Research studies

Iġrman ou greniers collectifs comme institution socioéconomique chez imazighen: Classifications et fonctions

Iġrman or collective granaries as a socioeconomic institution of imazighen: Classifications and functions

 

Prepared by the researche  :Lahoucin M’BARKI – Faculté des lettres et sciences humaines, Béni Mellal, Maroc.

Democratic Arabic Center

International Journal of Amazigh Studies : First issue – December 2024

A Periodical International Journal published by the “Democratic Arab Center” Germany – Berlin

Registration number
R N/VIR. 3366 – 4559 .B
International Journal of Amazigh Studies

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https://democraticac.de/wp-content/uploads/2024/12/%D8%A7%D9%84%D9%85%D8%AC%D9%84%D8%A9-%D8%A7%D9%84%D8%AF%D9%88%D9%84%D9%8A%D8%A9-%D9%84%D9%84%D8%AF%D8%B1%D8%A7%D8%B3%D8%A7%D8%AA-%D8%A7%D9%84%D8%A3%D9%85%D8%A7%D8%B2%D9%8A%D8%BA%D9%8A%D8%A9-%D8%A7%D9%84%D8%B9%D8%AF%D8%AF-%D8%A7%D9%84%D8%A3%D9%88%D9%84-%D9%83%D8%A7%D9%86%D9%88%D9%86-%D8%A7%D9%84%D8%A3%D9%88%D9%84-%E2%80%93-%D8%AF%D9%8A%D8%B3%D9%85%D8%A8%D8%B1-2024.pdf

Résumé

Les greniers collectifs représentent un patrimoine matériel qui incarne un volet immatériel. Nous avons traité dans cet article d’une part la classification des types de greniers de la vie agropastorale d’imazighen selon des critères notamment la forme, l’état, la fonction, l’emplacement, la situation au sein de l’environnement et l’espace géographique du grenier ; d’autre part nous avons mis en relief certaines fonctions assurées par ces greniers dont quelques-unes sont perdues et d’autres continuent ou changent de forme. Pour réaliser cette recherche, nous avons procédé à une étude qualitative assurée par des entretiens, à une étude quantitative via un questionnaire et par la méthode de boule de neige. Notre article comprend : une introduction, la méthodologie et le matériel de travail, les critères de classification des greniers, les fonctions, le tableau récapitulatif et une conclusion.

Abstract

Collective granaries represent a tangible heritage that embodies an intangible component. In this article, we have dealt with the classification of the types of granaries of the agropastoral life of Imazighen according to criteria including the form, condition, function, location, location within the environment and the geographical space of the granary; on the other hand, we have highlighted certain functions performed by these granaries, some of which have been lost and others continue or change shape. To carry out this research, we carried out a qualitative study provided by interviews, a quantitative study via a questionnaire and by the snowball method. Our article includes: an introduction, methodology and working materials, granary classification criteria, functions, summary table and a conclusion.

Introduction :

La construction des greniers et leur gestion collective reposent sur une multitude de traditions, de savoir-faire ancestraux, de droits coutumiers, de valeurs et de normes ancestrales. La diversité des types de greniers est une  richesse architecturale, artistique et socioéconomique et leur classification est basée sur un ensemble de critères à titre d’exemple, la fonction du grenier (donc son activité qui nous permet de distinguer les greniers qui sont encore en fonction et les autres qui ont perdu leur fonction), l’état de l’ighrem ou de l’Agadir, l’emplacement du grenier et sa situation par rapport aux habitations et aux autres constructions spécifiques (marabout, mosquée…) ou repères naturels (l’Asif, source,forêt…). Le recensement et la localisation des types de greniers et la détermination de leurs fonctions qu’ils avaient accomplies ou qu’ils assurent actuellement, ont necessité un travail de terrain pénible afin d’avoir une riche base de données. Les greniers peuvent plutôt doivent être un facteur de développement des potentiels culturels locaux au niveau du tourisme culturel ou du travail associatif. C’est la conviction de l’importance de préserver et de faire connaitre cet héritage ou patrimoine représenté par les greniers qui est la meilleure motivation pour faire l’inventaire de ces types de greniers et leurs fonctions.

  • La méthode et le matériel de travail
    • La méthodologie de travail

Nous avons procédé à faire des visites répétées à une dizaine de communes rurales de la région Béni Mellal-Khénifra et qui forment notre zone d’étude ou terrain de travail. Cette étude vise à recueillir des informations, des connaissances, des corpus, des enregistrements, des témoignages, des traditions orales, des photos, etc. Pour cette enquête, et selon Max Weber, la méthodologie du type idéal est nécessaire aux sciences de la culture car elle assure l’analyse des phénomènes historiques. Nous signalons que nous avons rencontré certaines difficultés dont nous citons l’étendue de la zone d’étude sur dix communes rurales entre deux provinces : Béni Mellal et Azilal, sans oublier l’entrave majeur du relief car toutes les communes rurales choisies sont montagneuses donc l’absence de l’infrastructure routière réduite en routes et sentiers en mauvais état. Notre étude est à la fois qualitative et quantitative, l’échantillonnage nous permet de collecter des informations pertinentes du terrain en touchant une population de cinquante-six greniers ciblés afin de répondre à notre problématique et pour vérifier nos hypothèses formulées.

La méthode qualitative consiste à un entretien individuel, à un groupe de discussion (groupe d’une sous fraction)[1]. Nous procédons aussi à l’observation quantitative et à une observation qualitative. Le but de la recherche qualitative est d’avoir un échantillon qui reflète les caractéristiques de la population étudiée.

La méthode quantitative est basée sur l’utilisation du questionnaire destiné aux gens dont l’âge est supérieur à 30 ans. Dans la méthode quantitative, nous utilisons aussi des variables quantitatives : les chiffres concernant le nombre de greniers pour chaque fraction, pour chaque commune, le nombre de cases dans chaque grenier, certaines dimensions du grenier, etc.

  • Matériels et outils de travail

Le matériel utilisé lors du travail de terrain est un ensemble d’outils pratiques. Nous citons d’abord, notre téléphone pour établir une communication régulière, nos collectes d’informations et de données, l’entretien, le questionnaire, des cartes topographiques, la boussole, l’altimètre, un mètre. D’autres outils sont utilisés tel le cahier ou le carnet de notes, un plan d’action en parcourant les distances entre les sites abritant les différents types de greniers et le matériel audio-visuel (caméra + appareil photo) pour prendre les photos et enregistrer les traditions orales. Pour le travail à domicile, nous devons préparer : la documentation écrite, le matériel technologique (appareil photos, téléphone), l’enregistrement des narrations, des informations, des descriptions, une documentation cartographique, le support de stockage des traditions orales.

  • La classification des greniers fortifiés
    • La structure ou l’aspect architectural des greniers

Les constructions traditionnelles de stockage reflètent une architecture faite avec habilité et concrétisent les savoir-faire des ancêtres. Elles varient d’une fraction à l’autre, d’une tribu à l’autre et d’une zone géographique à l’autre selon leur architecture d’une part et d’autre part selon les matériaux et les éléments de constructions.

2-1-1Le grenier en forme cubique ou en forme d’un pavé droit

C’est la forme la plus dominante avec une largeur et une longueur qui varient d’un grenier à l’autre.

Photo 1 : le grenier Iġrem n Oumzray Amazdar

 Un Grenier de forme cubique construit en pierre sur un socle rocheux ; il avait bénéficié d’une restauration

Cliché L Mbarki 15/07/2023

  • Le grenier cubique avec présence de tours

La présence de quatre tours pour certains greniers est un trait distinctif et Jacques Meunié a parlé de ce type d’ighrem dans l’Atlas central ayant un plan carré à quatre tours quadrangulaires.

Photo 2 : le tour de guet                           photo 3 : ighrem des Ayt Sidi Aziz avec des tours

Ighrem des Ayt Aziz ; source travail de terrain

  • Le grenier cubique avec absence de tours

Ces greniers ont une forme plus ou moins cubique. Ils sont construits de pierres allongées intercalées d’une terre argileuse, de bois à différentes tailles et natures. Ce type est parfois imposé par le climat qui règne, par la présence d’un paysage rocheux. Nous citons l’exemple de : ighrem n Ayt Sidi Hsayen à Tagleft (à gauche) et des Ayt Khouya Lahcen à Tilougguit n Ayt Isha (à droite). Parfois nous trouvons chez certains greniers sans tours une sorte de renforcement angulaire en pierre au pied de la façade exposée aux précipitations à titre d’exemple ighrem des Ayt Ounammas chez Inddahen à Anergui.

Photo 4 : Iġrem des Ayt Sidi Hsayen                photo 5 : Iġrem des Ayt Khouya Lahcen

Cliché L MBARKI 12/07/2023                                           16/07/2023

  • Le grenier en forme d’enceinte circulaire (cylindrique)

Photo 6 : Iġrem de forme circulaire de Sidi Moussa à Ayt Bougmmaz

Cliché L. MBARKI                         source : sortie scientifique 03 /05/2023

Il s’agit d’un grenier qui a une forme plus ou moins circulaire et il est construit sur une colline qui surplombe la vallée des Ayt Bougmmaz. Pour le haut Atlas central et le Moyen Atlas, il s’agit de l’unique grenier circulaire.

  • L’Etat actuel des greniers
    • L’ighrem en bon état et en usage

Certains greniers sont encore en bon état c’est-à-dire tous les éléments et les parties de construction du grenier sont intacts (murs, tours, toits…) et en plus, ce grenier est en fonction avec un changement au niveau des matières emmagasinées et stockées. Nous pouvons donner les exemples des greniers des Ayt Khouya à Tabr3it (Tagleft), Ighrem n Oumzray et Tifouyna (Zaouiat Ahansal), ighrem des Ayt Boulmane (Anergui).

Photo 7 : Ighrem de Tifouyna à Zaouiat Ahansal.           Photo 8 : Iġrem d’Amzray

Cliché L. MBARKI 15/07/2023

Les greniers de Tifouyna et d’Amzray n Oufella sont encore en bon état et leur fonction continue en assurant le stockage du fourrage surtout la luzerne, les grains du maïs et ses tiges séchées.

  • L’ighrem en bon état mais abandonné

Quelques greniers qui ont résisté aux conditions climatiques et anthropiques sont restés plus ou moins en bon état mais ils ont perdu leurs fonctions et sont donc abandonnés. Ce type de greniers, on le trouve chez les Ayt Sidi Aziz (Tagleft), à Agwddim (Zaouiat Ahansal), Ayt Khouya (Anergui), chez les Ayt Ouqabli.

Photo 9 : Iġrem de Tabnaaddit                             photo 10 : Iġrem n Ikhachan abandonné

     Cliché de L. MBARKI 17/07/2023                                            14/07/2023

 

  • L’ighrem en mauvais état avec une seule partie touchée

Il s’agit ici des greniers qui ont perdu un seul élément principal, qui peut être un mur (une façade), un tour ou le toit. Nous pouvons donner des exemples pour certaines communes parcourues : Le premier exemple ighrem n Ayt wouchen à Tagleft (à gauche) est un grenier en pierre, il a perdu son toit tandis que la porte existe mais elle est pleinement ouverte et bloquée par les matériaux tombés ; le deuxième grenier (à droite) appartient à Inddahen appelé ighrem n Tawsbouht à Anergui, il est construit en pisé et il a perdu aussi son toit. Cependant le troisième exemple ighrem des Ayt Aathman à ighrem n Ougrou (Tagleft) a perdu une partie de sa façade latérale (vers le Sud)

Photo 11 : Iġrem des Ayt Wouchen sans toit     photo 12 : Iġrem de Tawsbouht sans toit

Cliché L MBARKI 13/07/2023                                               17/07/2023

Il s’agit de deux greniers différents de point de vue matériaux de construction, le premier (photo 11) est en pierres le deuxième (photo 12) est en pisé mais les deux ont perdu un élément essentiel qui est le toit. La perte du toit sans restauration indique une exposition du grenier à toutes les conditions défavorables anthropiques et climatiques.

  • L’ighrem totalement effondré ou démoli

Ce type de greniers est fréquent surtout ceux qui sont construits en pisé de point de vue matériaux de construction et ceux qui sont construits sur un versant de point de vue emplacement et ce type est répandu chez Ayt Ali Mḥa des Ayt Aïssa à Anergui et les Ayt Boulmane de Taghya à Tagleft.

Photo 13 : Iġrem des Ayt Ali Mḥa effondré       photo 14 : Iġrem des Ayt Majjou démoli

Cliché L. MBARKI 17/07/2023                                       12/07/2023

  • L’ighrem sous forme de ruines et de traces

Il s’agit d’un type de grenier détruit totalement soit par une intervention de l’être humain ou à cause des conditions climatiques ou par présence des deux actions citées donc anthropique et naturelle. Nous citons ici l’exemple des greniers des Ayt Aâmmou sur la colline de Taghnbout et celui des Ikwrin de Tifirt N Ayt Hamza qui sont presque totalement effacés.

Photo 15 : traces d’Iġrem d’Ikwrin          photo 16 : parties des murs d’iġrem des Aâmmou

Cliché de L. MBARKI 14/07/2023

Les traces d’un grenier en pierres construit sur une colline pas loin de la rivière Ouirine à Tifirt N Ayt Hamza (photo 15) même chose pour l’autre grenier plus proche du premier mais avec persistance de petites parties des murs en pierres (photo16).

  • L’activité du grenier et son abandon

Nous avons deux hypothèses, la première concerne les conditions dans lesquelles les sociétés bâtissaient leurs greniers et la deuxième évoque les conditions dans lesquelles ces édifices sont abandonnés ou sont conservés pour perdurer (Naji, 2006, p.155)[2].

2-3-1 Les greniers en activité et en fonctions continues

Ce sont des greniers qui fonctionnent encore soit en gardant les mêmes procédures et le même type de fonctions soit qu’on assiste à un changement de fonctions et du domaine d’activités et l’exemple frappant est le grenier où on substitue la fonction de sauvegarder, d’emmagasiner les récoltes agropastorales par une fonction culturelle comme fondements et piliers du tourisme, soit qu’on transforme le grenier à une sorte de siège pour association, coopérative. Parfois ces greniers servent d’espaces aux tournages internes des scènes cinématographiques comme c’est le cas de Zaouiat Ahansal, Anergui et Tagleft ; ils peuvent aussi devenir un établissement qui assure l’alphabétisation. Les causes de la persistance et de l’activité des greniers en usage ou en activité qui résistent aux changements du temps et de l’espace sont liées aux traditions chez certaines communautés. Ces traditions disparaissent chez certains alors que d’autres en restent attachés. Kaouther Oudghiri a cité la cause d’attitude de l’organisation communautaire des Ayt Kine au Sud marocain vis-à-vis de ce patrimoine des greniers. En plus de ces causes sociales et psychiques, nous pouvons parler de la présence d’une protection naturelle et anthropique pour certains greniers (montagnes, collines, rochers, rivières ou vallées, murailles…)

  • Le grenier sans fonction donc abandonné

Nous trouvons des greniers qui sont encore plus au moins en bon état et qui résistent à toute sorte de démolition mais qui ont perdu leurs fonctions pour des raisons sociales, culturelles, juridiques, économiques, politiques. Parmi les causes de cette situation d’arrêt ou de perte de fonction d’un grenier, nous pouvons citer le changement du mode de vie des régions qui abritent ces greniers et la sensation d’avoir l’air d’infériorité pour les propriétaires de ces constructions en terre qu’ils considèrent comme indice de pauvreté de même que la faiblesse des sanctions pénales en cas de violation défavorable contre ce patrimoine architectural.

Nous pouvons se poser la question : Pourquoi le processus de la restauration et du fonctionnement des greniers est très lent ou absent ? Pour répondre à cette question, nous pouvons signaler que l’intervention de la conservation des greniers est amortie par le régime juridique foncier (Salimi, 2022, p.135)[3] donc on parle de la complexité de la situation foncière, qu’il y a manque de coordination entre les acteurs et les agents et nous pouvons ajouter l’indivision de la propriété liée au problème de l’héritage. Ici nous donnons comme exemple les greniers d’Awjgal où le projet de restauration n’était pas achevé vue l’entrave de la propriété collective.

  • Les propriétaires du grenier et leur mode de vie
    • Le type de grenier chez les sédentaires

Ils construisent leurs greniers collectifs au sein d’une agglomération ou d’un village « asgwn » en confiant la surveillance à un gardien « Amzdaġ ». Les gens pratiquent l’agriculture et l’élevage du cheptel à nombres restreints. Parmi eux, il y en a ceux qui pratiquent quelques professions ou métiers : laboureur, menuisier, maçon, forgeron.  Nous devons signaler que les sédentaires dont les maisons sont éparpillées au sein de leurs propriétés possèdent des silos individuels. Le grenier de tout un canton, devient une institution avec développement du droit coutumier et même du commerce et d’un marché (Montagne, 1951)

  • Le type de grenier pour les pré-sédentaires

Présence de Tighremt ; le village et son organisme essentiel, le grenier collectif, pendant la transhumance d’été est bien gardé. Nous avons constaté chez les Ayt Khouya et les Smaïl que les types de greniers de ces propriétaires, et en plus des cases de stockage, de la chambre de l’amzdagh, ont un emplacement destiné aux tentes de la transhumance estivale.

  • Le type de grenier pour les semi-nomades

Selon Robert Montagne, les semi-nomades préfèrent des grottes de falaises en lignes superposées ; puis, des magasins familiaux construits comme centre d’établissement permanent : la tighremt.

  • Le type de grenier chez les nomades

Pour les nomades qui se déplacent toujours, Laoust cite des sortes de Kasbahs cubiques avec des tours aux angles surtout chez les gens du Sud. Ce type de Kasbahs porte différentes appellations selon les régions. Il cite : Tighremt / Tighrmatin, « tighremt / Tighrmin », « Taḥanut n teqbilt ». Il nous parait logique que les types de greniers utilisés par les nomades qui se déplacent tout le temps avec leurs troupeaux de cheptel, ce sont les greniers de falaise (Awjgal, Walous, Ighrem n Ouchttine, ighrem n Zarkan…) alors que ces types cités chez Laoust peuvent correspondre au mode de vie des semi-nomades (montée vers les hauts reliefs en été et descente vers les « asgwn » ou village en hiver). Chez les nomades, des cachettes creusées ou aménagées dans les rochers et les silos collectifs (Robert Montagne, 1951).

  • Le type d’espace du grenier

Le grenier est soit un espace ouvert : greniers de falaise, greniers de grotte, Tanudfi, axubi n waman (digue), iferd (mare, lac), soit un espace clos : greniers de village, greniers de famille, silo, tarma, tassellt, akuffi (couffin).

  • Le grenier comme espace fermé

Ce critère permet de répartir les greniers en deux grands types. D’abord, les greniers qui représentent un espace fermé notamment les greniers collectifs de village, les greniers de famille, les greniers devenus individuels, les silos souterrains et puis, d’autres qui sont apparus tardivement comme « ttarmla » qui est une chambre destinée au stockage des aliments. Une sorte de caisse en bois appelée « afniq, soundouq », un grand panier en roseau en forme de silo c’est « Tassllet », les mines du sel gemme (Tasraft n Ayt Abdi), les mares (iferd), et les puits d’eau.

  • Le grenier comme espace ouvert

Ce type de grenier ou lieu de stockage englobe les espaces ouverts : nous pouvons citer les greniers de falaise ou Tiḥuna et qui sont un intermédiaire entre les greniers de grottes et les greniers collectifs ou Iġrman, les greniers de grottes (iferi n ayt Msahel), les mares ou lacs artificiels comme iferd n Ali et Tanoudfi des Ayt Boulmane.

  • Le type de l’emplacement des greniers
    • Le grenier sur colline loin de l’Asif

Ce type est construit sur une colline qui est loin de la rivière mais généralement proche d’une autre source d’eau (source, puits, tanoudfi…). Le choix de la colline comme lieu de construction est d’ordre défensif et sécuritaire.

  • Le grenier sur colline et proche de l’Asif

On trouve ce type de grenier, et contrairement au premier, dans les régions traversées par un courant d’eau ou l’Asif avec manque de sources d’eau loin de cette rivière ou de cette vallée.

  • Le grenier loin de l’Asif proche d’une source

Ce type est très fréquent dans les aires géographiques moins accidentées et traversées par une rivière ou sous forme d’un bassin géologique (dépression).

  • Le grenier sur un versant incliné

Les greniers sont construits sur un versant de montagne mais ce n’est pas n’importe quel versant. Les communautés choisissent en général le versant exposé au soleil (adret) et caché contre les précipitations (pluies et neige).

Photo 17 : le grenier au pied d’un versant incliné

Le grenier des Ayt Ounammas chez Imddahen, à Anergui, il est construit sur un versant et exposé au soleil (adret). Il est loin de la rivière mais près d’une source (Taghbalout).

Cliché de L. MBARKI          17/07/202

  • Le grenier au sein des habitations du village

La plupart des greniers de village, greniers de famille ou greniers de famille devenus greniers individuels se trouvent implantés au sein des habitations

  • Le grenier loin des habitations près de la forêt

Ce type de greniers est rencontré chez ikhachan des Ayt Ouqabli qui est un grenier collectif presque isolé des habitations au sein de la forêt au bord de la rivière de Ouirine, chez les ayt wouchen et Ayt Ali Ouamer à Achbarou, chez les Ayt Waboud et Ayt Aathman à Ighrem n Ougrou de Tagleft qui sont des greniers éloignés des habitations et entourés de végétations.

  • Selon la répartition géographique du Maroc

Selon ce critère de répartition géographique à l’échelle nationale, Jaques Meunié a classifié les greniers en quatre groupes : les greniers Rif espagnol, iġrman de l’Atlas central et du moyen Atlas, igudar du Haut Atlas, igudar du Souss et de l’Anti-Atlas. Nous pouvons proposer une modification au niveau de cette classification en gardant le groupe du Rif sans espagnol, les iġrman concernant le Moyen Atlas et le Haut atlas central, les igudar du Haut Atlas occidental et ceux du Souss et de l’Anti-Atlas.

  • Les fonctions des greniers collectifs

Parsons parle des quatre éléments stables d’une structure : les rôles, les collectivités, les normes et les valeurs. Dans le cas des greniers, les rôles peuvent changer selon le mode de vie et le système économique donc on parle de quatre séries d’éléments qui sont le fondement de sa valeur notamment les rôles économique, social, culturel et environnemental. Nous pouvons dire qu’une société qui possède un ensemble divers de greniers a un statut social élevé, ceci a un impact sur son système et son pouvoir économiques sur son territoire ; donc il lui donne un pouvoir politique au sein de la tribu ou de la sous-confédération. Nous pouvons conclure qu’il y a une relation étroite entre la possession des greniers (plutôt plusieurs types de greniers) et le degré de stockage sans oublier le pouvoir.

  • Fonction socioéconomique :

Les gens entreposent les grains et les fourrages en été pour affronter l’hiver et le stockage rend les gens forts psychiquement et économiquement. Ce rôle économique lié à la vie agropastorale change de faciès pour intégrer le tourisme culturel ou la vie associative et coopérative.

François Decret dit : « Ces greniers fortifiés ou dissimulés sous terre permettent aussi d’emmagasiner les céréales avant leur écoulement sur le marché interne ou externe »[4]. Donc Decret affirme le rôle économique des greniers dans deux sens, la consommation et la sécurité alimentaire des propriétaires puis la vente des récoltes comme sources de revenus afin d’assurer les autres besoins familiaux. Nous concluons que le grenier comme patrimoine est partie intégrante du système économique, social et environnemental.

Le grenier est considéré comme la source de l’alimentation et de l’approvisionnement pour les familles, la tribu ou la communauté, on peut dire que c’est le ventre de la maison (Jeanne-Françoise, 1982).

  • Fonction défensive :

Les greniers sont des lieux de refuge en cas de dangers, d’intempéries ou d’attaques, on y trouve les armes et la poudre. Ces greniers assurent une certaine sécurité pour les propriétaires. Un nombre très important de greniers étaient bombardés par l’aviation du colonisateur français afin d’éliminer toute source de nourriture et d’alimentation pour les gens de la montagne connus pour leur résistance farouche. Donc le seul moyen qui les oblige à poser les armes et à déclarer leur soumission est d’intensifier les bombardements ou les brûlages (par incendies) surtout entre 1929, 1930 à titre d’exemple Iġrman n Ouasif puis 1932-1933 (cf. Service Historique de l’armée de Terre).

  • Fonction spirituelle :

Généralement ces greniers présentent une sacralité donc ils représentaient des institutions ou des lieux sacrées et leur protection symbolique était toujours confiée à un saint et à son marabout (Sidi Walous, sidi Moussa, sidi Lghazi…), à une Zaouia, à une mosquée, à un mythe ou légende. Dans une conférence, Naji annonce : « Des nourritures frumentaires aux nourritures spirituelles … ». Naji soulève une relation entre ce qui est aliment ou nourriture donc économique et ce qui est spirituelle ou nourriture de l’âme des humains. Pour les propriétaires des greniers, la nutrition du corps ne peut pas être dissociée de la nutrition de l’âme. Les greniers ont une fonction des lieux sacrés, et nous ajoutons que cette sacralité est liée étroitement au monde des greniers sur le plan matériel comme construction collective ou sur le plan immatériel qui correspond aux récits (Naima Keddane, 2018).

  • Fonction touristique :

Des greniers étaient transformés en maisons d’hôtes, gîtes touristiques (Megdaz) ou en maisons d’artisanat. C’est un domaine d’investissement dans le cadre d’un développement territorial ou local et pour créer des sources de revenus.

Les deux greniers collectifs de Zaouiat Ahansal notamment ighrem n Oumzray n Oufella et Amazdar, aussi les greniers de famille Tighrmin n Ougddim, étaient restaurés par une association dans le but d’avoir et de sauvegarder ces monuments qui attirent les groupes de touristes.

Photo 18 : Tighremt exploitée                     photo 19 : Tighremt restaurée

Cliché de L. MBARKI 25/09/2023                                           15/07/2023

Photo 20 : Tighremt restaurée et habitée           photo 21 : Tighremt transformée en gîte

Cliché de L. MBARKI   15/07/2023

Il s’agit des greniers de Type Tighrmin de Agwddim à Zaouiat Ahansal. Ces greniers ont bénéficié d’une restauration. Tighrmin est un type de grenier familial qui correspond à Tighrmatin n Tqbilt (Laoust, 1920). Nous avons une Tighremt aménagée et exploitée comme maison d’hôtes dans le tourisme solidaire (photo18), Tighremt restaurée et exploitée dans le tourisme culturel (photo19), Tighremt restaurée et réhabituée (photo 20) et Tighremt restaurée et transformée en gîte touristique (photo 21).

  • Fonction sociale ou la consolidation des liens sociaux :

La gestion des greniers reflète un mode de vie solidaire, un esprit collectif, une culture d’entraide interfamiliale, intra-tribale et voire intertribale en cas de pénurie ou de sècheresse (échange par troc). Les greniers renforcent les relations sociales. Selon Salima Naji, l’école coloniale souhaitait la disparition des greniers (Naji, 2020, p.230)[5] Mais nous avons des communautés dont le poids de l’esprit collectif reste dominant sur le plan social. Nous pouvons se demander pourquoi cette institution du bien commun continue à survivre en Afrique du Nord surtout au Maroc ? Une réponse parmi d’autres est donnée par Naji qui assure que l’institution de l’Agadir sacré est une communauté élargie qui dépasse les relations du sang et de lignages (Naji, 2020)[6]. Cette fonction sociale du grenier est gérée par l’esprit collectif dont le travail est basé sur le principe de l’entraide. Le grenier comme tout autre patrimoine peut être considéré comme une sorte d’écosystème (Verniers, 2015) qui engendre une satisfaction privative des liens sociaux.

  • Fonction historique

Les types de greniers nous fournissent des informations sur l’architecture d’une époque ou d’une dynastie, sur le mode de vie des communautés et leurs productions agricoles. Ils nous permettent de suivre le transfert d’une culture architecturale (Exemple : Les Almohades en Afrique du Nord et en Espagne). A l’époque coloniale, et comme nous l’avons signalé avant, la France a su le rôle important des greniers dans l’approvisionnement des habitants en aliments et en nourritures ce qui renforce leur résistance alors pour obliger les tribus à déposer les armes et lancer leur soumission, l’armée française a intensifié les raids et les bombardements des greniers quel qu’ils soient : greniers collectifs « Iġrman » ou greniers de falaise « Tiḥuna » notamment iġrem n Zarkan, Awjgal, etc. Dans le cas où le grenier est bien protégé par les reliefs avec absence de possibilité d’être bombardé par l’avion, les colonisateurs procèdent à brûler certains greniers en provoquant de grands incendies.

  • Fonction socio-anthropologique

Les types et les états des greniers sont liés aux transformations qui sont à l’origine du changement et de l’évolution des familles, des tribus ou des communautés et leurs modes de vie. Le grenier quel que soit son type, peut être considéré comme un lieu de succession des processus d’humanisation de l’espace économique et sacré. Le grenier favorise, donc, ce qu’on appelle la domestication (Beldjerd et Tabois, 2014) qui correspond au fait d’habiter et d’humaniser un espace tout en luttant contre le désordre.

  • Fonction politique

Le grenier est un édifice construit par ses propriétaires pour assurer plusieurs fonctions comme nous l’avons cité en haut, c’est un patrimoine matériel qui incarne l’esprit de l’organisation politique de la tribu ou de la communauté (Mignot, 2009, p.58)[7]. Afin de préserver et sauvegarder ce patrimoine des greniers, il est préférable de doter les zones qui abritent les greniers, et qui sont généralement montagneuses, d’une politique publique intégrée qui vise leur développement territoriale et /ou local et rejeter les approches classiques.

  • Résultats et interprétations

Tableau récapitulatif

  En fonction L’état du grenier L’emplacement La situation
1er cas En fonction continue En bon état sur la forme et sur le fond Sur colline et près de la rivière Au sein des habitations (hameau)
2ème cas D’une façon occasionnelle Perte d’un seul élément Sur colline près d’une source Au voisinage du village
3ème cas Exploité par une seule famille Persistance du cadre (forme) seulement Sur un versant près d’une source Un peu loin des habitations (hameau)
4ème cas Abandonné définitivement En ruine Au bord de la rivière Loin des habitations
5ème cas Vendu pour une autre personne Seules les traces qui restent Sur une falaise qui surplombe une rivière Au sein d’une forêt dégradée

  La classification des greniers collectifs est basée sur une série de critères ou de paramètres majeurs notamment la fonction, l’état, l’emplacement géographique et la forme et d’autres critères qui sont d’ordre secondaire comme le type des matériaux de construction : en pierres ou en pisé ; le type de l’espace donc s’agit-il d’un espace fermé ou ouvert ?  Ces critères de classification choisis sont testés lors de la recherche sur le terrain via les interviews, le questionnaire et l’analyse de toutes les variables associées à :

La fonction du grenier :

Selon ce critère de fonction ou d’activité du grenier, nous pouvons mentionner deux types de greniers. Le premier est représenté par les greniers ou iġrman en fonction et en activité, qui continuent à assurer une fonction parmi celles que nous avons citées en haut surtout la fonction socioéconomique. Mais la continuité de l’activité peut subir des changements au niveau de la procédure, des types des produits emmagasinés ou le genre de la propriété qui passe parfois d’une propriété collective (socialisme et communisme) à une propriété individuelle (individualisme). Certains greniers continuent à assurer le stockage des céréales, du fourrage ou autres produits divers mais ce type est très rare notamment le grenier de Tabr3it chez les Ayt Khouya de Tagleft et le grenier de taben3ddit chez les Ayt Khouya d’Anergui. Les autres greniers, même s’ils fonctionnent encore, ils se limitent au stockage du fourrage (luzerne, maïs…) et nous citons à titre d’exemples, iġrem Amzray n Oufella à zaouiat Ahansal et iġrem de Moha Ouali chez les Ayt Boulmane à Anergui. Les greniers qui ont bénéficié d’une restauration gardent leur activité mais en changeant le genre de leur fonction et deviennent au service du tourisme culturel comme c’est le cas de Tghrmin à Agwddim et ighrem Amzray amazdar de zaouiat Ahansal. Nous signalons aussi que nous pouvons trouver quelques greniers transformés en gîte touristique ou maison d’hôtes exemple iġrem d’Agoujil chez les Ayt Boulmane à Anergui et celui de Magdaz.

Le deuxième type regroupe les greniers qui ont perdu leur activité et leur fonction pour plusieurs raisons : les greniers abandonnés car leurs propriétaires ont changé de mode de vie et de territoire, les greniers abandonnés car les conflits ont surgi entre les propriétaires et les greniers qui sont en ruines.

L’emplacement:

Nous avons distingué des greniers qui sont au bord de la rivière et nous citons : iġrem n Ayt Sidi Aziz, iġrem n Ayt Sidi Hsayen, iġrem des Ayt Mouali, iġrem des Ayt Wouchen, iġrem des Ayt Ali Ouamer, greniers des Ayt Ouaboud, iġrem des Ayt Aathman à Tagleft qui sont au bord de l’Asif Ouirine, iġrem n ikhachen à Ayt Oukabli sur l’Asif Ouirine, les quatre greniers d’iġrem n Ouassif chez les Ayt Tamjjoutt sont, eux aussi, au bord de Ouirine. Nous restons toujours sur la même aire géographique mais les Ayt Boulmane à Taghya ont construit tous leurs greniers au bord de la rivière des Ayt Boulmane et leurs voisins Ayt Ouaskar ont des greniers pas loin d’Asif n Askar. Presque tous les greniers d’Anergui sont au bord d’Asif Melloul sauf ceux des Ayt Aissa et iġrem n Taaddit chez les Ayt Khouya, ighrem n Ayt Ounammas chez les Imddahen. La quasi-totalité des greniers de Tilougguit n Ayt Isha surplombent l’Asif Ahansal et même remarque pour Zaouiat Ahansal pour Tighrmin n Ougddim et iġrem n Oumzray amazdar par contre le grand grenier iġrem n Oumzray n Oufella est reculé de l’Asif n Ouhansal et occupe la crête d’une colline. Pour les greniers de falaise d’Aoujgal, il s’ouvre sur Asif n Attache et celui de Walous surplombe la vallée (aqqa) de Tamgouft. Certains greniers ont pris comme emplacement le versant d’une montagne qu’il soit un adret ou un ubac avec des inclinaisons variées. Les exemples frappants dans notre inventaire sont les greniers suivants : celui iġrem des Ayt Ounammas sur le versant (adret) à Anergui et iġrem de Tifouyna à Zaouiat Ahansal, iġrem des Ayt Lahcen, iġrem Ayt Ouhlima et celui des Ayt Ali Mḥa chez Ayt Aissa toujours à Anergui ; ces greniers nichent sur un versant très incliné (ubac). Un autre emplacement des greniers est représenté par la colline plus au moins pointue, ces collines qui protègent ce type de greniers sont un peu proches des courants d’eau (rivière, vallée) comme c’est le cas d’iġrem des Ayt Hammadin chez Imddahen à Anergui ou un peu loin en cas de présence d’une source « Taghbalout, aghbalou »[8] c’est le cas d’iġrem des Ayt Sidi Hamza, iġrem des Ayt Aamer Oudaoud et ighrem d’Amzray n Oufella à Zaouiat Ahansal.

L’état de la construction :

Nous avons distingué cinq cas de l’état selon le degré des dégâts qui ont touché le grenier. Nous pouvons parler, alors, de greniers en bon état en ce qui concerne la forme et le fond et les exemples sont nombreux à Zaouiat Ahansal, à Tilougguit, à Anergui et à Tagleft. Les greniers avec perte d’un seul élément soit un mur abîmé pour Iġrem n Ayt Aathman à iġrem n Ougrou, soit un toit effondré comme le cas du grenier des Ayt wouchen, iġrem de Tawsbouht chez Imddahen d’Anergui. Pour certains greniers, nous avons noté la persistance du cadre seulement (forme externe) comme chez les Ayt Boulmane de Taghya, Ayt Mouali à Achbarou de Tagleft. D’autres greniers sont en ruines par contre la présence de quelques greniers (rares) est marquée seulement par des traces et nous prenons l’exemple des greniers de Tifirt N Ayt Hamza.

Les techniques et les matériaux de construction :

Nous pouvons parler de deux techniques dominantes partout sur l’aire géographique parcourue. La première technique dite de pisé est un type dominant à Anergui puisque nous avons treize (13) greniers en pisé construits à terre rougeâtre ou brunâtre et à Tilougguit mais rarement à Zaouiat Ahansal (Amzray n Oufella) et à Tagleft (Ayt Mouali). A partir des réponses des interrogés dans le questionnaire, cette technique de pisé exige la présence des maçons qui viennent du Sud Est ou des Ayt Hdiddou. La deuxième technique en pierres est dominante à Tagleft, Ayt Ouqabli, Tifirt N Ayt Hamza et Zaouiat Ahansal, et contrairement à la technique en pisé, cette technique implique les maçons de la région.

La forme externe du grenier :

Nous pouvons parler de deux grands types de greniers selon la forme externe de leur construction, sa morphologie (Paris, 2010), donc chaque type est représenté par des sous-types avec des traits distinctifs des autres. Le type quadrangulaire (Meunié, 1944) de forme d’un cube ou d’un parallélépipède rectangle avec un sous type qui possède quatre tours de guet et un autre sous-type sans tours mais avec un renforcement angulaire. Ce type est le plus dominant dans la région Béni Mellal- Khénifra. Une autre distinction au sein de ces greniers quadrangulaires est basée sur les dimensions de la base et celles des murs ce qui nous donne soit une forme cubique ou une forme de pavé droit (rectangulaire). François Paris parle du critère de la morphologie ce qui correspond dans notre cas des greniers à la forme externe ou l’aspect architectural. Les deux critères de classification notamment la forme et la distribution géographique (Paris, 2010) qui correspond pour nous à la répartition spatiale ou géographique, on les trouve chez Gabriel Camps dans la typologie des monuments de l’Afrique du Nord. Mais Camps a introduit dans la classification une autre dimension chronologique qui correspond pour nous à l’apparition des greniers à travers l’histoire de l’Afrique du Nord en général et du Maroc en particulier. L’attitude d’ajouter le critère de la chronologie est proposée aussi par Gautier (Gautier, 1907).

Conclusion :

La classification et la typologie des greniers collectifs ne se limitent pas à établir des classes et des listes. Elles nous permettent de faire des comparaisons entre tous les greniers recensés, de tester ces critères et de montrer les greniers qui peuvent servir au développement de la société en se basant surtout sur l’état, la fonction, l’emplacement et la situation des greniers. Nous avons traité le sujet des greniers collectifs selon nos objectifs et notre quête de recherche et nous avons choisi la classification des greniers et leurs fonctions dans le but d’aborder les types de greniers, de chercher et de  distinguer les greniers d’une zone d’étude en se basant sur les critères ou paramètres cités avant. Nous espérons via cet article que tous les intervenants et les responsables déploieront des efforts afin de préserver, de protéger et de valoriser ce trésor et ce patrimoine. La restauration, la transformation, la bonne réflexion juridique au niveau de la propriété des greniers comme biens collectifs ou individuels peuvent intégrer les greniers collectifs dans le développement durable.

Bibliographie :

  • Decret François et Fantar Mhamed, l’Afrique du Nord dans l’antiquité : Histoire et civilisation, Payot, Paris, 1981, pp. 134-135
  • Jeanne-Françoise Vincent, pouvoir et contrôle du mil : greniers individuels et collectifs chez les montagnards Mofu, in journal d’agriculture traditionnelle et de botanique appliquée, bulletin 3-4, 1982, pp. 295-306
  • Meunié Jaques, les greniers collectifs au Maroc, in journal de la société de Laoust Emile, « L’habitation chez les transhumants du Maroc central », collection Hespéris, institut des hautes études marocaines, n° VI, librairie Larose, Paris, 1935
  • Montagne Robert, structures du Maroc précolonial, édition : la croisée des Chemins Casablanca, 2012
  • Mignot Philippe, Greniers collectifs berbères. Une relecture entreprise sous la conduite de Johnny De Meulemeeste, Brépols, 2011, pp. 57-70
  • Naji Salima, « Igudars et Zawyas : les entrepôts de la baraka, réseau du sacré et patrimonialisation des sociétés amazighes de l’Atlas et du Maroc présaharien », in Hespéris-Tamuda LV, 2020, pp. 227-255
  • Naji Salima, Architecture du bien commun, pour une éthique de la préservation, MétisPresse, collection vues Densemble Essais, 2019
  • Naji Salima, Greniers collectifs de l’atlas : patrimoine du Sud marocain, éditions Edisud, la croisée des chemins, Casablanca, 2006, pp. 155-171
  • Paris François, la coopération archéologique française en Afrique, in les nouvelles de l’archéologie 120-121, 2010
  • Peyron Mickael. « Contribution à l’histoire du Haut-Atlas Oriental : les Ayt Yafelman ». In revue de l’Occident musulman et de la Méditerranée, n°38, 1984. pp. 117-135
  • Vernières Michel, « Le patrimoine : une ressource pour le développement », in techniques financières et développement, n° 18, 2015, pp. 7-20
  • Conférence : « Des nourritures frumentaires aux nourritures spirituelles. Les réseaux du sacré de l’Atlas, Igudar-s (greniers collectifs) et zawya-s (mosquées-tombeaux), relais réceptacles du Maroc présaharien », au siège de l’Académie du royaume du Maroc, 13 novembre 2019
  • Igoudar un patrimoine culturel à valoriser, éditeur IRCAM • imprimerie Elmaarif Aljadida, Rabat, 2013, série : Collègues et Séminaires N° 30 Coordination : Ait Hamza Med, Herbert Popp.
  • « Le développement rural : espace des zones montagneuses », conseil social, économique et environnemental

[1] Un groupe de sous fraction ou de clan qui sont parmi les propriétaires du grenier concerné, généralement, ils ont un esprit collectif donc ils préfèrent la participation d’un groupe ou comité.

[2] Naji Salima, Greniers collectifs de l’atlas : patrimoine du Sud marocain, éditions Edisud, la croisée des chemins, Casablanca, 2006, pp. 155-171

[3] Salimi Noureddine, Les ksours et les kasbahs au Maroc contraintes de conservation et perspectives de valorisation durable, in revue espace géographique et société marocaine n° 57, 2022, pp. 135 -154

[4] Decret François, l’Afrique du Nord dans l’Histoire des origines au V siècle, Payot, 1981

[5] -Naji Salima, « Igudars et Zawyas : les entrepôts de la baraka, réseau du sacré et patrimonialisation des sociétés amazighes de l’Atlas et du Maroc présaharien », in Hespéris-Tamuda LV, 2020, pp. 227-255

[6] ibid

[7] Mignot Philippe, Greniers collectifs berbères. Une relecture entreprise sous la conduite de Johnny De Meulemeeste, Brépols, 2011, pp. 57-70

[8] Tagbalout : petite source d’eau. Aghbalou : grande source d’eau

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