Milieu physique et territoire urbain : des écosystèmes fragiles saisies par l’indifférence du planificateur de la ville, cas de la ville de Khénifra, Maroc
Natural environment and urban territory: fragile ecosystems seized by the indifference of the city planner, case of the city of Khénifra, Morocco
Prepared by the researcher : MAROU Mohamed1, HANZAZ Mohamed2
- 1Professeur assistant à l’école nationale d’architecture, Oujda, Maroc
- 2Professeur le l’enseignement superieur, directeur de l’institut national d’aménagement et d’urbanisme, Rabat, Maroc
Democratic Arab Center
Journal of Urban and Territorial Planning : Fourteenth Issue – December 2022
A Periodical International Journal published by the “Democratic Arab Center” Germany – Berlin
Résumé
On attend de la planification urbaine de Khénifra des solutions et remèdes à la dégradation du milieu physique causée par l’urbanisation de la zone, alors qu’il nous semble cependant que cette planification se révèle inadéquate et que dès le niveau de la conception et non seulement de la mise en œuvre que s’est glissée une série d’erreurs dont le milieu physique au niveau de la ville déplora quotidiennement les effets. Une pareille analyse des documents de planification laisse apparaître l’absence d’une vision unifiée atour de la question environnementale, et prouve qu’il s’agit particulièrement, d’un environnement urbain qui fonctionne sous l’influence des enjeux d’intérêts conflictuels, et en dehors de toute préoccupation environnementale claire.
Abstract
We expect from the urban planning of Khénifra the solutions and remedies to the degradation of the natural environment caused by the urbanization of the region, while it seems that this planning turns out to be inadequate from the design and not only from the implementation that a series of errors crept in, the effects of which the natural environment at city level deplored on a daily basis. The analysis of planning documents reveals the absence of a unified vision around the environmental question, and proves that it is particularly an urban environment that functions under the influence of issues of conflicting interests, apart from any clear environmental concerns.
Introduction
Différents niveaux d’études ont souvent permis, au fil des années, de créer un lien durable entre planification urbaine et prise en compte des services rendus par la biodiversité supportés par des milieux physiques en constante évolution (Balez et Reunkrilerk, 2013). La planification urbaine devient par conséquent un enjeu majeur vis-à-vis de la préservation des milieux physique en ville, et semble être le moyen indispensable pour organiser les différents usages des sols et préserver les milieux physiques contre toute forme de dégradations. Ce sont en effet, ces milieux qui supportent la plus grande partie d’activités humaines (alimentation, construction, gestion des déchets, loisirs, etc.). La pression sur ces milieux en ville s’accroit à mesure que l’urbanisation s’intensifie. Elle est dans certaines mesures, responsable d’atteintes divers à la qualité de vie en milieu urbain. Ceci implique l’hypothèse que les rôles de ces milieux ont généralement été ignorés ou moins pris en compte par les aménagements urbains, qui tentent de répondre souvent prioritairement, à l’urgence en matière d’infrastructures socioéconomiques. Cette situation de mise à l’écart des milieux physiques, place aujourd’hui les gestionnaires de la ville, notamment avec les dispositions du développement durable, dans la nécessité de repenser la manière de concevoir les différents documents d’urbanisme de leurs territoires.
Ainsi, nous cherchons à travers le présent article, à faire une analyse de la pertinence des documents d’urbanisme quant à la préservation du milieu physique au sein du périmètre d’aménagement de la ville de Khénifra. L’étude devrait nous permettre, à partir d’une lecture critique desdits documents, de mettre en lumière l’échec de la planification urbaine dans le maintien de l’équilibre “urbanisation-milieu physique”, et de vérifier par la même occasion, notre hypothèse, à fin de s’assurer de l’indifférence des gestionnaires locaux vis-à-vis de la préservation du milieu physique au niveau de la ville.
1. Présentation de la zone d’étude
Khénifra est une ville marocaine de 114344 habitants (RGPH 2014), faisant partie, selon le nouveau découpage régional du pays en 2015, de la région Béni Mellal-Khénifra. Elle est distante de 160 km de Fès, au nord, et 300 km de Marrakech au sud. Administrativement, elle fait partie de la province portant le même nom, et son ressort territorial contient un ensemble de communes comme l’indique la carte suivante:
Fig. 1: Situation géographique de la ville de Khénifra
La province de Khénifra s’intègre à la fois dans le Moyen Atlas et le plateau central, ce qui explique son relief accidenté où alternent la montagne et les plateaux (Monographie de Khénifra, 1983) et dont l’altitude est variable selon trois gradients: Le plateau (L’Azaghar) (800 m), La montagne (Le Jbel) (de 1660 m à 2800 m) et la partie médiane entre les deux (Le Dir) (De 800m à 1600m). La ville se situe sur le piémont (Dir), à l’extrême Est du plateau central, perchée à 830 m d’altitude (Latitude: 32°56′05″ Nord, Longitude : 5°39′42″ Ouest), sur les abords du fleuve Oum Rabia, à 40Km au Sud-Ouest de ses sources (Rapport de diagnostic du PA de 2014).
2. La planification urbaine : Naissance et origines
La mise en contexte de cet essai induit principalement ce qui est la planification urbaine, et surtout la naissance de ses préoccupations environnementales.
La pratique de la planification urbaine définie comme « une attitude face aux problèmes urbains » (Lacaze, 1979, p.90), trouve ses fondements et origines dans la seconde moitié du 19ème siècle, après la révolution industrielle en Europe. Ce sont donc les maux d’industrialisation qui ont fait naitre ce concept, dont l’objectif était de maitriser les problèmes urbains, et de mettre fin au désordre des villes du 19ème siècle. La Grande Bretagne fut le premier pays qui a utilisé le concept de planification urbaine, avec “le town planning” puis “l’urban planning“, comme réaction au développement anarchique des villes et comme solution aux problèmes causés par l’industrialisation. On assiste ainsi à une tentative de codification d’un champ disciplinaire nouveau (Calabi et Chombart, 1984). En 1898, Ebenezer Howard a développé le concept des “cités jardins de demain” pour donner naissance à la ville hygiénique dont l’organisation spatiale s’opposant à celle de la ville industrielle polluée. L’objectif était de respecter les règles d’hygiène et morales, en valorisant la nature, par la mise en place des espaces verts urbains (Givaudan et Merlin, 1988). Ceci a posé les jalons d’une nouvelle pratique de l’urbanisme respectueux le l’environnement et du bien être des citadins. Par ailleurs, l’extension urbaine notamment, sur les milieux physiques fragiles est désormais contrôlée par des instruments juridiques. Il s’agit de veiller à ce que ces espaces soient utilisés d’une manière rationnelle (Lacaze, 1979), selon des règles rigoureuses contribuant conséquemment, à un modèle d’organisation de la ville, et impliquant le rôle des planificateurs dans la sphère du respect de l’environnement.
3. La planification urbaine de Khénifra : de l’étude à la mise en œuvre
La succession hiérarchisée des documents d’urbanisme (SDAU, PZ, PA et PDAR) édicté par la loi 12-90 relative à l’urbanisme n’est pas hasardeuse (Abouhani, 2009). Elle exprime l’interdépendance des aménagements des territoires à différentes échelles, en vue d’assurer leur développement d’une manière rationnelle et harmonieuse. Or, faute d’un S.D.A.U, l’extension de la ville est guidée uniquement par des plans d’aménagement.
3.1. Le plan d’aménagement de Khénifra en 1955 : Quelques orientations tardives d’aménagement colonial
Nul n’ignore que les P.A étaient induits par le protectorat au Maroc dès 1914, cinq ans avant leur adoption en France. D’où leur caractère expérimental. Cependant, seules les grandes villes qui avaient bénéficié de ces P.A, les petites villes et villes moyennes n’allaient se doter de ces documents que des décennies plus tard dont la ville de Khénifra avait fait la preuve. Soumise à la colonisation définitive en 1921, son premier plan d’aménagement n’a été établi qu’en 1955, soit 34 ans après. Ce P.A devrait tracer l’évolution future de la ville pour une durée de vingt ans. Mais, vue cette période critique de l’indépendance du pays, la mise en œuvre de ce document a été perturbée et ralenti pour finir dans l’archive de la commune.
En étant conscient qu’il s’agit d’un espace singulier à planifier, le colonisateur a tenté de concevoir ce document, en avançant les dispositions suivantes :
- L’interdiction de la construction :
– au pied de la montagne « Bamoussa » situé à l’Ouest de la ville.
– sur la rive droite de l’Oum Rabia.
- La création des disséminations des espaces verts.
- Le tracé des voies principales.
- La création d’une zone d’activité sur la rive droite de l’Oum Rabia et le long d’une partie de la route menant vers Meknès.
- La création de deux dispensaires.
Tout de même, ce document aurait certainement un impact positif sur le milieu physique s’il avait été mis en œuvre. Au moins on aurait pu enrayer l’urbanisation de certaines zones fragiles de la ville, déjà préconisées par le document en question comme servitudes non ædificandi (le long de l’oued Oum Rabia et au pied de la montagne Bamoussa à l’ouest de la ville).
3.2. La plan d’aménagement de Khénifra en 1993 : Un simple document d’accompagnement et de régularisation
Rappelons que le pouvoir public marocain a manifesté peu de souci pour la planification des petites villes et villes moyennes pendant les premières années de l’indépendance (Chaline, 1988). Toutefois, Khénifra à fait la preuve d’une ville ayant subit cette indifférence et ses lourdes conséquences.
3.2.1. Longue durée d’étude et diagnostic superficiel
En 1982, et à un moment tard, la direction centrale d’habitat et d’aménagement du territoire a pris conscience de la priorité absolue qu’acquiert la dotation de la ville de Khénifra d’un P.A. Selon l’analyse du PV[1] établi dans ce cadre, cette nécessité émane de la progression démographique galopante et ses besoins en matière d’habitat et d’équipements sociaux, de la position de carrefour et de liaison importante entre la vile de Fès, le plateau phosphatier de la région de Khouribga et l’agglomération de Casablanca, et en fin, de la progression de l’habitat clandestin vers le sud de la ville.
Par ailleurs, cette réalité urbaine dont le milieu physique subit énormément de conséquences, a débouché deux ans après, sur la proposition des options d’aménagement suivantes[2] :
- Renforcement de la liaison le centre rural Amalou Ighriben et la ville de Khénifra par une zone d’activités et d’équipements communs.
- Création de zones industrielles dans les parties Nord et Sud de la ville.
- Création d’une zone d’habitat économique à la périphérie de la ville, avec la prise en compte des conditions topographiques, en affectant la zone d’habitat à deux niveaux aux sites accidentées et la zone d’habitat à trois niveaux aux sites à étendues plates.
- Déplacement du souk vers le quartier la scierie.
- Création d’une ceinture verte autour du périmètre d’aménagement.
Une année plus tard, le projet du P.A a vu le jour en 1983, pour entrer à la mise en étude en 1986 et n’être homologué qu’en 1993.Toutefois, ces retards notoires au niveau de la mise à l’étude du P.A, représentent une cause majeure du décalage entre les prévisions et l’opérationnalisation. C’est ainsi qu’au lieu d’être un outil de planification, il s’est réduit en un document de régulation des infractions. Par conséquent, les 38 ans qui se sont écoulés sans feuille de route, allant de 1955 à 1993, ont pesé lourdement sur cette espace urbain en pic d’urbanisation[3], à savoir l’occupation des zones à risques par l’HNR et l’empiétement sur un milieu physique déjà fragile et probablement non renouvelable.
Encore, la non-conformité des limites géographiques et administratives était parmi les contraintes qui sont à l’origine de l’échec préalable de la conception prévue par le P.A. Du point de vue géographique, les douars périphériques étaient intégrés dans la ville, mais administrativement ils relevaient de la commune rurale de Moha Ouhammou Zayani., et sont gérés par le siège de cette dernière, qui se situe au centre du quartier d’Amalou Ighriben. Or, ce cadre juridique incohérent, ne soumit pas ces quartiers aux rigueurs de ce plan.
Aussi, le support logistique préalable à toute opération de planification urbaine a été totalement absent dans l’élaboration de ce P.A de Khénifra. Aucune étude topographique, foncière et économique n’a été réalisée, afin de permettre une meilleure connaissance du terrain. Ce plan se limite à une simple affectation de zone d’habitat et des équipements collectifs sans porter une réflexion sur certains enjeux environnementaux, tels que la décharge et l’assainissement. Toutefois, le groupe concepteur n’a pas eu le souci ni de changer l’emplacement de la décharge (dépôt sauvage) qui était implanté aléatoirement dans la partie Sud de la ville, donnant directement sur Oued Oum Rabia, ni de trouver une solution à l’assainissement liquide de la ville qui se jette directement dans ce dernier.
3.2.2. La mise en œuvre : Un faible taux de réalisation
Ce qui caractérise la quasi-totalité des PA au niveau national, c’est les prévisions spatiales arbitraires. Ces dernières ne se basent pas souvent sur les capacités financières de la mise en œuvre des PA. Ceci peut donner lieu au gel des terrains constructibles ou à un ensemble de détournements d’affectations.
Tableau 1: Taux de concrétisation des prévisions du PA de la ville de Khénifra de 1993 agissant sur le milieu physique
Source : Le règlement du PA de 1993, dépouillé
Il ressort du tableau ci-avant, que le taux de réalisation des équipements agissant directement sur le milieu physique de la ville de Khénifra reste insignifiant (38,7%), ceci remet en cause à la fois, la conception du PA qui doit projeter des équipements réalisables, et la gestion communale qui doit élaborer une programmation de la réalisation desdits équipements.
Egalement, ce PA prévoit la dotation de la ville d’une superficie globale d’espaces verts et boisements de plus de 46 hectares, repartie sur treize jardins et parcs, neuf zones de boisement et pépinière. Mais en réalité, onze seulement sont fonctionnels. Ils se caractérisent par l’étroitesse de leur étendue et par leur concentration dans le centre et la partie sud ouest de la ville. Huit emplacements réservés dans ce plan à cette fin ont déjà fait l’objet d’une urbanisation massive. Ils ont été remplacés soit par des lotissements comme le cas des emplacements (V13, V10, V15, V17 et V21), soit par des administrations (V 3, V11, V14 et V20)
De même, ce document prévoit le déplacement du souk[4] hebdomadaire vers son emplacement actuel (Fig.2), sans prendre en compte, d’un coté les conséquences environnementales sur l’Oum Rabia qui donne directement sur l’Oum Rabia et d’autre coté la capacité financière de la commune à réaliser les travaux relatifs à l’aménagement dudit souk. Ceci s’est répercuté sur la durée de sa réalisation, qui a pris des années pour l’achèvement partiel des travaux. Par conséquent, cet équipement est aujourd’hui fonctionnel, sans pouvoir offrir tous les services nécessaires aux commerçants et clients (Absence de blocs sanitaires, mure de clôture, parking,…)
Source : Le PA de Khénifra de 2014
Fig. 2: Localisation de l’actuel souk hebdomadaire de Khénifra
Aussi, le concepteur du PA prévoit deux types de zones industrielles pour la ville. La première (3ème catégorie) sera réservée à l’industrie non polluante. En revanche les unités industrielles polluantes qui peuvent affecter l’Oum Rabia vont êtres reléguées dans la deuxième zone (2èmedegré) au Nord de la ville. La superficie totale de ces deux zones est d’environ 49 hectares. En effet, aucune de ces zones n’a vu le jour. Ce taux nul remet toujours en cause, l’estimation des coûts de réalisation.
3.3. Le plan d’aménagement de Khénifra en 2004 : Un document dépassé avant son homologation
Le PA lancé en 1998, qui doit constituer la plate forme référentielle en matière de gestion de la dynamique de la ville, est devenu juste après son homologation en 2004, une contrainte plus qu’un outil de développement. D’où son abrogation et le lancement précoce d’un nouveau PA en 2010.
3.3.1. La procédure d’élaboration : une programmation normalisée
L’analyse de la note de présentation de ce P.A révèle une présentation standard du diagnostic, dont les données sont essentiellement d’origine administrative et qui débouche sur la programmation normalisée des équipements et des surfaces à urbaniser.
La question de la préservation des milieux physiques, objet de notre étude, est une question fondamentale à laquelle l’étude de ce PA a accordé moins d’importance. En effet, la consultation du rapport de diagnostic a fait ressortir que l’analyse du milieu physique se limite en une simple lecture standard du contexte géographique local, sans mettre en relief les composantes naturelles fragiles, auxquelles l’étude doit entrevoir des aménagements particuliers, sachant que le territoire de la ville de Khénifra est singulier, en présence d’Oued Oum Rabia et son réseau hydrographique intense. Or, il est judicieux que les termes de référence (TR) comportent des modalités stipulant l’obligation de traiter, en détail, ce volet et d’y apporter des réponses adéquates. Par ailleurs, ces TR qui n’étaient pas non plus adaptés à ce contexte géographique singulier, a laissé le concepteur manœuvrer selon une démarche standardisée qui consiste à entreprendre une série d’études systémiques.
Le dépassement des délais impartis pour la réalisation des documents d’urbanisme influence leurs contenus et leur apport urbanistique (Chtouki, 2011). Par ailleurs, ce P.A n’a pas échappé de cette réalité. Son homologation n’a eu lieu qu’après 6 ans de mise à l’étude. Alors, il s’est trouvé presque dépassé avant sa mise en œuvre. Ceci revient au mode de passation du marché de mise à l’étude, qui brise l’articulation sensée existé entre les différentes phases de l’étude selon la démarche globale tracée dans les TR. A ce propos, on fait allusion à l’étude du PA qui a été exécutée en deux tranches. Le premier marché contracté en date du 12/05/1998 consiste à présenter un rapport d’analyse préliminaire, un document de synthèse intermédiaire accompagné des dossiers d’enquête ménage et enfin un document de concertation avec des variantes d’aménagement à l’échelle de 1/5000. Quant au deuxième marché dont l’intitulé porte la mention « Achèvement du PA de la ville de Khénifra» a été passé une année après et attribué, disons par chance, au même cabinet d’architecte. Ledit marché comporte la fourniture des documents de la 2ème concertation (un document comportant les investigations menées pour la précision de la variante d’aménagement retenue, la note de présentation, le projet du PA et le projet de règlement d’aménagement), les documents de mise en œuvre des procédures d’instruction, d’examen et d’approbation (mêmes documents rectifiés à maintes reprises) et enfin les documents finaux (le rapport justificatif, le règlement d’aménagement et le plan).
De même, le programme de la mise à niveau urbaine, qui était en cours de réalisation, avait créé une nouvelle réalité urbaine, en discordance par rapport aux dispositions du PA.
Egalement, la ville commence à s’étaler sur des espaces situés en dehors du périmètre d’aménagement couvert par ce P.A. à savoir:
- La zone nouvelle d’urbanisation initiée par le conseil provincial et Al Omrane (1).
- La construction du lycée Ajdir à la sortie de Khénifra sur la route menant vers Oulmès (2).
Photo 1: Opération Al Omrane “Zayane” Photo 2: Lycée qualifient Ajdir
Aussi, ses alentours à la sortie de la ville vers Meknès n’étaient pas couverts par ce P.A, alors qu’ils sont aujourd’hui considérés comme des sites les plus apte à l’urbanisation, et pouvant recevoir et satisfaire les besoins de la croissance urbaine de la ville.
Evidement, le site de la ville est pénalisé par une combinaison de conditions topographiques structurales défavorables. Mais, ce que nous reprochons au concepteur, du point de vue affectation des zones non ædificandi, n’est pas de moindre importance du fait qu’elle s’est faite d’une manière aléatoire (Fig.3) en l’absence des études géotechniques et sismiques prouvant la présence de risques et dangers pour la construction. Ceci prive la ville d’une énorme superficie du sol constructible, et donne naissance à un tissu urbain fragmenté.
Fig. 3: Terrains affectés aléatoirement en zones non ædificandi
S’agissant des espaces verts, les prévisions de ce PA n’expriment pas des ambitions en la matière. Il s’avère que le choix et les affectations de ces espaces relèvent davantage d’une programmation au gré des opportunités foncières ou par défaut (chutes, espaces résiduels, zones non constructibles, …etc.), que d’une réelle réflexion sur la problématique des verdissements et sur celle du paysage urbain de la ville et le bien être de ses habitants.
Le cas de plusieurs espaces verts est très éloquent dans ce sens. Ils sont conçus aléatoirement avec des formes bizarres et des dimensions immenses injustifiées ; ce qui aggrave l’attitude de la commune face au problème d’insuffisance de ressources financières. D’abord pour l’acquisition de ces terrains et ensuite pour leur aménagement, comme c’est le cas de V4 et V12 ci-après.
Fig. 4: Espaces verts V4 et V12 en formes aléatoires
Le même cas pour V62 ayant été affecté sur un terrain d’une superficie d’environ 16 hectares en situation de litige. Ceci remet en cause l’enquête foncière entamée par le BET chargé de l’étude, faute de quoi, on est astreint à établir des perspectives de développement urbain inexécutables.
Fig. 5 : Terrain Mitchifssan V62 affecté en espace vert
Aussi, ce PA ayant affecté à la Casbah de Mouha Ouhamou Zayani le zonage d’administration (Fig.6). Or, le statut de celle-ci en tant que monument historique[5] exige, comme préconise la loi 12.90[6], sa protection et sa mise en valeur pour des motifs d’ordre esthétique, historique, culturel…
Fig. 6 : Casbah de Mouha Ouhamou Zayani affectée en zone d’administration
La figure ci-après représente un exemple concret de l’affectation incertaine du sol, et fait défaut de technicité et de professionnalisme. La voie projetée est irréalisable, du fait que cette zone donne directement sur l’Oued Om Rabia, elle constitue même sa zone humide, dont le caractère écologique spécifique nécessite la préservation et la protection contre toute forme de dégradation.
Fig. 7 : Voie projetée sur la zone humide de l’Oum Rabia
Si le choix de l’implantation géographique des zones d’activités dans une approche de vulnérabilité du territoire demeure un défi pour la plupart des documents de planification (Degrotte, 2011), le PA de 2004 a pris le risque en affectant une partie(1) de la zone industrielle et/ou d’activités de troisième catégorie, sur un site donnant directement sur le chaâba de Farra, qui s’achemine immédiatement vers Oued Oum Rabia (Fig.8). Or, la possibilité de contamination de ce cours d’eau par des rejets toxiques découlant notamment, des activités de réparation se pose. Ceci remet en cause le choix incertain dudit site.
Fig. 8 : Zone industrielle projetée sur un site vulnérable
Quant à la zone industrielle et/ou d’activités de deuxième catégorie, elle est implantée entièrement en dehors du périmètre d’aménagement dans la partie Est de la ville (Fig.9), à proximité du souk d’Amalou Ighriben qui relève du territoire de la commune territoriale de Mouha Ou Hammou Zayani. Or, sa projection aurait due être au sein du périmètre d’aménagement de la ville pour permettre à la commune territoriale de Khénifra la réalisation de ladite zone.
Fig. 9 : Zone industrielle projetée en dehors du périmètre d’aménagement
La préservation du tissu ancien a été depuis un siècle, une préoccupation de l’urbanisme colonial au Maroc avec notamment, la promulgation du dahir du 13 février 1914, complétant celui du 26 novembre 1912. Son instauration émane de la volonté de ne pas dénaturer les villes marocaines et de préserver ce qu’on appelle “la couleur locale” du pays (Theliol, 2014). Après l’indépendance, plusieurs textes et loi ont été instauré pour protéger et rénover les tissus anciens, dont notamment la loi 22-80 relative à la protection, à la conservation et à la mise en valeur du patrimoine culturel et la loi 12-90 relative à l’urbanisme qui oblige la délimitation des zones à vocation spécifique.
En revanche, le traitement des quartiers anciens au niveau de la ville de Khénifra n’a jamais été l’objet d’un regard particulier de la part des concepteurs des PA de la ville. Au lieu d’indiquer les différentes actions d’intervention, telles que la réhabilitation, la reconversion, la restructuration et la régularisation à mener selon les spécificités de ses tissus, ils ne tardent souvent pas à les affecter en zones d’habitats continus (Fig.10).
3.3.2. La mise en œuvre : Des affectations non abouties
Le niveau d’opérationnalisation d’un document d’urbanisme peut être le reflet de son appréciation (Debbi, 2008). Toutefois, le PA de 2004, bien qu’il accorde une place importante au volet environnemental en comparaison avec celui qui le précède, ses prévisions restent néanmoins, loin d’être plus transparentes en la manière.(Tableau2).
Tableau 2: Concrétisation du PA de la ville de Khénifra de 2004 du point de vue équipements destinés à la préservation de l’environnemental
Source : Le règlement du PA de 2004, dépouillé
Comme il ressort du tableau ci-dessus, la concrétisation des projections de ce PA reste très faible, avec un taux de réalisation dépassant à peine 14%.
En ce qui concerne les parkings, les places publiques et les espaces verts et boisements, leur concrétisation reste médiocre, surtout pour la dernière catégorie qui est d’un effectif de 97 équipements projetés dont seulement 8 ont été créés. Ce qui met toujours en évidence, l’indifférence vis-à-vis de la nature au sein de la ville.
En matière d’équipements de superstructure, la réalisation des installations destinées à la préservation des milieux physiques est insignifiante. On note que parmi un total de 6 équipements projetés selon le PA, il y a juste 2 équipements qui ont été réalisés (La décharge publique et le souk hebdomadaire), soit un taux de réalisation de 33,33%.
L’autre facette de cette faiblesse dans la mise en œuvre des documents d’urbanisme, se manifeste à travers la prolifération de l’habitat clandestin et non réglementaire. Ces transgressions atteignent même la construction sur des zones non ædificandi. Ses zones qui doivent, en principe, être l’objet d’un aménagement spécifique de par leur fragilité, se trouvent occupées par ce type d’habitat, ce qui remet inlassablement en cause, la question de la réglementation d’occupation du sol au niveau de la ville.
3.4. Le plan d’aménagement de Khénifra en 2014 : Un déphasage avec les orientations majeures actuelles et futures du développement urbain
Depuis sa mise en service en Mars 2007, l’agence urbaine de Khénifra[7] a mis en œuvre une stratégie prospective basée sur un diagnostic territorial, faisant ressortir les dysfonctionnements urbanistiques existants, mettant en exergue les potentialités de développement disponibles pour la mise à niveau urbanistique et architecturale de la ville. En effet, elle a procédé depuis la fin de l’année 2009 à la révision du PA de la ville avant son expiration. Cette action est bien justifiée, suite à l’intégration d’partie du territoire de la commune limitrophe de Moha Ohammou Zayani a été intégrée dans le périmètre urbain de la ville, édicté par le dernier découpage administratif, et aussi par le lancement du Programme de la Mise à Niveau Urbaine de la ville qui a autant changé la réalité de la ville.
3.4.1. La procédure d’élaboration : Des retards considérables
Si les retards notoires observés dans l’élaboration des deux PA de 1993 et 2004 peuvent êtres justifiés en quelque sorte, par le fait qu’ils ont été élaborés sous la supervision des services centraux, la situation n’a pas cependant grossièrement changé pour l’actuel PA, malgré que son élaboration soit assurée par l’agence urbaine. En effet, les préparatifs à l’élaboration de ce document avaient commencé avec les délibérations du Comité Consultatif et le lancement du marché d’étude en 2009, alors que son homologation et sa publication au bulletin officiel n’a eu lieu qu’en Février 2014.
Du point de vue conception, la procédure d’élaboration des PA de 1993 et 2004, relève de ce qui est qualifié par de nombreux chercheurs de “système classique[8] de production de la ville”. Les différentes zones qui figurent en légendes desdits PA sont ordinaires de type : zone d’habitat, zone d’habitat continue à plusieurs niveaux, zone de villas, zone industrielle…etc. En revanche, ce n’est qu’au nouveau PA qu’on attribue ce renouveau dans la conception en introduisant les ZRU (zone de renouvellement urbain), les ZAT (zone d’animation touristique), les ZRR (zone de restructuration ou de redressement urbain), les ZA (zone d’activités).
En matière des prévisions relatives aux équipements ayant un impact direct sur le milieu physique, la consultation du règlement d’aménagement du présent PA a fait ressortir les résultats illustrés dans le tableau suivant :
Tableau 3: Projections du PA de la ville de Khénifra de 2014 du point de vue équipements destinés à la préservation de l’environnemental
Source : Le règlement du PA de 2014, dépouillé
En plus de sa forme bizarre et son immense superficie, le concepteur du PA a reproduit le même scénario de celui de 2004 concernant l’affectation de la zone d’activités de 3ème catégorie. Son emplacement à proximité d’Oued Oum Rabia (Fig.11) contribuera sans doute à la pollution de ce dernier.
Fig. 11: Zone industrielle de 3ème catégorie affectée aléatoirement
De même, le PA prévoit la construction de l’habitat R+2 sur une zone très accidentée (Fig.12). C’est une zone à risques multiples, située sur la route menant vers Kahf N’Sour. Elle a été, pendant la période nommée “printemps arabe”, le théâtre d’une urbanisation clandestine et un étalement urbain sans précédent. Or, cette affectation qui vient légitimer un existant illégal, a donne lieu à un support réglementaire opposable à la commune urbaine de Khénifra en matière d’instruction des demandes d’autorisation de construire.
Fig. 12: Zone à risque affectée en zone d’habitat
L’affectation aléatoire du sol opérée par le concepteur du PA, se manifeste une autre fois à travers cet exemple (Fig.13), dont il prévoit la construction de l’habitat R+2 sur une zone du piémont de Jbel Bamoussa, qui réunit un ensemble de risques dont notamment, les ravinements et les inondations. Cette zone a été effectuée par le PA de 2004 comme zone non ædificandi.
- PA de 2004 PA de 2014
Fig. 13 : 1. Zone non ædificandi, 2. Zone constructible
S’agissant des espaces verts et boisement, si le PA était ambitieux en la matière, force est de constater que la superficie projetée n’est pas bien repartie entres les différents secteurs de la ville. Par ailleurs, peu d’espaces verts sont prévus dans le centre de la ville, tandis qu’une ceinture verte est projetée dans la périphérie au voisinage du périmètre d’aménagement. Ce constat peut être expliqué par plusieurs facteurs, dont le plus important est la rareté des terrains vacants dans le centre, résultat de l’évolution des pratiques urbaines antécédentes non soucieuses de la qualité paysagère et du cadre de vie. Quant à la projection d’une ceinture verte périphérique, elle semble avoir un rôle préventif et limitatif, pouvant empêcher la prolifération des constructions dans la périphérie de la ville. Outre cela, ses bienfaits écologiques et paysagers sont incontestables, notamment pour les zones urbaines limitrophes.
3.4.2. La mise en œuvre du PA de 2014 : Blocage et caducité
Confronté à la mise en œuvre des différents programmes lancés, à savoir : les plans de restructuration urbaine des quartiers irréguliers et la création de l’Ecole Supérieur de Technologie et du centre hospitalier provincial, l’actuel PA est devenu un obstacle, impliquant un besoin incitant de révision de son contenu par rapport à l’existant, en vue de dresser les situations irrégulières et assouplir la réglementation en vigueur
4. Khénifra : planification de consolidation timide vis-à-vis de la préservation de l’environnement
Parallèlement aux actions de planification urbaine, des efforts ont été déployé également en matière de leur consolidation, à travers la mise en place d’une stratégie visant l’accompagnement de la mise en ouvre des actions et des orientations prévues par les PA. Il s’agit du programme de la mise à niveau urbaine (M.N.U), du projet urbain et du projet d’étude[9] de redressement des Quartiers d’Habitat Non Réglementaire.
4.1. La première mise à niveau urbaine de Khénifra : Une génération de programmes qui a raté ses objectifs
Dans le cadre de la stratégie de M.N.U menée par l’Etat marocaine pour améliorer l’attractivité des villes, Khénifra a pu bénéficier en 2008, d’une première génération de programmes qui concernent un ensemble de domaine d’intervention dont notamment, ceux relatifs à la préservation de toutes les composantes du milieu physique au sein de la ville.
4.1.1. La conception : actions ambitieuses mais loin des orientations d’aménagement
D’après l’analyse du programme de la mise à niveau urbaine de Khénifra, il a été opportun de signaler son ambition quant à la préservation du milieu physique et l’amélioration de la qualité paysagère de la ville en programmant des projets destinés à cette fin (Tableau 4). Mais en revanche, il faut souligner qu’il n’était pas conçu dans le but de consolider les options du P.A de 2004, car ce programme “d’urgence” a été lancé au moment où l’administration commence à saisir la caducité dudit PA, et à réfléchir à son abrogation, et au lancement d’un nouveau P.A. Ceci, a donné une marge de liberté au concepteur du programme de la M.N.U pour manœuvrer selon des choix qui sont loin des orientations du PA.
Tableau 4: Taux de réalisation des actions environnementales prévues par le PMNU de la ville de Khénifra
Source : Rapport d’étude du PMNU de la ville de Khénifra, 2009, dépouillé
4.1.2. La mise en œuvre : un faible apport urbanistique
Selon les résultats illustrés dans le tableau 4, nous pouvons dire que le programme de M.N.U de la ville est achevé presque en toute sa totalité. Mais du point de vue qualité des travaux, il a été constaté, d’après les observations sur le terrain, que de nombreux projets n’ont pas bien été réalisés. D’après les enquêtes menées, ceci revient essentiellement, aux entreprises chargées de l’exécution des projets (Petites entreprises) ainsi qu’aux budgets qui leurs sont alloués (Coûts réels au delà du budget affecté). Ceci remet en cause la mise en œuvre dudit programme, et son retentissement sur l’amélioration de la qualité du paysage urbain de la ville de Khénifra.
4.2. Le projet urbain de Khénifra
Actuellement, le projet urbain de Khénifra est l’un des outils d’aménagement de l’espace urbain le plus opérant, qui rend ainsi féconde l’imagination des acteurs locaux prévue dans les documents d’urbanisme, puisqu’il ” […] se traduit par des actions concrètes ayant un impact direct et visible sur la ville” (El Malti, 2006, p.192). “C’est à travers les projets urbains que s’exprime aujourd’hui la revendication du « mieux urbain : amélioration de la qualité de l’environnement, avancée technologique, mue social» “ (Berezowska-Azzag, 2012, p.2,. Or, sa maîtrise peut être, sans contingence, la clé de voute, pour ce mieux urbain.
4.2.1. La conception : Des actions pertinentes et concertées
Lancé en 2009 par l’initiative de l’agence urbaine, le projet urbain de Khénifra a été conçu en concertation avec les partenaires concernés, en vue d’aboutir à un document qui fait le consentement de toutes les parties prenantes. Ainsi plusieurs propositions d’actions ont été formulées et classées selon des thématiques bien concises (Fig.14) afin de permettre à la ville de reprendre son équilibre urbain.
Source : Rapport du projet urbain de Khénifra, 2009
Fig. 14: Actions programmées par le projet urbain de la vile de Khénifra
Au regard des actions relatives à la préservation et à la valorisation du milieu physique au sein de la ville, la priorité a été donnée à l’amélioration du cadre de vie des citoyens, en prévoyant des actions pour la conservation de l’environnement paysager de la ville, entre autres : la charte architecturale et paysagère de la ville, le plan vert et l’étude de la requalification de la médina.
a. La charte architecturale et paysagère de la ville de Khénifra : Un document non opérationnalisé
Lancée en 2015 par l’initiative du conseil communal, la charte architecturale et paysagère de la ville de Khénifra qui constitue un outil complémentaire de son actuel PA homologué en 2014, n’a inopportunément pas, eu la chance d’être opérationnelle. Ce document ayant parcourue les différents phasages d’études est malheureusement fini dans les tiroirs des services communaux.
b. Le plan vert de la ville de Khénifra : Un projet en cours d’étude
Afin de rattraper le retard enregistré en matière d’espaces verts, le concepteur de l’actuel PA procède à la dotation de la ville d’une superficie non négligeable d’espaces verts et boisements (Tableau 5).
Existant | A créer | Total | % d’espaces verts à créer | |
Superficie des espaces verts en m2 | 45990 | 134006 | 179996 | 74% |
Population | 117443 | |||
Le Ratio Espaces Verts/Habitant | 0,39 | 1,14 | 1,53 |
Tableau 5: Etat des espaces verts au niveau de la ville de Khénifra
Source : Le règlement du PA de 2014, dépouillé
En effet, conscience des enjeux sanitaires, environnementaux et sociales que représentent ces espaces, mais aussi de larges contributions au renforcement de l’attractivité de la ville, l’agence urbaine de Khénifra a lancé en 2015 l’étude du plan vert de la ville, qui est aujourd’hui dans sa troisième phase, pour concrétiser les prévisions du plan d’aménagement en la matière. Dans cette optique, l’étude vise le diagnostic de l’état actuel et la proposition d’un dispositif technique pour la préservation, l’entretien et l’amélioration des espaces verts existants. Aussi, la localisation de l’ensemble des espaces verts urbains projetés au niveau du plan d’aménagement et la définition des statuts fonciers de ces terrains, les interventions possibles en terme d’aménagement et de valorisation, le cadre partenarial possible et le montage financier de chaque opération.
- L’étude de la requalification de la médina : action ambitieuse qui n’a pas vu le jour
L’ancienne Khénifra est comme toutes les médinas du Maroc, constitue un patrimoine matériel culturel, historique et identitaire de la région. Aujourd’hui, ce tissu est défiguré et il ne reste que quelques maisons traditionnelles persistant encore. Ce noyau est devenu à l’heure actuelle, le premier support de l’activité commerciale de la ville. Pour toutes ces considérations, l’Agence Urbaine a décidé de lancer en 2018 un appel d’offre, malheureusement déclaré infructueux, pour l’étude du PA et de sauvegarde de la médina de Khénifra, à fin de préserver ce premier noyau de la ville qui persiste encore en tant que « cœur battant » de la ville.
4.2.2. La mise en œuvre : un taux de réalisation dérisoire
Après avoir apprécié le contenu du projet urbain et son rôle dans la préservation du milieu physique et le rehaussement de la qualité paysagère de la ville, le problème de sa mise en œuvre demeure néanmoins, l’obstacle qui empêche la consécration des efforts déployés dans la phase de la programmation. Les données du tableau suivant sont très éloquentes dans ce sens.
Tableau 6: Taux de réalisation des actions prévues par le projet urbain de Khénifra
Projet | Nbre. de projets affectés | Nbre. de projets réalisés | Taux de réalisation | Observations |
Aménagement des pénétrantes |
4 |
4 dont 1 en cours | 100% | |
Aménagements des places publiques | 3 | 1 | 33,33% | |
Charte architecturale de la ville de Khénifra | 1 | 1 | 100% | Classée dans les tiroirs de la commune |
Plan vert de la ville | En cours d’étude | — | ||
Etude de la requalification de la médina | 1 | 0 | 0% | Projet lancé sous Appel d’Offres sur offres de prix n°07/2018 et déclaré infructueux[10] |
Reboisement des zones défrichées et aménagement des chaâbas | 1 | 0 | 0% | |
Réalisation d’un parc botanique et d’un jardin animalier | 1 | 0 | 0% | Le projet est affecté dans une zone objet de litige (Champ de course) |
Création d’une zone de l’industrie artisanale | 1 | En cours | 0% | Travaux en arrêt |
Mise en place d’une zone touristique | 1 | 0 | 0% | |
Schéma directeur des activités économiques | 1 | 0 | 0% | |
Schéma directeur de circulation | 1 | 0 | 0% | |
Total | 16 | 6 | 37,5% |
Source : Rapport d’étude du projet urbain de la ville de Khénifra, 2009, dépouillé
La lecture concise des résultats illustrés dans le tableau montrent clairement le faible taux de réalisation ne dépassant pas la moitié. Les projets prévus sont repartis selon ceux qui n’ont pas été réalisés et ceux qui n’ont pas été opérationnalisés (Charte architecturale).
Les actions ayant un effet direct sur la préservation du patrimoine et la valorisation du milieu physique telles que, l’étude de la requalification de la médina, le reboisement des zones défrichées, l’aménagement des chaâbas et la réalisation d’un parc botanique et d’un jardin animalier, n’ont malheureusement pas vu le jour. Ceci prive la ville de Khénifra d’un ensemble d’opportunités qui pourraient contribuer à un développement urbain durable.
4.3. Le projet de redressement des quartiers irréguliers
Outre les efforts déployés dans le domaine de l’amélioration de la qualité urbanistique et paysagère de la ville, et eu égard de la mauvaise image urbaine dont contribuent largement les quartiers irréguliers au sein de la ville, l’agence urbaine a procédé également, en coordination avec la commune urbaine de Khénifra, à l’élaboration des études relatives au redressement urbanistique. Ces études, qui concernent principalement 14 quartiers irréguliers, constituent désormais, un instrument de référence pour l’instruction des demandes d’autorisation de construire et un support pour les travaux de restructuration des quartiers concernés.
4.3.1. La conception : Des actions en faveurs de l’environnement
Ce projet de redressement des quartiers irréguliers est conçu d’une façon à assurer l’intégration physique de ces quartiers sous équipés de la ville, par la construction des voies de liaison avec les quartiers planifiés, de mettre en place certains services et commodités de la vie urbaine (rues bitumées, assainissement, électrification des rues, jardins et places publiques, équipements de proximité…etc.).
4.3.2. La mise en œuvre : Un taux de réalisation appréciable
L’étude de redressement des quartiers irréguliers de la ville prévoit la dotation de ces quartiers par un nombre d’équipements nécessaire à l’amélioration des conditions de vie des habitants (Tableau 7).
Tableau 7: Taux de réalisation des actions prévues par le projet de redressement des quartiers irréguliers de la ville de Khénifra
Projet | Nbre. de projets affectés | Nbre. de projets réalisés | Taux de réalisation | Observations |
Voirie de proximité | 24 Km | 24 Km | 100% | Travaux achevés |
Raccordement au réseau d’assainissement | 7 | 6 | 85,71% | Travaux arrêtés |
Espaces verts | 23 | 19 | 82,60% | Travaux arrêtés |
Aménagement des petits chaâbas | 6 | 4 | 66,66% | Travaux arrêtés |
Source : Le rapport d’étude de redressement des quartiers irréguliers de Khénifra, 2009, dépouillé
Il ressort des résultats illustrés dans le tableau ci-dessus, que les réalisations enregistrent des taux appréciables et que des efforts ont été déployés pour concrétiser les actions prévues par l’étude.
Aux termes de cette étude, on retient que la ville de Khénifra continue à produire son espace urbain en dehors des préoccupations environnementales. Les documents de planification élaborés pour la ville, se retrouvent souvent confrontés aux intérêts conflictuels des acteurs de la ville, et par conséquent, incapables de faire face aux différents empiétements sur le milieu physique. Dans l’ensemble, leurs élaborations et mises en œuvre n’affichent pas la volonté claire vis-à-vis de la préservation du milieu physique contre les différentes dégradations causées par l’urbanisation de plus en plus en évolution.
Bibliographie
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-Chaline C. (1988), « Petites Villes et Villes Moyennes dans le Monde Arabe », tome I et II. In: Annales de Géographie, t. 97, n°544, pp. 750-752; https://www.persee.fr/doc/geo_00034010_1988_num_97_544_20720_t1_0750_
-Chtouki H. (2011), « La planification urbaine au Maroc : État des lieux et perspectives» In « Planification et gestion de l’urbanisation », Article présenté lors da la Semaine de travail FIG (The International Federation of Surveyors, Marrakech, Maroc, 18-22 mai
-Theliol M. (2014), « Aménagement et préservation de la médina de Rabat entre 1912 et 1956 », Les Cahiers d’EMAM, N°22, PP. 47-70.
-Debbi F. (2008), « Evaluation de la mise en œuvre des documents d’urbanisme de la région de rabat sale zemmour zaer », Edition : Direction de l’Urbanisme, Maroc
-Berezowska-Azzag E. (2012), « Projet Urbain », Guide méthodologique. Volume 2 :
-Comprendre la démarche du projet urbain. Collection Urbanisme, Editions Synergie, Alger, 387 p
Ewa BEREZOWSKA-AZZAG, Projet Urbain, Guide méthodologique. Volume 2 :
Comprendre la démarche du projet urbain. Collection Urbanisme, Editions
Synergie, Alger 2012, 387 p., ISBN 978-9961-882-11-5, Dépôt légal : 1135-2012
El malti M. (2006), « L’urbanisme et la question de la ville » Edition AL BACHARIA, Rabat, Maroc
[1] Le Procès verbal de la réunion tenue au siège de la province le 16/09/1982, P.3
[2] Selon la note de présentation de la ville de Khénifra et d’une partie de la zone périphérique englobant l’agglomération d’Amalou Ighriben, 1984, p.5
[3] Due aux érections administratives en chef lieu de cercle en 1969 et en chef lieu de province en 1973, et à l’exode rurale causée par la sécheresse de l’année 80
[4] Situé à l’intérieur du tissu urbain. Il constitue une source de multiples nuisances (Pollution du sol, pollution d’Oued Oum Rabia, odeurs dégoutantes provenant de la partie réservée à la vente de bétail…)
[5] La Kasbah de Moha ou Hammou Zayani est un monument classé dans la province de Khénifra par le dahir du 26 décembre 1933 portant classement, B.O N° 1114 du 2 mars 1934, P.186.
[6] Paragraphe 8, Article 9 de la loi 12/90 relative à l’urbanisme
[7] Créée en vertu du décret n° 2.06.166 du 26 ramadan 1427 /19 octobre 2006 (B.O n° 5470 du 2 Novembre 2006) tel qu’il a été modifié par le décret n° 2.09.716 du 5 Rabii II 1431 /22 Mars 2010.
[8] En agissant principalement sur les terrains vierges ou faiblement urbanisés
[9] Cette étude a été l’une des actions du premier programme de la mise à niveau urbaine de la ville de Khénifra
[10] Selon nos enquêtes sur le terrain, l’agence urbaine ne prévoit pas le relancement de l’étude de la requalification de la médina puisque l’étude de la révision du présent PA est en cours.