Research studies

Videogaming Practices of Tunisian Gamers; Field study

Les Pratiques Vidéoludiques des Joueurs Tunisiens; Etude de Terrain

Prepared by the researcher :  Rym Grioui – University of Carthage. Tunisia

Democratic Arab Center

Journal index of exploratory studies : Fifth Issue – September 2022

A Periodical International Journal published by the “Democratic Arab Center” Germany – Berlin

Nationales ISSN-Zentrum für Deutschland
ISSN 2701-9233
Journal index of exploratory studies

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Abstract

This study was based on an online survey, carried out over a period of four months (March – June 2022), with a sample of 224 participants. All of them are video games players from Tunisia, aged between 14 to 39 years old. This article aims at a specific analysis of the socio-demographic characteristics of video game players. However, beyond this profile description, it is also a question of examining in a first place, the videogaming practices of this community “from different perspectives” (i.e., according to their motivations, investments and the various existing modes of confrontation). Secondly, we seek to draw up in particular the profile of the consumers of video games according to the different media used, budget and expenses related to this medium.

Résumé

Cette étude s’est appuyée sur une enquête en ligne, réalisée sur une période de quatre mois (Mars- Juin 2022), auprès d’un échantillon représentatif de 224 joueurs Tunisiens âgés de 14 à 39 ans. Cet article vise à une analyse spécifique des caractéristiques sociodémographiques des joueurs de jeu vidéo. Cependant, derrière cette description, il s’agit également d’examiner en premier lieu, les pratiques vidéoludiques de cette communauté en fonction des motivations, investissements et les différents modes d’affrontement existants et en second lieu, de dresser notamment le profil des consommateurs des jeux vidéo selon les différents supports utilisés, budget et dépenses liées à ce médium. L’étude est particulièrement originale dans la mesure où elle s’inscrit dans un domaine en plein essor et incontestablement tourné vers l’avenir.

  • Introduction

De toute évidence, le jeu vidéo présente un fait socio-culturel dont l’importance est aujourd’hui attestée par un univers vaste de pratiques et de productions. Cependant, ce phénomène fait encore l’objet de peu d’études en sciences sociales et humaines, alors même qu’il prend aujourd’hui une dimension nouvelle : d’une part il se distingue par une audience fortement engagée (Herz, Jessie C. 2002), qui s’étend de plus en plus à des catégories de joueurs moins âgés que les seuls jeunes, et d’autre part parce qu’il offre désormais à la communauté des joueurs le pouvoir de se rencontrer dans l’espace du jeu, car la plupart des versions comportent une option de jeu en réseau, et une possibilité de connexion sur Internet qui permet de jouer avec d’autres participants venus du monde entier, via des plates-formes de jeu hébergées sur serveurs distants.

C’est dans cette perspective que certaines recherches se sont intéressées au « play studies»,en étudiant les pratiques vidéoludiques des joueurs et leurs engagements, étant donné que l’audience de jeu vidéo est restée longtemps une entité abstraite (Aarseth, 2007). Ainsi, ce champs d’étude s’est inspiré tant de la sociologie des pratiques culturelles que des travaux sur les usages et des appropriations des objets de la communication (Jouët, 2000), en les envisageant sous l’angle de cadres de l’expérience (Fine, 1983 ; Berry, 2008) ou encore comme des formes sociales donnant lieu à des « styles » basés sur une variété de motivations, de relations sociales et d’écologies matérielles (Boutet, 2008).

Dans ce contexte de recherche relativement récent, cet article souhaite connaître de près les caractéristiques socioculturelles des joueurs de jeux vidéo en Tunisie, la réalité de terrain sur les différentes pratiques et les perceptions vidéo-ludiques de la jeune génération. En effet, cette étude s’inscrit dans la continuité des recherches microsociologiques sur les joueurs de jeux vidéo en représentant les résultats d’une recherche menée auprès de 224 joueurs Tunisiens. Cinq axes principaux ont guidé ce travail de recherche, soit: 1) Déterminer les caractéristiques sociodémographiques de la population des joueurs Tunisien. 2) Décrire les pratiques de jeux vidéo qui permettent aux joueurs de s’affronter. 3) Montrer l’importance du jeu vidéo dans les quotidiens des joueurs.  4) Connaître les habitudes des répondants concernant la consommation et l’achat de jeux vidéo. 5) Identifier les supports privilégiés des joueurs et les dépenses consacrées aux jeux vidéo.

  • Méthode et outils

Nous avons mis en place une démarche de recherche particulière qui vise à dresser le portrait des pratiques vidéoludiques de la population des joueurs tunisiens. Dans cette partie, nous détaillerons la méthodologie que nous avons employée pour cette étude empirique quantitative. L’outil que nous avons choisi est celui du questionnaire. L’enquête a été réalisée en ligne via un formulaire Google. Suite à sa mise en ligne, la présence du questionnaire a été annoncée sur la page «Facebook» officielle de la Fédération Tunisienne des Sports Electroniques.

Après tri et mise à l’écart des doublons, 224 réponses complètes ont pu être recueillies sur une période de quatre mois (de mars à juin 2022). Le questionnaire se composait de 5 thèmes et de 33 questions. Par ailleurs, certaines questions n’étaient accessibles qu’en cas de réponse affirmative à la précédente pour inciter les répondants à détailler leur réponse. Le questionnaire était composé de questions à choix fermé, avec une seule ou plusieurs réponses possibles, et de questions ouvertes. La majorité des questions ouvertes étaient facultatives pour laisser les répondants libres d’étayer leur propos sur les différentes thématiques. La rédaction et la validation de la version finale du questionnaire a été effectuée de manière concertée avec le directeur exécutif de la « Fédération Tunisienne des sports électroniques». Néanmoins, malgré tout le soin que nous avions apporté à l’élaboration de notre outil, nous avons reçus des retours de la part d’un premier échantillon de 30 joueurs concernant la conception de certaines questions afin de les rendre à choix multiples.

Les données recueillies à l’aide du questionnaire comprennent à la fois des échelles de «Likert » et des réponses ouvertes. Par conséquent, l’analyse qui en ressort est dite de type mixte. L’analyse quantitative comprend des statistiques descriptives élaborées à l’aide du logiciel SPSS (version 25). Ces résultats d’analyse sont approfondis et appuyés par une analyse qualitative des réponses ouvertes aux questionnaires.

Le questionnaire a ainsi été divisé en différentes sections :

  • Page d’accueil : Introduit l’objectif de l’enquête et détaillé des consignes.
  • Les caractéristiques sociodémographiques : Collecter des informations de base tel que l’âge, le sexe, la CSP, le lieu d’habitation, etc.
  • Les pratiques de jeux vidéo qui permettent aux joueurs de s’affronter : Rentrer dans plus de détails qui concernent le type de jeux pratiqués, les modes d’affrontements, participation à des compétitions, supports utilisés, motivations, etc.
  • L’importance des jeux vidéo pour les joueurs : Dans cette partie, l’intérêt s’est porté plus sur la place qu’occupe ces activités ludiques dans la vie d’un joueur tunisien typique en terme de temps, de disponibilité et de coûts (les compétitions suivies, temps accordé, fréquences du jeu, etc)
  • Supports, Budget et dépenses liées aux jeux vidéo : On était curieux de savoir à quel point un gamer tunisien était capable de dépenser et d’investir sur les jeux ou tout autres activités en liaison (les dépenses des joueurs, les supports de jeu privilégiés des joueurs, le budget moyen consacré aux jeux vidéo, etc).

  • Les hypotheses de l’enquête

L’enquête s’est basée sur trois hypothèses pour tenter de cerner le profil sociodémographique des joueurs et mieux comprendre leurs pratiques et leurs consommations vidéoludiques.

Hypothèse 1 : Dans son ouvrage « Digital Play », le chercheur Stephen Kline a identifié le terme de « masculinité militarisée », un ensemble de représentations dominantes traversent les productions vidéoludiques depuis la naissance de cette industrie. Cette notion renvoie notamment à « un réseau sémiotique partagé tournant autour de sujets de guerre, de conquête et combat » (Kline, Dyer-Witheford, De Peuter, 2003 : 255). Ceci nous mène à supposer que la population des joueurs en Tunisie est majoritairement masculine et jeune.

Hypothèse 2 : On a supposé que la place des pratiques vidéoludiques est importante pour les joueurs car elle n’est pas juste un moyen de se divertir, mais aussi de partager des moments entre amis, en famille, ou avec des inconnus ; par le biais des  jeux en ligne, comme les MMORPG (jeux massivement multi-joueurs) ou aussi les consoles, la wii… qui se développent fortement ces derniers temps.

Hypothèse 3 : L’industrie des jeux vidéo ayant dépassé l’industrie du cinéma en terme de chiffre d’affaire, on a supposé que les jeux vidéo avait une place assez importante pour que les joueurs dépensent beaucoup de leur argent dans cette pratique. On a voulu par la suite vérifier si les joueurs Tunisien consacrent vraiment un budget important dédié aux jeux vidéo.

Même si un certain nombre d’hypothèses préconstruites à cette étape, il est certain que  l’enquête s’appuiera également sur un rapport privilégié au terrain.

  • Les résultats de l’enquête

4.1. Pénétration des jeux vidéo en fonction de différents critères sociodémographiques (statistiques descriptives)

L’étude des critères sociodémographiques requiert d’examiner la population des joueurs de  jeux vidéo par tranche d’âge, genre, répartition géographique et niveau de diplôme d’études. Les hommes jouent-ils plus que les femmes ? Les jeux vidéo concernent-ils différentes catégories d’âges? Est-ce une activité d’écoliers et d’étudiants ou autres ? Quels sont les niveaux d’études des joueurs ?

De ces 224 répondants, la grande majorité représente un public masculin, avec (94,5%) des participants contre (5,5%) de femmes, ce qui laisse à penser que le jeu vidéo est une activité plutôt masculine, et qui n’attire que peu la gente féminine. On note également que le genre semble bien, et sans grande surprise, être un critère discriminant pour la pratique de jeu vidéo, étant donné que son audience s’avérant fortement masculinisée. (voir figure 1).

Figure 1 : Répartition du nombre des joueurs par genre

La moyenne d’âge des joueurs ayant répondu est de 21 ans (écart-type: 5,26), de plus les âges varient de 14 à 39 ans. Autrement dit, ce sont les moins de 35 ans qui restent les plus passionnés de jeux vidéo, puisque qu’ils présentent 98,6 % de l’ensemble des joueurs. Comme le montre le graphique ci-dessus, les taux de joueurs partent de 31.4% chez les (14-18 ans) et descendent progressivement avec l’âge, jusqu’à 1.4% chez les (35-39 ans) et plus. Cependant il est à noter qu’au sein de la tranche d’âge (19-24 ans) la concentration est la plus forte avec 45,9% de joueurs. (Voir figure 2)

Figure 2 : Pourcentage des joueurs par tranches d’âge

Par ailleurs, il est à remarquer que les répondants au questionnaire ne sont pas répartis de manière homogène sur le territoire Tunisien. La proportion des joueurs la plus élevée est également située au grand Tunis, soit (48,66%). Suivi du gouvernorat de Nabeul (8,04%) et de Sousse (7,59%). En revanche, les gouvernorats de Tataouine, Siliana, Tozeur et Kef s’affichent en dernière position avec (0%). Il est à mentionner que (61,5%) des joueuses  sont basées géographiquement aux gouvernorats du grand Tunis. (Voir  figure 3)

Figure 3: Répartition des joueurs par localisation géographique (Gouvernorats de la Tunisie)

Les critères sociodémographiques de la population qui constituent l’audience des jeux vidéo ont également été discutés par les résultats de l’enquête qui concernent l’occupation des répondants. Le premier constat est que cette population présente bien une forte proportion de lycéens. Les éléments d’information réunis permettent de lire que la très grande majorité des joueurs sont des Lycéens représentant (35 %), voire même (59,2%) sont engagés dans un cursus d’enseignement secondaire ou supérieur si on compte aussi les étudiants, ce qui représente plus que la moitié de la population. Suivie de loin des diplômés de Master ou équivalent avec (15,7%). Tandis que, les répondants n’ayant pas de diplôme représentent (1,3%) des enquêtés. En d’autres termes, la population étudiée semble être relativement éduquée. (Voir figure 4).

Figure 4: Répartition des joueurs par niveaux de diplôme

La population ici interrogée est majoritairement masculine, dont l’âge moyen est de 21 ans. Le phénomène des jeux vidéo prend de nouveaux aspects, d’une part, parce qu’il touche à des catégories de joueurs moins âgées que les seuls jeunes. La plupart d’entre eux sont localisés géographiquement au grand Tunis et les gouvernorats côtiers. En outre, la population comporte une part importante engagées dans un cursus d’enseignement secondaire ou supérieur, soit (59,2%) et dont l’occupation laisse supposer un temps disponible conséquent pour les loisirs.

4.2. Motivations, investissements et modes d’affrontement existants

L’audience des jeux vidéo ne prend véritablement un sens que lorsque sont questionnés  l’ensemble des pratiques et les modes d’affrontement vidéoludiques existants. Cette partie tend à établir des distinctions au niveau de l’investissement des joueurs dans leur pratique en fonction des critères principaux suivants: les raisons de jouer, les modes d’affrontement, le temps passé en jeu,  les préférences par type de jeu et l’appartenance aux communautés virtuelles.

Selon les répondants, la pratique des jeux vidéo est principalement motivée par la notion de convivialité. Plus que la moitié des joueurs jouent pour passer un bon moment avec une ou plusieurs personnes, soit (54%). Ainsi, les jeux vidéo gardent, comme on peut s’en douter, une place spécialement ludique, ayant peu pour but de faire des rencontres et de nouvelles connaissances. De même, (29,1%) des joueurs affirment qu’ils jouent pour le plaisir et la détente c’est-à-dire pour une envie de divertissement et d’amusement et de « passer le temps ». De leur côté, les femmes qui évoquent l’aspect divertissant des jeux vidéo sont à  (69,2%). Bien que l’idée de gagner de l’argent pour jouer à des jeux vidéo ne séduit que (16,9%) des participants dont (0%) au sein de la population féminine. (Voir figure 5)

Figure 5 : Répartition des raisons pour jouer aux jeux vidéo

Par ailleurs, l’idée d’établir une carrière professionnelle dans le gaming, est le rêve de (62,4%) des participants à l’enquête, dont (53,8%) de la population féminine l’ont exprimé. Dans le contexte de cette recherche, certains individus de l’échantillon sont sous contrat auprès d’une «équipe e-sport». Ils perçoivent une base de rémunération fixe et une part variable selon les performances sur la scène compétitive nationale ou internationale. Ils peuvent être entourés par un «Manager e-sport», un «Coach e-sport», un «Préparateur Mental», un Nutritionniste, un «Chargé de communication».  Alors que (9%) des répondants considèrent qu’il est actuellement contraignant d’exercer cette profession à cause des contraintes suivantes : la  structuration législative, difficulté d’être sponsorisé, un domaine très compétitif, l’émergence et le déclin rapide du jeu vidéo sur lequel le joueur s’entraîne, etc. (voire figure 6)

Figure 6: Pourcentage des joueurs souhaitant établir une carrière professionnelle dans le gaming

Bien que la pratique vidéoludique n’implique pas forcément une professionnalisation, elle requiert un certain contexte qui se caractérise généralement par la présence d’autres joueurs et spectateurs, des relations de coopération ou de compétition, une performance interposée et une volonté d’atteindre un but commun (Freeman et al, 2017, p. 1604). Ceci implique l’existence de plusieurs modes d’affrontements, les données récoltées ont fait émerger trois grandes catégories de joueurs de jeu vidéo (voire figure 7). La première catégorie concerne les «e-sportifs Loisir», «Ce sont les répondants qui déclarent jouer à des jeux vidéo permettant d’affronter d’autres joueurs, de manière informelle avec classement et en dehors de tout système de compétition organisées.» Cette première catégorie représente (43.1%) de la population interrogée. La seconde catégorie correspond aux « Esportifs Amateurs », «Ce sont les répondants qui déclarent jouer à des jeux vidéo permettant d’affronter d’autres joueurs, dont la quasi-totalité participe à des parties classées (ranked et ladders), et qui se sont déjà inscrits à des compétitions organisées (en ligne ou en LAN) ». Cette seconde catégorie représente (30.3%) de la population interrogée. Tandis que les «Joueurs Grand Public », «Ce sont les répondants qui déclarent jouer à des jeux vidéo permettant d’affronter d’autres joueurs, sans classement, et sans inscription à des compétitions organisées.» Cette dernière catégorie représente 27,1% de la population interrogée. D’après ces résultats, il semble que l’enquête ait essentiellement touché des joueurs particulièrement investis dans l’activité de jeu vidéo selon plusieurs formes d’affrontements, c’est-à-dire davantage ceux qui fréquentent les forums des jeux vidéo et participent fortement à l’activité collective en ligne.

Figure 7 : Pourcentage des catégories de joueurs

Dans la même continuité d’idées, la pratique des jeux vidéo est une activité très fréquente au sein de notre population, (66.2 %) des répondants admettent jouer plusieurs fois par jour, parmi eux (27.4 %) avouent qu’ils jouent régulièrement plusieurs fois par semaine. A ce niveau, les écarts de fréquence de jeu entre les hommes et les femmes sont importants, (70,6%) des hommes déclarent jouer plusieurs fois par jour, à l’inverse (76,9%) des femmes jouent plusieurs fois par semaine. Cependant, il n’y a qu’un très faible pourcentage des joueurs ayant répondu qu’ils jouent de temps en temps et rarement (seulement 6,4 %) soit (93,6 %) de joueurs “assidus”. On ne comptabilise finalement aucun non-joueur, ce qui montre qu’au sein de notre échantillon, le jeu vidéo est une pratique extrêmement courante, il envahit une part importante de leur quotidien, puisqu’ils représentent une activité quotidienne ou quasi quotidienne pour la majorité d’entre eux.  (Voir figure 8)

Figure 8 : Pourcentage de fréquence de jeu

En outre, le temps passé en jeu est assurément un des critères qui permettent d’évaluer l’investissement des joueurs dans leur activité. Notamment, presque le un tiers des joueurs (32,6%) consacrent entre 6 heures 3 heures par session de jeu, un peu moins, soit (30,8%) déclarent jouer entre 1 heure et 3 heures par session et le un quart (25,1%) entre 12h et 6 heures. Seuls 1,8 % des joueurs ont des sessions de jeux de moins d’une heure. (Voir figure 9).

Comme pour d’autres pratiques socio-culturelles, les hommes et les femmes n’entretiennent pas le même rapport au jeu vidéo, ceci se vérifie également dans la durée des sessions du jeu. Ainsi, plus de la moitié des joueuses (53,8%) déclarent jouer entre 1 heure et 3 heures par session, bien que la majorité de la population masculine soit (33,8%) affirme qu’ils jouent entre 3 heures et 6 heures. Cet écart révèle que les hommes jouent plus longtemps que les femmes.

Figure 9: Durée moyenne des sessions de jeu

La figure 10 met en évidence le pourcentage de joueurs pour chaque type de jeu. En effet, (30,1%) des répondants ont une préférence pour les  jeux de tir à la première personne (nous retiendrons l’acronyme anglais FPS pour First-Person Shooter, plus courant auprès des joueurs de ce type de jeu) notamment que le FPS est très bien représenté lors des compétitions e-sportives. De point de vue genre, (53,8%) de la population féminine privilégie ce genre de jeux (FPS).  Les personnes portant leur préférence sur les « Jeux d’aventure, action » représentent (16,8%) du total, suivies par les amateurs de « Jeux de sports » à 15.6%, puis les jeux de rôle et les jeux de stratégie à (11,5%). (Voir figure 10)

Cette trilogie de tête des catégories de (FPS), jeux de sports et jeux d’aventure, action comportent deux logiques prédominantes : l’une axée sur le jeu de rôles, l’autre sur la compétition et coïncident avec les genres dominés par les grandes productions à très gros budget, estimé par exemple à 350 millions de dollars pour le jeu (FIFA) ou  à 265 millions pour La saga « Grand Theft Auto » (GTA V) et celle «Assassin’s Creed», jeux d’action aventure à thématiques historiques, sont aussi très présentes.

Figure 10: Les préférences des joueurs par type de jeux

L’enquête s’est intéressée aux modalités de pratique des jeux vidéo. Ainsi, ce medium est   majoritairement pratiqué à plusieurs à distance en ligne avec (68%) contre (22%) des joueurs qui déclarent jouer plutôt seul (voir figure 11). Effectivement, (69,2%) de la population féminine préfère jouer à plusieurs en ligne, de même plus que la moitié de la population masculine soit (59,9%) opte aussi pour cette modalité. A ce niveau, on souligne  le rôle crucial que joue l’internet dans la vulgarisation des jeux vidéo multi-joueurs en ligne en offrant aux joueurs des espaces où s’affronter et/ou coopérer en temps réel en fonction de différents scénarios.

A cet égard, il est nécessaire de comprendre les raisons qui poussent les joueurs à créer et participer à ces jeux en ligne. Pour la majorité des joueurs, l’intérêt provient de « l’expérience partagée, le caractère collaboratif de la plupart des activités et, surtout, la récompense d’être socialisé dans une communauté de joueur et d’acquérir une réputation parmi eux.» (Duchenaut et Moore 2004 : 360). Et depuis, contrairement aux stéréotypes que la société peut avoir, on peut attribuer un certain caractère social aux jeux vidéo, puisque ce n’est pas forcément une activité solitaire ou asociale.

Figure 11: Jouer seul ou à plusieurs

D’ailleurs, il existe diverses formes de communautés virtuelles que l’on retrouve dans les jeux vidéo, on les nomme parfois « linkshells », « clans », « kinships » ou encore les « guildes ». Les données recueillies, montrent que (57,9%) des répondants participent dans une guilde. (Voir figure 12) Sur ce point, il est à remarquer que (61,5%) de la population féminine n’appartient pas à une communauté virtuelle. Cependant, en marge de l’espace d’affrontement, les joueurs s’allient au sein des guildes pour se socialiser et discuter autant du jeu que d’autres sujets plus communs, s’entraider, participer aux mêmes activités et créer des relations plus durables et profondes entre eux

Figure 12 : Pourcentage d’appartenance à guilde

La population est enfin majoritairement familiarisée à l’activité vidéoludique et en proportion plus que notable à la pratique des  jeux de tir à la première personne (30,1%).  En supplément, l’idée d’établir une carrière professionnelle dans le gaming, est le rêve de (62,4%) des répondants. De surcroît, la motivation à jouer est incitée par la notion de convivialité, plus que la moitié des joueurs jouent pour passer un bon moment avec une ou plusieurs personnes soit (54%). La pratique vidéo-ludique comporte par ailleurs une forte dimension communautaire et sociale dans la mesure où elle rassemble les joueurs autour d’une passion commune. Ainsi les joueurs ne sont plus dans leur pratique des individus isolés, (57,9%) de la population déclare leur appartenance à des communautés virtuelles. Chacun peut désormais jouer n’importe où, n’importe quand et avec n’importe qui. Désormais, le jeu vidéo offre l’opportunité à la communauté des joueurs de pouvoir communiquer et s’organiser dans des guildes  avec des participants venus du monde entier. Cette socialisation a évolué grâce à la modalité de jeu à plusieurs à distance qui est privilégiée par (68%) de l’échantillon de l’étude.

4.3.  Supports, Budget et dépenses liées aux jeux vidéo 

Cette partie aborde, quant à elle, les pratiques de consommation des joueurs à l’heure de la  propagation de l’activité vidéo-ludique et l’émergence de nouvelles manières de le procurer en fonction des critères suivants : les supports des jeux privilégiés, le budget consacré aux jeux vidéo, le type de dépenses pris en compte dans le budget et les différents lieux d’achat.

En premier lieu, on s’intéresse à la pratique du jeu vidéo sur les différents supports. Comme le souligne, dès 2003, “Nicolas Auray”, la relation entre les phénomènes sociaux particuliers que l’on observe dans les jeux vidéo et les supports sur lesquelles ils s’appuient est très forte, « Ils donnent un essor majeur au jeu collectif. Ils créent de nouvelles échelles de coordination, pour un nombre démultiplié de joueurs en permettant de jouer à distance». (Auray, 2003). Il n’existe pas un seul support matériel commun à tous les jeux mais les plates-formes de lecture de jeux vidéo sont nombreuses. D’après les répondants, les joueurs qui se servent d’un seul support présente (38,2%) de la population suivis par (36,4%) qui déclarent utiliser deux supports pour pratiquer le jeu.

Figure 13 : Nombre de supports utilisés pour jouer

La question «Quels sont les supports que tu utilises pour jouer aux jeux vidéo? » a suggéré six propositions de réponse (il était possible de cocher autant de cases qu’on utilisait d’équipements différents) dont un champ « autre » afin que le répondant ajoute un équipement que nous aurions éventuellement pu oublier. Ainsi, sur l’ensemble de notre échantillon, l’ordinateur est le principal support de jeu le plus utilisé. Plus que (52,9 %) des joueurs l’utilisent au cours des  activités de jeu vidéo. Il est à noter aussi que l’ordinateur est le support de jeu préféré de (84,6%) de la population féminine de l’étude. En effet, l’ordinateur offre aux joueurs une grande variété de jeux vidéo, des titres AAA et un très haut débit de connexion au réseau. Au-delà de la possibilité d’acquérir des contenus de façon dématérialisée, l’ordinateur introduit l’utilisateur les univers persistants des jeux massivement multi-joueurs. Cette fonctionnalité prend toute sa mesure dans un contexte compétitif ou coopératif et démultiplie l’intérêt et le plaisir de jouer. Ajoutons qu’à ce jour, pour certaines catégories de jeux, aucun accessoire n’a en effet encore remplacé le clavier et la souris (Multiplayer Online Battle Arena / MOBA, Real Time Strategy / RTS, First Personal Shooter / FPS).

Ensuite, (22,7%) des répondants préfèrent également utiliser la console de salon pour pratiquer les jeux vidéo. Puis, près de 14,1 % des joueurs jouent sur le « Smartphone Gaming », tant disque la console portable est utilisée pour jouer par (4,2 %) des joueurs. Enfin, la case « autres » n’a été cochée qu’une seule fois sur l’ensemble des questionnaires pour apporter une précision sur le type de console de jeu utilisé. (Voir figure 14)

Figure 14 : Supports utilisées pour jouer au jeu vidéo

A propos du budget consacré aux jeux vidéo, plus de (52%) des répondants déclarent qu’ils ont un budget alloué aux jeux vidéo. (Voir figure 15) Parmi ces derniers, (38,2%) dépensent moins de 100 dinars par mois, ils sont même (47,9%) à dépenser moins de 50 dinars par mois, ce qui est à rapporter au fait que la moyenne d’âge des joueurs est de 21 ans, et que beaucoup sont encore des étudiants et ne touchent pas de salaires.

Figure 15 : Budget consacré aux jeux vidéo

On constate que parmi les répondants une très faible partie (4,9%), dispose d’un budget mensuel consacré à plus que 300 dinars, consacre une somme importante aux jeux vidéo, bien que (47,9%) des joueurs affirment que leurs budget ne dépassent pas 50 dinars par mois (voire figure 16). En effet, certains jeux vidéo, même s’ils sont de qualités, coutent chers pour une durée de vie relativement courte si on la ramène à son prix, ce qui laisse à penser que les autres moyens de se les procurer puissent être privilégiés.

Figure 16 : Budget consacré aux jeux vidéo par mois

Payer pour jouer permet différents types d’acquisitions. Ils sont (31,7%) à consacrer leurs budgets à l’acquisition des supports de jeu (consoles, téléphones mobiles…), (14,2%) à acheter des niveaux supplémentaires ou des options en ligne. L’abonnement mensuel séduit (14,2%) des joueurs en ligne. (12%) des participants acquièrent des accessoires divers, alors que (8%) de la population opte pour les jeux d’occasions. (Voir figure 17)

Figure 17 : Types de dépenses pris en compte dans le budget

Le parcours d’achat des répondants lors de l’achat d’un jeu vidéo est distribué de manière  physique ou dématérialisée. Dans cette optique, plus que la moitié des joueurs, sont des cyber-consommateurs. Soit (62,2%), optent pour le concept d’achat des jeux vidéo en ligne, par contre, il apparaît assez clairement que le cadre d’un achat physique (se rendre à des magasins spécialisés) ne séduit que (17,8%). Il est à noter aussi que (20%) des répondants déclarent qu’ils n’achètent pas des jeux. (Voir figure 18).

Figure 18 : Lieu d’achat des jeux vidéo

Les joueurs de jeux vidéo sont bien équipés en matériel audiovisuel, en effet ils utilisent plusieurs  supports de lecture de jeux. Près de (52,9 %)  des joueurs jouent sur ordiphone, il est ainsi le principal support de jeu. Cependant il n’y a que (52%) des répondants qui consacrent un budget aux jeux vidéo, dont (47,9%) dépensent moins de 50 dinars par mois. La majorité des répondants, soit (31,7%) de la population consacre une bonne part de leurs budgets à l’acquisition des supports de jeu (consoles, téléphones mobiles…) de même (62,2%)  opte pour le concept d’achat en ligne. En effet, la dématérialisation des logiciels de jeux s’est très largement développée en bouleversant les circuits de distribution de l’industrie vidéoludique et modifie en profondeur les habitudes de consommation des joueurs de jeux vidéo.

  • Conclusion

Comme nous l’avons supposé, la gente masculine constitue l’essentiel des pratiquants étant donné que la majorité des jeux vidéo sortant sont conçus pour eux. Face à cette situation, il est à mentionner que certains créateurs de jeux ont souhaité remédier à cela en proposant des représentations de genre plus égalitaires, plus diversifiées que celles qui étaient alors sur le devant de la scène vidéoludique. Parmi eux, des créateurs se trouvant en Scandinavie, semblent s’inscrire dans ce courant. De plus, ces studios sont basés dans des états qui sont souvent présentés et perçus par les autres pays comme les plus égalitaires du monde, ou tout du moins se présentant comme tel et misant sur cette image.

Encore, les résultats de l’enquête montrent que les joueurs préfèrent le jeu en ligne massivement multi-joueurs. Ce genre de jeu met en relation des joueurs du monde entier. Autrement dit, des milliers de joueurs peuvent interagir les uns avec les autres et ce, grâce à des canaux de discussions spécifiques présents dans le jeu. Ces jeux, tels que World Of Warcraft ou encore Dark Age Of Camelot, nécessitent une connexion internet et sont donc des jeux dits (en ligne). Au sein de ces jeux, les joueurs, au travers de leurs avatars, peuvent intégrer une ou plusieurs guildes ou fédérer plusieurs joueurs. En revanche, cette intégration à la guilde ne se fera que si le joueur est perçu par les autres comme performant, grâce à sa maitrise et à sa technicité, et qu’il est utile dans le groupe.

En parallèle de l’évolution des pratiques de jeux, les modes de consommation semble se transformer également. L’enquête a montré que 52, 3% des répondants consacrent un budget pour jouer dont (47,9%) dépensent moins de 50 dinars par mois étant donné qu’il s’agit d’une population jeune et encore dépendante financiérement. Ces dépenses peuvent prendre différentes formes, par exemple l’achat d’un jeu vidéo, d’un abonnement pour jouer en ligne, ou encore de contenus et d’options supplémentaires tout en privilégiant l’internet comme meilleur lieu d’achat des jeux.

Ce premier travail est une première tentative pour décrire et comprendre ces nouvelles pratiques vidéoludiques auprès d’un échantillon de joueur tunisien. Pour les futures recherches on envisage la réalisation d’autres investigations qualitatives et quantitatives afin de compléter nos résultats.

Liste  Bibliographique

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المركز الديمقراطى العربى

المركز الديمقراطي العربي مؤسسة مستقلة تعمل فى اطار البحث العلمى والتحليلى فى القضايا الاستراتيجية والسياسية والاقتصادية، ويهدف بشكل اساسى الى دراسة القضايا العربية وانماط التفاعل بين الدول العربية حكومات وشعوبا ومنظمات غير حكومية.

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