorisation de la pédagogie à l’université au service des étudiants. L’évaluation des enseignants, appelée évaluation des enseignements bien qu’il s’agisse d’une évaluation individualisée, représente une partie de ce qui est désigné comme autoévaluation des enseignements, l’autre partie étant constituée par l’évaluation des filières et des établissements. Conformément à la nouvelle définition de la qualité fixée pour l’enseignement supérieur où la figure de l’étudiant est promue comme “consommateur”, l’évaluation est en partie réalisée par les étudiants (Coffey et Gibbs 2001; Gunn 2018; Tomusk et al. 2010).

Les leçons que l’on peut tirer de cette situation sont les suivantes : Les politiques d’excellence semblent être un phénomène universel (Gunn 2018). En effet, de nombreux pays, qu’ils soient grands comme les États-Unis, la Russie ou encore le Japon, ou plus petits comme la Corée, l’Australie, la Nouvelle Zélande, ou qu’ils soient avancés ou émergents, comme la Chine et l’Inde, de telles politiques sont déjà pratiquées. Les mêmes objectifs prévalent dans tous les pays, c’est-à-dire disposer d’universités bien placées dans les classements internationaux et menant les recherches les plus avancées pour disposer de la main-d’œuvre la plus qualifiée, rester compétitif sur les marchés internationaux et accroître le prestige du pays et la notoriété des universités (Brusoni et al. 2014). Dans ce sens, les politiques d’excellence ont un caractère plus élitiste qu’inclusif, et encore dans le sens limité d’excellence sociale mais pas sociétale. Pour (Teichler 2007, 144) “Les termes excellence ou élite font sans aucun doute référence à l’apogée. «Excellence» souligne la distinction par rapport aux autres d’un point de vue vertical de manière très positive et crée une aura d’exceptionnalité. Le terme « élite » fait référence à un groupe de personnes exceptionnelles ; ceux qui excellent dans leurs études doivent être considérés comme une entité sociale ou une partie d’une entité sociale qui pourrait même avoir une légitimité au-delà de leur performance positive.”.

Ainsi, les dispositions du processus de Bologne se sont développées en contradiction avec l’objectif premier du processus, qui faisait référence à une « transition » politique et économique du communisme vers une société démocratique dirigée vers le marché, d’un système d’enseignement supérieur d’élite vers un système de masse (Tomusk et al. 2010). Il traduit « une transformation des enseignements supérieurs et du rôle qui leur est assigné : l’augmentation numérique et en pourcentage d’une classe d’âge accédant à l’enseignement supérieur transforme la structure et les finalités de l’enseignement supérieur. Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, la démocratisation de l’Université est associée à l’idée d’un élargissement des droits et des libertés des citoyens européens. Elle est appelée à fonctionner comme une force intégratrice de façon à limiter la marginalisation des individus et des groupes sociaux » (Goastellec 2014).

Beaucoup croient fermement que les inquiétudes concernant la qualité des établissements d’enseignement supérieur européens cachent des efforts visant à remplacer la prise de décision professionnelle autonome et les critères de qualité en place pour la gestion des universités par des méthodes de gestion empruntées au secteur des entreprises, qui étaient déjà en cours avant même à la déclaration de Bologne (Coenga-Oliveira et Anctil-Avoine 2017; Ferrer Llop 2014; Harari-Kermadec et Porcherot 2020; Valenduc 2012).

Les politiques d’excellence et d’efficacité peuvent être identifiées à tous les niveaux : de l’université, de la faculté, du département et/ou mêmes au niveau des membres individuels du personnel. Elles peuvent être appliquées dans le contexte des nombreux rôles et fonctions différents des établissements d’enseignement supérieur. Elles s’appliquent à la fois à la gestion et à la prestation de services ainsi qu’à l’expérience du personnel et des étudiants et aux résultats des études et de la recherche. Ce qui est clair, c’est que l’excellence est une attente et un objectif. Il y a une compréhension générale que l’objectif est au cœur de la culture et des valeurs de l’enseignement supérieur et explique la motivation pour l’amélioration continue.

Les facteurs prépondérants du développement de ces politiques sont l’autonomie des établissements – il s’ensuit donc un certain désengagement de l’État ainsi qu’une certaine dérèglementation du secteur -, les classements internationaux et la mondialisation. Ces politiques sont menées tant par les gouvernements, centraux ou régionaux que par les universités elles-mêmes, surtout si la différenciation de ces dernières est forte et leur autonomie élevée. Les politiques les plus fréquentes sont celles qui concernent à la fois l’enseignement et la recherche.

Conclusion

L’idéal humboldtien de l’université, comme lieu où la société se reflète et discute de ses valeurs, est aujourd’hui abandonnée, pour mettre au cœur du débat la question des finalités et objectifs de l’université. Une question qui est posées en termes d’adéquation au marché du travail et de rentabilité. D’où La nécessité d’introduire les politiques d’excellence et d’efficacité autrefois connues uniquement dans le secteur privé. Le néolibéralisme dans l’enseignement se caractérise donc par un changement d’attitudes de la part de l’État (dérèglementation, privatisation, désengagement, application des règles du New Public Management aux établissements) que de la part des étudiants (demande pour une éducation plus utilitariste – offres des formations plus professionnalisantes (et d’un enseignement plus individualisé ; recours aux écoles privées ; demande de résultats et de gestion plus responsable des établissements universitaires). Dans l’enseignement supérieur, le néolibéralisme se caractérise par une volonté des gouvernements de voir leurs universités mieux placées dans les classement internationaux en leur donnant plus d’autonomie, mais en les rendant aussi plus redevables (respect des règles du New Public Management). Le néolibéralisme se caractérise aussi par la concurrence qui se développe entre les universités, leur internationalisation et leur orientation vers plus de sélection. Le néolibéralisme est donc bien à l’œuvre dans l’enseignement supérieur.

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[1] l’organisation scientifique et technique du travail dans l’atelier ou l’usine, a mis sous contrôle toutes les tâches et opérations des travailleurs, en particulier celles des non qualifiés, qui sont dès lors expropriés de leur condition de travailleurs professionnels “l’ouvrier de métier” qu’ils supportaient dans les périodes de production “quasi artisanales” précédentes (Boyer et Freyssenet 2000; Dockès 1993), pour devenir progressivement une nouvelle classe ouvrière sans qualification dont le travail était rigoureusement délimité et prescrit (l’ouvrier-masse) (Coriat 1994; Houben et Ingham 1995; Linhart 2013).

[2] L’auteur reprend la thèse du sociologue Zygmunt Bauman de” la société liquide” selon laquelle les institutions formant la société ont perdu ces dernières décennies à la fois de leur stabilité et de leur légitimité pour montrer comment le travail devient lui aussi de plus en plus incertain et en constante évolution. Les attaches entre les travailleurs et employeurs ne sont plus stables ; les travailleurs sont flexibles et indépendants et l’entreprise est plus fluide en se désengageant de plus en plus envers ses salariés. Dans le travail liquide, « il ne y’a pas de locaux d’entreprise, pas de collègues, pas d’horaires, pas de représentants du personnel, pas non plus de règlements en matière de santé et de sécurité, pas de prévention des accidents de travail, pas de congés payés, pas de négociation collective, pas d’assurance maladie » (Degryse, 2020).

Comme l’a expliqué Baumann : « Contrairement aux corps solides, les liquides ne peuvent pas conserver leur forme lorsqu’ils sont pressés ou poussés par une force extérieure, aussi mineure soit-elle. Les liens entre leurs particules sont trop faibles pour résister… Et ceci est précisément le trait le plus frappant du type de cohabitation humaine caractéristique de la « modernité liquide ». D’où la métaphore. Les liens humains sont véritablement fragiles et, dans une situation de changement constant, on ne peut pas s’attendre à ce qu’ils demeurent indemnes. Se projeter à long terme est un exercice difficile et peut de surcroît s’avérer périlleux, dès lors que l’on craint que les engagements à long terme ne restreignent sa liberté future de choix. D’où la tendance à se préserver des portes de sortie, à veiller à ce que toutes les attaches que l’on noue soient aisées à dénouer, à ce que tous les engagements soient temporaires, valables seulement « jusqu’à nouvel ordre »”. (Tabet, 2017)

[3] Voir (Ritzer 1996) qui considère que dans un temps de McDonaldisation de la société  ou celle-ci prend les caractéristiques d’un restaurant de prêt-à-manger  et ou on observe un glissement du traditionnel vers des modes dits raisonnables de pensée et de gestion scientifique, l’université est aussi conçue 1) comme un moyen de consommation éducative, 2) qui permet aux étudiants de consommer des services éducatifs et éventuellement 3) d’obtenir d’importants « biens » – diplômes et titres de compétences.

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