Research studies

Translation, Loyalty and The Sacred Text

Traduction, Fidélité et Texte Sacré

 

Prepared by the researcher :  Taoufik Khaldi  – Moulay Ismail University, Meknes. Morocco

Democratic Arabic Center

Arabic journal for Translation studies : Fifth Issue – October 2023

A Periodical International Journal published by the “Democratic Arab Center” Germany – Berlin

Nationales ISSN-Zentrum für Deutschland
ISSN 2750-6142
Arabic journal for translation studies

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Abstract

No one can ignore the place that the sacred text occupies in the field of translation. This interest has sparked several research and publications to try to understand it, studying it through several perspectives and points of view. Indeed, the present research aims to highlight the problem of the translation of the dual as a linguistic phenomenon that characterizes the Arabic language. The interest that the study has in this phenomenon is due to its absence in the French language. This problem of the dual is accentuated by the choice of the corpus which is part of the Quranic text, and by the choice of two synonymous words that contain our corpus. Dual and synonymy are tested in the translating activity, in order to see the strategies deployed by translators to remain faithful to the original text. If the choice of such a word in a Quranic text has a semantic value that adds to the context of its appearance, this choice must also be rendered in the translation through the search for strategies that try to remain faithful to the original text.

Résumé

Nul ne peut ignorer la place qu’occupe le texte sacré dans le champ de la traduction. Cet intérêt a mis feu à plusieurs recherches et publication pour essayer de l’appréhender, en l’étudiant au travers plusieurs perspectives et point de vue. En effet, la présente recherche consiste à mettre en évidence le problème de la traduction du duel comme un phénomène langagier qui caractérise la langue arabe. L’intérêt que porte l’étude à ce phénomène est dû à son absence dans la langue française. Cette problématique du duel s’accentue par le choix du corpus qui s’inscrit dans le texte coranique d’une part, et par le choix de deux vocables synonymiques qui renferment notre corpus. Duel et synonymie sont mis à l’épreuve dans l’activité traduisante à travers une approche comparatives de trois traductions françaises différentes, et ce pour voir les stratégies déployés par les traducteurs pour rester fidèles au texte origine. Si le choix d’un tel vocable dans un le texte coranique a une valeur sémantique qui s’ajoute au contexte de son apparition, ce choix doit être rendu également dans la traduction à travers la recherche des stratégies qui essayent de rendre fidèle le texte origine.

  • Introduction

Notre objet d’étude consistera à étudier la notion de fidélité dans la traduction du texte sacré, réalisée grâce à des tentatives individuelles. De ce fait, les réflexions anciennes, notamment les premiers traducteurs chrétiens qui s’inscrivent dans une optique théologique, associent la fidélité à la littéralité, en instaurant une servitude à l’égard de la parole divine. Par ailleurs, le développement des approches et théories au sein du champ traductologique a fait que la notion de fidélité connait un glissement sémantique, autrement dit, la fidélité fut associée au sens et au message. Il est vrai que le travail des théoriciens Vinay et Darbelnet constitue une pierre angulaire quant à l’appréhension des procédés de la traduction qui ont donné lieu à deux types de traduction : la traduction directe ou littérale et la traduction oblique, cependant leur approche reste rudimentaire dans la mesure où elle repose sur la comparaison entre les langues. Par ailleurs, selon la conception interprétative défendue par Séleskovitch et Lederer, la traduction n’est pas un simple transcodage des vocables, mais un processus qui passe par la compréhension avant l’expression. Cette perspective assimile l’activité traduisante au schéma de la communication. Ainsi plusieurs aspects s’imposent-ils, notamment le vouloir dire de l’auteur, le contexte et le destinataire.

En effet, notre problématique est de pointer du doigt quelques difficultés qui enfreignent à la fidélité du texte coranique, en réinterrogeant la notion de synonymie et du duel au sein du Coran. En d’autres termes, existe-t-il une synonymie parfaite ? Quel est le rapport entre les vocables et leur contexte d’emploi ?

Pour ce faire, cette étude s’inscrira dans une approche comparative, tout en étudiant les propriétés distributionnelles des vocables étudiés et leur appréhension dans les traductions de notre corpus.

Dans la partie réservée à l’étude comparative, nous nous pencherons sur l’analyse du duel des lexèmes proposés afin de circonscrire notre travail et leur présentation dans les différentes traductions. Cette délimitation a pour objectif d’interroger les stratégies adoptées par les traducteurs lors de la traduction du duel ; sachant que cette forme n’est pas morphologiquement rendue en français.  Devant cet écueil, les traducteurs recourent sûrement à des alternatives et cherchent des formes plus adaptées pour traduire les formes du duel ; c’est ce que nous essaierons de vérifier dans ce qui suit. Si le traducteur s’efforce à trouver les équivalents des mots en mobilisant son savoir autant linguistique qu’extralinguistique, sa tâche se complique davantage, voire devient impossible, dans le cas des structures syntaxiques.

  1. Les traductions françaises étudiées et critères de choix

Le Coran, texte sacré, occupe une place importante dans la culture musulmane. Cette révélation divine fut transmise dès l’époque du prophète Mohammed de génération en génération. Elle ne se présente pas comme une simple parole divine réservée aux pratiques religieuses au sein de la communauté musulmane, mais il s’agit bel et bien d’un discours universel qui rend compte de l’Homme et de la Vie. Cette parole divine fut révélée au prophète Mohammed au moyen de l’Ange Gabriel en langue arabe, pour que la communauté à laquelle appartient le messager puisse saisir et comprendre le message divin. Cependant, l’expansion de l’Islam a fait que plusieurs personnes de diverses cultures et communautés non arabes se convertissent à l’Islam. Face à cette émergence, les théologiens et juristes se sont répartis en deux clans : les juristes et théologiens qui s’opposent à la traduction du texte coranique, soutenus par les versets qui mettent en relief la suprématie de la langue arabe et l’inimitabilité du message divin ; et ceux qui plaident pour sa traduction, afin de répondre à son universalité et permettre aux non arabophones l’accès au sens du discours divin. Les premières traductions du Coran s’inscrivent dans le cadre des travaux des Orientalistes qui ont axé leur attention sur la traduction et la compréhension du texte coranique à des fins idéologiques. Cela a éveillé une conscience auprès de la chair musulmane pour faire face à la propagation de fausses idées, et s’intéresser à la traduction du texte sacré pour qu’elle soit en adéquation avec le sens du texte origine.

Ces problèmes qui surgissent au cours de la traduction du texte coranique et égarent les traducteurs sont d’ordre linguistique et culturel. Dans ce sens, et pour illustrer le sujet traité dans ce modeste travail, l’étude portera seulement sur trois traductions françaises :

  • Traduction de Kasimirski
  • Traduction de Régis Blachère
  • Hamidullah, Muhammad

Le choix de ces traductions est dicté par plusieurs considérations :

Traduction et réceptivité

L’intérêt à ces traductions est dicté par leur notoriété, étant donné qu’elles sont classées parmi les meilleures traductions françaises au monde. Elles sont plus largement consultées et continuent d’être de plus en plus rééditées. Les traductions de Kasimirski, (B. Kasimirski, 1993) de Blachère (Blachère, 2005), suscitent un grand intérêt chez les lecteurs français non musulmans. Par contre, la traduction de Hamidullah (M. Hamidullah, 1989) est privilégiée par les lecteurs musulmans.

La représentation temporelle

Du point de vue chronologique, il convient de souligner que ces traductions appartiennent à des périodes différentes. On assiste à l’apparition de la traduction de Kasimirski (1840), puis celle de Blachère (1950) et ensuite la traduction de Hamidullah (1959).

Les traducteurs ; leurs origines et objectifs

Ces traductions furent réalisées par des traducteurs appartenant à différentes nationalités et religions. Sans doute la qualité de la traduction et l’interprétation du texte seraient-elles influencées du moment que le traducteur, au cours de son activité traduisant, fait appel à sa culture.

Ainsi convient-il de diviser les traductions étudiées en deux types :

Quant aux méthodes de traduction, il est à signaler qu’elles sont également diverses et diversifiées. Certains traducteurs essayent de rester plus fidèles au texte arabe en se basant et sur le fond et sur la forme afin de transmettre ses spécificités manifestées dans la richesse et la beauté du texte coranique. Pour d’autres, ils essayent d’être fidèles à la langue cible, ce qui met en évidence la diversité des styles adoptés quant à l’activité traduisante.

En effet, Kasimirski a proposé une traduction d’une grande richesse stylistique mais ne flattant pas beaucoup la langue arabe. La traduction de Blachère respecte la forme et de la structure du texte origine. Le traducteur opte également pour de nombreuses notes dans le but de comparer le coran et les textes bibliques. De plus, la structure du texte traduit fut restée fidèle à l’ordre chronologique de la révélation des versets coraniques. La traduction de Hamidullah se caractérise par son aspect littéral, et le recours aux exégèses musulmans pour rendre plus clair le message du texte arabe.sa prise en compte des apports de la tradition exégétique musulmane.

En dépit de leur qualité, aucune de ces traductions n’a été épargnée de critiques et de remarques dans la mesure où elles contiennent des problèmes linguistiques, méthodologiques et certaines erreurs d’interprétation.

  1. La notion du duel et sa relation avec la synonymie 

La synonymie est considérée comme un phénomène sémantique qui “désigne une relation entre deux mots ou expressions qui ont le même sens ou une signification très voisine” (Christian, 1986, p. 176). Cependant, la thèse selon laquelle les mots se ressemblent nettement donnent lieu à une synonymie parfaite est vouée à l’échec. Il est communément admis que de Saussure, le pionnier de la linguistique structurale, est le premier qui ait fondé le principe d’opposition selon lequel les mots ne se définissent pas par eux-mêmes, mais par ce qu’ils ne sont pas. Dire que deux mots ou deux expressions ont le même sens, c’est considérer que les langues sont tautologiques, et que cette redondance qui se manifeste dans le caractère exhaustif des dictionnaires enfreint la notion d’économie. Ce principe d’opposition qui a été développé dans la phonologie sera repris dans la sémantique. Cette dernière est considérée comme un isomorphisme qui repose sur des concepts phonologiques.

De surcroit, l’analyse sémique et son processus consistent à définir notamment, les traits sémiques, les sémèmes, les archisémèmes etc. Dans ce sens, les mots n’acquièrent pas des traits définitoires tels qu’ils se trouvent dans les dictionnaires, mais ils reçoivent leur définition en partant de leur différenciation qui émane de leur contexte d’emploi.

C’est le cas des deux vocables que renferme le corpus étudié dans cette section à savoir   ” الوالدين”et  “الأبوين”

Pour illustrer ces problèmes qui égarent les traducteurs au moment de l’activité traduisante, il importe d’analyser les deux vocables dans le texte origine avant de passer aux traductions étudiées.

3.1 Le mot « الأبوين»

En parcourant quelques dictionnaires quant à l’entrée « أب », il est à remarquer la présence de quelques nuances au niveau de sa définition ; Ibn Faris(1979) dit :

الهمزة والباء والواو يدل على التربية والغذو(…) وقال الخليل فلان يأبو اليتيم أي يغذو كما يغذو الوالد ولده” (44-46ابن فارس، ص.)

Pour Al Asfahani ;

(الأصفهاني) الأب: الوالد ويسمى كل من كان سببا في إيجاد شيء أو إصلاحه أو ظهوره أبا”

Al Jaza’iri, quant à lui, différencie entre les deux vocables “أب” et “والد” ;

 (61الجزائري،ص. )”الوالد لا يطلق إلا على من أولدك من غير واسطة والأب قد يطلق على الجد البعيد”.

Ces gloses définitionnelles s’attestent comme différentes ; Ibn Faris décrit “أب”  comme celui qui nourrit ses fils, Al Asfahani considère que les deux mots “أب” et “والد” sont synonymes, mais Al Jaza’iri voit que la différence entre les deux vocables réside dans la nature du lien de proximité qui peut être directe parents-fils ou indirecte grand-père-petit-fils.

Si nous suivons les différents contextes du mot أب”  “dans le texte coranique, nous pouvons dire qu’il s’agit d’un terme générique qui englobe aussi bien le père proche que le grand-père ou le père lointain : le premier se manifeste dans l’expression coranique : ” إذ قال يوسف لأبيه ” (يوسف:12), le second est révélé dans ملة أبيكم” “إبراهيم(الحج:76), c’est la raison pour laquelle le terme accepte d’être employé en pluriel : “الله ربكم ورب أبائكم الأولين”(الصافات:126).

Par ailleurs, le terme “أب” est attesté dans plusieurs contextes comme un terme d’identification ou de surnom ; celui-ci est considéré parmi les termes d’adresse qu’utilisent les Arabes pour s’interpeller, cela trouve sa justification aussi bien dans la vie quotidienne que dans le texte coranique :

“ادعوهم لآبائهم هو أقسط عند الله”(الأحزاب:5)

“ما كان محمد أبا أحد من رجالكم” (الأحزاب:40)

Ainsi, le terme est employé comme indice d’autorité, d’orientation comme le prouvent les phrases coraniques suivantes où le « أب » renvoie à celui qui ordonne et qui doit être suivi :

ولما دخلوا من حيث أمرهم أبوهم (يوسف:68)

 فلن أبرح الأرض حتى يأذن لي أبي  (يوسف:80)

 قالوا بل نتبع ما ألفينا عليه آباءنا  (البقرة:169)

Tous ces traits sémiques sont remplis et rendus dans le cas du vocable duel “الأبوين” qui renvoie aux parents lointains notamment Adam et Eve :

يَا بَنِي آدَمَ لَا يَفْتِنَنَّكُمُ الشَّيْطَانُ كَمَا أَخْرَجَ أَبَوَيْكُم مِّنَ الْجَنَّةِ يَنزِعُ عَنْهُمَا لِبَاسَهُمَا لِيُرِيَهُمَا سَوْآتِهِمَا” (الأعراف:27)

Le lexème « الأبوين » est dicté par le contexte d’emploi qui fait appel au degré d’intimité entre les « père et mère » et leurs fils, qui peut référer à une proximité directe et proche ou à une proximité indirecte et lointaine, puisque le terme « بني ادم » est générique et renvoie à toute l’humanité. De plus le contexte met en exergue le rapport d’identification du moment que Adan et Eve s’inscrivent dans un rapport de spécification, autrement dit le verset renferme le terme duel « الأبوين » comme étant les géniteurs de toute l’humanité. C’est la raison pour laquelle le recours au lexème « الوالدين » altérerait le sens et laisserait entendre que le verset infère à cette relation intime et directe entre tous les pères et mères, et tous leurs fils.

Si le verset ci-dessus nous renseigne sur cette relation indirecte entre les parents et leurs fils, les versets suivants s’attestent comme différents, car ils placent cette relation directe entre les parents et leurs fils :

“ولِأَبَوَيْهِ لِكُلِّ وَاحِدٍ مِّنْهُمَا السُّدُس […] فَإِن لَّمْ يَكُن لَّهُ وَلَدٌ وَوَرِثَهُ أَبَوَاهُ فَلِأُمِّهِ الثُّلُث )النساء ص(11

“وَرَفَعَ أَبَوَيْهِ عَلَى الْعَرْشِ وَخَرُّوا لَهُ سُجَّدا”)يوسف ص100)

“وَأَمَّا الْغُلَامُ فَكَانَ أَبَوَاهُ مُؤْمِنَيْنِ فَخَشِينَا أَن يُرْهِقَهُمَا طُغْيَانًا وَكُفْرً”ا) الكهف ص79)

Le premier verset renvoie au contexte de l’héritage, le second verset confirme l’idée du pouvoir révélée dans le mot « عرش », alors que le dernier verset représente le statut spirituel différent entre les parents « مؤمنين » et leur fils « كفرا ».

3.2 Le mot الوالدين 

Ce second vocable illustre d’autres valeurs sémantiques et contextuelles qu’il convient d’étudier à travers toujours le texte coranique origine :

En effet, Ibn Faris dit :

“الواو واللام والدال أصل صحيح: وهو دليل النجل والنسل…وتولد الشيء عن الشيء حصل عنه”

Cela signifie que le mot « والد » désigne le père proche associé au fils. Cette désignation est corroborée par la présence de ce vocable au singulier ou au duel comme le cas du verset « وبالوالدين إحسانا ». A la différence du terme précédent, le texte coranique ne renferme aucun contexte dont lequel le mot « والد » s’emploie en pluriel. L’absence de son pluriel montre qu’il ne renvoie nullement au signifié « grand-père ou père lointain ».

De plus, il est à remarquer que son emploi dénote une régularité contextuelle stable et fixe dénotée dans la bonne conduite envers les parents, leur respect et leur service. Tous ces bons actes sont désignés par les mots : إِحْسَانًا, حُسْنًا présents dans des versets. Cette interprétation est encouragée par la relation affective qui s’instaure entre le père proche et son fils et qui devient moins en moins entre le petit-fils et le grand-père. De ce fait, le sens que renferme l’expression والد » est soutenu par le verset suivant dans lequel le contexte coranique tient à honorer les parents, les respecter et interdire toute humiliation à l’égard d’eux :

“وبالوالدين إحسانا….فلا تقل لهما أف ولا تنهرهما وقل لهما قولا كريما” (الإسراء:23)

A cet égard, l’emploi de « والد » qui fait référence à la relation affective devient pertinent au lieu du mot « أب », même si les parents et leurs fils appartiennent à deux croyances différentes, car le contexte coranique privilégie la bonne conduite pour manifester la reconnaissance et la gratitude vis-à-vis des parents illustrées par l’expression :

“وقل رب ارحمهما كما ربياني صغيرا” (الاسراء:24)

3.3 L’héritage : une neutralisation de l’opposition

L’héritage est l’une des notions de l’Islam, délimité par la révélation elle-même. Pour que le partage de l’héritage soit intelligible, la première condition consiste à ce que le défunt et les héritiers soient de la même croyance islamique. Cette condition ne demeure attestée puisque le défunt a le droit d’écrire son testament. C’est la raison pour laquelle les deux vocables sont attestés dans ce contexte :

“للرجال نصيب مما ترك الوالدان والأقربون وللنساء نصيب مما ترك الوالدان والأقربون” (النساء:7)

Puis le texte coranique mentionnera le mot « أبوين » :

” ولأبويه لكل واحد منهما السدس “(النساء:11), car le contexte est d’ordre financier qui place les deux dans un statut égalitaire qui neutralise toute discrimination sociale financière ou religieuse

Nous pouvons déduire que les deux vocables sont en distribution complémentaires ; le mot “والد”ne s’emploie que dans des contextes qui font appel à la bonne conduite et la relation affective qui associe le père proche à son enfant. Cette relation devient limpide du moment que le mot  “والد”ne se présente nullement dans sa forme plurielle. Le mot “أب” quant à lui présente une autre propriété distributionnelle qui réside dans les contextes de l’autorité, de permission et de suivi, c’est pourquoi qu’il est employé dans ses différentes formes, singulière, duelle et plurielle.

  1. Etude comparative des traductions 

Nous avons précisé que le texte coranique déploie deux mots quasi-synonymiques, et c’est le contexte qui détermine le choix de l’un ou de l’autre pour rendre compte de l’économie de la langue. Or, le français, qui ne comporte pas la notion du duel, n’a que le lexème « parents » pour traduire les deux mots arabes.

L’analyse des trois traductions a permis, d’emblée, de s’arrêter sur le problème de la traduction du duel. Nous pouvons dégager une remarque générale : toutes les traductions, malgré la différence de leurs époques, utilisent les mêmes mots : tantôt les parents, tantôt père et mère. Cette irrégularité, contrairement au texte coranique arabe, montre la négligence du sens origine et du contexte d’apparition des signes linguistiques.

La traduction de Hamidullah renforce les vocables père et mère par un autre proches parents. Ce procédé d’étouffement est une forme d’insistance pour orienter le lecteur vers ce lien de proximité.

” de faire le bien envers les pères, les mères, les proches parents

“A tous Nous avons désigné des héritiers pour ce que leur laissent leurs père et mère, leurs proches parents

Mais cette structure n’est pas régulière, car elle ne concerne pas tous les versets qui renvoient au contexte de la bienfaisance pour stabiliser le référent :

“de faire un testament en règle en faveur de ses père et mère et de ses plus proches »

« Agissez avec bonté envers (vos) père et mère

Le même lexème père et mère est utilisé pour renvoyer à l’équivalent arabe “الأبوين”, sauf dans le verset suivant où il a opté pour parents :

“Et il éleva ses parents sur le trône”

La traduction de Blachère, quant à elle, déploie le même vocable sans tenir compte ni des particularités sémantiques ni contextuelles.

Pour le verset qui renvoie aux premiers parents de l’humanité, Adan et Eve, Blachère utilise l’adjectif primitifs.

“O Fils d’Adam ! que le Démon ne vous tente point, de même qu’il fit sortir du Jardin votre père et votre mère primitifs

Une autre remarque qu’il convient de préciser : Blachère a considéré que le mot “وَالِدَيّ” est singulier, c’est la raison pour laquelle il a traduit le verset comme suit, surtout que les deux mots en gras renvoient à la notion de “الوالدين”

“Nous avons commandé à l’Homme le bien envers ses père et mère (…) de Te remercier du bienfait dont tu m’as comblé ainsi que mon père

La dernière traduction soumise à l’analyse est celle de Kazimirski qui a employé les mêmes vocables, avec les mêmes remarques que les autres traductions susmentionnées, sauf dans le verset suivant dans lequel on assiste à la présence de deux mots différents pour renvoyer au même équivalent arabe “الوالدين” .

La bienfaisance envers ses père et mère ( …) les bienfaits que tu m’as comblé ainsi que mes parents

Dans ces exemples, la difficulté ne réside pas dans les vocables, dans la mesure où les traducteurs ont essayé de chercher des équivalents dans la langue cible, mais le problème est perçu dans l’irrégularité contextuelle qui permet au lecteur de la traduction de faire le départ entre les deux significations.

  1. Conclusions et discussions

L’analyse a montré que les traductions étudiées recourent à deux vocables différents à savoir « parents » et « père et mère ». Cependant, la difficulté réside dans distribution contextuelle du moment que les traducteurs n’ont pas pris en considération la dimension du contexte et les valeurs sémantiques que proposent les deux vocables du texte d’origine. Cela met en cause la fidélité quant à ces traductions et leur décalage par rapport aux régularités contextuelles du texte origine et qui affecte le sémantisme des vocables traduits. En effet, ces traductions prouvent que le problème ne réside pas dans le choix des mots, mais dans leur préservation et leur distribution dans les différents contextes d’apparition.

  1. Conclusion

A partir de cette étude succincte de la notion du duel et son rapport avec la synonymie, nous avons essayé d’éclairer les problèmes qui égarent le traducteur au cours de la traduction du texte coranique. Nous avons montré également qu’en dépit de l’absence de la notion du duel dans la langue française, les traducteurs ont optés pour d’autres stratégies notamment, l’étouffement à travers les répétitions ou l’expansion des mots. En d’autres termes, la recherche d’équivalence peut s’instaurer entre les deux langues. En revanche, un principe crucial a été occulté à savoir la prise en considération du contexte et son impact sur la signification.

Cela corrobore l’idée que la traduction du texte coranique par le biais des tentatives individuelles est discutée, puisqu’il présente des spécificités aussi bien formelles que sémantiques qui exigent que le traducteur soit à l’affût. C’est la raison pour laquelle il existe cette panoplie de retraductions qui continuent à être éditées, dans l’objectif de comprendre mieux le texte origine. Si le Coran a donné lieu à plusieurs interprétations et commentaires exégétiques, à cause de son ambigüité, la présence de différentes traductions témoignent aussi de diverses positions et point de vue des traducteurs. Un tel texte qui inclut une charge sémantico-culturelle importante exige une collaboration d’auteurs en puisant dans différents domaines dans le but d’instaurer la fidélité du texte coranique au cours de sa traduction. Par ailleurs, les problèmes s’ajoutent lorsqu’il s’agit de changer le point de vue et intégrer d’autres approches notamment l’approche énonciative et son apport théorico-méthodologique pour optimiser voire minimiser ces problèmes qui apparaissent au cours de la traduction du Coran.

A cet égard, le Coran, étant un texte inépuisable, demeure intraduisible dans le sens que lui donne Barbara Cassin, puisque l’intraduisible ne correspond pas à ce qu’on ne peut pas traduire mais, à ce qu’on ne cesse de traduire.

Liste Bibliographique

  • Baylon, C. e. (1986). La sémantique : avec les travaux pratiques d’application et leurs corrigés. Editions Fernand Nathan.
  • Blachère, R. (2005). Le Coran. Maisonneuve et Larose.
  • Hamidullah, M. L. (1989). Le Saint Coran. Amana Corporation, Maryland US.
  • Kasimirski, B. (1993). Le Coran.
  • الأصفهاني, ا. (2004). المفردات في غريب القرآن. دار الكتب العلمية.
  • الجزائري،, ن. ا. (2004). فروق الّلغات في التمييز بين مفاد الكلمات. مكتبة الرشد.
  • فارس, أ. ا. (1979). معجم مقاييس اللغة.

Romanization of Arabic Bibliography

  • Al-Isfahani, A. (2004). Al-Mufradat fi Ghareeb Al-Quran [Vocabulary in the Strangeness of the Quran]. Dar Al-Kutub Al-Ilmiyah.
  • Al-Jazairi, N. A. (2004). Furq Al-Lughat fi at-Tamyiz bayn Ma’ani al-Kalimat [Linguistic Differences in Distinguishing Word Meanings]. Maktabat al-Rashd.
  • Faris, A. A. (1979). Mu’jam Maqayis al-Lughah [Dictionary of Language Measures].

Annexes

الوالدين

Mohammed Hamidullah Régis Blachère Albert Kazimirski القرآن  
de faire le bien envers les pères, les mères, les proches parents Marquez de la bienfaisance à vos Père et Mère tenez une belle conduite envers vos pères et mères, وَبِالْوَالِدَيْنِ إِحْسَانًا البقرة: 83
de faire un testament en règle en faveur de ses père et mère et de ses plus proches A lui de tester en faveur de ses père et mère Il doit laisser par testament ses biens à ses père et mère الْوَصِيَّةُ  لِلْوَالِدَيْنِ وَالْأَقْرَبِينَ بِالْمَعْرُوفِ البقرة: 180
Dis: “Ce que vous dépensez de bien devrait être pour les pères et mère Ce dont vous faites dépense en bien, doit être pour vos père et mère Il faut secourir les parents قُلْ مَا أَنفَقْتُم مِّنْ خَيْرٍ فَلِلْوَالِدَيْنِ وَالْأَقْرَبِينَ البقرة: 215
Aux hommes revient une part de ce qu’ont laissé les père et mère Aux [héritiers] hommes, une part de ce que laissent les père et mère et les proches. Aux femmes, une part de ce que laissent les père et mère Les hommes doivent avoir une portion des biens laissés par leurs pères et mères et leurs proches, les femmes doivent aussi avoir une portion de ce que laissent leurs pères et mères et leurs proches للرجال نصيب مما ترك الوالدان والأقربون وللنساء نصيب مما ترك الوالدان والأقربون النساء : 7
A tous Nous avons désigné des héritiers pour ce que leur laissent leurs père et mère, leurs proches parents, A tous, Nous avons donné des ayants droit sur ce qu’ils laissent : les père et mère Nous avons désigné à chacun les héritiers qui doivent recueillir la succession laissée par les ascendants, par les parents ولكل جعلنا موالي مما ترك الوالدان والأقربون النساء : 33
Agissez avec bonté envers (vos) père et mère, [Marquez]de la bienfaisance à vos père et mère Témoignez de la bonté de vos pères et mères, à vos parents وَبِالْوَالِدَيْنِ إِحْسَاناً النساء : 36
soyez bienfaisants envers vos père et mère Marquez de la bienfaisance à vos père et mère Traitez vos pères et mères avec générosité وَبِالْوَالِدَيْن إِحْسَاناً الأنعام:151
Ô notre Seigneur! pardonne-moi, ainsi qu’à mes père et mère et aux croyants. Seigneur, pardonne moi ainsi qu’à mes père et mère et aux Croyants Pardonne-moi, à mes pères et aux croyants رَبَّنَا اغْفِرْ لِي وَلِوَالِدَيَّ وَلِلْمُؤْمِنِينَ يَوْمَ يَقُومُ الْحِسَابُ إبراهيم : 41
“n’adorez que Lui; et (marquez) de la bonté envers les père et mère: Et marquiez de la bonté à vos père et mère De tenir une belle conduite envers vos père et mère وَبِالْوَالِدَيْنِ إِحْسَاناً الإسراء: 23
Et Nous avons enjoint à l’homme de bien traiter ses père et mère Nous avons commandé à l’Homme le bien envers ses père et mère De tenir une belle conduite à l’égard de ses père et mère وَوَصَّيْنَا الإِنسَانَ بِوَالِدَيْهِ حُسْنًا العنكبوت : 7
Et Nous avons enjoint à l’homme de la bonté envers ses père et mère (…)ainsi qu’à mes père et mère, Nous avons commandé à l’Homme le bien envers ses père et mère(…)  ainsi que mon père La bienfaisance envers ses père et mère ( …) les bienfaits que tu m’as comblé ainsi que mes parents وَوَصَّيْنَا الْإِنسَانَ بِوَالِدَيْهِ إِحْسَانًا …))

قَالَ رَبِّ أَوْزِعْنِي أَنْ أَشْكُرَ نِعْمَتَكَ الَّتِي أَنْعَمْتَ عَلَيَّ وَعَلَىٰ وَالِدَيّ

الأحقاف :15
Quant à celui qui dit à ses père et mère Au contraire, celui qui criera à ses père et mère Celui qui dit à ses parents وَالَّذِي قَالَ لِوَالِدَيْهِ أُفٍّ لَّكُمَا الأحقاف : 16
     

 

 
           الأبوان
Mohammed Hamidullah Régis Blachère Albert Kazimirski القرآن  
Quant aux père et mère du défunt, à chacun d’eux le sixième de ce qu’il laisse, Si [l’héritière] est unique, à elle la moitié et à chacun de ses père et mère, le sixième de ce qu’a laissé [le défunt] (…) Les père et mère du défunt auront chacun le sixième de la succession ولِأَبَوَيْهِ لِكُلِّ وَاحِدٍ مِّنْهُمَا السُّدُسُ مِمَّا تَرَكَ إِن كَانَ لَهُ ولد فَإِن لَّمْ يَكُن لَّهُ وَلَدٌ وَوَرِثَهُ أَبَوَاهُ فَلِأُمِّهِ الثُّلُثُ النساء : 11
Ô enfants d’Adam! Que le Diable ne vous tente point, comme il a fait sortir du Paradis vos père et mère O Fils d’Adam ! que le Démon ne vous tente point, de même qu’il fit sortir du Jardin votre père et votre mère [primitifs] Ô enfants d’Adam ! que Satan ne vos séduise pas comme il a séduit vos pères يَا بَنِي آدَمَ لَا يَفْتِنَنَّكُمُ الشَّيْطَانُ كَمَا أَخْرَجَ أَبَوَيْكُم مِّنَ الْجَنَّةِ يَنزِعُ عَنْهُمَا لِبَاسَهُمَا لِيُرِيَهُمَا سَوْآتِهِمَا الأعراف : 27

 

Et il éleva ses parents sur le trône, Il fit montre ses père et mère sur le trône Il plaça sur un siège élevé ses père et mère وَرَفَعَ أَبَوَيْهِ عَلَى الْعَرْشِ وَخَرُّوا لَهُ سُجَّدًا يوسف 100.

 

Quant au garçon, ses père et mère étaient des croyants l’adolescent avait pour père et mère deux croyants Quant au jeune homme, ses parents étaient croyants وَأَمَّا الْغُلَامُ فَكَانَ أَبَوَاهُ مُؤْمِنَيْنِ فَخَشِينَا أَن يُرْهِقَهُمَا طُغْيَانًا الكهف :80

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