Research studies

L’impact de l’accès à l’eau potable sur la croissance économique : Une Revue de littérature

 

Prepared by the researche

  • Yammad Yousra – Faculté d’économie et de gestion – Université Ibn Tofail – Maroc
  • BADDIH Hindou – Faculté d’économie et de gestion – Université Ibn Tofail – Maroc

Democratic Arabic Center

International Journal of Economic Studies : Thirty Issue – August 2024

A Periodical International Journal published by the “Democratic Arab Center” Germany – Berlin

Nationales ISSN-Zentrum für Deutschland
ISSN  2569-7366
International Journal of Economic Studies

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Résumé

L’histoire nous a appris que l’eau est une ressource d’une symbolique unique. Elément indispensable au développement de la vie sur Terre, elle joue un rôle crucial dans la régulation du climat, la production d’énergie et l’essor de l’agriculture et de l’industrie. Cependant, les effets conjugués du réchauffement climatique et de la croissance démographique ont causé des dommages considérables aux ressources en eau. D’autant plus, la santé et le bien-être sont tributaires de l’accès à une eau potable propre et à des services d’assainissement adéquats. Ces derniers mettent les populations à l’abri des pathologies d’origine hydrique. Dans l’ensemble, le monde entier pâti du problème de la pénurie de l’eau. D’ailleurs, cette conjoncture planétaire de pénurie n’a nullement dispensé la Maroc d’une décente remarquable de ses ressources hydriques. Notre revue de la littérature vise à identifier les principales conclusions des études rigoureuses sur le lien entre l’accès à l’eau et à l’assainissement et la croissance économique. En analysant les différentes contributions, nous cherchons à comprendre les mécanismes par lesquels l’accès à l’eau et à l’assainissement influence la croissance.

Abstract

History has taught us that water is a uniquely symbolic resource. An essential element in the development of life on Earth, it plays a crucial role in climate regulation, energy production and the development of agriculture and industry. However, the combined effects of global warming and population growth have caused considerable damage to water resources. What’s more, health and well-being depend on access to clean drinking water and adequate sanitation services. The latter protect populations from water-borne pathologies. On the whole, the world is suffering from the problem of water scarcity. Moreover, this global situation of scarcity has by no means exempted Morocco from a remarkable decent of its water resources. Our literature review aims to identify the main findings of rigorous studies on the link between access to water and sanitation and economic growth. By analyzing the various contributions, we seek to understand the mechanisms by which access to water and sanitation influences economic growth.

Introduction :

Le décollage des pays du tiers monde fut tributaire à la mise à feu d’une dynamique purement technico-économique. Elmandjra, M. (1992). Cependant, on assiste de nos jours à une reconversion radicale de ces conceptions mécanistes depuis 1970, et à une prise de conscience du caractère épuisable des ressources, suite à la multiplication des crises écologiques et des catastrophes environnementales qui ont eu lieu en 1980.

 Ces dernières ont fait des ravages à travers l’histoire. Par conséquent, il était impératif de concilier le modèle de développement économique, basé sur la croissance avec le respect de la préoccupation écologique, admettant que nous vivons dans un monde aux ressources finis. En effet, le passage à un autre modèle plus viable de développement s’est imposé comme un Game changer. C’est dans ce contexte que l’ouvrage The Limits to Growth (1972), commandé par le Club de Rome a établi le lien entre la destruction des écosystèmes et la croissance économique

De surcroît, la croissance économique exige beaucoup d’eau Mondiale, L. B. (2022). Le patrimoine hydrique représente un facteur de production capital, dont la baisse se traduit par une récession de la croissance. D’ailleurs, certains pays assisteront à un repli au niveau de leur croissance qui peut arriver à 6 % du PIB à l’horizon 2050, en raison de la baisse de la production agricole, de la santé, des revenus …

D’autant plus, la banque mondiale avait tiré la sonnette d’alarme en 1995 dans un communiqué de presse, en affirmant que les guerres de ce siècle étaient majoritairement liées au pétrole ; mais les guerres du siècle prochain seront liées à l’eau. L’UNESCO aussi a établi des prévisions indiquant une forte probabilité de survenance d’une crise imminente de l’eau, en tablant sur une échéance proche (unesco,1999, p17). D’autant plus les récentes projections hydrologiques des ressources en eau douce de la planète ont signalé une éventuelle menace mondiale émergente, celle de la diminution des réserves d’eau douce par rapport à la demande croissante d’eau dans le monde. (Falkenmark et al. 1998 ; Revenga et al. 2000 ;Vörösmarty et al. 2000).

L’histoire nous a appris que l’eau est une symbolique à nulle autre pareille, elle représente un besoin universel, elle est considérée également comme une ressource unique de par sa plurifonctionnalité. Quel que soit la manière avec laquelle nous la considérons, l’eau est avant tout un élément vital, indispensable au développement de la vie sur terre, à la régulation du climat, à la production de l’énergie et au développement de l’agriculture et de l’industrie…

Il convient de constater, que les conséquences de l’évolution exponentielle de l’industrialisation, couplée à l’explosion démographique, et à l’impact du changement climatique, favorisent le débat autour de l’ambivalence entre la pénurie mondiale de l’eau et le développement économique.

En regardant l’évolution de l’économie internationale depuis des décennies, on s’aperçoit que c’est pas pour la première fois que les économistes étudient le lien entre la croissance économique et l’accès à l’eau, nous pouvons peut citer quelques travaux : (Bhattarai, 2004 ; Dalhuisen et al., 2003 ; Portnov & Isaac, 2008 ; Rock, 1998), Gleick (2003) (Rock 1998; Bhattarai 2004). Shafik, N., & Bandyopadhyay, S. (1992). Edward b. barbier (2004) ….

Sur le plan intellectuel, cette prise de conscience a déclenché un regain d’intérêt concernant cette problématique de l’eau qui fut longtemps marginalisée sur la scène scientifique, au profit d’autres problématiques à caractère social.

Cet article se veut une synthèse des recherches théoriques et empiriques qui ont exploré l’impact de l’accès à l’eau sur la croissance économique.

En réalité, le lien entre la pénurie de l’eau et la croissance économique est doté d’une complexité particulière, du fait de la faiblesse de la littérature ayant travaillé sur ce phénomène. (Botting, M.et al.2010). Les études empiriques qui ont examiné la relation entre l’accès à l’eau et la croissance économique, ont trouvé des résultats mitigés. Certaines études ont trouvé un résultat positif, tandis que d’autres ont trouvé un résultat négatif.

Cette revue de littérature vise à identifier les principales conclusions des travaux dûment établis sur l’impact de l’accès à l’eau et à l’assainissement sur la croissance. En interrogeons la littérature, nous tentons de comprendre comment l’accès à l’eau et à l’assainissement impacte-t-il la croissance.

Afin d’approfondir l’analyse de l’impact de l’accès à l’eau sur la croissance économique, ce papier se structure en deux parties distinctes. Premièrement, nous explorerons les différentes études qui se sont concentrées sur le lien entre accès à l’eau potable. Nous mettrons en lumière les méthodologies employées par ces recherches et les conclusions qu’elles ont dégagées. Dans un second temps, nous nous pencherons sur les travaux qui ont examiné la validité de l’hypothèse de Kuznets appliquée à l’eau. Nous analyserons les arguments avancés en faveur et en défaveur de cette hypothèse.

  1. L’accès à l’eau potable et la croissance économique

Barbier (2004) a étudié l’éventuel effet entre la pénurie de l’eau et la croissance économique par le biais d’analyses théoriques et empiriques. Pour ce faire, il a mobilisé une approche basée sur des données de panel pour tester sa théorie sur un ensemble de pays développés et en développement. Cette approche repose sur l’examen de l’incidence du taux d’utilisation de l’eau sur l’économie, admettant que dans son modèle de croissance, il considère « l’eau » comme un intrant faisant partie intégrante du processus de production.

Dans Son papier, « Water and economic growth » [1] Barbier, appuie fortement l’hypothèse selon laquelle la relation entre la croissance économique et le taux d’utilisation de l’eau est en U inversé. En outre, il est à signaler que, dans la majorité des pays, les taux actuels d’utilisation de l’eau douce n’entravent pas la marche de la croissance économique, néanmoins, les pays qui à priori-pâtissent du stress hydrique peuvent avoir des difficultés particulières à réaliser une croissance supplémentaire en utilisant plus d’eau. Barbier trouve que le coefficient d’eau est positivement corrélé à la croissance économique. Cela signifie que les pays qui disposent d’une plus grande quantité d’eau par habitant connaissent une croissance économique plus rapide.

Les résultats du modèle montrent qu’il existe deux effets potentiels de la pénurie de l’eau, un impact absolu et un impact relatif. Admettant l’absence de contraintes absolues de rareté de l’eau dans une économie. Le modèle de Barbier suggère que le taux d’utilisation de l’eau garantit que le PIB par habitant soit à son maximum. En revanche, la relation entre la croissance et le taux d’utilisation de l’eau est susceptible d’être plus complexe pour ceux qui manquent d’eau.

Force est de constater que bien que le gouvernement doive toujours s’approprier le maximum de la production pour fournir de l’eau douce ; cela ne signifie pas que la croissance économique en résultera.

Deux conditions majeures sont obligatoires pour la survenance de la croissance économique, la première est que la productivité marginale du capital doit compenser les effets négatifs du gaspillage d’eau dans l’économie, d’autre part, il faut qu’il y ait suffisamment de ressources en eau douce disponibles à s’approprier.

Les conclusions de Barbier ont des implications importantes pour la politique économique. Elles suggèrent que les gouvernements doivent investir dans l’amélioration de l’accès à l’eau, en particulier dans les pays en développement. Ces investissements peuvent contribuer à stimuler la croissance économique et à réduire la pauvreté

Barbier propose une nouvelle mesure de l’impact de l’eau sur la croissance économique, appelée le “coefficient d’eau”. Ce coefficient est défini comme le ratio entre la valeur ajoutée de la production utilisant l’eau et la valeur ajoutée totale de l’économie.

Outre que Barbier, nombreux sont les auteurs, qui ont étudié l’incidence de la rareté de l’eau sur la croissance économique et sur le bien-être des populations. A cet effet, il est impératif dans un premier temps de définir clairement ce concept. En effet, la rareté de l’eau est définie comme une pénurie au niveau de la disponibilité d’eau douce renouvelable se comparant à sa demande. (Taylor 2009 ). C’est dans cette optique que s’inscrit le travail de Damkjaer, S. et Taylor, R. (2017), intitulé « The measurement of water scarcity: Defining a meaningful indicator ». Les auteurs ont examiné l’évolution des indicateurs de mesure de la rareté de l’eau pendant les décennies passées[2]. Ils soutiennent que ces métriques manquent de significativité dans la mesure où, ils ne tiennent pas compte de la variabilité hydrologique et ils quantifient de manière subjective les conditions socio-économiques, chose qui peut mener à des estimations fallacieuses et partant à des décisions déconnectées de la réalité. Apres cette analyse profonde, ces auteurs sont parvenus à proposer une nouvelle approche de mesure de la rareté par l’indicateur « Stockage d’eau douce », dans l’objectif de combler les déséquilibres qui existent entre la demande et l’offre de l’eau douce, ainsi que pour éclairer un éventail de techniques ayant pour but de s’adapter au repli des ressources en eau. En réalité cette nouvelle approche prend en considération la variabilité temporelle de l’eau douce et elle est objective.

Toujours dans le cadre de la relation entre la croissance économique et les ressources en eau, Shafik and Bandyopadhyay (1992)[3] ont étudié dans leur papier « Développement économique et qualité de l’environnement : une analyse économétrique » la relation entre la croissance économique et la qualité de l’environnement, en parcourant méticuleusement les aspects de la transformation environnementale à divers niveaux de revenus.

Pour ce faire, ils ont utilisé des indicateurs environnementaux comme variables dépendantes dans des régressions en panel, avec les données de 149 pays, pour une période qui s’étale de 1960 à 1990, pour in-fin voire la façon avec laquelle ces indicateurs réagissent face à la croissance économique.

Les six variables concernant la qualité de l’environnement étudiées dans ce papier sont : le manque d’eau potable, le manque d’assainissement urbain, les niveaux ambiants de particules en suspension, le dioxyde de soufre, la génération de déchets municipaux et les émissions de gaz à effet de serre par habitant. Dans le but de générer des résultats significatifs, les auteurs se sont servis du modèle log-linéaire .

Les résultats des auteurs montrent que le revenu est le plus significatif sur tous les indicateurs de la qualité environnemental, y compris l’accès à l’eau potable et à l’assainissement urbain. D’autant plus, cette dernière variable s’améliore avec l’accroissement du revenu par habitant, contrairement aux autres indicateurs environnementaux qui se détériorent à mesure que les revenus augmentent.

Fort est de constater que nombreux sont les indicateurs qui ont tendance à progresser à mesure que les pays touchent des niveaux de revenus moyens. En outre, les pays à forte capacité d’investissement sont plus déviateurs de l’environnement, dans le sens où ils ont une forte intensité polluante.

Les auteurs trouvent que la disponibilité de l’eau est positivement corrélée à la croissance économique. Cela signifie que les pays qui disposent d’une plus grande quantité d’eau par habitant connaissent une croissance économique plus rapide.

Les conclusions de Shafik et Bandyopadhyay sont importantes pour la politique économique. Elles suggèrent que les gouvernements doivent investir dans l’amélioration de l’accès à l’eau, en particulier dans les pays en développement. Ces investissements peuvent contribuer à stimuler la croissance économique et à réduire la pauvreté.

Ne trainant pas seulement avec la raréfaction. Il y a une autre carence, celle de la détérioration de la qualité de l’eau (baechler, l. 2012). En fait, le problème de l’accès à l’eau est plus qualitatif que quantitatif, car plus on consomme, plus on rejette. Par conséquent, la pollution représente le vice majeur de cette évidence. Cet afflux massif des eaux usées est catastrophique pour l’environnement aquatique et nécessitera des traitements beaucoup plus coûteux pour rendre les réserves terrestres exploitables.

C’est dans ce cadre, que s’inscrit l’article de S.El KhanjiJ Hudson(2016) intitulé « water utilization and water quality in endogenous economic growth »[4] . Ces auteurs ont travaillé sur l’effet de la qualité de l’eau sur la croissance économique endogène. Pour ce faire, ils ont imité la méthodologie de Barbier (2004) qui a intégré dans son modèle le ratio de l’utilisation de l’eau.

En effet l’étude de El Khanji et Hudson est une contribution importante à la littérature qui lie l’eau à la croissance économique. Leurs conclusions sont compatibles avec les résultats des recherches antérieures. Techniquement, les auteurs ont opté pour un modèle à effets fixes à variables instrumentales, et ont étudié deux variables dépendantes ; qui sont le produit intérieur brut par habitant et la moyenne de croissance de 5 ans. 

Dans cette analyse, l’accent a été porté sur une analyse empirique plutôt que sur la construction d’un modèle théorique. En effet, et en s’alignant au modèle de Barbier qui a utilisé une fourchette de croissance de 5 ans, les auteurs ont fait de même en basant leur calcul sur 5 années et en construisant un panel de 177 pays couvrant la période 1960-2009.

En effet, Barbier (2004) a démontré que l’utilisation de l’eau impacte la croissance économique. Cependant, il avait appelé pour une analyse beaucoup plus approfondie, faute des données qui étaient limitées. Outre, l’impact de la qualité de l’eau sur la croissance économique était un sujet peu étudié au niveau de la littérature.

Dans cette perspective, les auteurs ont songé à combler l’impertinence des modèles de croissance antérieurs en intégrant la dimension environnementale (Soit la DBO [5]comme mesure de la qualité de l’eau et de la pollution), dans la mesure où les activités humaines, y compris l’industrialisation et l’urbanisation exercent une pression notoire sur les ressources en eau ; qui sont limitées dans la nature. D’autant plus, la pollution de l’eau ne cesse de monter en flèche. Ce papier soutient fortement l’hypothèse selon laquelle il existe une relation en U inversée dans l’effet de la rareté de l’eau sur l’économie à court et à long terme.

Les résultats de l’étude sont les suivantes :

  • L’eau est un facteur très important de la croissance économique. Les pays ayant plus d’eau ont tendance à avoir une croissance économique rapide.
  • L’utilisation de l’eau a une incidence positive sur la croissance économique.
  • La qualité de l’eau influence négativement la croissance économique, dans la mesure où la pollution de l’eau peut engendrer des problèmes de santé, une baisse de la productivité et une perte de compétitivité.

Il a été démontré que l’impact de la qualité de l’eau sur la croissance économique l’emporte sur la quantité de l’eau, c’est à dire que la qualité de l’eau est beaucoup plus significative lorsqu’on parle de l’effet sur la croissance économique. C’est dans ce sens que le paradigme de la croissance ne doit plus se limiter aux facteurs socio-économiques mais plutôt s’ouvrir sur les variables environnementales. D’ailleurs, le modèle a conclu que l’utilisation de l’eau et la DBO entravent toutes les deux la croissance économique.

Les résultats du modèle montrent que la croissance augmente à mesure que l’utilisation de l’eau augmente, jusqu’un certain point maximum où la rareté devient significative. Au-delà de ce degré, la croissance commence à se détériorer en raison d’une surexploitation des ressources en eau.

Abstraction faite de l’effet de l’utilisation de l’eau sur la croissance économique, la DBO ajoutée, décrit comment la qualité de l’eau affecte l’économie et comment le phénomène de la pollution endommage les ressources naturelles.

Ce modèle a levé le voile sur une problématique longtemps négligée, ce n’est autre que la pollution qui s’inscrit dans le cadre d’un cercle vicieux qui pèse lourd sur la qualité de l’eau prélevée. En fait, les coûts de production se voient augmenter, chose qui ralentit le processus de croissance économique et l’emploi.

In fin, les résultats du modèle prouvent indubitablement que la qualité de l’eau est un paramètre aussi révélateur que prometteur, au point de l’emporter sur la quantité, preuve à l’appui, la qualité de l’eau est significative concernant les régressions pour les deux variables dépendantes. Contrairement à la quantité qui n’est significative que dans un seul modèle.

Toujours dans le cadre de la qualité de l’eau et son incidence sur la croissance économique. L’étude de Desbureaux, S., Damania, R., Rodella, AS, Russ, J. et Zaveri, E. (2019), qui dans leur article intitulé « L’impact de la qualité de l’eau sur la croissance du PIB : données probantes provenant du monde entier », ont étudié l’impact de la qualité de l’eau sur la croissance du PIB. Pour ce faire, les auteurs se sont appuyés sur un indicateur révélateur de la qualité de l’eau, soit la (DBO). [6]Ils ont mobilisé un modèle de panel à effets fixes. En utilisant un panel de 17 pays pour une période qui s’étale de 1990 à 2014.

Les résultats ont démontré que la pollution des rivières, entraine une diminution de la croissance économique des régions en aval, ces dernières perdent entre 1,4 et 2,5 % de croissance économique.

Ce travail nous a éclairé sur l’impact de la qualité de l’eau sur l’économie, nous invitant ainsi à poursuivre nos recherches dans ce domaine et à développer une nouvelle compréhension de cette relation problématique.

Hertel, T., & Liu, J. (2019). Dans leur rapport intitulé « Implications of water scarcity for economic growth », tentent d’évaluer quantitativement l’incidence de la raréfaction des ressources hydriques sur la croissance économique, en mobilisant le « multi-region, recursive-dynamic, Computable General Equilibrium (CGE) model ». Les auteurs ont dressé dans un premier temps une revue de littérature qui se rapporte à la rareté hydrique, à la croissance économique, dans le but de rassembler tous les éléments qui serviront pour monter un modèle d’équilibre général calculable (EGC) multi-périodes et multi-régions, similaire au modèle de ENV-Linkages établi par l’OCDE.

Dans l’ensemble, le monde entier pâti du problème de la pénurie de l’eau. Cette ressource est à découvert et la majorité des pays peinent toujours pour atteindre l’objectif n°6 du développement durable, qui prévoit l’accès à l’eau potable et à l’assainissement pour tous. Tout comme les autres pays, l’Afrique du Sud n’a pas été épargnée de la raréfaction de ses ressources en eau, au regard du stress chronique qu’elle subit[7].

Conscient de cette détérioration alarmante, le gouvernement Sud-Africain, face au déploiement de tant d’efforts à l’échelle mondiale, a répondu présent pour apporter sa pierre à l’édifice. Le but étant de lutter contre la pollution et atténuer la pénurie d’eau. Dans le même ordre d’idées, une collection de mesures a été introduite pour préserver la qualité de l’eau dans le bassin de la rivière Olifants.

Dans leur papier « Managing the trade-off between economic growth and protection of environmental quality: the case of taxing water pollution in the Olifants river basin of South Africa. » . Kyei, C. et  Hassan, R.(2019) ont travaillé sur l’analyse des implications économiques et environnementales d’une taxe sur la pollution de l’eau dans ce même bassin. Pour ce faire, ils ont utilisé un modèle d’équilibre général calculable (CGE), afin de simuler les effets économiques et environnementaux d’une taxe sur les pollutions des eaux. Le modèle s’est calibré sur les données relatives au bassin du fleuve Olifants. En effet, les auteurs simulent l’incidence des différents taux d’imposition sur les niveaux de pollution, la production économique et l’emploi.

Les auteurs se sont engagés dans cette étude dans le but d’évaluer à quel point une taxe sur les pollutions des eaux pourra réduire la pollution dans le bassin en question, et partant améliorer la qualité de l’eau tout en minimisant l’impact sur la croissance économique. Cette étude a montré que la protection de l’environnement n’est nullement gratuite, et est obtenue à un certain coût[8]. Il a été démontré également dans ce travail que dans le bassin de la rivière Olifants, l’internalisation des externalités négatives de la pollution de l’eau par le biais d’un régime fiscal est la technique qui permettra de réduire efficacement les rejets polluants, et partant atteindre les objectifs environnementaux et protéger l’écosystème aquatique.[9]

Manase, G. (2009), dans son article intitulé « The strategic role of water in sustainable economic growth and development: the case of South Africa »,  avait souligné l’ampleur majeure  de l’eau pour l’économie Sud-Africaine.  L’auteur avait évoqué dans son article que l’infime fraction de stockage de l’eau allouée à chaque habitant (qui s’élève à seulement 700 m³) est susceptible de risquer l’objectif de croissance économique. En conclusion, cet article a démontré une forte corrélation entre l’économie et l’eau, tout en tablant sur les investissements d’infrastructure hydrique comme condition indispensable pour atteindre la croissance économique.

Sadoff et al. (2015) dans leur ouvrage intitulé « Securing Water, Sustaining Growth Report Of The Gwp/Oecd Task Force On Water Security And Sustainable Growth », ont travaillé sur la sécurité de l’eau et son incidence sur le développement durable, à l’aide de deux approches (théorique et empirique). Le modèle théorique[10] a été mobilisé pour mieux comprendre la dynamique de l’investissement dans la sécurité de l’eau. Les auteurs ont commencé par définir le concept de « sécurité de l’eau ». Ils l’ont défini comme étant la disponibilité de l’eau qui respecte certains standards quantitatifs et qualitatifs acceptables pour la santé publique, et pour les écosystèmes…

Les résultats de ce modèle théorique montrent que lorsqu’une économie est exposée à des risques liés à l’eau, il serait avantageux d’investir rapidement dans des actifs qui atténuent ces risques et protègent les actifs productifs. Néanmoins, du moment où les risques hydrologiques entrainent des pertes qui touchent d’autres secteurs, l’économie dans ce cas, peut subir un frein important qui va limiter par la suite sa capacité à exploiter les opportunités liées à l’eau.

Le modèle empirique [11] quant à lui, a été réalisé pour 113 pays, suivant la méthodologie de régression en panel à effets fixes, le but étant de déterminer s’il existe une incidence statistiquement significative des variables hydro-climatiques, sur la croissance du PIB par habitant des pays en question.

Les résultats montrent que l’insécurité de l’eau représente un frein au processus de la croissance économique mondiale. En somme, les deux modèles théorique et empirique ont démontré l’ampleur de l’investissement dans la sécurité de l’eau pour le développement, également l’importance du développement pour l’investissement dans la sécurité de l’eau.

Ce travail soutient l’hypothèse selon laquelle la sécurité de l’eau représente un paramètre déterminant pour réaliser la croissance économique, partant de l’idée que l’abondance de l’eau favorise le fonctionnement des entreprises et maintient les employés en bonne santé. (Grey, D., & Sadoff, C. W.2007).

En effet, il convient de souligner que les études ayant démontré de façon convaincante la relation entre la rareté de l’eau et la croissance économique sont rares (Hertel, T., & Liu, J. 2019) . Cet ouvrage de Sadoff et al. (2015) constitue une référence en la matière, du fait que ses résultats ont montré l’existence d’une relation forte entre l’insécurité hydrique et la croissance économique, et ce à travers une approche d’analyse de données de panel de 113 pays.

Bai, Hefei, et al. (2021), dans leur étude intitulée « Water policy and regional economic development: evidence from Henan province, China », ont travaillé sur l’incidence de la politique des ressources en eau sur la croissance régionale. Les auteurs ont choisi le terrain de la province de Henan, soit une importante région agricole et industrielle. Cette analyse est menée à l’aide d’un modèle d’équilibre général calculable. Les résultats ont démontré que l’amélioration de l’approvisionnement, de l’efficacité de l’eau et surtout de la technologie de l’eau, doit avoir un effet considérable sur la croissance régionale. C’est dire un impact positif sur l’emploi, le PIB régional, et le revenu des résidents. En revanche, si on agit sur la tarification, ça donne un effet opposé, dans le sens où l’augmentation du prix de l’eau limite le développement régional (diminution du Pib régional/l’emploi et le revenu des ménages).

En somme, s’agissant de la relation entre l’eau et la croissance économique, les auteurs de l’étude parviennent aux conclusions suivantes :

  • Les politiques de l’eau qui stimulent l’efficacité au niveau l’utilisation des ressources en eau, pourront avoir une incidence positive sur la croissance économique
  • Les politiques de l’eau qui s’intéressent à l’amélioration de la qualité de l’eau pourront également avoir une incidence positive sur la croissance économique.
  • Les politiques de l’eau qui ont tendance limiter l’accès à l’eau pourront avoir un impact négatif sur la croissance économique.

Il est évident que l’eau fait l’objet d’une multitude d’usages. Ce postulat nous dirige vers le contraste entre l’offre et la demande de l’eau. Lorsque l’approvisionnement en eau baisse, la production des secteurs qui dépendent excessivement des ressources en eau a tendance à diminuer à des degrés différents (le secteur agricole en est un bon exemple) . Ceci n’est nullement sans effet, mais plutôt affecte manifestement le PIB et les revenus des habitants de la province de Henan.

En outre, les auteurs signalent que le mécanisme de la tarification, (Montginoul et Rieu, 1996 ; Montginoul, 1998) en tant que moyen de gestion de la demande, s’avère efficace uniquement à court terme, dans la mesure où il permet de réguler de manière efficace l’utilisation de l’eau dans la province du Henan et inciter les usagers industriels à prêter une attention particulière à l’amélioration du taux d’utilisation de cette denrée tant convoitée.

Le coût de production des entreprises aura tendance à grimper suite à l’augmentation du prix de l’eau.  Cela induit une baisse de la production, et celle de la demande de main d’œuvre également. Par conséquent l’emploi diminue et le chômage prend les devants. De la sorte l’économie se contracte. Les auteurs s’aperçoivent que cet arbitrage, en sacrifiant le PIB dans un laps de temps réduit est une mesure aussi bien opportune que nécessaire pour un développement social et durable.

Admettant l’importance de la ressource -eau-, non seulement pour le bien-être de l’humanité mais aussi pour l’intégrité des écosystèmes, Rosa Duarte, Vicente Pinilla and Ana Serrano(2011), ont étudié dans leur article intitulé « la relation entre les ressources naturelles et la croissance économique » les tendances de l’utilisation de  l’eau entre 1900 et 2000 dans le monde entier, en plus de leurs principaux déterminants. Pour y parvenir, il fallait historier l’existant, et creuser dans les trajectoires historiques de l’utilisation de l’eau, pour par la suite effectuer des projections futuristes.

Porté par l’objectif d’étudier les déterminants de l’utilisation de l’eau et synthétiser le rôle joué par la croissance économique, les demandes de la population et la technologie, dans l’explication de impacts environnementaux, Les auteurs ont opté pour la méthode de l’analyse de décomposition structurelle (SDA), qui a été appliquée au modèle IPAT (Ehrlich et Holdren, 1971 ; Commoner et al. 1971). L’idée est de décomposer les tendances de l’utilisation de l’eau en cas de changements de la demande économique et de l’intensité de l’utilisation de l’eau. Pour par la suite, faire une simple analyse de scénario, dans le but de projeter les tendances futures de l’utilisation de l’eau en fonction de différentes hypothèses économiques, démographiques et technologiques.

Les résultats de l’étude montrent que la croissance économique et celle démographique s’avèrent déterminantes, s’agissant de l’augmentation de l’utilisation de l’eau durant ces 100 dernières années, avec des variétés régionales significatives, admettant que la consommation de l’eau joue un rôle important dans la croissance du PIB.

Cazcarro, I.et al. (2013), ont tenu d’examiner dans leur papier intitulé « Croissance économique et évolution de la consommation d’eau en Espagne : une analyse de décomposition structurelle », la relation entre la croissance économique et l’évolution de la consommation d’eau en Espagne, durant une période significative, qui s’étale de 1980 (marquée par le début de l’ère démocratique), jusqu’à 2007 (début de la crise économique).

Dans le but d’aboutir à des résultats significatifs, les auteurs ont mobilisé une méthodologie de décomposition structurelle SDA,[12] pour étudier principalement les changements dans la consommation d’eau incorporée dans la demande finale.[13].

Les résultats ont révélé que, toutes choses étant constantes par ailleurs, l’augmentation de la croissance économique aurait entrainé une croissance de la consommation d’eau presque trois fois supérieure à la croissance réellement observée pendant la période étudiée. Les auteurs ont conclu que, c’est la croissance économique qui a été derrière l’augmentation de la consommation d’eau en Espagne. En effet, elle a entraîné une hausse de la demande d’eau dans tous les secteurs. Ils ont également constaté que les transformations technologiques ont contribué à l’augmentation de la consommation d’eau, dans la mesure où les nouvelles technologies ont fait que l’utilisation de l’eau est devenue plus efficace dans certains secteurs.

  1. L’hypothèse de la courbe de Kuznets environnementale (EKC) appliquée à l’accès à l’eau

En dépit de la pauvreté de la littérature sur l’environnement, les conclusions empiriques de la littérature ont attesté l’existence d’une relation en U inversé entre le revenu par habitant et les concentrations de nombreux atmosphériques locaux (Grossman and Krueger , 1995).

Dans ce sillage, il convient de noter que nombreuses sont les études qui se sont penchées vers cette hypothèse de la courbe environnementale de Kuznets[14] ,entre autres (Fotros, MH 2010), qui a examiné la relation entre la pollution de l’air et la croissance économique dans les pays exportateurs de pétrole. En effet, les résultats ont indiqué une augmentation de la pollution atmosphérique aux premiers stades de la croissance économique dans ces pays. Outre Balali et coll. (2013) ont fait de même, en étudiant la relation entre croissance économique et la pollution de l’environnement dans le secteur pétrolier, tout en mettant l’accent sur les fluctuations des prix dans l’économie iranienne. Conséquemment, l’hypothèse de Kuznets est confirmée dans le secteur énergétique en Iran et les résultats ont attesté l’existence d’une relation d’une forme de cloche entre la valeur ajoutée du secteur pétrolier et le dioxyde de carbone.

La ressource eau est une condition nécessaire pour la croissance économique. Néanmoins, les activités humaines, à savoir l’agriculture, l’industrie et l’urbanisation, engendrent une augmentation de la consommation et partant de la pollution de l’eau. L’hypothèse de la courbe de Kuznets environnementale (EKC), suggère qu’il existe une relation de type U inversé entre la détérioration de l’environnement et le développement économique. En d’autres termes, plus un pays se développe, plus son impact environnemental augmente d’abord, mais diminue par la suite.

On assiste à une divergence au niveau des visions des auteurs, nombreuses sont les études qui plaident une pour une corrélation positive entre la croissance et la consommation d’eau (Bhattarai, 2004 ; Dalhuisen et al., 2003 ; Portnov & Isaac, 2008 ; Rock, 1998 ;[15] Rock 1998 ; Bhattarai 2004 ; Shafik, N., & Bandyopadhyay, S. 1992 ; Edward b. barbier 2004). Contrairement à (Gleick 2003) qui avait constaté une faible corrélation entre la croissance économique nationale et la consommation d’eau.[16]

D’une manière analogue, comme cela a été le cas pour d’autres ressources naturelles et polluants, Matthew A. Cole (2004) a eu pour objectif dans son papier intitulé « Economic Growth And Water Use »  de déterminer s’il existe une relation systématique entre l’utilisation de l’eau et le revenu (s’il existe une relation en forme de U inversé). Pour ce faire, il a utilisé la méthode de spécification à effet fixe pour une période qui s’étale de 2000 à 2020.

Les résultats montrent que, la courbe de Kuznets peut s’appliquer à la relation entre la croissance économique et l’utilisation de l’eau. C-à-d, dans la première phase de développement économique, l’utilisation de l’eau a tendance à augmenter du fait que les pays développent leurs agricultures, leurs industries et leurs infrastructures urbaines. Néanmoins, plus les pays deviennent plus riches, ils investissent davantage dans l’efficacité de l’utilisation de l’eau et sa préservation. L’utilisation de l’eau peut donc diminuer à mesure que les pays se développent.

Ajoutant à cela, le fait que seulement dans les régions développées que les points d’inflexions estimés à des niveaux de revenus ont été dépassés.

En revanche, Cole mentionne que la (ECK) n’est pas toujours applicable à la relation entre la croissance économique et l’utilisation de l’eau. Dans certains cas, il se peut que l’utilisation de l’eau continue à augmenter même dans les pays développés. En raison du changement climatique, de la croissance démographique ou des changements dans les modes de consommation.

En plus, il est primordial de signaler que la courbe de Kuznets est une théorie générale qui n’est pas applicable à tous les pays, du fait que les déterminants spécifiques qui influencent la relation entre la croissance économique et l’utilisation de l’eau peuvent varier d’un pays à l’autre.

Dans leur travail intitulé « Water Consumption And Economic Growth: Evidence For The Environmental Kuznets Curve » , Hosseinzadeh, Masoud, et al (2022), ont étudié la relation entre la consommation d’eau et la croissance du PIB[17] , en mobilisant la méthode des données en panel. Pour ce faire, ils ont utilisé la consommation d’eau par habitant et la production intérieure brute par habitant de 31 provinces d’Iran, pour une période qui s’étale de 2005 à 2018.

Les résultats ont montré effectivement qu’il existe une relation de type U inversé entre la croissance économique et la consommation d’eau. Au début de la trajectoire de la croissance, la consommation d’eau augmente. Ultérieurement, elle commence à décliner.

Outre, c’est dans les secteurs d’agriculture et de service que l’hypothèse de la EKC est confirmée, contrairement au secteur industriel où la relation eau-production prend la forme d’un N inversé.           

Bien que la tendance générale, qui soutient l’existence d’une courbe environnementale de Kuznets pour l’eau s’avère robuste dans tous les ensembles de données. L’analyse via les techniques NPDR[18], qui ne sont pas basées sur des hypothèses de forme fonctionnelle a démontré que la consommation augmente à mesure que le revenu augmente, par la suite elle se stabilise, mais elle ne diminue pas. Cela montre que la baisse constatée dans les régressions GLS et à effets fixes pourra être un reflet d’hypothèses concernant la forme fonctionnelle, plutôt qu’un vrai reflet des tendances dans les données.

David Katz (2014) dans son papier « Water Use And Economic Growth: Reconsidering The Environmental Kuznets Curve (EKC) Relationship », tend à redresser les torts des études précédentes, en réexaminant la relation entre la croissance économique et les prélèvements d’eau, grâce à des séries de données transversales et de panel. Il a mobilisé une variété d’approches méthodologiques, entre autres, les effets fixes et l’analyse de régression de densité non paramétrique (NPDR), et les moindres carrés généralisés (GLS).

En fait, l’auteur a élargi son analyse contrairement aux études précédentes, tant en ce qui concerne les données analysées que le type d’analyse, le but étant de tester la robustesse des résultats.

La DATASETS comprend des données transversales sur les prélèvements d’eau par habitant pour 149 pays, et également des données de panel sur les prélèvements d’eau totaux et par habitant et sur la consommation d’eau de 48 Etats des États-Unis, pour une période qui s’étale de 1960 à 2005, en plus des données des prélèvements d’eau totaux/par habitant de 30 pays de l’OCDE de 1960 à 2000.

En conclusion, les résultats adhèrent à l’hypothèse qui préconise l’existence d’une courbe environnementale de Kuznets. Cependant, ces résultats à défaut de robustesse, sont tributaires des données, des techniques statistiques mobilisées et également du secteur en question.

Mohsen Mehrara1, et al.(2011) , ont étudié dans leur  papier « On the relationship between water withdrawal and income: smooth transition regression (STR) approach » la relation entre le prélèvement annuel d’eau (RAE) et les niveaux de  revenu, dans quelques pays, par le biais d’une approche de régression de transition lisse (STR) [19]et en utilisant des données transversales de 163 pays pour l’année 2006[20].

Les auteurs utilisent l’approche STR pour détecter les ruptures structurelles potentielles dans la relation, et aussi pour identifier si la relation suit un modèle en U inversé, comme le suggère l’hypothèse de la courbe de Kuznets environnementale (EKC). Conséquemment les résultats attestent de la non-linéarité du lien entre le revenu et les prélèvements d’eau AWW[21]. D’autant plus cette relation suit plutôt un modèle sous forme de U inversé.

Enfin, cette revue de littérature nous a fourni un cadre solide pour tester l’incidence de l’accès à l’eau potable et aux services d’assainissement sur la croissance économique. A travers cette revue, nous sommes parvenus à sélectionner des variables pertinentes pour construire un modèle économétrique qui porte sur l’analyse de l’incidence de l’accès à l’eau potable et aux services d’assainissement sur la croissance économique du Maroc, dans la période qui s’étale de 2000 à 2022.

Nous visons à clarifier les fondements théoriques de notre recherche et à fournir une représentation visuelle des relations interdépendantes entre l’accès à l’eau potable domestique et le développement socio-économique.

Conclusion

Les travaux de Georgescu-Roegen (1971) et le rapport fondateur “The Limits to Growth” (Meadows et al., 1972), étaient le fer de lance qui a amorcé oustensiblement une nouvelle ére marquée par beaucoup d’attention quant aux impacts environnementaux liés à la croissance économique.

Qu’on le veuille ou non, les effets conjugués du réchauffement climatique et de la croissance démographique, ont causé des dommages averés. Outre, la dépendance des sociétés vis-à-vis de l’eau exerce une forte pression sur nos ressources hydriques. Conséquemment, la crise de l’eau qui frôle le seuil absolu, est considérée comme l’un des risques mondiaux les plus critiques pour la société, chose qui interroge nos pratiques et la gouvernance de ce secteur vital.

Conformément à certaines estimations, l’humanité s’est déjà appropriée plus de la moitié des ressources en eau disponibles dans le monde. (Postel et al., 1996).

Les voyants sont rouges et l’hypothèse d’un éventuel stress hydrique survolte le monde entier. Dans une optique futuriste, il convient de signaler que nombreuses sont les projections qui concernent la raréfaction future de l’eau. Néanmoins, il est délicat de se projeter dans la disponibilité future de l’eau (Gleick 2003). Cette difficulté d’estimation réside dans la précision du rôle que joue la croissance économique dans la détermination de l’utilisation de l’eau.

Certes, la relation entre l’eau et la croissance économique est complexe, et souvent sous-étudié dans la littérature. Cependant, malgré l’appauvrissement de la littérature en la matière, il est essentiel de reconnaitre l’importance de l’accès à l’eau dans le développement économique, et partant stimuler la recherche dans ce domaine digne d’intérêt.

En effet, L’eau est un facteur déterminant pour la croissance économique, comme elle peut être également un facteur limitant.

Ces auteurs ont contribué à la compréhension de la relation complexe entre l’accès à l’eau et la croissance économique. Leurs travaux soulignent l’importance de l’accès à l’eau pour le développement économique et le bien-être des populations.

En somme, Il ressort de ce survol de littérature que l’accès à l’eau exerce une incidence significative sur la croissance économique et que l’eau est un facteur de production essentiel, dont la disponibilité constitue un facteur déterminant pour la prospérité des pays.

Outre, un soin particulier est apporté ces derniers temps à l’aspect qualitatif de l’eau. Celui-ci, a pris les devants par rapport à l’aspect quantitatif, preuve à l’appui, nous trouvons les dépenses énormes consacrées à la lutte contre la pollution de l’eau. En réalité la qualité de l’eau est un facteur important pour le développement socio-économique, mais elle peut également être un blocus.

De ce fait, il est capital de considérer aussi bien la qualité de l’eau, que la quantité, quand il s’agit de la gestion de l’eau. Ces deux éléments sont intimement liés, et doivent être évoqués de manière holistique.

Bibliographie  

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  4. Cole, M. A. (2004). Economic growth and water use. Applied Economics Letters, 11(1), 1-4. Annuaire des Collectivités Locales, 30(1), 87-98.
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  16. Katz, D. (2015). Water use and economic growth: reconsidering the Environmental Kuznets Curve relationship. Journal of Cleaner Production88, 205-213.
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  19. Manase, G. (2009). The strategic role of water in sustainable economic growth and development: the case of South Africa.
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  21. Mondiale de la Santé, O. (2019). Stratégie de l’oms sur l’eau, l’assainissement et l’hygiène 2018-2025 (No. WHO/CED/PHE/WSH/18.03). Organisation mondiale de la Santé.
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  • YAMMAD Yousra

Docteure en sciences économiques et de gestion

Faculté d’économie et de gestion

Université Ibn Tofail – Maroc

Laboratoire des sciences économiques et politiques publiques

yammadyoussra@gmail.com

2- BADDIH Hindou

Professeure de l’enseignement supérieur

Faculté d’économie et de gestion

Université Ibn Tofail – Maroc

Laboratoire des sciences économiques et politiques publiques

[1] Barbier, E. B. (2004). Water and economic growth. Economic Record, 80(248), 1-16.

[2] Indice de stress hydrique (WSI) proposé par Falkenmark et Lindh ( 1974 )/ Ratio de retrait/disponibilité (WTA)/ L’indice social de stress hydrique ( SWSI) développé par (Ohlsson 2000 )/ L’indice Indice de pauvreté en eau (WPI), proposé par Sullivan ( 2002/ l’indice de stress hydrique » (WSI EWR ) proposé par Smakhtin et al. ( 2004 )…..

[3] Shafik, N. (1994). Développement économique et qualité de l’environnement : une analyse économétrique. Documents économiques d’Oxford , 46 (Supplement_1), 757-773.

[4] El Khanji, S., & Hudson, J. (2016). Water utilization and water quality in endogenous economic growth. Environment and development economics, 21(5), 626-648.

[5] Demande biochimique en oxygène (DBO)

[6] La demande biologique en oxygène, ce paramètre est qualifié de polluant général

[7] En raison des précipitations qui sont en dessus de la moyenne, ajoutant à cela la dégradation de la qualité de l’eau et la montée en flèche de la pollution des eaux de surface et des eaux souterraines

[8] Mais la politique de taxation de la pollution est gracieuse en termes d’incitations économiques avec les secteurs écologiques les moins polluants.

[9] D’autant plus, (2) un taux d’imposition de 100 rands par tonne de pollution réduira la pollution à hauteur de 25 % , et améliorera la qualité de l’eau jusqu’à 10 %. Les auteurs concluent que l’effet de la taxe sur la croissance économique est relativement faible, avec une diminution du PIB de moins de 1 %.

[10] A theoretical model of the dynamics of waterrelated risk, investment, and growth

[11] (An empirical analysis of the dynamics of water security and growth at the global scale)

[12] D’une manière générale, les techniques SDA visent à décomposer la tendance temporelle d’une variable en un groupe de forces motrices qui agissent comme des accélérateurs ou des retardateurs (Dietzenbacher et Los,1998 ; Hoekstra et van der Berg, 2002 ; Lenzen et al., 2001; de Boer, 2009).

[13] Cette technique, définie par Rose et Chen (1991) comme “l’analyse du changement économique à travers un ensemble de changements (statiques et comparables) dans les paramètres clés d’un tableau d’entrées-sorties”.

[14] La courbe environnementale de Kuznets est un segment ascendant dans lequel la croissance économique entraîne une dégradation de l’environnement, mais elle diminue après avoir atteint son maximum ;C’est-à-dire la croissance améliore l’environnement (Sharzehi et Haqhani , 2008).

[15] La consommation d’eau augmente initialement en fonction de la croissance économique., mais plus tard elle commence à décliner

[16] Nombreuses sont les études qui plaident une corrélation positive entre la richesse et la consommation d’eau domestique tant en Israël (Portnov et Meir 2008) qu’à l’étranger (Dalhuisen et al 2003).

[17] Après avoir passé en revue l’hypothèse de Kuznets

[18] L’analyse de régression de densité non paramétrique (NPDR).

[19] La STR est une technique statistique qui permet de prendre en compte la possibilité de ruptures structurelles dans la relation entre deux variables, dans ce cas, les prélèvements d’eau et le revenu.

[20] Les observations de cette expérience de modélisation proviennent des bases de données AQUSTAT FAO et WDI

[21] annual water withdrawal  

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