Research studies

Effets du terrorisme sur la communauté marocaine et maghrébine musulmane en Europe: Création de différentes formes de violence

Effects of terrorism on the Moroccan and North African Muslim community in Europe: Creation of different forms of violence

 

Prepared by the researcher

BENAICHA Benyouness, Docteur en Géographie – Faculté des lettres et Sciences Humaines, Université Mohamed Ier, Oujda, Maroc

SBAI Abdelkader, Professeur, Université Mohamed Ier, Oujda, Maroc – BENRABIA Khadija, Professeur, Université Mohamed Ier, Oujda, Maroc

Democratic Arab Center

Journal of African Studies and the Nile Basin : Twentieth Issue – June 2023

A Periodical International Journal published by the “Democratic Arab Center” Germany – Berlin

Nationales ISSN-Zentrum für Deutschland
ISSN  2569-734X

Journal of African Studies and the Nile Basin

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Résumé

Après les attentas du 11 Septembre 2001 à New York, aux Etats Unies, le phénomène du terrorisme a connu une ampleur internationale incontournable. L’Europe, elle aussi a connu plusieurs attentats qualifiés de terroristes, dont les acteurs de ces attaques, sont principalement des jeunes maghrébins issus de l’immigration. Ceci a engendré un jumelage entre la migration et le terrorisme. En conséquence, la communauté marocaine et maghrébine musulmane en Europe se trouve, après chaque attentat, victime des actes de xénophobie, de violence et d’islamophobie.

Cette situation délicate, nous pousse dans cet article à mettre en question la migration et le terrorisme, et chercher à présenter les formes de violence que la communauté marocaine et maghrébine musulmane subit en Europe après les attaques terroristes. Nous allons essayer de savoir si cette hostilité et cette violence qualifiée de terrorisme, n’est qu’une réaction contre la marginalisation et l’exclusion établie par certains pays vis-à-vis de cette communauté, en se basant sur une méthode de recherche qui combine entre le qualitatif et le quantitatif, la recherche documentaire et les interviews.

Abstract

After the attacks of September 11, 2001 in New York, in the United States, the phenomenon of terrorism experienced an unavoidable international dimension. Europe, too, has experienced several attacks qualified as terrorists, whose actors in these attacks are mainly young North Africans with an immigrant background. This has created a twinning between migration and terrorism. Consequently, the Moroccan and North African Muslim community in Europe finds itself, after each attack, a victim of acts of xenophobia, violence and Islamophobia.

This delicate situation pushes us in this article to question migration and terrorism, and to seek to present the forms of violence that the Moroccan and North African Muslim community undergoes in Europe after the terrorist attacks. We are going to try to find out if this hostility and this violence qualified as terrorism, is only a reaction against the marginalization and exclusion established by certain countries vis-à-vis this community, based on a research method which combines qualitative and quantitative, documentary research and interviews.

Introduction

Dès les attentats du 11 Septembre 2001 à New York, Le terrorisme est devenu un phénomène d’actualité par excellence, une matière brute et un champ fertile d’étude et d’analyse. Il avait connu une ampleur internationale et un jumelage entre le terrorisme et la migration, surtout en Europe après les attentats de Madrid le 11 Mars 2004, les attentats de Londres le 7 juillet 2005 et les attentats de Paris contre l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo, et les attentats du 13 Novembre 2015…

Les acteurs des attaques qualifiés de terroristes en Europe, sont principalement des jeunes maghrébins issus de l’immigration. Selon les médias, ces attaques prennent une allure religieuse (attaques Jihadistes) liées à la religion de l’Islam. Cette perception, met en péril la communauté marocaine et maghrébine musulmane, surtout celle issue de la migration. Cette communauté se trouve après chaque attentat victime des actes de xénophobie, de violence et d’islamophobie. Chaque fois, elle doit prouver et justifier son innocence.

 Cette situation délicate nous pousse, dans cet article, à montrer la relation entre la migration et le terrorisme en question, en traitant les formes de violence subie par la communauté marocaine et maghrébine musulmane en Europe surtout après les attentats. Nous essayons également de savoir si cette hostilité et cette violence qualifiée de terrorisme, n’est qu’une réaction contre la marginalisation et l’exclusion établit par certains pays vis-à-vis de cette communauté.

Nous allons essayer de répondre à deux questions majeures:

– Quelles sont les formes de violence contre les migrants marocains et maghrébins musulmans en Europe ?

– Le terrorisme n’est-il pas une réaction contre une situation défavorable ou un échec de la politique d’intégration ?

I- Formes de violence contre les migrants marocains et maghrébins musulmans en Europe

La violence contre la communauté marocaine et maghrébine musulmane en Europe prend différentes formes. Elle peut se manifester dans des actes de xénophobie, d’islamophobie et de racisme. Parfois, ces actes sont des réactions contre les actions commises par les terroristes.

1- L’islamophobie, une origine de violence

Après chaque attentat terroriste dans un des pays de l’UE, la notion d’islamophobie apparaît à nouveau et constitue une matière brute et un champ fertile pour les médias et les politiciens. Au sein de la société, cette peur de l’Islam se transforme à des actes de violence contre les musulmans dans tous les pays de l’UE. Ces actes prennent des formes différentes: verbales, gestuelles et physiques, même des fois. Ils engendrent des dégâts matériels et humains. Ils se multiplient directement, après chaque attentat terroriste, ce qui entraîne des malheurs à la communauté musulmane dans ces pays. Toute la communauté devient coupable. Elle doit présenter chaque fois des excuses et des explications sur la culture, la religion, l’Islam, le JIHAD, le voile…

Dans ce cadre, on peut faire appel à l’indice de la tolérance, créé par Vincent Tiberj[1] en 2008. Il a pour objectif de mesurer de manière synthétique les évolutions de l’opinion publique française à l’égard de la diversité avec une mesure comparable dans le temps, depuis 1990, «Entre novembre 2014 et mars 2015, l’indice longitudinal de tolérance a progressé de 2.3 points de pourcentage. L’opinion n’a pas cédé à la tentation de l’amalgame avec les auteurs de ces actes: la tolérance à l’égard des noirs progresse de 4 points, et à l’égard des musulmans et des maghrébins de 1.6 points »[2]. On trouve que la diversité démontrée par cet indice se focalise sur les magrébins et les subsahariens «noirs», dont sa progression est significative pour les subsahariens. ça veut dire que leur acceptation par la société a progressé de 4 points. Au contraire, la tolérance de la société française envers les maghrébins et les musulmans est faible. Elle n’enregistre que 1,6 points.

2- Aspects de la violence contre la communauté émigrante musulmane

Après les attentats de Paris, les actes du racisme et de la violence ont connu une accentuation remarquable, surtout pour celles et ceux qui portent des signes religieux telles que: le voile et la barbe. Une femme avec un voile et un homme avec une barbe sont une menace, une source de la terreur et un symbole du terrorisme. Les actes de violence ont pris différentes formes:

  • Tentatives d’écrasement par des voitures;
  • Insultes;
  • Neutralisation physique;
  • Investigations et enquêtes policières caractérisées par la violence: les interpellations des gens dans des heures et des endroits qui stigmatisent les interpellés;
  • Fracture des portes;
  • Arrestations arbitraires avec utilisation des armes.

Même les sites de culte musulmans n’étaient pas en abri de ces attaques, tels que, clouer les têtes des porcs sur les portes des mosquées, causer des dégâts aux sites par les incendies (Photos1), l’écriture des expressions racistes et anti-Islam sur les murs extérieurs des mosquées.

Source : Espagne : Une mosquée vandalisée pour venger l’attaque de Bruxelles http://africanmanager.com.

Photo 1: La mosquée de Madrid brûlée le 22 Mars 2016

La photo 1 montre que cette attaque a eu lieu directement après les attentats de Bruxelles[3]. On peut constater ça de la banderole sur laquelle était écrit «Aujourd’hui Bruxelles, demain Madrid?». En espagnole «Hoy Bruselas mañana Madrid», ce qui signifie que les réactions avec l’attaque de Bruxelles ont pris une ampleur européenne.

Les deux figures ci-dessous, montrent des contre attaques qui ont eu lieu directement après les deux attentats de catalogne (Barcelone et Cambrils)[4].

Photo 2: Consulat marocain à

Tarragone

Photo 3: Ecriture apparue sur la

face de la mosquée Mont Blanc à

Tarragone

Source : www.huffpostmaghreb.com

Cette fois-ci, il ne s’agit pas juste d’une institution religieuse (la mosquée), plutôt d’une institution diplomatique, c’est le consulat marocain à Tarragone. Les menaces ne concernent pas l’origine religieuse des terroristes, mais elles sont dirigées aussi vers leurs pays d’origine.

Un rapport de l’Association des droits des musulmans en Belgique publié le 23 Avril 2015 avait admis, que 696 actes anti-Islams ont été enregistrés en 2014. Ces actes avaient atteint plus de 50 actes par mois. Cette situation, a été renforcée par la liberté des médias qui contribuent à l’établissement d’un environnement d’hostilité et du racisme.

Ces violences, s’effectuent contre une communauté qui respecte dans sa majorité les principes et les normes des sociétés dans lesquelles elle vit. Elle respecte la démocratie, le droit d’expression, l’égalité entre les sexes, la laïcité… Ce qui la pousse à sortir à la rue pour dénoncer ces actes.

Source: www.la-croix.com

Photo 4: Des musulmans se manifestent après l’attentat de Charlie Hebdo [5]

3- Une société multiculturelle ou communautariste ?

 L’existence des différentes cultures et ethnies dans la société européenne peut être vue comme un multiculturalisme ou comme un communautarisme? Les musulmans, les juifs, les chrétiens, les arabes, les hindous, les subsahariens, les roumains… sont-ils vu comme des communautés isolées, des cultures différentes ou des groupes identifiés sur des bases identitaires «en référence à une origine ethnique ou éthnonationale commune, à une même religion, à une langue d’origine (minoritaire), etc.»[6]. La société qui rassemble toutes ces identités, ces couleurs, ces religions, est-elle une société multiculturelle ou communautariste?

Une société multiculturelle «est une société au sein de laquelle chaque groupe culturel conserve et affirme son identité et ses traditions, tout en partageant et respectant les valeurs communes du pays»[7]. Dans ce cadre, la société d’un pays d’immigration internationale de travail est une société qui affronte automatiquement le multiculturalisme, puisque les origines des émigrants sont multiples et diversifiées, une diversité des origines géographiques, des couleurs de peau, des croyances… Cela impose à ces pays la gestion de ce phénomène social.

 On parle du communautarisme «lorsque les communautés sont reconnues comme telle dans une société donnée»[8]. Là on parle d’une reconnaissance, et la reconnaissance vient de l’autre, c’est-à-dire c’est la société d’accueil qui doit reconnaître l’existence d’une communauté et respecter sa différence. Afin de corriger cette situation, deux politiques sociales ont été adoptées. Il s’agit de l’assimilation et l’intégration.

 4- De l’assimilation à l’intégration du migrant: cas de la France

Laetitia VAN EeCKHOUT affirme que, l’intégration «exprime davantage une dynamique d’échange, dans laquelle chacun accepte de constituer partie d’un tout où l’adhésion aux règles de fonctionnement et aux valeurs de la société d’accueil, et le respect de ce qui fait l’unité et l’intégrité de la communauté n’interdisent pas le maintien des différences»[9]. Cependant, parfois le maintien de la différence est vu comme un élément qui ne se conforme pas avec les principes de la communauté d’accueil par exemple «les principes de la laïcité et l’Islam», est ce que dans ce cas là, la communauté musulmane ou une communauté de couleur différente ne peut pas faire partie d’un tout?

En effet, les décideurs français ont été conscients de la diversité et la différence entre les immigrés et la société d’accueil, et afin d’éviter les soucis et les conflits qui peuvent survenir de cette différence, l’Etat avait adopté la politique d’assimilation. Selon l’OIM, cette dernière signifie un «processus par lequel un premier groupe social ou éthnique généralement minoritaire adopte les traits culturels (langue, traditions, valeurs, moeurs, etc.) d’un second groupe, généralement majoritaire. L’adaptation se traduit par une altération du sentiment d’appartenance. L’assimilation va au-delà de l’acculturation. Il est cependant rare que l’assimilation entraîne la disparition totale de la culture d’origine».

Laetitia VAN EeCKHOUT voit l’assimilation «comme la pleine adhésion par les immigrés aux normes de la société d’accueil, l’expression de leur identité et de leurs spécificités socioculturelles d’origines étant cantonnée à la seule sphère privée»[10]. L’assimilation est une politique qui cherche à faire apprendre au nouvel immigré sur le territoire français un ensemble de règles, de normes et des valeurs qui lui permettent de s’adapter à la société. Ce qui fait que l’immigré doit être similaire à l’autochtone en suivant un modèle déjà existant.

Dès les années 80, le concept de l’intégration a remplacé celui de l’assimilation. L’intégration vise à doter l’immigré des droits au logement, à la scolarisation, à la qualification, aux allocations familiales et l’égalité des droits avec les français.

Le modèle français de l’intégration «repose en fait sur l’idée de l’assimilation»[11]. C’est un modèle d’intégration qui passe par l’assimilation. La loi du 24 Juillet 2006 impose aux nouveaux arrivés sur le territoire français de signer le Contrat d’Accueil et d’Intégration (CAI). La connaissance de la langue du pays d’accueil est parmi les démarches adoptées pour faciliter l’intégration. Cependant, il faut poser la question suivante, est ce que la connaissance de la langue, la réussite scolaire et l’obtention des diplômes, la naissance sur le territoire du pays d’accueil, le respect des principes et normes de la société d’accueil concrétisent réellement l’intégration ?

Si la question de l’intégration a été posée fortement avec les premières générations de la migration, vu leur ignorance de la langue française et aux normes de la société, vu aussi leur mentalité conservatrice, est ce que la situation n’a-t-elle pas changé pour leurs descendants, surtout nous parlons actuellement de la deuxième, la troisième et la quatrième génération, notamment ceux qui sont nés sur le territoire français et qui ont poursuivi leurs études dans les écoles françaises. Certains trouvent que «La République, en contradiction avec ses propres principes, paraît incapable d’intégrer ces jeunes Français qui vivent comme les indigènes de la nation, comme s’il y avait toujours une marque, une trace d’une immigration lointaine qui pèse toujours sur eux.»[12]. Une marque d’une immigration lointaine qui se pose sur les jeunes issus de l’immigration, même si ces derniers ne sont pas vraiment des immigrés, car ils n’ont pas pris la décision pour émigrer. Cependant, ils affrontent eux aussi les défis de l’intégration.

Si l’intégration est indispensable pour les premières générations, est-elle aussi pour les autres générations? On sait parfaitement bien, que le migrant reste un migrant, soit de la première ou de la deuxième génération. En plus, ils affrontent tous les mêmes défis. Ce qui nous pousse à nous interroger ici, sur la crise d’intégration qui se pose actuellement et qui produit des anomalies sociales comme l’exclusion sociale, la ségrégation, le terrorisme… Ces anomalies liées à la migration reviennent aux migrants qui sont incapables de s’intégrer selon le modèle imposé, ou bien le pays d’accueil n’a pas pu gérer la diversité?

A notre avis la question de l’intégration n’existe vraiment pas dans la société. Elle n’est pas à l’origine de la crise, car la notion du « migrant » en France est une sorte de stigmatisation. Celle-ci s’appuie sur le principe de l’isolement et la négligence. Au début des années soixante, les immigrés qui parlaient le français étaient minimes, et avec le temps passé sur le territoire français, ils ont appris la langue, ainsi que la majorité de ces immigrés viennent des pays d’origine où le français est la deuxième langue. Ils sont fortement habitués et familiarisés avec cette langue. Mais ce n’est pas de leur faute que les recruteurs des années soixante, ne recommandaient pas la connaissance de la langue du pays d’accueil à la place des corps capables de supporter le travail forcé.

L’immigration pose problème au niveau de l’intégration en Europe lorsque les immigrés sont d’origines maghrébines (en général arabes et musulmans) ou subsahariennes (à cause de leurs couleur). C’est l’incapacité d’accepter la différence qui pose problème. Les défis de l’intégration, plutôt de l’assimilation selon le modèle d’intégration français sont davantage forts et compliqués avec la culture de ces immigrés.

 II: Le terrorisme est-il une réaction contre une situation défavorable

 1- Terroristes ou exclus sociaux

 Le terrorisme peut être vu comme une réaction ou une manifestation contre le désespoir dû aux conditions de vie des communautés immigrantes. Cela, explique d’une part l’origine sociale du terrorisme. Ainsi que, cette vision donne une réflexion sur la manière et les méthodes potentielles à éradiquer l’extrémisme et la violence. Ces méthodes trouvent leur force et leur crédibilité loin de l’approche sécuritaire. Le recours à la violence (terrorisme) peut s’expliquer non seulement par les conditions sociales dégradées, mais aussi par une volonté effective de réaliser des objectifs personnels ou d’un groupe.

 Le communautarisme à notre avis est le résultat logique d’une politique de séparation établie par les pays d’accueil, conduisant à l’exclusion sociale. La construction des HLM à titre d’exemple reflète parfaitement bien cette volonté, car les HLM sont une sorte de logement destiné à la population la plus dégradée de la société. Les décideurs ont voulu que les émigrés vivent en séparation de la population locale. Les HLM sont connus par leurs grandes concentrations des émigrés. C’est une sorte de ghettos officiels en béton, bâti à la place des ghettos clandestins. En effet, le communautarisme a été créé officiellement de façon volontaire ou involontaire. Les grands HLM de Seine-Saint-Denis, de Gennevilliers, d’Aulnay en France reflètent bien cette réalité.

Le Ministre de la ville, de la jeunesse et des sports Français Patrick Kanner a déclaré le dimanche 27 mars 2016, lors de la mission «Grand Rendez-vous» sur Europe 1-Le Monde-iTélé-[13], que: «Molenbeek, c’est une concentration énorme de pauvreté et de chômage, c’est un système ultra-communautariste, c’est un système mafieux avec une économie souterraine, c’est un système où les services publics ont quasiment disparu, c’est un système où les élus ont baissé les bras».

Le nombre des habitants de Molenbeek au 1er Janvier 2015 était de 95414, au 1er Janvier 2010, il était 88452 habitants, au 1er Janvier 2005 il était 78581 habitants et au 1er Janvier 2000, il était 71257 habitants[14]. Les habitants de ce quartier sont de nationalités différentes (Tableaux1).

Tableau 1 : La population de Molenbeek en 2004

Nationalité Nombre %
Belgique 57 643 73,8
Maroc 8 248 10,6
Italie 2 109 2,7
France 2 046 2,6
Espagne 1 211 1,6
Congo 977 1,3
Turquie 788 1,0
Portugal 540 0,7
Grèce 466 0,6
Pologne 255 0,3
Pays-Bas 241 0,3
Autres 3 563 4,6
Total 78 087 100,0%

Source: Observatoire de la Santé et du Social de Bruxelles-Capitale « Statistiques sanitaires et sociales », Edition 2006/1, P : 09

Le tableau 1 montre clairement, que les origines de la population du quartier Molenbeek sont très diversifiées. En 2004, 73,8% étaient des belges, en ajoutant les autres origines européennes, nous allons remarquer que la population de Molenbeek est européenne par excellence (82,6%).

Il faut noter ici un point important, que les belges constituants le quartier ne sont pas tous d’origine belge, mais ils sont d’origines migratoires. Dans ce cas, les paroles du Ministère trouvent leurs forces.

Le Ministre français avait déclaré aussi qu’en France, il y a «des centaines de quartiers comme Molenbeek», pourtant les autorités françaises tiennent ces quartiers sous la main. Il a également évoqué qu’«il y a une différence énorme aussi et je n’ai pas de leçon à donner à la Belgique et à ses pouvoirs publics, mais il est vrai que nous prenons le taureau par les cornes dans ces quartiers». Les paroles du Ministre résument la situation de ces quartiers de fortune. Nous déduisons alors qu’il y a un désespoir, une pauvreté une exclusion et une absence de la reconnaissance de la population qui vit dans ces quartiers.

 À notre avis, pour gérer la situation, est ce que l’approche sécuritaire évoquée par le Ministre est la seule issue?

En 2005, la France a connu des émeutes dans la banlieue de Paris, dans les quartiers dits «sensibles», où «Les jeunes de banlieue accumulent les mêmes contre-performances sociales: échecs scolaires, absence d’avenir professionnel, galères quotidiennes et recours aux combines de l’économie souterraine»[15]. De là, nous retenons que le recours de ces jeunes à la violence était sous le motif des conditions de vie défavorables, la discrimination économique et le manque d’espoir. Par ailleurs, Gilles ANQUETIL évoque que «Les émeutes de novembre 2005 ont été une révolte du désespoir. Les émeutiers, qui n’étaient inspirés ou guidés ni par les gauchistes ni par les islamistes, avaient le sentiment de ne plus avoir de place ni d’avenir dans notre société»[16]. La révolte des jeunes n’a été guidée que par une volonté de changer le désespoir, et non un acte terroriste. Le même journaliste affirme que «Les jeunes s’insurgent contre les discriminations dont ils sont victimes pour l’emploi ou le logement».

2- Poches de la pauvreté: cas de la France

Une étude a été faite par le Centre d’Observation et de Mesure des Politiques d’Action Sociale (Compas) dont le siège est à Nantes en France, sur la pauvreté dans 100 grandes communes de France, dont le seuil de la population est au moins 54 000 habitants, et le seuil de pauvreté est de 977 euros, en 2011. Cette étude avait montré que «la capitale française compte 14% de la population sous le seuil de pauvreté. Mais dans une dizaine de quartiers des 13e, 18e, 19e et 20e arrondissements, ce taux dépasserait les 40%».[17]

En 1982, la France comptait 4 millions d’immigrés (nés étrangers dans un pays étranger), et 3,5 millions d’étrangers (vivant en France sans avoir la nationalité française) pour 55 millions d’habitants. En 2011, elle comptait 5,4 millions d’immigrés et 3,7 millions d’étrangers pour 65 millions d’habitants[18].

 Au niveau de la répartition géographique de la pauvreté sur le territoire français, l’étude admet que «La pauvreté est aussi bien ancrée dans des villes du Sud, comme Béziers, Perpignan, Avignon ou Nîmes, que du Nord et de l’Est comme Roubaix, Calais ou Mulhouse. Certaines métropoles importantes comme Marseille, Montpellier ou Lille figurent aussi parmi les territoires où le taux de pauvreté est le plus élevé»[19].

Tableau 2: Le taux de pauvreté dans certaines villes en France

Ville plus de 54000 habitants Nombre d’Habitants en 2011  

Localisation

Taux de pauvreté % en 2011
Roubaix 94 186 Le Nord 45
Aubervilliers 75 598 Ile de France 39
Saint-Denis 107 762 Ile de France 34
Bézier 71 432 Le Sud 33
Perpignan 118 238 Le Sud 32
Sarcelles 58 398 Ile de France 32
Mulhouse 110 351 L’Est 31
Vénissieux 60 159 Banlieue de Lyon 31
Avignon 90 194 Le Sud 30
Calais 72 915 Le Nord 30
Epinay-sur-Seine 54 540 Ile de France 30
Pantin 53 797 Ile de France 30
Nîmes 144 940 Le Sud 29
Montpellier 264 538 Le Sud 25

Source: compas (modifié)

Au sein des villes, le taux de pauvreté est très élevé. A titre d’exemple, il «peut aller jusqu’à 75% dans certains quartiers de Marseille»[20]. Il y a aussi «des communes de la banlieue Nord de Paris (Aubervilliers, Pantin, Sarcelles, Epinay-sur-Seine…) où la pauvreté atteint ou dépasse le tiers de la population»[21].

Il est incontestable que la concentration de la pauvreté dans ces communes est un point d’interrogation. Évidemment, le taux le plus élevé de pauvreté se localise là où l’emploi manque le plus. À titre d’exemple, selon l’INSEE, la population de l’Île de France était en 2012 de 11898502, dont 2160215 sont des immigrés. Il faut noter ici, que les immigrés désignent toujours ceux qui résident sur le territoire de la France avec une carte de séjour, et non ceux qui sont d’origine migratoire et possèdent la nationalité française.

Tableau 3: Le chômage en Île de France en 2012 selon le pays d’origine

  Actifs ayant un emploi  

Chômeurs

Femmes ou hommes au foyer Autres inactifs population immigrante
Portugal 148 571 10 668 6 633 9 773 241 385
Italie 21 761 2 765 2 102 1 371 55 057
Espagne 19 414 1 825 1 701 1 304 46 359
Autres pays de l’Union Européenne à 27 92 917 15 296 9 726 8 780 172 885
Autres pays d’Europe 34 181 9 014 4 240 5 343 74 817
Algérie 130 307 41 089 27 722 19 597 289 826
Maroc 113 329 30 784 24 473 14 490 227 903
Tunisie 51 435 15 949 9 721 6 729 109 349
Autres pays d’Afrique 249 421 67 377 18 268 34 660 435 340
Turquie 30 443 10 651 10 820 6 502 69 338
Autres pays 243 395 47 597 33 665 27 532 437 955
Ensemble 1 135 174 253 015 149 072 136 083 2 160 215

Source : INSSE (modifié)

Nous constatons du tableau 3, qu’en 2012, les actifs ayant un emploi d’origine européenne qui vivent en Ile de France constituent 316844 actifs. Par contre, les actifs ayant un emploi qui sont d’origine maghrébine constituent juste 295071 actifs. Concernant les chômeurs, nous constatons que les européens chômeurs constituent 39568 chômeurs et les maghrébins 87822 chômeurs. Par contre, la population immigrante d’origine européenne en Ile de France constitue 27,33%, un taux inférieur à celui des maghrébins qui constituent 29,2% de la population immigrante.

Cette concentration revient au peuplement de ces communes connues par une implantation élevée de la population immigrante. La politique de logement social suivi par certaines communes a conduit à une concentration de la population pauvre. Au contraire, l’étude faite par le Centre d’Observation et de Mesure des Politiques d’Action Sociale (Compas) montre, que les communes de l’Ouest de Paris possèdent moins de logements sociaux et les prix les plus élevés des immobiliers destinés au logement, ce qui baisse par la suite le taux de la pauvreté qui se situe entre 7 et 10%.

Conclusion

Pour conclure, il faut mentionner que le terrorisme reste un phénomène international qui n’a pas de nationalité, de religion, de genre, de couleur, de race…, Il est nié par le monde entier. Il est une sorte de violence qui engendre des victimes innocentes.

Nous avons vu qu’en Europe la communauté marocaine et maghrébine musulmane souffre après chaque attentat terroriste de différentes formes de violence, qui ont engendré des victimes.

Il faut mentionner que les racines et les facteurs de ces attaques, même avec tout ce qui a été écrit et dit sur le sujet, ne sont pas clairs et bien définis. Par ailleurs, nous trouvons qu’il y a plein d’exemples de la bonne intégration de la communauté marocaine et musulmane dans tous les pays d’Europe. Il y a des ministres, des maires, il y a un nombre important de médecins et d’infirmiers dans les hôpitaux, des ingénieurs, des techniciens, des employés… Ce qui fait, que la reconnaissance de l’existence de cette communauté et sa participation au développement permettra à notre avis d’éviter les malentendus, les violences et éradiquer l’hostilité et l’exclusion économique et sociale.

Bibliographie

– ANQUIL Gilles: «Les jeunes de banlieue, ces «étrangers de l’intérieur assignés à résidence», http://bibliobs.nouvelobs.com/20130313.OBS1712/

– CNCDH, (2014): Rapport « La lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie ».

-« Des mosquées de nouveau visées après l’attentat contre Charlie Hebdo » Un musulman dénonce l’attentat de Charlie Hebdo le 9 janvier 2015 à côté de la mosquée de Saint-Etienne / AFP www.la-croix.com

– Espagne: Une mosquée vandalisée pour venger l’attaque de Bruxelles http://africanmanager.com

– INSSE

– MAURIN Louis et MAZERY Violaine, (janvier 2014): «Les taux de pauvreté des 100 plus grandes communes de France», Compas Etude, n°11-. www.lecompas.fr

-MICHELON Vincent, «Des quartiers de Paris compteraient plus de 40% de pauvres », www.metronews.fr 28-01-2014

– Observatoire de la Santé et du Social de Bruxelles-Capitale « Statistiques sanitaires et sociales », Edition 2006/1.

– Rapport annuel 2015– 2016. http://www.molenbeek.irisnet.be

– TAGUIEFF Pierre-André et autres: «Autour du communautarisme», les cahiers du CEVIPOF, N°43

– VAN EeCKHOUT Laetitia, «L’immigration», Edition Odile Jacob, la documentation Française, Janvier 2007.

http://www.lemonde.fr/politique/article/2016/03/27/le-ministre-de-la-ville-compte-une-centaine-de-quartiers-francais-similaires-a-molenbeek_4890800_823448.html#GOHr1k76SpCrLbJZ.99

-http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2014/08/06/sept-idees-recues-sur-l-immigration-et-les-immigres_4467506_4355770.html.

www.la-croix.com,

www.huffpostmaghreb.com

[1]– C’est un français et un docteur en science politique et chargé de recherches au Centre d’études européennes de Sciences Po.

[2] – CNCDH, (2014) : Rapport «La lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie»; P : 03.

[3] – Les attentas du 22 mars 2016, à L’aéroport Zaventem et la station métro Molenbeek

[4] – Les deux attaques du 17 Août 2017, à L’avenue de la Rambla à Barcelone et Balnéaire de Cambrils près de Tarragone.

[5] – « Des mosquées de nouveau visées après l’attentat contre Charlie Hebdo » Un musulman dénonce l’attentat de Charlie Hebdo le 9 janvier 2015 à côté de la mosquée de Saint-Etienne / AFP www.la-croix.com

[6] – TAGUIEFF Pierre-André et autres : «Autour du communautarisme», les cahiers du CEVIPOF, N°43, P:95

[7] – VAN EeCKHOUT Laetitia, «L’immigration», Edition Odile Jacob, la documentation Française, Janvier 2007. P : 27.

[8] – Idem . P :27

[9] – VAN EeCKHOUT Laetitia, Idem P :101

[10] – Idem

[11] – VAN EeCKHOUT Laetitia, Idem P :102

[12]–  ANQUIL Gilles : «Les jeunes de banlieue, ces «étrangers de l’intérieur assignés à résidence», http://bibliobs.nouvelobs.com/20130313.OBS1712/, le 15 Mars 2016.

[13]http://www.lemonde.fr/politique/article/2016/03/27/le-ministre-de-la-ville-compte-une-centaine-de-quartiers-francais-similaires-a-molenbeek_4890800_823448.html#GOHr1k76SpCrLbJZ.99. Vue le 28 Mars 2016. A 12h36.

[14] – Rapport annuel 2015 – 2016. http://www.molenbeek.irisnet.be. P :57

[15] – ANQUETIL Gilles, Idem

[16] – Idem.

[17]– MICHELON Vincent, « Des quartiers de Paris compteraient plus de 40% de pauvres », www.metronews.fr 28-01-2014, 14:15.

[18]-http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2014/08/06/sept-idees-recues-sur-l-immigration-et-les-immigres_4467506_4355770.html.

[19] – MAURIN Louis et MAZERY Violaine, (janvier 2014) : « Les taux de pauvreté des 100 plus grandes communes de France », Compas Etude, n°11-. www.lecompas.fr .P : 01

[20] – MAURIN Louis et MAZERY Violaine, Idem. P : 03

[21] – MAURIN Louis et MAZERY Violaine, Idem. P : 01

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